De plus en plus de DSI renégocient leurs contrats avec leurs fournisseurs. La qualité des prestations délivrées constitue l’un des critères de négociation. Comment apprécier ces éléments ? Best Practices vous propose une grille simplifiée de notation des fournisseurs, l’objectif étant d’identifier leurs points forts et leurs points faibles.
La notation globale repose sur un certains nombre de critères qui caractérisent les projets systèmes d’information. Plusieurs éléments d’insatisfaction guident la stratégie de renégociation avec les fournisseurs :
- Les prix : que ce soit pour les éditeurs, qui multiplient les audits de licences, ou pour les SSII qui cherchent à reconstituer leurs marges avec leurs clients, les entreprises sont soumises à une pression sur les prix. On pourrait penser que la période de crise est plutôt favorable aux DSI mais, en fait, il s’agit ici de coûts indirects : les éditeurs cherchent à vendre davantage de licences, même si le prix catalogue ou négocié peut diminuer. De leur côté, les SSII, même si le prix de journée baisse, souhaitent accroître le taux d’activité de leurs consultants en « tirant » sur leurs contrats existants.
- La qualité : c’est la conséquence de la pression sur les prix. On observe une baisse tendancielle de la qualité des prestations, selon beaucoup de DSI, même si aucun indicateur objectif ne le démontre.
- Les compétences : c’est l’une des difficultés rencontrées par tous les DSI, notamment pour la connaissance métier.
- Les difficultés contractuelles : elles sont inhérentes à la relation client-fournisseur, mais il semble que la crise rende ces relations un peu plus tendues que par le passé.
La suite de cet article propose les 34 critères à prendre en compte pour élaborer une grille de notation des fournisseurs, ainsi qu’une approche en dix étapes.
L’intérêt d’utiliser une grille de notation des fournisseurs est d’identifier leurs points forts et leurs points faibles, de mesurer l’évolution dans le temps et d’établir des bases de comparaisons entre plusieurs entreprises.
Nous avons découpé le processus de notation en trois parties : avant, pendant et après le projet, chacun de ces éléments faisant l’objet d’une note consolidée. On aboutit avec cette consolidation à une note en trois lettres, de type AAA.
Les critères à prendre en compte avant le projet
Visibilité/image du fournisseur : cet élément est important, mais ne doit pas être considéré comme incontournable. Cela dit, une certaine visibilité du prestataire (dans la presse, dans les salons, sur le Web, dans les conférences…) est à prendre en compte, notamment s’il fait témoigner ses clients.
Clarté de la roadmap technologique (pour les éditeurs) : il s’agit d’avoir une vision la plus claire possible de l’évolution des solutions à moyen ou long terme. Un éditeur doit communiquer sur les stratégies technologiques qu’il compte mettre en œuvre. Une absence de visibilité, surtout à court terme, est un indicateur d’alerte.
Pression commerciale : un niveau de pression commerciale « normal » est tout à fait justifié, c’est le signe d’un dynamisme commercial du prestataire. Cependant, les comportements des commerciaux ne doivent pas aboutir à une pression trop intense pour pousser les DSI à acheter davantage (de licences, de journées de conseil ou de développement…). Une pression trop intense est un indicateur à surveiller, c’est le signe que les commerciaux du prestataire ont eux-mêmes des objectifs très élevés (d’où un risque de turnover) ou que le prestataire peine à trouver des nouveaux clients. Il faut alors se demander pourquoi…
Niveau de compétences des commerciaux : ceux-ci doivent connaître l’ensemble de l’offre qu’ils proposent, les fonctionnalités de produits, les savoir-faire de leur entreprise et disposer d’un minimum de compétences en matière de négociation.
Compréhension des besoins métiers : un bon prestataire doit connaître un minimum des problématiques métiers de ses clients et de ses prospects. C’est une garantie que la solution qu’il propose sera le plus possible en adéquation avec les besoins et la stratégie de l’entreprise.
Qualité du conseil avant-vente : dans la moitié des litiges informatiques, c’est l’obligation de conseil du prestataire qui est mise en cause. Cet élément est de plus en plus pris en compte par les tribunaux. Cette obligation de conseil impose notamment au prestataire informatique de s’informer des besoins réels de son client et de lui livrer des outils adaptés à ces besoins. Si elle s’applique pendant le projet, on peut considérer que le prestataire doit conseiller au mieux son prospect sur les solutions meilleures possibles pour répondre à ses besoins.
Turnover des commerciaux : un turnover trop élevé des commerciaux des prestataires est presque toujours le signe d’une fragilité de ceux-ci, ou, du moins, un indice que des difficultés organisationnelles ou managériales apparaissent. Cela pose, à court terme, des problèmes dans le suivi des relations commerciales et, à plus long terme, un risque dans la pérennité du prestataire et de ses solutions.
Qualité de la réponse à l’appel d’offres : les éléments fournis par les prestataires lorsqu’ils répondent à un appel d’offres traduisent souvent l’intérêt qu’ils portent au projet. Une réponse bâclée, truffée de fautes d’orthographe et regroupant des éléments standard doit alerter sur la réelle implication future du prestataire, s’il est retenu. De même, on s’intéressera dans l’appel d’offres à des éléments tels que la formalisation du partage des rôles et des responsabilités : pour les intégrateurs, cette formalisation est indispensable afin de déterminer les responsabilités respectives. Cette clarification n’est pas seulement indispensable en cas de difficultés, mais également au quotidien. Entrent également en ligne de compte les possibilités de négociation des conditions contractuelles : dans la relation client-fournisseur, la possibilité de négocier certains éléments du contrat doit toujours être possible. Il ne s’agit pas bien sûr d’obtenir tout et n’importe quoi, de part et d’autre, mais d’adapter les dispositions contractuelles à des besoins particuliers. Un prestataire qui refuse tout aménagement, sans se justifier par des raisons objectives (et non pas un simple : « Notre direction américaine nous interdit tout changement dans le contrat standard »), doit être considéré avec prudence. Dans ce cas, le recours à un conseil juridique s’impose pour obtenir des aménagements. La qualité de la réponse à l’appel d’offres passe également par le caractère vérifiable des références, par le fait que les consultants proposés aient l’expérience (certifications…) sur les produits concernés et les références présentées, que les adhérences engendrées soient clairement identifiées. On s’intéressera aussi au degré d’indépendance du prestataire par rapport aux solutions logicielles qu’il propose, et à son degré de spécialisation sur ces solutions.
Clarté des conditions tarifaires : en particulier pour les éditeurs de logiciels, une clarté dans les tarifs est un signe que l’offre est elle-même claire. La multiplication des tarifs, des options, des modules ou des conditions particulières pour l’application de tel ou tel tarif introduit un flou qui profite aux éditeurs mais surtout pas aux DSI.
Possibilités de négociation des conditions tarifaires : c’est le pendant du critère précédent. Les conditions tarifaires doivent s’adapter au contexte de l’entreprise et aux évolutions prévues du projet. En principe, un fournisseur doit accepter, voire proposer, une certaine souplesse dans ce domaine.
Les critères à prendre en compte pendant le projet
Facilité de mise en œuvre/déploiement de la solution (pour les éditeurs) : une mise en œuvre et un déploiement facile d’une solution logicielle évite des surcoûts en matière d’intégration et de paramétrage.
Respect du partage des rôles et des responsabilités : pour les intégrateurs, cette formalisation est indispensable afin de déterminer les responsabilités respectives. Si ce partage a été défini lors de la phase d’appel d’offres, il faut qu’il soit respecté. Cette clarification n’est pas seulement indispensable en cas de difficultés, mais également au quotidien.
Facilité d’adaptation des ressources à l’évolution des besoins (pour les intégrateurs) : un projet n’est jamais figé, même si l’essentiel des évolutions est correctement anticipé. En cas de changement, volontaire ou non, le prestataire doit être capable d’adapter ses ressources.
Respect des délais et des coûts (pour les intégrateurs) : on le sait, la majorité des projets ne respectent pas les délais. Mais ce n’est pas une raison pour accepter des dépassements susceptibles de compromettre la livraison d’une solution aux utilisateurs.
Respect des engagements de services : les engagements de services négociés et définis par le prestataire et son client doivent être respectés. Ils sont en principe réalistes et ne doivent pas poser problème.
Stabilité (relative) des équipes pendant le projet : elle constitue un facteur clé de succès des projets, surtout pour les projets longs qui nécessitent un engagement fort du prestataire et une capitalisation des connaissances. Un certain niveau de turnover est toutefois acceptable et même souhaitable pour renouveler les compétences, tant qu’il ne déstabilise pas la bonne conduite du projet.
Qualité des livrables : la DSI doit régulièrement savoir qui fait quoi et qui a produit quoi pour le projet. Ce critère est d’autant plus important que le nombre d’intervenants sur un projet est élevé.
Qualité de la formation proposée par le prestataire : lorsque l’éditeur ou l’intégrateur propose des prestations de formation, pour ses produits ou, plus généralement, dans le cadre de la gestion du changement, la qualité de cette formation est un gage d’une meilleure appropriation par les utilisateurs.
Qualité de l’accompagnement : ce critère peut paraître subjectif, mais il est nécessaire que les prestataires soient présents ou au moins disponibles au quotidien. C’est le rôle premier d’un fournisseur que d’accompagner ses clients.
Réactivité du prestataire : elle est essentielle, en cas de difficulté ou de demandes liées à un changement de périmètre du projet, par exemple suite à un changement de stratégie des directions métiers ou à des événements non prévus (acquisition, lancement de nouvelles offres…).
Rôle de force de proposition du prestataire : c’est le prolongement de l’obligation de conseil. C’est le rôle du prestataire de proposer des pistes de solutions que les DSI n’auraient pas envisagées, des combinaisons technologiques innovantes et créatrices de valeur, ou encore des méthodologies pertinentes…
Réactivité du support de l’éditeur : en cas d’incident, la réactivité du support/hot line est essentielle pour mettre en œuvre des actions correctrices et prévenir une aggravation des difficultés.
Qualité de la documentation rédigée remise : elle est utile pour faciliter à la fois le transfert de compétences pour les équipes de la DSI et l’appropriation des solutions par les utilisateurs.
Niveau de compétences des consultants : une entreprise fait appel à un prestataire pour ses connaissances métiers, fonctionnelles et technologiques. Celles-ci doivent se décliner chez tous les intervenants sur un projet.
Qualité du transfert de connaissances : la qualité de la relation client-fournisseur s’exprime par le niveau de transfert de connaissances de l’un vers l’autre. L’objectif est que la solution soit intégrée le plus possible par l’entreprise, de manière à réduire le degré de dépendance à l’égard du fournisseur.
Respect des engagements contractuels : un prestataire peut être tenté d’interpréter ce qui a été négocié dans le contrat (par exemple, pour les éditeurs de logiciels, la notion d’utilisateur actif). D’où l’intérêt de bien anticiper cette phase. Il en est de même pour les prestations de TMA (tierce maintenance applicative).
Les critères à prendre en compte après le projet
Rapport qualité/prix de la solution/prestation : la mise en œuvre d’une solution logicielle ou d’un projet impose un retour sur investissement positif. Ce critère permet de positionner les fournisseurs dont les solutions bénéficient d’un bon rapport qualité/prix. Ce critère est toutefois relativement subjectif, lié à la perception d’un retour sur investissement. Il peut en revanche être utilisé pour des besoins de notation internes à l’entreprise.
Délais de prise en compte des incidents, réactivité de la hot-line et réactivité pour corriger les problèmes : la qualité du « service après-vente » fait souvent la différence entre les prestataires…
Respect des engagements contractuels et des engagements de services : ce critère s’applique pendant le projet et après le projet (voir plus haut).
Niveau des coûts (maintenance, abonnements, droit d’usage annuel…) : pour les logiciels, le coût de maintenance ne doit pas être prohibitif et correspondre à un vrai service, en termes d’évolution de la solution.
Niveau global de satisfaction des utilisateurs : c’est un critère décisif pour apprécier l’adéquation d’une solution par rapport aux besoins métiers. Mais il doit être mesuré de façon objective, sans oublier que les raisons d’une insatisfaction des utilisateurs peuvent trouver leur origine dans la DSI et ne pas être liées à la solution ou aux actions de l’intégrateur.
Stratégie de versioning de l’éditeur : le rythme de sortie de nouvelles versions ne doit pas être trop rapide, signe que l’éditeur cherche à maximiser ses revenus en proposant des nouvelles fonctionnalités. Il ne doit pas non plus être trop lent, sous peine d’obsolescence de la solution mise en œuvre. Cet élément fait partie des critères de choix d’un éditeur, mais il peut également être intéressant, par exemple dans le cas d’extensions de modules ou d’autres solutions du même éditeur dans le cadre de projets futurs.
Niveau de dépendance par rapport à la solution : certaines solutions « enferment » les DSI dans un modèle, une technologie, et cela peut être préjudiciable à l’agilité nécessaire face aux changements des exigences des directions métiers. Une certaine indépendance (fonctionnelle, technologique, commerciale, contractuelle…) à l’égard des solutions est toujours utile.
Niveau de pression commerciale du fournisseur : certains fournisseurs sont tentés de « harceler » leurs clients pour que ceux-ci investissement dans davantage de licences (dont ils n’ont pas besoin dans l’immédiat) ou des développements complémentaires pas toujours justifiés. La pression commerciale ne doit toutefois pas être confondue avec des relations normales commerciales entre un fournisseur et ses clients.
Une approche en dix étapes
- Déterminer les pondérations de chaque critère en fonction de vos besoins, en prenant comme base 100 pour la phase avant-projet, 100 pour la phase projet et 100 pour la phase post-projet. Les pondérations peuvent être adaptées à votre contexte.
- Sélectionner les fournisseurs à évaluer (éditeurs de logiciels, SSII, intégrateurs, cabinets de conseil…).
- Remplir, pour chaque fournisseur, une fiche projet, ou plusieurs fiches projets si un même fournisseur est intervenu sur plusieurs projets.
- Consolider les notes par fournisseur et par critère.
- Déterminer la note globale consolidée (trois lettres), représentative de la qualité globale du fournisseur.
- Établir un classement par fournisseur.
- Établir un classement par critère, pour différents fournisseurs.
- Rédiger un document de synthèse utilisable par la DSI, la direction des achats, la direction financière et tous ceux qui participent aux processus de sélection des fournisseurs.
- Mettre à jour régulièrement ce document, en fonction des nouveaux projets et des nouveaux fournisseurs.
- Comparer les résultats de votre entreprise avec les autres entreprises.
Exemples :
- Une note B+AC traduit le fait que le fournisseur est plutôt performant pour mener à bien des projets malgré quelques points insuffisants lors de l’avant-projet mais une vigilance particulière s’impose pour la phase après projet.
- Une note C+ D+D doit inciter à la prudence et à conduire à s’interroger sur les réelles capacités du fournisseur à répondre aux besoins. Il faut notamment vérifier les références clients.
- Une note AAA correspond à un fournisseur dont les clients, très satisfaits, estiment qu’il a parfaitement répondu aux besoins.
Grille de correspondance entre les notes et l’évaluation globale | |||
Note moyenne | Lettre correspondante | Appréciation | Niveau de maturité |
1 – 2 | D | Peu satisfaisant | Le fournisseur présente des points faibles susceptibles de compromettre le succès d’un projet |
3 | D+ | ||
4 | C | ||
5 | C+ | Satisfaisant | Le fournisseur présente quelques points faibles qui ne compromettent pas le succès du projet |
6 | B | ||
7 | B+ | ||
8 – 9 | A | Très satisfaisant | Le fournisseur ne présente pas de points faibles particuliers et a su démontrer sa capacité à mener les projets en adéquation avec les besoins de ses clients. |
10 | A+ |