Le manque de maturité des métiers, leur mauvaise foi, leur ignorance ou leur indifférence provoquent des désagréments que subissent les équipes de la DSI. Qui se traduisent par des pertes de temps et du stress. Comment faire face aux différentes situations qui peuvent se présenter et, pire, se cumuler ? Pour chacune des treize cas de figure qui peuvent se présenter, nous vous proposons trois idées simples pour s’en sortir.
La mission essentielle d’une DSI est, bien sûr, de satisfaire les besoins des directions métiers. En général, tout se passe pour le mieux si les équipes IT et celles des métiers comprennent leurs enjeux respectifs et travaillent en étroite collaboration. Mais il peut arriver que, côté DSI, des frustrations, des situations de stress, voire des exaspérations apparaissent. Il n’y a pas que les consultants ou les éditeurs de logiciels qui s’incrustent, il y a aussi les métiers. C’est, hélas, souvent pour de mauvaises raisons et, dans tous les cas, cela occasionne des pertes de temps pour les équipes IT. Nous avons recensé treize comportements qui sont susceptibles d’irriter les DSI, avec quelques moyens d’en atténuer les effets indésirables.
Les indécis : quand les métiers ne savent pas ce qu’ils veulent
Les métiers sont abreuvés de multiples messages sur ce qu’il est possible de faire avec les technologiques et le numérique, mais ne savent pas trop par quel bout prendre le problème. Soit parce qu’ils estiment ne pas avoir de besoins précis, soit parce qu’ils voudraient tout faire en même temps. Qu’il y ait profusion ou absence totale d’idées, les métiers auront tendance à ne rien faire ou à se reposer sur l’expertise de la DSI.
La conséquence pour la DSI : supporter de multiples sollicitations des métiers pour trouver des idées, dont la plupart ne seront pas mises en œuvre. D’où un possible découragement des équipes.
Trois idées pour s’en sortir :
- Agir de façon proactive en fournissant des idées aux métiers.
- Montrer par l’exemple ce que font d’autres entreprises.
- Recentrer les demandes en fonction des objectifs stratégiques et du ROI potentiel.
Les girouettes : quand les métiers changent d’avis régulièrement
Les métiers ont peaufiné leur cahier des charges, le projet est finalisé, l’application a été livrée dans les temps et en respectant le budget, mais… subitement, les métiers décident qu’il faut finalement faire autrement. Pour différentes raisons, qui peuvent être légitimes ou plus discutables, il faut tout recommencer…
La conséquence pour la DSI : une surcharge de travail pour la DSI et un engorgement dans les projets qui complexifie leur priorisation.
Trois idées pour s’en sortir :
- Formaliser des engagements précis entre la DSI et les métiers.
- Clarifier les responsabilités en amont des projets.
- Imposer le fait que les projets modifiés ne seront plus prioritaires.
Les radins : quand les métiers négocient les prix
Pour les métiers, tout est évidemment trop cher. Beaucoup gardent, ancré dans leur cerveau, le fait qu’un PC acheté en grande distribution coûte trois à quatre fois moins cher que ce qui leur est facturé par la DSI. Ce raisonnement est aussi valable pour les applications, accentué par la profusion des applications pour smartphone qui laissent à penser que tout peut être parfaitement ergonomique, simple à manipuler et facile à concevoir. Deux postulats, bien évidemment erronés, sont utilisés : d’une part, une application se développe très vite et ne nécessite pas de ressources importantes. D’autre part, les applications les plus simples sont, par définition, faciles à développer, donc peu coûteuses.
La conséquence pour la DSI : des pertes de temps à justifier chaque poste de coûts.
Trois idées pour s’en sortir :
- Détailler tous les coûts et les critères de refacturation.
- Préparer en amont des argumentaires pour lever les objections des métiers.
- Justifier les coûts, notamment pour les ressources, et le temps passé.
Les filous : quand les métiers achètent en direct et veulent le support de la DSI
C’est un grand classique, popularisé avec l’engouement pour le BYOD, mais aussi pour des applications plus lourdes, comme lorsque, par exemple, la direction commerciale estime que c’est une excellente idée de souscrire à Salesforce, laissant par la suite la DSI se débrouiller avec l’intendance, en particulier les transferts de données et la réversibilité.
La conséquence pour la DSI : le manque d’anticipation et d’implication en amont de la DSI fait courir des risques pour les données et occasionne des surcoûts.
Trois idées pour s’en sortir :
- Communiquer sur les risques pour les données de l’entreprise.
- S’allier avec la direction générale et la direction financière pour mettre en évidence les impacts sur les coûts globaux.
- Positionner la DSI de manière à ce qu’elle soit perçue comme une force de proposition et d’accompagnement des métiers.
Les égocentriques : quand les métiers arrivent avec des solutions mais pas des besoins
Les métiers ont accès à énormément d’informations, trouvées sur le Web. Face à un besoin, il y a toujours quelqu’un qui a une solution, à commencer par les fournisseurs. Comme les métiers ont tendance à aller à la facilité (et à ne pas investir du temps dans des études de benchmarking), ils associent une solution à un besoin, par exemple : pour un CRM, il faut prendre Salesforce, pour un ERP, retenir SAP, pour une base de données, c’est forcément Oracle… Cette association simpliste fonctionne également pour des fournisseurs plus petits. C’est aussi l’effet du marketing des fournisseurs, dont l’objectif est évidemment d’associer leur marque à une problématique IT. Entre les métiers qui ne savent pas ce qu’ils veulent et ceux qui connaissent déjà la solution, on ne sait pas lesquels sont les plus nuisibles !
La conséquence pour la DSI : la DSI devra démontrer que les choix des métiers ne sont pas forcément judicieux. Et s’il s’agit de nouveaux fournisseurs, il faudra initier le processus de relation commerciale.
Trois idées pour s’en sortir :
- Obliger les métiers à élaborer des business cases et considérer que c’est un élément obligatoire avant de commencer un projet.
- Proposer un benchmarking des fournisseurs sur les critères privilégiés par les métiers (coûts, qualité, délais, réputation, base installée de clients, aspects technologiques…).
- Rechercher les causes de l’attitude des métiers pour leur démontrer que leurs certitudes ne sont pas nécessairement rationnelles.
Les peureux : quand les métiers sont des paranos de la sécurité
Certains métiers sont tellement fiers des données qu’ils créent et qu’ils gèrent qu’ils deviennent jaloux de tous ceux qui voudraient y accéder, y compris à la DSI. Même si lesdites données n’ont guère d’intérêt pour un tiers. Il ne faut donc pas leur parler d’héberger ne serait-ce qu’un octet ailleurs qu’en Europe. La sécurité entraîne des surcoûts que les métiers ne sont pas toujours prêts à assumer, par exemple s’ils souhaitent un taux de disponibilité de 100 %, nettement plus coûteux qu’un taux de disponibilité de 99,9 % alors que les utilisateurs ne verront guère de différence.
La conséquence pour la DSI : des surcoûts et un manque de souplesse que les utilisateurs pourraient reprocher à la DSI.
Trois idées pour s’en sortir :
- Cartographier les données selon leur caractère stratégique.
- Élaborer des scénarios de compromis sécurité/performance.
- Expliquer les mécanismes de sécurité mis en œuvre (en interne ou par des prestataires externes) et communiquer sur la responsabilité des utilisateurs de les respecter.
Les faux-cul : quand les métiers critiquent la DSI sournoisement
C’est souvent de façon informelle que l’on s’en aperçoit : tel métier critique la lenteur et l’absence de réactivité des équipes de la DSI, tel autre affirme qu’il n’en a pas eu pour son argent, un troisième réclame la tête du DSI… Le tout, évidemment sans le dire en face.
La conséquence pour la DSI : des situations de non-dits préjudiciables aux efforts de visibilité de la DSI.
Trois idées pour s’en sortir :
- Élaborer une vraie stratégie de marketing de la DSI.
- Mesurer régulièrement le taux de satisfaction des utilisateurs.
- Rencontrer régulièrement les métiers pour comprendre leurs positions et leurs critères de jugement.
Les envahisseurs : quand les métiers sont des prédateurs digitaux
Le terrain du numérique est préempté par les métiers qui y voient une opportunité de se transformer et, pour certains, de s’affranchir des contraintes imposées par la DSI. L’existence d’un Chief Digital Officer n’arrange rien, car c’est une légitimation, au plus haut niveau, que le numérique n’est pas ou plus l’apanage des équipes IT.
La conséquence pour la DSI : un flou dans le partage des responsabilités et un risque de marginalisation de la DSI.
Trois idées pour s’en sortir :
- Positionner la DSI comme force de proposition pour les problématiques de transformation digitale.
- Pratiquer une veille active sur les sujets numériques et leurs impacts sur les métiers.
- S’allier avec le CDO, s’il existe, autour d’intérêts communs.
Les fourbes : quand les métiers s’allient entre eux
L’ambiance aux comités de direction est, dans la plupart des cas, heureusement, plutôt cordiale, constructive et bienveillante. Mais il arrive que la DSI attire les animosités, à tort ou à raison. Le risque est alors de voir les métiers se liguer pour « sortir » le DSI ou une partie de ses équipes. Un autre cas de figure concerne les métiers qui, séparément, ne parviennent pas à imposer leurs points de vue à la DSI. Et sont tentés de s’allier pour avoir plus de poids, par exemple vis-à-vis de la direction générale ou de la direction financière.
La conséquence pour la DSI : une modification du rapport de forces au détriment de la DSI.
Trois idées pour s’en sortir :
- Créer un poste de Business Relationship Manager, interface entre la DSI et les métiers.
- Élaborer une vraie stratégie de marketing de la DSI.
- Nouer des stratégies d’alliance avec les métiers.
Les caliméros : quand les métiers sont insatisfaits en permanence
C’est le syndrome « Je paie-j’ai droit » : malgré tous les efforts déployés par la DSI pour satisfaire leurs besoins, les métiers trouveront toujours quelque chose à redire. Et les domaines ne manquent pas : la qualité, le coût, les délais, les profils des équipes, les fonctionnalités…
La conséquence pour la DSI : une atteinte au moral des équipes IT, qui peuvent douter de leurs compétences.
Trois idées pour s’en sortir :
- Savoir justifier la création de valeur et les coûts.
- Archiver toutes les interactions entre la DSI et les métiers, notamment les arbitrages effectués.
- Élaborer des argumentaires face aux critiques récurrentes.
Les aventuriers : quand les métiers ne veulent pas investir en gestion du changement
On connaît l’importance de la gestion du changement pour chaque projet et chaque application d’envergure. Elle participe pour plus de la moitié dans le succès ou l’échec d’un projet. Mais, à l’inverse des fonctionnalités d’une application, qui se voient et sur lesquelles il est difficile de faire l’impasse, la gestion du changement demeure immatérielle, alors qu’elle est incontournable pour accélérer et faciliter l’appropriation par les utilisateurs. D’où la tentation, pour faire des économies ou ne pas retarder les mises en production, de faire l’impasse sur la gestion du changement, vue comme une simple ligne comptable par les métiers.
La conséquence pour la DSI : l’image de la DSI peut être ternie par une insatisfaction des utilisateurs.
Trois idées pour s’en sortir :
- Collecter des résultats d’études qui montrent l’importance de la gestion du changement dans la réussite des projets.
- Mesurer régulièrement l’évolution de la satisfaction des utilisateurs.
- Proposer aux métiers des moyens simples et peu coûteux pour gérer le changement (newsletters, quizz, petits déjeuners…).
Les aveugles : quand les métiers ne voient jamais de ROI dans les applications
Le calcul des retours sur investissements n’est hélas pas une science exacte, de multiples paramètres entrent en compte. Les métiers peuvent avoir une vision déformée de la réalité et considérer que, quoi que la DSI leur développe, il n’y aura pas un retour sur investissement suffisant, voire aucun ROI.
La conséquence pour la DSI : devoir se justifier sur les arbitrages (techniques, fonctionnels, de ressources, de délais et de coûts…).
Trois idées pour s’en sortir :
- Savoir identifier et démontrer le ROI non financier.
- Identifier en amont du projet les facteurs clés de succès et les indicateurs clés de performance.
- Obliger les métiers à formaliser un business case, avec les coûts et les bénéfices attendus.
Les dictateurs : quand les métiers veulent imposer leurs fournisseurs
C’est une forme maligne de la dégénérescence des métiers qui viennent voir la DSI avec des solutions au lieu de formuler des besoins. Ils poussent l’exigence jusqu’à imposer un fournisseur. Les raisons sont multiples, depuis « on a déjà travaillé avec lui et ça s’est bien passé » jusqu’au « tout le monde en dit du bien » en passant par « le commercial avant-vente m’a assuré que leur solution correspond en tous points à notre besoin ».
La conséquence pour la DSI : d’éventuelles difficultés relationnelles avec le fournisseur et des problèmes de qualité des solutions, si elles ne sont pas alignées avec les besoins.
Trois idées pour s’en sortir :
- Vérifier toutes les affirmations des métiers pour en valider l’objectivité.
- Identifier les raisons de l’attitude des métiers.
- Rappeler aux métiers que, selon l’expression consacrée dans les milieux boursiers « les performances du passé ne préjugent pas des performances futures. »