Au cœur de l’été, la Cour des comptes a publié un rapport d’audit flash sur le programme Scribe, qui devait être le nouveau logiciel de rédaction des procédures de la police nationale. Mais ce projet, lancé fin 2015 a été gelé au printemps 2021. Pour la Cour des comptes, c’est « l’exemple emblématique d’une conduite de projet défaillante : le programme a cumulé une série de dysfonctionnements de nature organisationnelle, technique et juridique qui lui laissaient peu de chances d’aboutir. » On ne peut pas dire que ce projet a joué de malchance. Les mauvaises pratiques mises en exergue par la Cour des comptes n’auraient jamais dû exister car on connaît depuis longtemps les bonnes pratiques pour empêcher un tel fiasco.
L’audit a ainsi révélé une série d’erreurs que n’importe quel étudiant en management du SI sait, en principe éviter : l’expression des besoins n’a jamais été stabilisée en six ans, l’équipe projet a été confiée à deux directeurs qui n’avaient aucune expérience dans ce domaine, la maîtrise d’œuvre a été entièrement sous-traitée, le prestataire ayant lui-même reconnu avoir « manqué à son devoir de conseil et d’alerte », la comitologie a été défaillante et les alertes ont été insuffisamment prises en compte. Le seul gagnant a été le prestataire, qui a perçu, entre 2016 et 2021, plus de huit millions d’honoraires « pour un outil non viable techniquement ». Résultat, il faut ajouter plus de trente millions d’euros aux quatorze déjà dépensés pour que le projet soit livré en 2024, pour 95 000 utilisateurs.
Des besoins ignorés, un pilotage défaillant et des risques sous-estimés : on connaît donc les trois ingrédients de base de la recette pour faire échouer les projets. Le pire est qu’on les connaissait depuis bien longtemps…