L’Académie des Sciences un rapport plutôt alarmant sur l’état de l’enseignement de l’informatique en France. Les experts consultés dans le cadre de ce rapport partent d’un constat relativement pessimiste : « L’Europe et la France en particulier accusent un important retard conceptuel et industriel dans le domaine par rapport aux pays les plus dynamiques, comme les États-Unis et certains pays d’Asie.
Ce retard est en partie lié aux carences de l’enseignement de l’informatique, resté longtemps au point mort ou réduit à l’apprentissage des seuls usages de produits de base. Un enseignement aussi limité ne saurait permettre de faire basculer notre pays de l’état de consommateur de ce qui est fait ailleurs à celui de créateur du monde de demain. »
Dans le même temps, les exigences de formation n’ont jamais été aussi importantes. Les experts estiment ainsi que les « circonstances sont très favorables à l’introduction d’un véritable enseignement de l’informatique » : pression de l’industrie en manque de personnel bien formé en informatique, attirance naturelle des jeunes pour le numérique qui fait partie de leur environnement de tous les jours, « possibilité de décliner les exemples d’applications dans des domaines très variés et attirants, excellente adaptation à l’enseignement en ligne qui se développe partout, développement d’une meilleure compréhension de ce qu’un curriculum doit inclure dans ce domaine. »
L’enseignement de l’informatique peut se résumer à trois phases : d’abord la sensibilisation (essentiellement à l’école primaire). Ensuite, l’acquisition de l’autonomie (principalement au collège), afin d’approfondir l’analyse de données et la programmation. Enfin, le perfectionnement (au lycée), dans lequel on approfondit les bases, avec une maîtrise des usages. Cela suppose, bien sûr, de former également les enseignants, pas seulement pour dispenser leurs cours mais également, soulignent les experts, pour être formés « à l’impact de l’informatique dans l’évolution de leur discipline : la simulation dans les sciences expérimentales, l’usage de bases de données en histoire ou géographie, l’analyse de textes en littérature, la traduction automatique, la création artistique, etc. »
Le rapport de l’Académie des Sciences formule plusieurs propositions, dont la principale est de « mettre en place un enseignement de science informatique depuis le primaire jusqu’au lycée, orienté vers la compréhension et la maîtrise de l’informatique, et dépassant donc largement les seuls usages des matériels et logiciels. » Une mise en œuvre qui, selon les experts « ne doit plus être différée. » Pour l’enseignement supérieur, il conviendrait d’augmenter le nombre d’heures dédiées à l’enseignement informatique. Le volume actuel (deux heures en première année, une heure en seconde année) n’est pas suffisant.
Du côté des enseignants, il s’agit, recommande le rapport «d’inclure l’informatique dans la formation initiale des professeurs des écoles, et former les professeurs en activité par un développement professionnel volontariste afin que tous puissent initier leurs élèves à cette discipline. »
Le groupe de travail, présidé par Gérard Berry,était composé de : Serge Abiteboul (académicien, Inria), Jean-Pierre Archambault (association EPI, Enseignement public & nformatique), Christine Balagué (Institut Télécom), Georges-Louis Baron (université René-Descartes, Paris), Gérard Berry (académicien, Collège de France), Gilles Dowek (Inria), Colin de la Higuera (SIF – Société informatique de France – et université de Nantes), Maurice Nivat (académicien), Françoise Tort (École normale supérieure de Cachan), Thierry Viéville (Inria).
Le rapport complet est disponible : www.academie-sciences.fr/activite/rapport/rads_0513.pdf