Qu’est-ce que l’informatique quantique ?

Les entreprises peuvent-elles ignorer la révolution de l’informatique quantique ? Non, affirment les auteurs du rapport du Cigref sur ce thème. « L’atome, c’est bien le point de départ de l’informatique quantique qui utilise des ressources nanométriques (10-9) afin de résoudre les problèmes que les calculateurs actuels ne peuvent aborder.

Les domaines d’application de l’informatique quantique sont aussi variés que la cryptographie, la métrologie, l’optimisation, la simulation, l’analyse des données et l’intelligence artificielle. Les entreprises doivent donc se préparer à cette rupture technologique qui s’annonce majeure et dont les premiers effets tangibles sont annoncés d’ici 5 à 10 ans », prévient Jean-Michel André, DSI du groupe SEB et pilote du groupe de travail du Cigref sur l’informatique quantique.

Le concept n’est pas nouveau. Le rapport du Cigref en retrace l’historique. Le début du XX° siècle a vu émerger les premiers travaux sur la théorie des quantas, initiée par le physicien allemand Max Planck en 1900, jusqu’au CES 2020, avec l’annonce par IBM de la mise en ligne d’une nouvelle machine « Raleigh » dotée de 28 Qubits.

« L’utopie est finie, le réel s’impose et tous les grands acteurs du numérique qui voient leur écosystème menacé par l’informatique quantique, se lancent dans la bataille », précisent les auteurs. Un terrain de jeu où s’agitent des entreprises tels que Alibaba, Atos, D-Wave, Google, IBM, Intel, IonQ, Microsoft, Quantum Circuits, Rigetti… Dans l’Hexagone, de nombreuses entités publiques et des universités françaises sont également parties prenantes dans la course vers la maîtrise du quantique.

La France, les États-Unis, la Chine, la Russie et bien d’autres pays investissent massivement dans le marché mondial de l’informatique quantique qui, selon le World Government Summit 2019, quadruplera entre 2023 et 2027 avec une croissance annoncée de 25 % par an.

La mécanique quantique est basée sur trois états. D’abord, le principe d’indétermination (ou d’incertitude), selon lequel on considère qu’un objet pourrait être « en plusieurs endroits en même temps » ou qu’il n’a pas de localisation tant que la position n’est pas mesurée. Ensuite, la superposition d’états, qui explique qu’une particule peut-être « au même moment » plus ou moins dans une « infinité » d’états différents, qui coexistent en même temps.

Enfin, le phénomène d’intrication montre qu’il est possible de créer un système lié composé de plusieurs particules dont les états dépendent les unes des autres, et ceci quelle que soit la distance qui les sépare. Ainsi, la mesure d’une information sur l’une des particules du système se répercute immédiatement sur les autres où qu’elles soient.

En informatique classique, l’unité de mesure pour stocker une information est le bit, mais, en informatique quantique, l’unité de base de stockage d’une information est le Qubit. « Produire des Qubits stables est essentiel pour pouvoir effectuer des opérations et exécuter de manière complète des algorithmes. Si la théorie de la mécanique quantique date du début du 20ème siècle, les technologies quantiques qui produisent des Qubits qui pourraient être les briques de base d’un ordinateur quantique sont très récentes et surtout diverses. Or si ces technologies savent produire des Qubits de différentes façons, toutes les approches n’ont pas la même maturité ou impliquent des contraintes qui affectent leur efficacité ou orientent les usages possibles », expliquent les auteurs, pour qui les circuits supraconducteurs sont les technologies les plus matures, le premier Qubit supraconducteur a été créé en 2002 par le CEA.

Les outils mis en œuvre en informatique quantique sont très différents de ceux de l’informatique classique : l’informatique quantique introduit des bouleversements dans quatre domaines. Le premier est économique et business. On imagine aisément que la formidable puissance de calcul et d’exécution des algorithmes va non seulement modifier les processus dans les organisations, mais également générer de nouvelles opportunités pour créer des produits et des services innovants.

« L’accélération de l’intérêt du monde économique et industriel sur le Quantum Computing est réelle. Il y a encore trois ou quatre ans il n’y avait pas grand-chose en terme de réalisation. Mais on commence à voir depuis deux ans, une vraie appétence de la part des industriels et des start-up qui y travaillent très sérieusement », soulignent les auteurs.

Deuxième domaine que l’informatique quantique va sérieusement bouleverser : les ressources humaines, parce que les compétences nécessaires aux informaticiens du quantique ne seront pas celles enseignées actuellement. « Si l’on considère que les premières applications industrielles apparaîtront dans 5 à 10 ans, cela signifie que d’ici 2030 il faudra former, ou a minima sensibiliser, au quantique de nombreux étudiants. Il s’agit moins de former de futurs physiciens du quantique que de former de futurs informaticiens au quantique.

Mais la plupart des autres établissements d’enseignement supérieur, dont notamment les écoles d’ingénieurs en informatique, n’ont pas intégré les technologies quantiques dans leurs formations, alors que c’est un domaine qui va, comme les technologies numériques aujourd’hui, impacter voire transformer les futurs systèmes d’information des entreprises », assurent les auteurs. Le troisième domaine est culturel : « On ne pense pas « quantique » comme on pense « informatique », l’informatique quantique va transformer les systèmes d’information des entreprises et leur usage, la culture d’entreprise et les compétences des équipes informatiques », estiment les auteurs.

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Informatique quantique, comprendre le Quantum Computing pour se préparer à l’inattendu, Cigref, février 2020, 37 pages