Architecture d’entreprise : de l’obscurité à l’influence

Selon une étude du cabinet américain Cutter Consor­tium (1) « bien que le potentiel de l’architecture soit vaste et en grande partie inexploité, elle peine à démontrer sa valeur dans les entreprises, même si ce métier est de plus en plus reconnu. »

Pour Whynde Kuehn, consultante chez Cutter Consortium, le climat économique se révèle propice pour que l’architecture d’entreprise puisse démontrer sa valeur, dès lors que les entreprises ont pour ambition de croître, de se transformer et d’améliorer leurs performances. Pour 2019, Cutter Consortium identifie huit leviers par lesquels l’architecture d’entreprise peut prouver sa valeur : la transformation business, le planning stratégique, l’expérience client, l’agilité, l’optimisation des ressources, la conformité, les technologies émergentes et la coordination à travers l’organisation.

« Il convient de fédérer les différentes disciplines liées à l’architecture d’entreprise, il est surprenant de constater qu’elles fonctionnent encore, dans de nombreuses entreprises, de manière séparée, sans réelle cohésion, alors que le levier de la collaboration entre les métiers, l’IT et les architectes se révèle très puissant pour créer de la valeur. »

Se focaliser sur la communication

Caroline Barnsdall-Thompson, consultante chez Gartner, suggère trois bonnes pratiques (2) : « Communiquez, communiquez, et communiquez ! Il faut toujours relier l’architecture d’entreprise au business et à la valeur, ne pas se concentrer sur la méthode retenue et recourir au storytelling pour que la cible à laquelle on s’adresse se sente directement concernée. »

Pour Alain-Gabriel Gomane, responsable marketing produit chez Mega International, l’architecture d’entreprise est passée « d’une pratique obscure à une pratique influente. » Il distingue quatre stades par lesquels l’architecture d’entreprise évolue dans une organisation :

  1. Phase d’obscurité : l’architecture d’entreprise est perçue comme n’apportant pas de valeur. L’impact positif de l’architecture d’entreprise n’est pas ou peu perçu par les dirigeants d’entreprises. Ces derniers la considèrent comme une source de travail supplémentaire à faible valeur ajoutée. Beaucoup d’entreprises ne parviennent pas à aller au-delà du stade où l’architecture d’entreprise est considérée comme obscure. « Pour commencer à gagner de l’influence, les architectes d’entreprise peuvent identifier les projets à court terme et se concentrer sur des objectifs tactiques. Ils seront alors appréciés par quelques acteurs clés de l’entreprise », suggère Alain-Gabriel Gomane.
  2. Phase d’utilité : l’architecture d’entreprise est vue comme un soutien des métiers. En mettant en œuvre des actions qui produisent des résultats, l’architecture d’entreprise commence à obtenir l’adhésion et le soutien des dirigeants et se transforme en une unité opérationnelle considérée comme aidant l’organisation. « À ce stade, si ce n’est pas déjà fait, il est important que les équipes IT soutiennent les opérations métier pour mettre en œuvre des cas d’usage supplémentaires, afin d’appliquer le plan stratégique, mais surtout d’apporter de la valeur en répondant aux besoins des métiers. Au fur et à mesure de la mise en œuvre de nouveaux cas d’usage, l’architecte d’entreprise améliore sa compréhension de l’entreprise, lui conférant une reconnaissance supplémentaire. »
  3. Phase de fiabilité : l’architecture d’entreprise vue comme partenaire des métiers. « L’architecte d’entreprise construira progressivement sa réputation au sein de l’entreprise et gagnera en influence. Il commencera à recevoir des demandes d’aide spontanées et à lancer des nouveaux projets pour répondre aux besoins des métiers. Il doit avoir une vue d’ensemble de l’entreprise, être en mesure de faire rapidement des analyses d’impact et d’évaluer plusieurs scénarios de transformation. »
  4. Phase d’influence : l’architecture d’entreprise est considérée comme un partenaire stratégique. « Une fois dans cette phase, l’architecte d’entreprise est perçu comme un partenaire stratégique qui travaille conjointement avec les directions métier. A ce stade, les métiers le consultent avant de prendre de nouvelles initiatives. Cette proximité avec les dirigeants permet de favoriser la flexibilité et la réorientation rapide des priorités pour s’adapter à la nouvelle stratégie. »

(1) Enterprise Architecture : Key Business Priorities and Success Factors for 2019, Cutter Consortium.
(2) The top five challenges for enterprise architects and how to handle them, Gartner Symposium 2018.