Les entreprises puisent de plus en plus régulièrement dans le vivier des consultants indépendants lorsqu’elles sont à la recherche d’expertises rares et pointues. Elles se trouvent donc de plus en plus souvent face à un dilemme : quand faut-il privilégier l’externalisation ou l’internalisation d’une expertise ? Quatre questions doivent être posées.
1. La mission est-elle pérenne ?
Pour choisir entre externalisation ou internalisation, le temps reste le premier des indicateurs. En effet, l’entreprise devra évaluer si la mission correspond à un besoin ponctuel, ou si elle s’inscrit au contraire dans la durée. Le poste créé sera-t-il conservé au sein de la structure ou va-t-il être absorbé une fois la mission achevée ? Dans ce dernier cas, la durée de la mission doit être évaluée avec précision. Sait-on quand elle devra s’achever ? Se déroulera-t-elle sur plusieurs semaines, sur plusieurs mois ou plusieurs années ? Dans le cadre d’une mission de management de transition, la question ne se pose pas, externaliser est quasiment incontournable.
Ce type de mission nécessite en effet à la fois une approche de type « consultant » avec la maîtrise des méthodologies projet pour impulser et animer la transformation, et une approche de l’expérience/expertise opérationnelle pour manager l’équipe dans son quotidien lors de cette transformation : c’est donc un rôle particulièrement délicat à attribuer en interne. Dans le cas d’une mission de conseil, le choix est plus libre et sera davantage lié à la disponibilité de l’expertise recherchée.
2. Dispose-t-on des ressources nécessaires en interne ?
L’entreprise en question a-t-elle à sa disposition des ressources capables de mener à bien cette mission ? Les salariés disposent-ils de l’expertise ou de l’expérience souhaitable pour sa réalisation ? Dans le cas où la réponse à ces questions est positive, il est nécessaire de savoir dans quels délais le collaborateur identifié pourrait être opérationnel. La prise de poste peut être plus ou moins rapide, en fonction des projets en cours de gestion, et s’il s’agit d’un besoin urgent, il faudra là aussi faire appel à un consultant externe. En revanche, si la mission est durable mais que les ressources internes manquent, la question de la capitalisation est cruciale. Dans quelle mesure est-il possible et intéressant de former ses salariés ? Les enjeux de la mission sont-ils suffisamment clés pour que l’entreprise les fasse monter en compétences ?
3. Que privilégier entre expertise et connaissance de l’entreprise ?
L’environnement de projet compte pour beaucoup dans le choix. Si l’on reconnaît au consultant sa capacité rapide à s’intégrer, une connaissance d’autres environnements et la maîtrise de méthodologie projets, dans certain cas, la connaissance des processus internes, et de la culture d’entreprise font du salarié un meilleur candidat. Bien que cette culture environnementale soit bénéfique à plusieurs égards, elle peut également aller à l’encontre des intérêts de la mission et de l’entreprise. L’équation est la suivante : plus les missions sont stratégiques, plus la dimension politique est forte. Dans une phase d’audit, la position d’un salarié qui doit faire entendre à son supérieur que certains choix stratégiques sont à revoir peut-être extrêmement délicate. Tout comme la mise en place d’une stratégie qui contreviendrait à ses intérêts futurs, une fois la mission terminée. Recourir à un consultant externe permet de prévenir ces situations de conflits d’intérêt : délié de tout attachement et de tout affect, le consultant interviendra avec pragmatisme, objectivité, et pourra également remettre en cause des décisions, sans craindre aucune conséquence pour sa carrière.
4. Quel est le coût ?
Le coût est traditionnellement un élément déterminant dans la prise de décision, et doit être mis en perspective au regard de la durée de la mission. Dans le cas où celle-ci serait longue, la ressource interne peut se révéler plus abordable. Si elle est au contraire de courte durée, le recours à l’externalisation s’avèrera probablement moins coûteux. Néanmoins, il serait plus judicieux de raisonner en terme de valeur ajoutée : la réussite du projet devrait primer sur toute autre considération, car logiquement, les conséquences financières qui en découlent ont toujours un impact bien supérieur aux frais engagés, pour mobiliser et former un salarié ou pour recruter un consultant externe.
Le choix de l’internalisation ou de l’externalisation entre donc dans une équation complexe. Une dernière considération s’ajoute : le changement de paradigme qui s’est opéré ces dernières années autour de l’externalisation. Auparavant, les entreprises qui externalisaient faisaient le choix de déléguer l’intégralité de la mission à leurs consultants. Aujourd’hui, elles attendent davantage d’implication de la part de leurs employés dans des projets à expertise externe. Ainsi, l’opérationnel s’externalise quand le pilotage reste l’apanage d’un chef de projet au sein de la structure. Ce nouveau mode de fonctionnement va dans le sens d’un essor de couples mixtes internes-externes, qui permettent de faire émerger des patchworks d’expertises.
Cet article a été écrit par Benjamin Mallet, directeur associé chez Colibee.