Comment aligner les projets ERP avec les enjeux métiers

Irruption d’un concurrent, transformations du marché, nouvelles réglementations… L’environnement des entreprises change fréquemment, obligeant celles-ci à s’adapter et à réinventer sans cesse leur métier et leurs business models.

Dans ce contexte exigeant, un système d’information aligné sur les enjeux métiers est devenu primordial pour maintenir la compétitivité de l’organisation, surtout s’il est basé sur des ERP. La performance du système de gestion est notamment un facteur de premier plan pour assurer la qualité de service, la flexibilité et la réactivité.

Un système d’information doit être capable de s’adapter rapidement à toutes les évolutions du métier, même celles qui ne peuvent être anticipées. Néanmoins, les projets liés au système d’information, en particulier ceux qui touchent le cœur du métier, sont souvent source d’appréhension aussi bien pour les services opérationnels (achats, ventes, production, finance, ressources humaines) que pour la direction des systèmes d’information.

La mise en place de solutions stratégiques de type ERP s’apparente parfois à un long chemin semé d’embûches. Beaucoup d’entreprises, échaudées par leurs premières expériences, rechignent ensuite à faire évoluer leur système d’information ou se trouvent engluées dans des projets dont elles ne voient pas le bout. Qu’il s’agisse d’une refonte, d’une évolution ou d’un déploiement, bien souvent, les projets ERP sont en effet jugés trop coûteux, trop longs, trop éloignés des priorités métier, voire apparaissent comme une source de complexité supplémentaire, dont la valeur ajoutée est incertaine et difficilement mesurable.

A cela viennent s’ajouter des difficultés à prioriser, hiérarchiser et rationaliser les besoins, en particulier dans les projets transversaux impliquant plusieurs directions métiers. Ceux-ci débouchent parfois sur des « usines à gaz » éloignées des enjeux réels. Pourtant, la plupart de ces problèmes ont la même cause : une démarche projet trop éloignée du métier et de ses enjeux.

Pour faire du système de gestion une source de valeur et non plus une source de coûts et de complexité, il est impératif de replacer les métiers au centre des projets ERP. Engager une démarche de convergence entre la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre, tout au long du cycle de vie de ces projets, permettra de maintenir ou de restaurer l’alignement avec les enjeux du métier.

1. Maintenir l’alignement métier : les bonnes pratiques

Souvent stratégiques, puisqu’ils touchent les grandes fonctions de l’entreprise, les projets ERP sont jalonnés de défis, tant pour les opérationnels que pour la DSI. Par ailleurs, plus les projets sont transversaux, c’est-à-dire plus le nombre de services impliqués augmente, plus ces enjeux seront sensibles, en particulier lors de la formalisation des différents besoins et des éventuels arbitrages à effectuer.

Durant la phase de cadrage, il s’agira, par exemple, de s’assurer de l’exhaustivité des besoins exprimés dans le cahier des charges. Ce dernier devra également permettre de décrire d’éventuelles spécificités en les situant par rapport à l’activité, afin que les prestataires puissent fournir des réponses précises et chiffrées.

Pendant la phase de conception détaillée, il faut notamment vérifier que les besoins décrits sont réellement partagés par les différents services concernés par une même activité, pour éviter les incompréhensions. Il faudra également veiller à formuler les besoins et les règles de gestion de telle façon que les services puissent les valider facilement et s’engager dans le projet. L’analyse des écarts entre l’existant et la solution, souvent complexe, devra permettre de s’orienter vers le déploiement d’un core model. Enfin, il faut garder à l’esprit que la documentation doit être unique et cohérente, quel que soit le nombre de projets menés.

Lors de la phase de réalisation, cette documentation nécessite, de fait, un soin particulier : il faudra notamment s’assurer qu’elle reflète les activités métiers et reste indépendante des différents projets. Lors de la recette, il est important d’impliquer les métiers, mais aussi d’optimiser la recette d’intégration effectuée par les différents services. Enfin, la formation doit, quant à elle, tenir compte des divers profils d’intervenants concernés par chaque activité, afin d’assurer pertinence et efficacité.

Les questions clés sur les projets informatiques
Phases Étapes Problématiques majeures
Cadrage de projet Cahier des charges
  • Comment exprimer les besoins d’une manière exhaustive, synthétique et partagée par les différents métiers ?
  • Comment décrire les spécificités propres à l’entreprise en les situant par rapport à l’activité ?
  • Comment formaliser les besoins pour des prestataires, obtenir des réponses fonctionnelles et des chiffrages pertinents ?
Phases
de projet
Conception détaillée
  • Comment faire en sorte que les besoins soient partagés par les différents métiers impactés par une même activité ?
  • Comment formaliser les besoins détaillés et les règles de gestion de telle manière que les métiers puissent s’engager en les validant ?
  • Comment élaborer une documentation unique de l’activité, indépendamment des multiples projets qui se succèdent ?
  • Comment peut-on simplifier la phase de gap analysis pour déployer un core model ?
Réalisation
  • Comment élaborer une documentation de la solution décrivant la mise en œuvre de l’activité ?
  • Comment élaborer une documentation de la solution, indépendamment des multiples projets qui la font évoluer ?
Recette
  • Comment impliquer facilement les équipes métiers dans une recette d’intégration ?
  • Comment optimiser la recette d’intégration effectuée par les différents services ?
Formation
  • Comment optimiser la formation, compte tenu des différents profils ?
Source : Digitalonomics.

2. Privilégier une démarche de convergence

Seule une démarche centrée sur le métier permet d’adresser de manière globale et cohérente les différents défis des projets ERP. En effet, ce sont les règles et les activités du métier qui vont déterminer les contours de la solution. La maîtrise d’ouvrage a donc un rôle clé à jouer dans le projet, à la fois pour engager et impliquer les métiers dans la démarche, et pour aider la maîtrise d’œuvre à comprendre véritablement les besoins.

Par exemple, il est important d’examiner dans quelle mesure les pratiques existantes s’écartent ou pas des meilleures pratiques implémentées dans l’ERP, afin de déterminer celles qu’il faut implémenter et celles qui devront évoluer et se standardiser.

Pour cela, il est essentiel de comprendre et de modéliser les activités métier, sous un format compréhensible par toutes les parties prenantes du projet : maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’œuvre et utilisateurs finaux. Une représentation sous forme de processus et de flux permet de partir d’un modèle commun à tous les acteurs et de capitaliser sur les meilleures pratiques de l’entreprise.

Caractériser l’activité, documenter les processus, décrire la solution

Les éléments suivants permettent de décrire l’activité :

  • Le schéma des flux logistiques, depuis l’achat auprès des fournisseurs jusqu’à la vente aux clients, en incluant les différents sites, les articles échangés, les tiers et les principaux flux (commandes, livraisons…).
  • La modélisation des processus logistiques et financiers en activités et sous-activités.
  • La description détaillée des flux métiers composant les processus, avec les événements de gestion qui entraînent un traitement sur l’information : pour le processus achats, ces flux seront, par exemple, l’achat de matières premières ou de fournitures, et les événements tels que le passage d’une commande ou le paiement d’un fournisseur.
  • La description des règles de gestion et des procédures métiers qui peuvent s’appliquer à un ou plusieurs flux métiers, en veillant à maintenir l’unicité de l’information dans le cas où plusieurs flux seraient concernés.

Ils peuvent être complétés par d’autres documents contenant des informations clés pour le métier, par exemple :

  • La description de l’organisation.
  • La chaîne de valeur.
  • Le dossier recette utilisateurs.
  • Le dossier de formation.

La description de la solution s’appuiera, quant à elle, sur d’autres documents, par exemple :

  • Une cartographie applicative (Blueprint) décrivant la solution cible.
  • La description du paramétrage.
  • Les spécifications des développements.
  • Un manuel utilisateurs.
  • Le dossier d’exploitation batch.
  • Une matrice des autorisations.

Les projets s’appuieront sur la description de l’activité tout au long de leur cycle de vie, sachant que cette dernière n’est pas figée et qu’elle doit refléter les évolutions stratégiques, organisationnelles, réglementaires et métiers de l’entreprise. La description de la solution sera, quant à elle, alimentée et enrichie au fur et à mesure des projets, afin d’être toujours à jour.

3. La démarche métier, un accélérateur pour les entreprises

La démarche métier prend en compte les principaux risques pesant sur les projets ERP. Elle permet d’activer des facteurs de succès essentiels tant pour les projets que pour l’évolution du système d’information à moyen ou long terme.

En intégrant une démarche métier, les projets disposent ainsi :

  • D’un patrimoine documentaire métier unique décrivant les activités de l’entreprise. Celui-ci permet aux acteurs métier de s’impliquer davantage que dans des projets jugés trop techniques. Il évite l’éparpillement des règles de gestion au fil des projets. Enfin, il réduit les écarts entre l’expression des besoins et la solution livrée.
  • D’un patrimoine documentaire unique sur la solution, qui facilitera considérablement les projets de maintenance et d’évolution ultérieurs. L’existence d’une telle documentation facilite également l’identification des écarts, ce qui aide les entreprises qui le souhaitent à déployer un core model.
  • D’une démarche centrée sur la convergence des compétences, qui évite un travail en silo des différents responsables métiers et fonctionnels.
  • D’un suivi de projets par activité et flux métier, qui facilite le pilotage et évite aux projets informatiques de traverser un tunnel empêchant de connaître leur avancement.

Ces facteurs de succès permettent d’accélérer les projets, aussi bien lors de la phase d’expression des besoins que durant la réalisation, le déploiement et même lors de l’utilisation post-projet. Pendant la conception, maîtrise d’ouvrage (MOA) et maîtrise d’œuvre (MOE) peuvent ainsi travailler de concert en s’appuyant sur la description des flux métiers. Ce sont ces mêmes flux qui structureront les scenarii de recette et de formation.

4. Flexibilité, qualité de service et maîtrise des coûts

Le système d’information améliore pour sa part son évolutivité et sa flexibilité : l’entreprise s’adapte plus vite et plus facilement lorsque son métier évolue. Cela contribue également à la qualité de service et évite d’éventuels blocages de l’activité, liés à un système de gestion inadapté. Les processus et les règles de gestion sont harmonisés : le traitement des informations comptables et le reporting financier se trouvent facilités, en particulier dans les organisations possédant plusieurs filiales ou implantées à l’étranger.

Enfin, la standardisation des processus, l’optimisation des projets et la présence d’une documentation de qualité, qui facilite la maintenance, sont autant d’éléments qui se conjuguent pour réduire les coûts associés au système de gestion et renforcer la maîtrise des entreprises sur un de leurs actifs les plus stratégiques.

Comment accompagner cette démarche métier ?

La mise en place d’une démarche métier dans le cadre des projets ERP requiert une double compétence : la maîtrise de la solution, d’une part, la connaissance et la compréhension de l’activité et des métiers de l’entreprise, d’autre part.

En effet, si l’expertise sur les solutions ERP est primordiale, seule elle ne suffit pas. Pour se faire accompagner dans de tels projets, les entreprises ont besoin d’une véritable assistance à maîtrise d’ouvrage opérationnelle, notamment pour les aider à formaliser la description de leurs activités et flux métiers. A ce titre, une connaissance approfondie du métier est un différentiateur fort, qui aide à comprendre les contraintes et les enjeux auxquels les entreprises sont confrontées.

De même, la mise en place d’une démarche métier ne se limite pas à la réalisation d’un projet. Au contraire, cette démarche démarre en amont et se poursuit tout au long de la vie de la solution. Le partenaire qui accompagne l’entreprise doit donc être capable d’intervenir tout au long du cycle de vie des projets, en particulier lors des étapes suivantes :

  • La phase de cadrage.
  • Le développement et la mise en œuvre, pour assurer une gestion industrialisée des projets et des déploiements.
  • Les tests d’acceptation, pour gérer de manière industrialisée la recette.
  • En fin de projet, pour optimiser la mise en place et la réalisation des formations.
  • En amont, en aval et tout au long des projets, pour accompagner l’entreprise dans la réalisation d’une documentation métier.

Toutes les entreprises n’ont pas le même niveau de maturité dans la mise en œuvre de l’ERP, aussi l’accompagnement doit également s’adapter au contexte. Dans le cas d’organisations peu familières des projets ERP, ou ayant rencontré des difficultés importantes, il est préférable que l’accompagnement couvre l’ensemble du déroulement d’un projet (AMOA et MOE).

Dans d’autres cas, l’accompagnement pourra concerner uniquement l’assistance à maîtrise d’ouvrage ou la maîtrise d’œuvre, ou bien prendre la forme d’interventions ponctuelles. Parfois même, l’intervention pourra se porter uniquement sur la documentation métier, ce qui permet déjà d’adresser de nombreux enjeux. Il peut s’agir, par exemple, d’un audit de la documentation existante pour évaluer les manques ou d’un travail préalable à une harmonisation du système d’information.

Les facteurs clés de succès d’un projet IT
Facteurs clés de succès Sinon…
Un patrimoine documentaire métier unique décrivant l’activité … un risque de perte de réactivité
Un patrimoine documentaire unique sur la solution … un risque de perte de la maîtrise du SI par les métiers et un risque sur la flexibilité/évolutivité du SI
Une démarche projet par la convergence des compétences … un risque de complexifier la maintenance
Un suivi de projet par activité (flux métiers) … un risque sur la qualité de service (effet tunnel des projets informatiques)

5. Agir sur les trois leviers de la qualité

Pour accroître l’efficacité des projets et la valeur qu’ils apportent à l’entreprise, trois grands principes doivent être mis en œuvre dans le cadre de l’accompagnement. Ces principes sous-tendent l’ensemble de la démarche et permettent d’assurer la qualité des projets.

  • Intégrer pour garantir la transversalité
    Les processus que met en œuvre un ERP sont, par définition, transversaux et s’appuient sur une vision intégrée des différents domaines fonctionnels. Par conséquent, un projet ERP apportera toute sa valeur seulement si les différentes directions travaillent de concert et expriment leurs besoins en commun. De la même manière, les différents services fonctionnels devront réaliser conjointement la recette.
  • Optimiser les flux métiers
    Les flux métiers forment le cadre structurant qui délimite les activités de l’entreprise. Une fois définis en détail lors de la phase de conception, ces flux servent de guide pour la suite des projets. Le temps passé en amont permet d’optimiser l’ensemble des phases en aval, notamment la recette et la formation, directement basées sur la façon dont travaillent les métiers.
  • Piloter par des comités de convergence
    Le système de gestion et les projets associés ont pour objectif d’apporter de la valeur aux métiers. La gouvernance et le pilotage des projets doivent en tenir compte. En tant que partie prenante essentielle, les métiers seront notamment représentés dans des comités de convergence, destinés à suivre l’avancement des flux métiers. Dans ce cadre, un pilotage par flux métiers apporte des réponses claires et une visibilité précise à la maîtrise d’ouvrage. Il présente également l’avantage de s’adresser, de manière commune et unifiée, à tous les acteurs impliqués dans un flux, quelle que soit leur fonction dans l’entreprise.

Les métiers sont les premiers concernés par les projets ERP et, à ce titre, il n’y a guère de sens à les confiner dans une tour d’ivoire une fois les besoins exprimés dans un cahier des charges. Pour que les projets apportent une véritable valeur ajoutée et qu’ils contribuent à la flexibilité, la réactivité et la performance de l’entreprise, il convient d’impliquer ces acteurs clés tout au long de la vie des projets.


Les bonnes pratiques avant d’implémenter un ERP

  • Créer un PMO (Project Management Office).
  • Définir les rôles et les responsabilités de chacun.
  • S’accorder sur les décisions stratégiques et les enjeux.
  • Définir l’état futur des processus.
  • Élaborer un plan de gestion du changement.
  • Préciser la stratégie et la planification de la migration des données.
  • Élaborer une roadmap pour atteindre le ROI.

Source : Read this before beginning your ERP implementation, Panorama Consulting.
Lien : www.panorama-consulting.com/read-beginning-erp-implementation/


Implémentation d’un ERP : les dix questions à se poser

  1. L’équipe projet est-elle la bonne ?
  2. Quelle sera l’organisation pour mener à bien le projet ?
  3. Quel sera le TCO ?
  4. Quel est le business case ?
  5. Quel est le planning d’implémentation ?
  6. Comment intégrer les partenaires (éditeurs, intégrateurs…) ?
  7. Quelle est l’approche de management du changement ?
  8. Quelle est la gouvernance mise en œuvre ?
  9. Quels sont les étapes de mesure des progrès accomplis ?
  10. Quels critères permettront de juger du succès ou de l’échec du projet ?

Source : « Ten Questions to Ask Before Starting an ERP Software Implementation », Panorama Consulting.
Lien : www.panorama-consulting.com