Dépenser sans compter : est-ce le meilleur moyen d’intégrer un Codir ?

Comment faire pour être mieux reconnu par les métiers et surtout les directions générales ? Les DSI peuvent privilégier trois stratégies : dépenser plus, dépenser « là où ça se voit » et occuper le terrain de l’innovation numérique.

Depuis que la frénésie du numérique s’est emparée des dirigeants d’entreprise, les DSI n’ont jamais autant été au centre de l’organisation, que ce soit pour en louer les compétences ou, au contraire, et c’est plus souvent le cas, pour mettre en exergue les limites de leur pouvoir.

La plupart des entreprises, des organisations publiques, des cabinets de conseil et des start-up se sont lancés à l’assaut du numérique, faisant fi du passé, imaginant l’avenir mais… laissant dubitatives nombre de directions générales face à de multiples questions, dont celle de la survie de leur entreprise !

De fait, l’entreprise ne sait plus à quel(s) saint(s) numérique(s) se vouer sauf peut-être… à son DSI ! Mais encore faut-il en être conscient, car les DSI ont souvent, parmi les métiers, les utilisateurs et les fournisseurs, davantage d’ennemis que d’alliés. Pour se rapprocher du comité de direction, s’il n’y est pas encore, le DSI peut appuyer sur trois leviers : dépenser plus, dépenser « là où ça se voit » et occuper le terrain de l’innovation numérique.

1. Dépenser plus pour peser plus et ainsi éviter la marginalisation progressive

Depuis plusieurs années, et plus encore pendant les périodes de crise qui, hélas, se succèdent jusqu’à devenir un environnement banal et permanent, les directions générales et les métiers ne veulent plus revivre les situations du passé, lorsque les budgets IT étaient moins contraints, avec, dans beaucoup d’entreprises, des vannes budgétaires ouvertes, sans contrôle, pour des projets pas toujours pertinents.

L’informatique Reine a donc vécu et les Robespierre de tous poils se sont empressés de la décapiter ou de l’embastiller ! Et quoi de mieux pour embastiller une DSI que de la rattacher à la sacro-sainte DAF ou à un secrétariat général ? Autrement dit, à des managers qui savent surtout compter, mais qui ont fréquemment un intérêt mineur pour l’informatique et le numérique, et apprécient, d’ailleurs, le pouvoir que cette situation leur confère !

Résultat : les succès dans la maîtrise des coûts ont fait de l’IT une « petite » composante de la dépense, que l’on mesure par exemple avec le ratio IT/chiffre d’affaires. A contrario, les grands métiers dépensiers se retrouvent plus facilement sous le contrôle direct des directions générales. On peut en déduire un premier axiome : pour être reconnu, le DSI doit arrêter de « ne plus dépenser » mais, au contraire, être ambitieux et afficher ses dépenses !

2. Capitaliser sur le renouvellement des générations de dirigeants

Les générations X, Y ou Z, qui ont baigné dans les technologies, souvent dès leur plus jeune âge, sont maintenant en approche des strates des dirigeants ou, pour certains, les ont déjà atteintes. La technologie n’est pas leur ennemie, bien au contraire ! Leurs préoccupations sont essentiellement tournées vers la place de leur entreprise sur les marchés internationaux. La question n’est donc plus de réduire les budgets IT, mais de s’assurer de leur bonne adéquation avec les objectifs stratégiques, centrés sur le numérique. On peut en déduire un deuxième axiome : pour être encore mieux reconnu, le DSI a intérêt à dépenser « là où ça se voit » !

3. Préempter le terrain de l’innovation numérique

L’innovation est l’objet de toutes les attentions, elle se décline sous de multiples formes et le numérique en est un syndrome. Mais ce dernier est, de tous les avatars de la vie d’un DSI, celui qui porte en lui une vraie ambition et de réelles opportunités. De nombreuses études montrent qu’heureusement la plupart des dirigeants ont perçu et compris (ou sont en train de comprendre) que le numérique va bouleverser leur mode de fonctionnement quotidien, voire remettre en question la survie de leur entreprise, s’ils ne le considèrent pas à sa juste valeur : une seconde révolution copernicienne, après l’irruption des ERP.

Même si, dans un premier temps, cette nouvelle approche se voit dédier un CDO (chief digital officer), il est nécessaire que les DSI soient reconnus comme étant les hommes et les femmes « régaliens » dans la transformation de l’entreprise, qui aboutira à créer de nouvelles opportunités.

Les entreprises européennes ou anglo-saxonnes l’ont compris depuis longtemps, bien mieux que nous… On peut en déduire un troisième axiome : pour être définitivement reconnu, le DSI doit se comporter comme un « partner », pas uniquement comme un DSI, avec, si possible, des compétences non IT dans son parcours.

Cet article a été écrit par Christian Broches, conseil en gestion de carrière des DSI et en organisation. christian.broches@ecosystem-consulting.com