Innovation : les trois postures des entreprises

Un DSI doit-il être celui qui investit avant les autres dans des technologies de rupture ? Le conservatisme peut coexister avec l’innovation. L’investissement dans une nouvelle technologie ou une nouvelle version de rupture d’une solution logicielle comporte toujours une part de risque.

Un DSI doit-il être le « patient zéro », celui qui, dans le domaine médical, est le premier à être « infecté » ? Plusieurs raisons incitent à s’engager dans cette voie :

  •  L’urgence,  lorsque les utilisateurs font face à une dégradation des performances et qu’il faut, de toute façon, faire évoluer le système en place. Soit cette évolution se fait en douceur, mais le risque est de devoir recommencer à moyen terme. Soit on privilégie un saut quantitatif et qualitatif de manière à avoir une avance suffisante, à l’image de certains pays dépourvus de réseaux téléphoniques fixes ou d’un système bancaire efficace et qui passent directement à des réseaux haut débit et des systèmes de paiement par mobile.
  • L’obsolescence technologique, qui induit des risques de dysfonctionnements majeurs, comme l’a montré, en novembre 2015, la panne qui a affecté le système d’information de l’aéroport d’Orly, géré en partie avec Windows 3.1.
  • La recherche d’un avantage compétitif par l’innovation technologique.
  • Les bonnes relations avec un fournisseur et la confiance réciproque. Chacun y trouve son avantage : pour le fournisseur, il s’agit d’initier la ou les premières références clients de manière à en convaincre d’autres, d’ajuster les fonctionnalités après une utilisation réelle et un feedback des utilisateurs ; de son côté, l’entreprise cliente bénéficie d’un engagement accru des équipes du fournisseur (qui a intérêt à la réussite du projet), par rapport aux autres clients, de conditions financières intéressantes (si elle sait les négocier au préalable) et d’une rapide adaptation de la solution en cas de bugs.

Au-delà de ces éléments, entre une attitude conservatrice et, à l’opposé, une attitude d’innovation, le curseur tend à se déplacer vers le second point, pour au moins trois raisons :

  • La culture de l’innovation se répand dans les entreprises et les organisations. Les directions générales y sont plus réceptives, car elles ont bien compris les risques de ne rien faire ou d’aller trop lentement face à des concurrents, dont certains peuvent surgir de nulle part, on le voit avec les craintes concernant « l’uberisation » que l’on trouve dans la plupart des secteurs économiques. Cette attitude contraste avec les années 1990 et même avec les années 2000.
  • L’écosystème des startup élargit les opportunités de solutions innovantes et, plus que par le passé, pérennes. Cela incite les entreprises à observer le marché… et à passer à l’acte pour se positionner en précurseurs sur des projets pilotes.
  • Le numérique pose la question de la vitesse d’adaptation des stratégies et des business modèles face aux concurrents. Si, auparavant, quelques mois, voire quelques années, pouvaient suffire pour réagir, aujourd’hui, les délais se sont raccourcis, notamment pour les marchés B2B et des marchés très concurrentiels, où il faut être capable de lancer de nouvelles offres en quelques jours pour ne pas se laisser distancer.

Il est possible de concilier le fait d’être précurseur et de limiter les risques (voir tableau page 3), notamment en définissant un périmètre d’expérimentation, éventuellement extensible, en étant prévoyant pour revenir à l’état initial, en étant vigilant sur les capacités et les ressources du fournisseur et en pilotant le projet de façon fine et quotidienne.

Les attitudes face à l’innovation technologique
Précurseurs Attentistes Décalés
Posture Proactive Réactive Défensive
Philosophie  » L’avenir appartient aux audacieux » « Rien ne sert de courir il faut partir à point » « La prudence est mûre de sûreté « 
Degré d’adoption Fort Faible ou nul Inexistant
Principale motivation Innover pour les métiers Se rassurer avec des retours d’expérience solides Contraintes financières ou manque de maturité des métiers
Principaux challenges Les compétences et l’accompagnement, la gestion des risques Le ROI et le business case Le budget et les ressources
Source : Digitalonomics.