Comment gérer des fournisseurs devenus trop puissants ?

Lorsque des fournisseurs deviennent trop puissants parce qu’ils disposent d’un quasi-monopole, il est souvent difficile de négocier pour inverser le rapport de forces. C’est néanmoins possible, en s’appuyant sur quatre stratégies.

Dans le numéro de juillet-août 2015 de la Harvard Business Review, trois consultants du Boston Consulting Group et la directrice des achats de PepsiCo proposent plusieurs approches pour négocier avec des fournisseurs puissants. Cette puissance s’acquiert de plusieurs manières : par exemple, des rachats, des disparitions de fournisseurs, des situations de quasi-monopoles, que l’on connaît dans de nombreux secteurs, y compris dans le domaine des technologies de l’information. Cela aboutit à un affaiblissement relatif des clients face à des fournisseurs qui ont acquis un pouvoir d’orientation du marché, des prix ou des conditions commerciales.

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 » How to negotiate with powerful suppliers « , par Petros Paranikas, Grace Puma Whiteford, Bob Tevelson et Dan Belz, Harvard Business Review, juillet-août 2015.

Les auteurs proposent quatre stratégies possibles, qui peuvent bien sûr se combiner. La première consiste à permettre au fournisseur d’avoir accès à un nouveau marché (par exemple pour équiper des filiales ou de nouveaux établissements) en échange, par exemple, d’un effort sur ses prix ou d’une réduction de ses risques avec des engagements sur une durée plus longue.

Seconde approche possible, si créer de nouvelles sources de valeur pour le fournisseur n’est pas possible ou difficile : modifier les processus d’achat. Il s’agit, dans ce cas, d’agir sur trois leviers : d’abord, la consolidation des achats, par exemple lorsque plusieurs entités d’un même groupe disposent d’une autonomie pour acheter, il peut être pertinent de mutualiser sur un seul fournisseur.

C’est le cas pour les applications lourdes de types ERP : faire appel à un seul fournisseur réduit les coûts de licences, d’intégration et de maintenance. Pour les entreprises plus petites, elles peuvent s’intégrer à des consortiums ou des associations qui disposent d’un pouvoir de négociation plus élevé. Ensuite, les auteurs suggèrent de jouer la carte des bundles, si les solutions répondent à des besoins, bien sûr. Ainsi, on peut obtenir de meilleures conditions auprès d’un éditeur d’ERP si, en même temps, l’entreprise acquiert tel ou tel module chez ce même éditeur. Enfin, face à un fournisseur puissant, il est toujours envisageable de réduire les volumes d’achat, si c’est possible.

La troisième approche, suggérée par les auteurs, consiste à créer une nouvelle source d’approvisionnement. Dans le domaine des technologies de l’information, cela peut passer par le financement de start-up ou des co-entreprises, de manière à s’approprier la technologie et les ressources avant les concurrents, ou bien en réinternalisant ce qui peut l’être au lieu de faire appel à un éditeur de logiciels.

Cette stratégie comporte toutefois des risques, expliquent les auteurs : « Assurez-vous que la nouvelle configuration crée une valeur supérieure aux investissements, aux risques cachés et à l’implication supplémentaire que cela suppose de la part du management. »

Quatrième stratégie possible : créer un rapport de force avec son (ou ses) fournisseurs devenu(s) trop puissant(s). Cela passe, par exemple, par l’arrêt de toute commande, l’exclusion du fournisseur de tout nouvel appel d’offres ou une action en justice. Les auteurs racontent l’histoire d’un groupe financier américain qui devait réduire ses coûts à hauteur de trois milliards de dollars. Pour contribuer à atteindre cet objectif, une baisse de 10 % des coûts des infrastructures IT a été demandée à un fournisseur.

Celui-ci a refusé. Le DSI du groupe financier a alors contacté directement le PDG du fournisseur, lui expliquant que toutes les commandes étaient suspendues sans délai. Les équipes du fournisseur ont été informées que leur contrat se terminait immédiatement et le fournisseur a été exclu du système de e-procurement. Résultat : le fournisseur a accepté la baisse proposée par son client.

Quelle que soit l’option retenue, les auteurs posent plusieurs prérequis avant de s’engager : « Il faut une vision claire du problème, une capacité à faire travailler ensemble les différentes entités de l’entreprise, une volonté de penser différemment, une compréhension des enjeux et un engagement des directions générales au-delà des aspects tactiques pour privilégier les aspects stratégiques. » Les auteurs l’assurent : « Si ces éléments sont en place, ce qui était a priori impossible devient possible. »


Les quatre stratégies possibles

  • Apporter plus de valeur pour le fournisseur
  • Modifier les processus d’achat
  • Faire appel à un autre fournisseur
  • Créer un rapport de force