Poclain Hydraulics : pas de croissance sans transformation du système d’information

Le spécialiste français des transmissions hydrauliques a engagé un vaste programme de transformation. Baptisé SI+, ce programme avait pour objectifs d’optimiser la planification de ses activités de production, d’améliorer le cycle de vie de ses produits et de mieux intégrer les entreprises acquises.

En 2010, Poclain Hydraulics (282 millions de chiffre d’affaires en 2014, 2 000 collaborateurs aujourd’hui) amorce un plan de transformation de son système d’information pour répondre à trois objectifs : optimiser la planification de ses activités de production, améliorer le cycle de vie de ses produits et mieux intégrer les entreprises acquises. Cette décision, impulsée par la direction générale, qui veut rendre le groupe industriel plus réactif face aux transformations internes et aux attentes des clients, fait partie de sa stratégie visant à atteindre un chiffre d’affaires de 400 millions d’euros fin 2015.

« Cet objectif était atteignable uniquement si les systèmes d’information parvenaient à apporter des éléments différentiateurs, tels que l’innovation, la vision de la demande client, la réactivité, la qualité de service et l’efficience opérationnelle », précise José Munoz, directeur des systèmes d’information de Poclain Hydraulics.

« Ce qui impliquait un décloisonnement des métiers. » En effet, une orientation processus et clients séduit le comité exécutif qui y voit l’opportunité de gagner en agilité, en réactivité et en performance. D’un fonctionnement des métiers en silo, empêchant certaines formes de transversalité, Poclain Hydraulics veut s’orienter vers une architecture orientée services (SOA) lui permettant d’établir une vision globale de son système d’information.

Quatre briques technologiques

Pour y parvenir, le groupe réalise, en septembre 2011, une étude préliminaire. Le programme SI+ est, dès lors, initialisé. Il doit se construire autour d’un core model, basé sur des processus métiers et un système d’information agile, composé de quatre briques principales :

  • Le CRM (Customer Relation Management), outil destiné à analyser les demandes des clients.
  • Le SIRH (Système d’Information de Gestion des Ressources humaines) pour identifier, pérenniser les compétences requises et motiver les collaborateurs.
  • L’outil transverse de PLM (Product Life Management) pour la gestion et la publication des données techniques (articles, nomenclatures) à travers les métiers, dont l’ERP (Enterprise Ressource Planning).
  • L’ERP (Oracle eBusiness Suite) en interface avec l’ERP existant (Peoplesoft).

Poclain Hydraulics fait aussi le choix d’un référentiel de données éclaté et d’une architecture orientée service (SOA) afin d’assurer plus de flexibilité dans l’échange de données entre les systèmes. Dans un second temps, le groupe industriel sélectionne des consultants et des partenaires pour leur expertise autour des solutions à mettre en place.

Le partenaire principal sera l’entreprise indienne Larsen & Toubro, déjà en charge de la maintenance de l’ERP PeopleSoft depuis 2003, qui prend en charge le paramétrage et les développements ; Oracle Consulting Services et Easyteam se verront confier le développement et la maintenance des services SOA ; et Digora aura la responsabilité de l’administration et de la maintenance de la plateforme technique (infrastructures, gestion des environnements).

Se substituer à un intégrateur défaillant

Côté technologies, Poclain Hydraulics sélectionne les applications E-Business Suite, Business Intelligence Publisher, ainsi que les suites SOA et AIA (Application integration architecture) d’Oracle, pour les outils de développement Middleware, Oracle database, pour la base de données, et le système de virtualisation OVM d’Oracle. Viennent s’ajouter le PLM de Windchill, le CRM de Pivotal, le SIRH de Foederis et les systèmes existants à interfacer : PeopleSoft, UPK (User Productivity Kit), la virtualisation sous VMware et l’infrastructure IBM. Globalement, l’équipe projet regroupe 40 à 60 collaborateurs à temps plein. La phase design prend forme.

Suite à la phase de conception, Poclain Hydraulics se heurte à un déficit de compétences de son intégrateur, l’obligeant à opter, début 2013, pour une approche « intégrateur interne ». « Pour gagner du temps, nous avons pris le risque de ne pas signer avec un nouvel intégrateur, mais de nous appuyer sur les compétences métiers et IT de nos équipes », précise José Munoz.

Neuf mois plus tard, un projet pilote est réalisé en Italie. Puis, quatre sites de production sont déployés en 2014, tout d’abord en République Tchèque et aux États-Unis, puis en France et en Inde, trois mois plus tard. Ce qui représente 80 % des utilisateurs. « Au final, vingt mois auront été nécessaires pour finaliser le programme SI+ », affirme José Munoz.

Même si le DSI avoue que l’entreprise n’a pas encore capté toute la valeur de la mise en place du système, les objectifs internes sont, selon lui, en voie d’être tenus et se mesurent par plus de flexibilité dans les flux, une meilleure visibilité et efficience dans les processus internes, une polyvalence des sites de production et, enfin, une valorisation des compétences internes dans la gestion des projets.

Comme autres bénéfices, José Munoz met en évidence, la robustesse du système et sa flexibilité. « Désormais, nous pouvons gérer les schémas de distribution de nos produits avec plus de combinaisons. » Côté clients, toute demande de modification de design est maintenant diffusée dans les ERP à travers le SOA et des workflows de validation.

De nouvelles expertises

Résultat : davantage de réactivité entre la demande de modification, la réalisation en design et l’application dans les usines impactées. Quant aux fournisseurs, ils disposent d’un portail Web permettant de traiter les demandes plus rapidement. « L’image de Poclain Hydraulics s’en trouve aussi améliorée, car nous avons su mettre en valeur les compétences humaines de nos collaborateurs, nous avons constaté un vrai changement d’approche des différents métiers », signale José Munoz. Enfin, le décloisonnement des métiers a augmenté le nombre d’utilisateurs par système. « Les solutions PLM et CRM sont utilisées respectivement par 750 et 250 collaborateurs », poursuit-il.

Parmi les difficultés citées par le DSI, on note l’échec de collaboration avec le premier intégrateur, l’organisation et la mobilisation des équipes, l’intensité du rythme à maintenir pendant trois ans et, enfin, l’absorbation de la charge supplémentaire de travail lié au rôle d’intégrateur.

« Lorsque vous endossez le rôle d’intégrateur, vous devez anticiper les changements de votre organisation pour maintenir le niveau des compétences, les délais et la qualité de mise en œuvre, d’autant plus lorsque le projet s’étale sur trois ans. » Pour y faire face, José Munoz a changé son organisation pour correspondre aux demandes des métiers.

Ses 42 collaborateurs mobilisés à temps plein ont été répartis en pôles d’expertises : opérations, finance et vente, innovation, processus et données, service delivery, support aux utilisateurs et infrastructures. En trois ans, le profil des membres de l’équipe projet a fortement évolué. « SI+ a été un vrai révélateur de talents », insiste José Munoz. « Les défis se sont transformés en succès, grâce à la cohésion et à la mobilisation des équipes internes et des partenaires. »

    Le projet de transformation SI+ de Poclain Hydraulics
 Trois objectifs  Quatre phases  Quatre briques technologiques  Dix bénéfices
  1.  Optimiser la planification de ses activités de production
  2. Améliorer le cycle de vie de ses produits
  3. Mieux intégrer les entreprises acquises
  1. Design : construction groupe collaborative dont les livrables sont les processus groupe (documents d’alignement métier)
  2. Build : construire la solution dans les systèmes d’information
  3. Deploy : propre à chaque site, elle embarque la préparation des données du site, les formations et le plan de bascule
  4. Run : propre à chaque site, elle démarre par une phase  » hypercare « , avec une présence physique forte, puis un désengagement progressif de l’équipe projet
  1. Un outil de CRM
  2. Un SIRH
  3. Un outil de PLM
  4. Un ERP
  1. Flexibilité des flux face aux changements d’organisation industrielle
  2. Efficience des processus internes
  3. Décloisonnement des métiers
  4. Sites de production plus polyvalents parce que standardisés (processus et données)
  5. Montée en compétences pour
  6. la gestion de projet
  7. Réactivité face aux demandes clients
  8. Flexibilité avec les fournisseurs
  9. Déploiement sans impact sur les activités commerciales et opérationnelles
  10. Innovation dans l’architecture des systèmes
  11. Mise en valeur des compétences humaines et techniques
    Source : Poclain Hydraulics.

Une campagne de communication pour accompagner la transformation

Historiquement en charge de la maintenance de l’ERP PeopleSoft, Larsen & Toubro se voit progressivement confier l’activité projet, sous la houlette de l’industriel. Les dix experts, envoyés chez le groupe français, vont se révéler à la hauteur, selon José Munoz : « Très compétentes, les équipes se sont totalement imprégnées de nos processus et de nos activités, et ont rapidement réalisé les spécifications techniques et les développements spécifiques », admet le DSI de Poclain Hydraulics.

Côté communication (voir encadré), l’entreprise utilise tous les moyens qui existent pour toucher au mieux les utilisateurs, à tous les niveaux : l’affichage, l’intranet, les vidéos. Quant à la formation, rien n’est laissé au hasard.

Notamment lors de la phase de roll out, durant laquelle une partie de l’équipe projet se déplace un mois sur chacun des sites, afin de former les équipes locales. « Il s’agit, pour l’équipe projet, d’ajuster le système et d’agir comme support de proximité. C’est ce qu’on appelle la phase hypercare. Puis, progressivement, l’équipe projet se désengage et passe le relais aux équipes locales », explique José Munoz. L’équipe locale devient ainsi plus experte et peut mieux aider ses collaborateurs locaux.

Cette année, Poclain Hydraulics poursuit le déploiement de son programme SI+ en France et en Chine, en avril, puis en Slovénie, en novembre. Au final, 1 200 utilisateurs adopteront ces nouveaux outils. Quant à la deuxième phase de déploiement d’E-Business Suite, elle est déjà programmée pour 2017.


Les bonnes pratiques de Poclain Hydraulics

Pour concevoir et mettre en œuvre une transformation du système d’information qui soit réussie et pérenne, il est nécessaire d’engager les parties prenantes autour des principes suivants :

  • Respecter la culture d’entreprise à laquelle s’identifient les collaborateurs.
  • Communiquer à chaque phase du projet et à tous les niveaux.
  • Placer toujours l’humain au cœur du projet.
  • Accompagner les collaborateurs dans la conduite du changement, afin de garantir son succès.
  • Respecter les particularités des différentes filiales.
  • Dédier une équipe qui gère et pilote le développement du projet.
  • Développer la polyvalence, l’expertise et la valeur ajoutée des collaborateurs par la formation.
  • Travailler en mode partenariat avec les intégrateurs.

Un effort de communication

Le programme SI+ de Poclain Hydraulics a été soutenu par des initiatives en matière de communication, avec, en particulier, des newsletters, des témoignages vidéos et des posters, en français et en anglais. Ces derniers ont permis de diffuser des messages sur les changements, avec le fil rouge « A call to change », décliné par des slogans tels que :

  • « La croissance se prépare maintenant, adoptons les standards ! »
  • « Think global, act local! »
  • « Innovations need IT! »
  • « More drive and speed with a new ERP! »
  • « Create value together, collaborate with agility! »
  • « Design, source, produce and sell everywhere! »

Le projet de Poclain Hydraulics a, par ailleurs, été récompensé, en mars 2015, par le Trophée des Trophées Oracle des clubs utilisateurs.