Transformer le capital humain : une vraie rupture pour les DSI

On réduit souvent le métier de la DSI à sa vocation à aligner en permanence le SI aux enjeux métiers et à garantir la qualité de service. On oublie trop souvent la dimension RH de sa fonction dans sa capacité à développer les compétences pour soutenir ses missions.

Dans un environnement de fortes évolutions tant techniques que métiers, et dans un contexte d’exigences accrues de performance de la fonction SI, est-ce que le capital humain de la DSI sait répondre à ces enjeux ? Quels ajustements doivent être apportés et comment doit-on mener cette transformation ?

La place de l’IT dans le business des entreprises, aujourd’hui en pleine évolution, impacte les compétences attendues au sein de la DSI. L’introduction de la relation client multicanal, le développement de la BI (business intelligence), le renforcement du e-commerce, l’évolution des modes de travail amène des évolutions relativement classiques des compétences IT mais nécessitent de les compléter par des compétences métiers. Les évolutions techniques liées à la modernisation des SI, au déploiement du Cloud et des outils de mobilité (BYOD, tablettes) accompagnées du renforcement du pilotage des fournisseurs sont autant d’évolutions exigeant de hauts niveaux d’expertise dont les DSI ne sont pas toujours bien dotés.

Par ailleurs, l’évolution des activités de la DSI depuis les années 1990 met en avant une plus grande richesse et une plus forte spécialisation des métiers de l’IT. Les années 1990 se caractérisaient par des activités concentrées sur du « faire » comme le « conseil en système d’information », les « études et le développement », la « production et l’exploitation » et « l’assistance technique interne ». Aujourd’hui, les activités de la DSI ont clairement évolué vers du « faire-faire » avec des activités comme le « pilotage, organisation et gestion des évolutions du système d’information », le « management de projet », le « management opérationnel ».

Ces évolutions introduisent de vraies ruptures dans les compétences de la DSI. On ne compte plus les DSI qui rencontrent des difficultés à disposer de « chef de projet » capable de prendre de vraies responsabilités dans le pilotage d’un projet ou à jouer un rôle de vrai « chef d’orchestre ».

Une situation RH préoccupante au sein des DSI

Dans un contexte où l’évolution des compétences est déterminante pour accompagner l’évolution de la DSI, une enquête publiée par Harvard Business Review explique qu’une bonne partie des grandes entreprises peinent à faire évoluer le modèle RH de leurs filières SI, essentiellement pour les raisons suivantes :
– une faible mobilité et une perte de compréhension des enjeux transverses de l’entreprise,
– un manque de perspectives, d’évolution et donc une faible motivation
– une population senior, majoritairement composée de cadres et d’ingénieurs,
– une dimension internationale des profils trop souvent laissée de côté et handicapante pour les grands groupes internationaux,
– un sourcing opportuniste des compétences, essentiellement guidé par une démarche économique,
– une surreprésentation des postes de management opérationnel, considérer comme la seule voie de progression.

Une double évolution des métiers à prévoir

La révolution des usages et des technologies accompagnée d’un recentrage des activités de la DSI se traduisent par deux tendances d’évolution des métiers de l’IT. Les DSI doivent renforcer les métiers de pilotage et de contrôle sur le périmètre historique des activités de la DSI. La DSI a besoin d’architectes et d’urbanistes pour renforcer la maîtrise du SI et des infrastructures associées, de pilotes du sourcing pour tirer le maximum de valeur des fournisseurs et enfin de contrôleurs de gestion pour mesurer la performance économique mais également opérationnelle de la DSI. Les DSI doivent créer de nouveaux métiers, là où les frontières avec les métiers se dissipent, comme par exemple le responsable e-business qui incarne le pilote de la stratégie digitale de l’entreprise.

Une transformation RH qui passe par un véritable projet d’entreprise

Cette transformation des compétences ne doit pas être sous-estimée. D’ailleurs, toutes les DSI qui ont limité cette transformation au volet RH ont rarement abouti.

Cette transformation pose le sens des missions de la DSI et donc sa stratégie. La stratégie de la DSI va déterminer par exemple le degré de polyvalence attendu par les collaborateurs et donc conditionner sa promesse employeur dans les perspectives d’évolutions qu’elle offre aux collaborateurs. Cette évolution a également des impacts sur le fonctionnement de la DSI et donc sur son modèle d’organisation.

Cette transformation ne se limite pas non plus à l’évolution des internes de la DSI et doit être menée en cohérence avec la stratégie de sourcing de la DSI. Il faut veiller à ce que le développement des compétences des internes se concentre sur les activités stratégiques de la DSI.

Cet article a été écrit par Erwan Le Lan, manager chez Solucom (Wavestone).