Dans la plupart des organisations, les rythmes de décision s’accélèrent, entraînant un besoin d’agilité de plus en plus poussé, notamment en matière de systèmes d’information. Comment les DSI perçoivent-ils ces demandes ? De quelle manière y répondent-ils ? Le cabinet de conseil Advese, en partenariat avec Best Practices Systèmes d’Information, a interrogé une trentaine de DSI sur ces enjeux.
Premier constat de l’enquête menée par Advese et Best Practices Systèmes d’Information : les entreprises ayant formalisé le concept d’agilité sont rares. Seules cinq des sociétés rencontrées disposaient d’une définition partagée au sein du groupe et avaient mis en œuvre des actions concrètes destinées à accroître l’agilité de l’entreprise ! C’est peu et ces entreprises avaient pour point commun d’être sur des marchés grand public extrêmement concurrentiels, soumis à de fortes pressions allant jusqu’à la remise en cause des modèles économiques traditionnels. Dans la majorité des cas, la réflexion avait été initiée par la DSI et reprise par l’ensemble de l’entreprise.
Interrogés sur ce que signifie pour eux l’agilité, les DSI mettent spontanément en avant plusieurs aspects, dont l’importance varie selon les entreprises. Selon les répondants, l’agilité implique tout d’abord d’être rapide. Il faut aller vite pour répondre aux exigences de « time-to-market » du métier et livrer le service dans les délais requis. Pour y parvenir, il faut être réactif en permanence. Enfin, le troisième aspect qui ressort des réponses est la flexibilité. L’agilité est requise pour s’adapter au calendrier de l’entreprise, et celui-ci est changeant. Dans ce contexte, le système d’information apparaît comme un élément clé de l’adaptabilité des entreprises.
Face à l’accélération des demandes métiers, il s’agit également pour les DSI de rompre avec « l’image de DSI traditionnelle, lourde et peu réactive ». Cela implique de nouvelles façons de travailler, qui ne sont pas une fin en soi, mais un moyen de mieux satisfaire les attentes des métiers ou de répondre à des besoins différents. Qu’il s’agisse de saisir une opportunité, d’intégrer une nouvelle filiale, de travailler avec un nouveau fournisseur, de suivre l’entreprise dans sa croissance ou de s’adapter aux évolutions de son activité, l’agilité impose un partenariat entre la DSI et les métiers.
En tant que partenaires, les DSI estiment notamment que leur rôle est de veiller à un certain nombre d’éléments qui relèvent de leurs missions :
- La performance et la qualité des solutions mises en place ;
- La cohérence globale du système d’information ;
- La sécurité ;
- La maîtrise des coûts.
Du côté des métiers, les répondants relèvent cependant une différence de perception de l’agilité, souvent résumée à « faire plus vite et moins cher ». L’enjeu est alors de réconcilier ces deux visions à travers un certain nombre de bonnes pratiques, afin de parvenir à une maturité de l’entreprise sur la notion d’agilité.
Des demandes motivées par la pression du marché
La hausse des demandes impliquant de l’agilité va souvent de pair avec une accélération des cycles projet. Elle peut également se traduire par une augmentation des demandes urgentes à tel point que dans certaines entreprises, l’agilité est devenue « un fil continu ».
Ce besoin de rapidité est accentué par la crise et les contraintes budgétaires rencontrées par les entreprises, qui ont alors tendance à privilégier les projets rapides à mener. Les projets concernant le pilotage de l’entreprise sont également accélérés par le contexte économique.
Enfin, l’essor des outils de mobilité, des réseaux sociaux et des nouveaux usages du côté grand public contribue également à cette accélération pour plusieurs des répondants, en créant de nouveaux besoins. « Le client souhaite par exemple utiliser son smartphone pour passer un ordre de Bourse », illustre le DSI d’un établissement financier.
L’état du marché et la concurrence, qui imposent de faire évoluer l’offre et la stratégie de l’entreprise, sont les principales raisons à l’origine des demandes d’agilité. Il s’agit d’être davantage centré sur le client, de développer de nouveaux produits et services (e-commerce par exemple) ou d’améliorer la réponse aux appels d’offres. Parmi les autres motivations citées figurent la recherche d’efficacité et de productivité pour les collaborateurs, la gestion d’opérations de fusions-acquisitions et les réorganisations associées, ainsi que la prise en compte de contraintes réglementaires, celles-ci pouvant néanmoins être anticipées.
Interrogés sur la provenance des demandes, les DSI mentionnent en premier lieu les métiers de support et la direction générale. Les fonctions directement en contact avec les clients des entreprises, notamment les fonctions commerciales et marketing, sont les plus citées. Viennent ensuite les directions financières, la communication ainsi que les ressources humaines. Les opérationnels, notamment dans l’industrie, sont peu cités, à l’exception des métiers de la logistique, qui doivent fréquemment intégrer de nouveaux partenaires.
Pour la majorité des répondants, l’ensemble du système d’information est concerné par les demandes d’agilité : applications métiers, système de gestion, Web et infrastructure. Néanmoins, certains domaines tirent nettement la demande, en premier lieu le système d’information tourné vers le client, « en train de devenir le système d’information principal » dans certaines des entreprises interrogées. Les outils de gestion de la relation client (CRM), les nouveaux usages numériques (e-commerce, m-commerce, réseaux sociaux) et la mobilité sont au cœur de ces enjeux, particulièrement marqués dans les entreprises en relation directe avec les consommateurs. Un autre domaine fréquemment concerné est celui du pilotage, notamment le reporting et la simulation financière.
D’autres problématiques peuvent toucher plus particulièrement certaines briques du système d’information : la capacité à étendre l’entreprise rapidement est par exemple fortement dépendante de l’agilité de l’infrastructure, notamment en termes de stockage et de réseaux, tandis que le travail à distance et les problématiques d’accès à l’information associées alimentent les demandes liées à la mobilité.
De nouvelles contraintes pour les DSI
Les DSI sont nombreux à estimer disposer d’une visibilité insuffisante sur les demandes d’agilité, déplorant par ailleurs une formulation souvent trop simpliste. Néanmoins, s’il est difficile de définir ces besoins de manière précise, c’est souvent parce qu’il s’agit de nouveautés pour les métiers. La demande peut de ce fait évoluer et se préciser en cours de projet. Pour cette raison, les répondants sont globalement conscients que cette visibilité difficile à obtenir fait partie du jeu. Pour les DSI, gérer l’incertitude devient la norme. Dans ce contexte, c’est à eux d’aller comprendre le besoin, voire d’être force de proposition. L’agilité nécessite également de savoir changer de priorités et va de pair avec de nouvelles façons de travailler.
Conscients de ces changements, les DSI doivent cependant composer avec d’autres contraintes, notamment budgétaires. Un petit tiers des répondants parviennent à obtenir des financements supplémentaires pour les demandes d’agilité, quand celles-ci sont « de vrais besoins, pour lesquels les demandeurs sont prêts à investir ». Les budgets peuvent ainsi être augmentés quand les bénéfices attendus le justifient, quand la qualité et la pérennité des solutions sont des critères importants ou quand cela s’accompagne de garanties sur le « time-to-market ».
Pour un autre tiers des répondants, en revanche, il est rare, voire « anti-culturel » que les interlocuteurs de la DSI acceptent de dépenser plus pour une demande d’agilité. Ces contraintes sont fréquentes dans les entreprises où la maîtrise des coûts prime, et où la DSI cherche soit à réduire les dépenses, soit à fonctionner à budget constant. « L’agilité est réduite par les contraintes financières », souligne un répondant. Le reste des répondants se situe entre les deux, disposant d’une marge de manœuvre financière variable selon les projets.
Pour pouvoir traiter les demandes d’agilité, plusieurs DSI ont mis en place des stratégies visant à obtenir une certaine agilité budgétaire, dans un contexte où la plupart des investissements sont encore planifiés et cadrés sur un schéma pluriannuel. Parfois, ils privilégient la réduction des dépenses existantes, notamment les coûts d’exploitation. D’autres ont la possibilité de réserver une partie de leur budget pour les besoins non planifiés. Enfin, dans certains cas, les budgets supplémentaires ne sont pas comptabilisés sur le budget de la DSI mais sur ceux des métiers demandeurs.
La plupart du temps, néanmoins, « il est plus simple d’arbitrer les répartitions de ressources que de donner des nouveaux moyens ». Pour ces arbitrages, les DSI se réfèrent à la stratégie de l’entreprise. Quand il s’agit de projets qui n’étaient pas prévus dans les plans d’investissement pluriannuels, ce qui est souvent le cas des demandes d’agilité, la validation par le comité exécutif ou par la direction générale est généralement un passage obligé.
Quand il faut dire non…
La plupart des répondants ont la possibilité de répondre par la négative aux demandes. Néanmoins, cela peut présenter un risque pour l’image et la notoriété de la DSI. Pour plus de la moitié des répondants, répondre par la négative aux demandes d’agilité est cependant un devoir dans certains cas, surtout « si les risques pour l’entreprise sont trop forts », témoigne un DSI. Dans tous les cas, ces réponses négatives doivent être expliquées et justifiées.
Les réponses négatives sont mieux acceptées quand la DSI propose des scénarios de contournement (formation, utilisation d’outils existants, offres open source, etc.), une mutualisation des besoins ou un report. Parfois, quand le projet s’écarte de la stratégie de l’entreprise, le rôle de la DSI est également d’inciter les métiers à approfondir leur réflexion ou à mieux justifier leur choix. La confiance préalable existant entre la DSI et les métiers, ainsi que l’appui sur des partenaires internes comme le service juridique, contribuent également à limiter les risques associés aux réponses négatives.
Dans quelques organisations, les réponses négatives ne sont pas possibles car la DSI n’est pas en position d’arbitrer : ce rôle est dévolu aux métiers ou au comité exécutif. Par ailleurs, certaines demandes ne peuvent que très rarement être refusées : projets relevant de la conformité réglementaire, demandes de la direction générale…
Le coût de l’agilité perçu de manière différente par les métiers et la DSI
Dans certains cas, les projets répondant à des demandes d’agilité s’avèrent moins coûteux que les projets classiques, en raison de délais plus courts et de l’usage de méthodes différentes. Néanmoins, à une échelle plus globale, un répondant affirme qu’un « système d’information agile n’est pas moins cher ».
De manière générale, les DSI s’accordent sur un écart de perception plus ou moins marqué entre la DSI et ses clients. Les DSI sont conscients que « l’utilisateur a besoin d’avoir une réponse rapide et simple à sa demande », et qu’il attend de ce fait une informatique « agile et réactive avec un coût faible ». Mais, bien souvent, l’agilité est comprise par les métiers comme un synonyme de « rapide et pas cher », ou comme un moyen d’obtenir facilement ce qu’ils souhaitent, en réduisant les spécifications au minimum. Parfois au contraire, les métiers ont une perception erronée de l’informatique, vue comme forcément chère. La DSI est, quant à elle, confrontée à des problématiques d’intégration avec l’existant, qui, mal anticipées, peuvent être une source de surcoût importante, ainsi qu’à la réalité du marché. En cas d’incompréhension sur le coût, « c’est à ce moment-là que la DSI a besoin de faire beaucoup de pédagogie », estiment les répondants.
Sur ces enjeux, quelques organisations sont parvenues à un bon niveau de maturité, acceptant que l’agilité puisse avoir un coût et que ce dernier se justifie. « Les clients ont la responsabilité budgétaire du projet, illustre un répondant. De fait ils travaillent sur le périmètre pour cadrer le budget. Ils savent qu’aller vite peut coûter plus cher. »
L’agilité, un travail de fond touchant tous les niveaux de l’entreprise
Pour acquérir ou accroître l’agilité, les DSI peuvent agir sur plusieurs leviers, internes comme externes (voir tableau ci-dessus).
L’agilité implique tout d’abord un certain nombre de prérequis techniques, le premier étant l’existence d’un vrai socle pérenne et flexible. Celui-ci s’acquiert par la standardisation et l’urbanisation du système d’information, la simplification et la rationalisation du parc ou encore la capitalisation de l’existant, en s’appuyant par exemple sur un catalogue de services. Certaines entreprises doivent parfois mener au préalable de gros projets structurants, comme la mise en place d’un progiciel de gestion intégré ou la convergence de plusieurs systèmes d’information, qui apparaissent de l’avis général difficilement conciliables avec l’agilité.
Certains types de solutions, de par leur architecture et leurs possibilités, contribuent également à l’agilité du système d’information. Le cloud computing et la virtualisation sont ainsi cités par plusieurs DSI, permettant de « mettre à disposition rapidement et à moindre coût des environnements de type « bac à sable » », mais aussi de répondre aux urgences.
En matière d’organisation, il s’agit notamment d’améliorer la visibilité sur les demandes et se donner les moyens d’être plus réactifs, en travaillant sur la disponibilité des ressources et les compétences.
Pour améliorer la visibilité sur les demandes, les DSI prévoient ainsi des ressources spécifiques affectées à la collecte des demandes et à la relation client : « business partners », correspondants métiers, les appellations diffèrent selon les entreprises, mais elles désignent toutes des interlocuteurs servant de « passerelle » entre la DSI et ses clients, qui développent une vraie connaissance des différents métiers de leur entreprise.
Pour pallier les difficultés liées à la disponibilité des ressources, quelques entreprises ont mis en place des équipes « commandos », spécialement dévolues au traitement des demandes urgentes ou innovantes. De petite taille, elles fonctionnent « en mode start-up ».
Une nécessaire évolution des compétences
Un autre aspect important en termes d’organisation de la DSI est la gestion des compétences. Les DSI interrogés reconnaissent l’importance d’avoir un socle de compétences large et pluridisciplinaire, également doté d’une bonne écoute pour comprendre les besoins des métiers. Pour cela, plusieurs répondants ont entrepris un travail sur les évolutions de poste et la formation professionnelle.
Les collaborateurs de la DSI peuvent également effectuer de la veille technologique et être impliqués dans l’innovation. Quelques répondants ont mis en place des cellules consacrées à l’innovation mais dans la majeure partie des cas, les interlocuteurs considèrent que l’ensemble des acteurs de la DSI doivent s’impliquer dans ces démarches, qui sont d’ordre plus culturel qu’organisationnel.
Enfin, la dimension relationnelle joue elle-aussi un rôle important dans la recherche d’agilité. Pour améliorer le dialogue avec les métiers, les DSI travaillent énormément sur la communication et le « marketing de la DSI ». Le renforcement du dialogue passe aussi par la tenue régulière de réunions de travail. Celles-ci permettent de faire préciser les besoins et le volume en jeu, mais aussi d’évoquer la question des risques et le budget.
De nombreuses initiatives pour développer l’agilité portent sur les méthodes et les pratiques de travail de la DSI. L’objectif principal est alors d’industrialiser ces pratiques, tant au niveau projets et développement que dans l’exploitation, pour aller vers une approche basée sur des processus. Dans cette optique, plusieurs répondants ont expérimenté les méthodes agiles pour leurs projets, notamment Scrum. Celles-ci se basent notamment sur des cycles courts et une approche itérative, permettant de s’ajuster au fur et à mesure aux besoins. Dans la plupart des cas, ces méthodes sont réservées à certains projets, souvent les développements spécifiques.
D’autres entreprises privilégient les « proofs of concept » (POC), construisant des maquettes ou des prototypes pour évaluer la faisabilité et la pertinence des projets, ainsi que pour cadrer la demande. Cette approche est plus fréquente sur les projets liés à un progiciel. Les DSI misent aussi sur l’automatisation partout où c’est possible : tests, interfaces, etc.
Du côté de l’exploitation, les DSI travaillent notamment sur les processus et la productivité, en s’appuyant sur des méthodes comme ItiL, le lean management ou Six Sigma. Le premier objectif poursuivi par ce travail sur les processus est l’accélération des rythmes de mise en production.
Le dernier axe sur lequel les DSI concentrent leurs efforts est la gouvernance et la gestion du portefeuille de projets, deux domaines nécessitant une implication des métiers. L’arbitrage des demandes est essentiel pour cibler les actions et obtenir l’agilité là où elle est nécessaire. D’autres actions aident les métiers à « mûrir leurs besoins », comme l’évaluation de la maturité des technologies, l’utilisation de notes de cadrage pour que les demandeurs réfléchissent aux enjeux, aux objectifs et à l’organisation ou encore la systématisation des études de rentabilité (business cases) afin de cerner les gains attendus et de « challenger la demande », notamment pour les projets dépassant un certain seuil de budget.
Le rapprochement avec les métiers peut prendre d’autres formes, comme l’intégration de représentants du client dans les équipes de la DSI. La DSI peut également sensibiliser les métiers et diffuser une culture favorable à l’agilité, notamment à travers des actions de formation.
Inversement, cela peut aussi être à la DSI d’aller à la rencontre des métiers : transfert des équipes de développement dans les métiers « sur certains domaines clés » ou « réalisation d’études de « l’évasion » pour comprendre les motivations des métiers quand ils vont voir ailleurs qu’à la DSI ».
Enfin, le pilotage des contrats avec les prestataires est également cité comme un levier fort d’agilité, « la sous-traitance permettant d’absorber la charge » et d’avoir « un accès rapide à des compétences externes ». Dans ce domaine, il s’agit « d’introduire de la flexibilité dans les contrats, par exemple avec une facturation au ticket plutôt qu’au forfait ». Il s’agit aussi de standardiser et d’industrialiser les pratiques.
Des bénéfices identifiés mais un retour sur investissement peu mesuré
Le premier bénéfice pour la DSI porte sur l’amélioration de son image et de sa visibilité. Ces initiatives créent une relation de confiance. « En prouvant que la DSI peut être plus rapide sur un certain nombre de demandes, elle est plus légitime quand elle annonce des délais plus longs sur d’autres demandes », illustre ainsi un DSI.
Les pratiques agiles, qui demandent un engagement fort des différentes parties prenantes, favorisent également une évolution des modes de travail, aussi bien du côté de la DSI que de ses clients. « Les demandes urgentes gênent tout le monde », résume un DSI : tous les acteurs ont donc à gagner d’approches permettant de mieux anticiper et traiter ces besoins.
Pour la DSI, cet engagement se traduit par le développement du « sens du service », transformant dans le même temps l’état d’esprit des clients de la DSI : « d’eux-mêmes, les métiers proposent un lotissement en plusieurs phases des projets », illustre un répondant.
Pour les entreprises, les gains les plus directs des démarches agiles sont liés à l’amélioration de la productivité, qui réduit les coûts et les délais des projets. Ce sont souvent les bénéfices les plus aisément observables. Les approches agiles améliorent également l’alignement du système d’information avec la stratégie de l’entreprise, permettent « de se concentrer sur les vrais sujets », en « tuant ceux qui n’apportent rien ». En privilégiant le « time-to-market », la DSI peut aussi aider l’entreprise à gagner ou maintenir un avantage concurrentiel, avec les conséquances financièrer associées. Enfin, la transparence financière favorisée par l’approche orientée service et les processus d’arbitrage clairs permet « de travailler avec les équipes métiers dans un mode bénéficiaire pour les deux », ce qui améliore la satisfaction des utilisateurs.
Malgré ces éléments, le retour sur investissement (RSI) de certaines initiatives agiles peut s’avérer difficile à mesurer. En effet, il s’agit d’une « transformation à longue échelle ». Pour cette raison, il est parfois tout simplement trop tôt : dans plusieurs entreprises ayant participé à l’enquête, les actions d’évaluation des bénéfices sont en cours de mise en place. Parmi les actions prévues pour évaluer ces bénéfices figurent les enquêtes de satisfaction client, l’élaboration d’études de rentabilité, la mise en place d’indicateurs ou, dans une logique de type lean management, la mesure du temps gagné sur certains processus.
Sans surprise, le premier frein évoqué par les DSI est la formalisation des besoins, suivi de l’arbitrage. Parmi les autres difficultés citées, la gestion des ressources et des compétences revient fréquemment. D’autres répondants rencontrent également une certaine résistance aux changements. Pour y remédier, il est important de donner du sens à ces démarches, mais aussi de développer les « savoir-être » et la pluridisciplinarité des équipes. La disponibilité des ressources enfin peut poser problème, avec l’apparition de « goulets d’étranglement quand de multiples projets arrivent tous en même temps ».
La capacité du système d’information existant « à suivre et intégrer des nouveautés » est également une source de difficultés, voire un frein à l’agilité, tout comme la maturité parfois insuffisante des offres. Une agilité budgétaire insuffisante complique aussi la tâche des DSI. Enfin, quelques participants évoquent d’autres freins liés à la culture des entreprises, comme le rythme de transformation de l’organisation ou la « pression mise sur les normes et la gouvernance, source de rigidité ».
Réussir les démarches d’agilité
La plupart des entreprises interrogées ont entrepris des actions en faveur de l’agilité. Néanmoins, celles-ci sont encore souvent réservées à des projets pilotes ou mis en place sur des périmètres limités. C’est le cas par exemple des méthodes agiles : d’une part, tous les projets ne sont pas de bons candidats à celles-ci, d’autre part, réussir leur adoption nécessite un haut niveau de maturité de l’entreprise.
Par ailleurs, le passage à un mode agile s’accompagne souvent d’une pression supplémentaire pour les équipes, dont il faut tenir compte. Sans cela, chercher à faire de ce fonctionnement la norme présente un risque de démotivation pour les équipes.
Plusieurs répondants s’accordent sur le fait que l’agilité ne doit pas se faire au détriment des « fondamentaux du système d’information » : fiabilité, sécurité, protection des données et conformité. Néanmoins, les politiques de gestion des risques informatiques, telles que mises en place dans de nombreuses organisations, peuvent être un frein à l’agilité. La gouvernance est ainsi source de « lourdeur dans les processus et les méthodes », tandis que « la sécurité est très contraignante.» Pour tenir compte de ces contraintes, plusieurs répondants cherchent à intégrer plus étroitement la sécurité aux processus, à travers des comités de validation des changements, la mise en place de règles strictes ou une implication plus large des spécialistes de la sécurité. L’identification des informations sensibles est également une étape primordiale.
Malgré ces initiatives, il arrive que des compromis soient nécessaires. L’enjeu est alors de « trouver le bon curseur », comme l’explique un répondant. Pour cela, la phase d’analyse du risque est importante.
Les facteurs clés de succès
Les facteurs clés de succès identifiés par les DSI sont de plusieurs ordres. Il faut tout d’abord respecter les différents prérequis techniques et organisationnels : urbanisation du système d’information, industrialisation des méthodes et des processus…
Viennent ensuite des facteurs liés aux collaborateurs. Comme l’affirme un DSI, « le principal facteur clé de succès reste l’humain : il faut faire adhérer tout le monde, parler d’une seule voix et partager les mêmes valeurs ». Dans ce contexte, disposer des bonnes compétences est primordial, que cela passe par la formation, le recrutement ou la mobilité interne. Il faut aussi s’assurer de leur disponibilité et accompagner le changement, sans oublier de nourrir la motivation des équipes par l’animation, la mise en place de démarches certifiantes…
Enfin, il faut développer la culture de l’agilité, « tant chez les équipes métiers que chez les équipes informatiques ». Celle-ci passe par notamment par la capacité à anticiper et les approches itératives.
- Un autre pan important pour réussir est le soin apporté à la relation client. Celui-ci passe par différents aspects :
- la communication auprès des métiers et de la direction générale ;
- le fait de montrer des résultats ;
- un travail sur la crédibilité et la transparence ;
- de nouveaux modes de relation avec les métiers, la DSI devenant un partenaire privilégié plutôt qu’un fournisseur ;
- une responsabilisation des clients.
Enfin, la gouvernance figure elle aussi dans la liste des facteurs clés de succès. Il faut parfois la refondre, mais il faut surtout l’intégrer aux décisions sur l’agilité, afin de rester vigilant sur les principes et les politiques mis en place.