Le contrat dans le cadre d’un appel d’offre

L’objet de cet article n’est pas de proposer un contrat type, mais de faire le point sur quelques clauses clés particulièrement importantes dans les contrats informatiques, qu’il s’agisse de projets ou bien de prestations, en particulier en cas d’externalisation.

Ces clauses sont présentées ci-après, sans aucun ordre particulier. N’oubliez pas que si votre appel d’offre a été bien fait, vous avez déjà une grande partie de ces clauses qui ont été validées dès la réponse. Cela n’empêche pas d’en discuter et d’en renégocier certaines, mais dans ces cas-là, ne lâchez rien sans avoir obtenu des contreparties.

Le préambule

Le préambule est essentiel. C’est lui qui détermine le contexte et établit les responsabilités.

On doit y trouver, en particulier et de façon synthétique, les éléments suivants :

  • Le rappel des enjeux stratégiques du projet pour le client.
  • Le fait que, comme le client « n’y connaît rien », il a eu recours à un appel d’offre auprès des meilleurs experts du marché.
  • Que dans ce contexte, la société Y a marqué son vif intérêt, en indiquant par écrit vouloir répondre et par la présence de membres de sa direction générale aux présentations des (date 1, date 2, etc).
  • Que la société Y reconnait avoir eu toutes les facilités pour comprendre le contexte et les buts à atteindre, en particulier par un accès aisé à l’équipe projet et la fourniture de nombreux éléments additionnels, au-delà du cahier des charges.
  • Que la société Y a affirmé être un expert du domaine, que cela est attesté par les références fournies, et qu’en conséquence elle est parfaitement consciente des risques inhérents à la nature de l’opération visée et sait parfaitement les gérer.
  • Qu’à l’issue de X mois de procédure d’appel d’offre, la société Y a été sélectionnée et qu’elle a, à nouveau, marqué son très vif intérêt pour le projet.
  • Que la société Y reconnaît que ce projet et la référence du client sont stratégiques pour elle et qu’en conséquence elle mettra tout en œuvre pour en garantir le succès.
  • Que la société Y a compris qu’au-delà de son rôle de maître d’œuvre, sa capacité à exercer son devoir de conseil a été déterminante dans le choix du client.
  • Que la société Y s’engage à mobiliser ses meilleurs experts dans le monde en cas de difficulté.
    Si déjà un préambule de ce type pose problème, il convient de poser le stylo et d’appeler le fournisseur n°2, votre MESORE (Meilleure Solution de Rechange)…

La priorité des documents

La priorité des documents est la suivante :

  • Le contrat
  • Les annexes
  • Le cahier des charges
  • La proposition

Vous maîtrisez le cahier des charges, le fournisseur maîtrise son offre. Donc, logiquement, vous voudrez que le cahier des charges prime sur l’offre et le fournisseur voudra le contraire. C’est souvent un point sur lequel il faut céder, mais pas sans obtenir une contrepartie.

Les audits

Quatre types d’audits sont à prévoir. Bien qu’il s’agisse d’audits de plus en plus contraignants, ils doivent être indépendants les uns des autres.

Si la situation se dégrade très vite, ou que vous avez été tardif à tirer la sonnette d’alarme, déclenchez directement l’audit de niveau 3 ou 4, sans passer par les audits de niveaux 1 et 2. Ce mécanisme est aussi utile en interne, afin de réguler les tempéraments belliqueux : si on vous demande d’utiliser « l’arme nucléaire de niveau 4 », il est préférable de suggérer de réaliser d’abord un audit de niveau 2 ou 3, au motif que le fournisseur n’a jamais émis d’alerte officielle et qu’il faut se réserver une dernière cartouche si nécessaire.

Niveau 1 : audit interne standard
Il s’agit d’un audit annuel, récurrent, faisant partie du plan d’assurance qualité, réalisé par les équipes internes, mais indépendantes du fournisseur, et dont les résultats sont communiqués et expliqués (ainsi que les plans d’action en résultant). L’audit de niveau 1, régulier et automatique, est là en tant qu’alerte si tout ne se passe pas comme prévu.

Beaucoup affirmeront que cet audit de niveau 1 ne sert à rien. Peut-être, mais si le fournisseur ne satisfait pas spontanément et naturellement à cette obligation contractuelle et/ou si les résultats sont sans intérêt, c’est une alerte essentielle pour vous. Et l’occasion de rappeler, par écrit, à quel point vous êtes déçu du peu de sérieux et de l’absence de respect d’exigences contractuelles de base et sans réel impact.

En cas de dégradation de la situation, vous aurez ainsi déjà un élément au dossier. Comme cet audit fait partie du contrat (du plan d’assurance qualité), il est à la charge du fournisseur.

Niveau 2 : audit interne sur demande
Le principe est le même que pour l’audit de niveau 1 : il s’agit d’un audit effectué par une équipe interne et indépendante du fournisseur, mais à votre demande et selon une feuille de route que vous fournissez. Le coût de cet audit est supporté par le fournisseur. Si vous estimez que la facturation est fantaisiste ou que vous avez des doutes sur les indicateurs, cet audit de niveau 2 est adapté.

Niveau 3 : audit externe fait à votre demande et réalisé par une société tierce indépendante
Lorsque la situation est plus grave et que vous avez des doutes sur l’objectivité et les compétences internes de l’équipe d’audit du fournisseur, vous souhaitez un audit externe. Mais vous ne voulez pas activer « l’arme nucléaire ». Dans ce cas, l’astuce réside dans le fait que c’est le fournisseur qui choisit le prestataire externe et que c’est lui qui en supporte les coûts.

De façon à sécuriser la situation, la liste des prestataires externes susceptibles d’être appelés en cas d’audit fait l’objet d’une annexe au contrat : vous en choisissez quatre et le fournisseur en choisit quatre. Cette annexe peut être revue une fois par an (pour les auditeurs choisis par chacune des parties) sur demande.

Niveau 4 : audit externe fait par une société choisie par vous
Le prestataire qui réalise l’audit est choisi dans la liste annexée au contrat et financé par vous. Dans ce cas, vous activez « l’arme nucléaire »… et il n’y a plus rien après !

Pour les audits, il convient de prévoir deux autres éléments :

  • Le nombre de jours maximum non facturés que le fournisseur doit passer annuellement en cas d’audit, par exemple : 40 jours/homme dus au titre des audit et non facturables. Les jours au-delà étant facturés à raison de X euros/jour. Mettez un taux unique indépendant des profils mobilisés et exigez alors une feuille de temps détaillée.
  • L’active participation du fournisseur pour les audits que vous auriez à subir (audit interne de votre maison mère, audit des CAC, etc).

Les indicateurs

Il en existe plusieurs types :

  • Les indicateurs qui peuvent donner lieu à pénalités.
  • Les indicateurs informatifs, sans conséquence contractuelle.

Indicateurs de disponibilité des serveurs : deux leurres

  • Un indicateur relatif à la disponibilité d’un serveur était conçu sur le principe que si on « pingait » le serveur et qu’il répondait, alors il était disponible. Problème : le serveur répondait au ping, mais ne faisait rien d’autre.
  • Un fournisseur affirmait qu’un serveur fonctionnait, alors qu’il n’acceptait qu’une connexion, la première qui se présentait, à la place des milliers qu’il était censé pouvoir prendre en compte.

Comment éviter que les indicateurs ne tombent en panne

Dès qu’ils deviennent gênants, les indicateurs « tombent en panne » ou ne sont plus mesurables. Pour éviter cette situation, deux clauses doivent être intégrées dans le contrat :

  • Le fournisseur est responsable de la production et de la mesure des indicateurs, y compris de la mise en place des moyens nécessaires. Cela est inclus en intégralité dans le contrat et ne peut donner lieu à aucune facturation supplémentaire.
  • En cas de non production des indicateurs, c’est la valeur la plus mauvaise possible qui sera retenue par défaut.

Généralement, ces deux clauses font réfléchir les four­nisseurs.


Les tableaux de bord

Le tableau de bord doit servir à piloter. En fonction des différentes étapes du projet ou des phases de la prestation, on n’a pas besoin des mêmes indicateurs. Il faut donc définir deux parties dans un tableau de bord :

  • Une partie « dure », immuable, comportant quelques indicateurs « régaliens » et les éléments de facturation.
  • Une partie « molle », relative aux opérations en cours, par exemple : nombre de spécifications créées/décrites/validées, nombre de demandes de changements, nombre de sites déployés, nombre de bugs par catégories…

La partie dure est contractuelle, la partie molle est spécifiable et modifiable à volonté par le client, due par le fournisseur, mais ne donne pas lieu à pénalités ou clause de terminaison. Et même dans ce cas, les conseils sur les indicateurs restent valables. Rappelons qu’un tableau de bord dont tous les indicateurs sont toujours au vert ne sert à rien. Un tableau de bord n’a d’intérêt, pour le client comme pour le fournisseur, que s’il y a des indicateurs qui posent question et permettent de mettre en place des plans d’amélioration. Il faut notamment éviter d’élaborer des tableaux de bord « pastèques » : il est vert dehors mais rouge dedans et avec plein de points noirs…

La facturation

Pour ne pas avoir de problèmes de facturation, quelques règles simples sont à retenir :

  • Annexer un modèle de la facture.
  • Instituer un comité de facturation au cours duquel on vous présente et on vous commente la facture qui va être émise.

Tout le monde est gagnant :

  • Vous, car vous connaissez et comprenez la facture qui arrive.
  • Le fournisseur, car ses factures sont validées et donc payées rapidement.

La clause de « terminaison »

Le contrat doit pouvoir se terminer et il y a sept raisons pour lesquelles un contrat peut se finir. Il est utile que ces sept raisons soient inscrites au contrat… et donc négociées en amont, avant la signature.

  • Fin naturelle du contrat. Il était prévu pour un projet et le projet est fini. Il était prévu pour une prestation de quatre ans et ce délai est écoulé. Le contrat est terminé et tout va bien…
  • Hardship. La clause de hardship permet d’ouvrir une négociation si un événement externe venait à modifier, de façon extraordinaire, l’équilibre économique d’un contrat. Cette clause est souvent réclamée par les fournisseurs dans les contrats d’externalisation qui s’étendent sur plusieurs années et mobilisent des ressources offshore. Imaginons que le pays où se trouve le centre de services ferme ses frontières ou triple ses charges sociales. À l’évidence, l’équilibre économique du contrat serait rompu et, faute d’un nouvel accord, il conviendrait de mettre fin au contrat.
  • Terminaison pour faute. Le fournisseur a commis une faute irréparable, par exemple :
    ~ Des informations confidentielles ont fuité.
    ~ Un virus, qui a été normalement bloqué sur vos infrastructures, s’est introduit via des postes de travail
    du fournisseur.
    ~ Le nom de votre société a été utilisé en tant que référence alors que cela n’était pas autorisé.
    ~ Une législation nationale ou supra-nationale n’a pas été respectée.
    ~ L’adhésion à vos valeurs d’entreprise n’a visiblement pas été respectée.
    ~ …
  • Terminaison pour défaut de performance. Des indicateurs sont dans le rouge trois fois de suite ? Les plans d’action de redressement ne sont pas tenus ? Tous ces éléments doivent permettre de dénoncer le contrat. Il convient également de prévoir la terminaison pour non-conformité chronique, par exemple lorsque le fournisseur se débrouille pour éviter les cas évidents de résiliation du contrat, mais organise une « cavalerie des indicateurs » qui sont, tour à tour, dans le rouge, mais jamais suffisamment sur un indicateur donné pour permettre de dénoncer le contrat. Dans ces cas, et même pour des défauts qui, pris un à un, peuvent paraître anodins, il faut pouvoir dénoncer le contrat.
  • Terminaison pendant la phase de transition. Le fournisseur n’est pas capable de réaliser la transition entrante et vous refusez d’en signer le PV. À l’évidence, le contrat doit se terminer.
  • Terminaison pour convenance. Finalement vous avez changé d’avis, votre nouveau président ne souscrit pas au projet ou à la stratégie. Dans ce cas, il faut pouvoir mettre fin au contrat de façon prématurée, pour convenance. Le fournisseur doit naturellement être indemnisé. Le fait de prévoir cette clause dans le contrat fait que l’on négocie également le montant de l’indemnité avant de signer le contrat, ce qui est, à l’évidence, bien plus facile.
  • Terminaison pour changement de contrôle. Imaginez que votre fournisseur soit racheté par votre plus féroce concurrent, et que vous ne puissiez mettre fin au contrat. Alors, combien de temps votre tête restera-t-elle attachée ? C’est pourquoi il faut prévoir qu’en cas de changement de contrôle, vous puissiez sortir du contrat sans avoir à vous justifier. Le fournisseur vous réclamera une indemnité de sortie, vraisemblablement la même que celle prévue dans la sortie pour convenance. Il faut vous y opposer fermement. Vous n’y êtes pour rien dans le changement de contrôle. Et le fait de ne rien payer dans le cas d’une sortie pour changement de contrôle trouve son pendant dans le fait que vous autorisiez la clause de hardship qui est, elle, en faveur du fournisseur. On remarquera que la survenance de la clause de hardship est bien moins probable que celle d’un changement de contrôle.

Le devoir d’information et de conseil

Dans le contrat, il faut mentionner l’obligation qu’a le fournisseur de vous informer clairement, de vous apporter un conseil avisé sur les risques ou les limites encourus au long de la vie du contrat. De même, ne manquez pas de souligner, dans cette clause, que le fournisseur a mis en avant son continuum de service et ses équipes de conseil…

L’obligation de coopération et de coordination

Cette obligation de coopération doit figurer au contrat, être étendue à la coopération et, dans certains cas, à la coordination des tiers. Cette précaution s’avère utile, par exemple dans le scénario suivant : votre infrastructure est hébergée dans le cloud d’un grand prestataire du marché, vos serveurs sont administrés par un fournisseur spécialisé qui a toute votre confiance, mais quand l’intégrateur de votre projet procède aux tests finaux, c’est la catastrophe ! Rien ne fonctionne et le match de ping-pong commence pour savoir qui est responsable de la situation…

Épargnez-vous d’avoir à jouer les arbitres. Déterminez à l’avance que votre intégrateur, qui a durement gagné votre appel d’offre, est responsable, non seulement de coopérer (par exemple avec des auditeurs), mais aussi de coordonner toutes les ressources nécessaires à la bonne résolution du problème.

Certes, il peut refuser, mais restez libre de le lui demander. Il va sans dire que l’obligation de coordination vaut aussi pour vos entités internes… Vous pouvez utilement rédiger une charte de collaboration et la faire signer par tous vos fournisseurs.

La clause de benchmark

La clause de benchmark est essentiellement réclamée dans le cas de prestations pluriannuelles, typiquement pour les contrats d’externalisation. Le principe est simple : disposer d’un moyen de vérifier que le prix payé correspond au prix du marché. Elle reste très rarement utilisée, mais fait le bonheur des cabinets de conseil pour la spécifier.

La clause de benchmark repose sur plusieurs principes :

  • Vous pouvez déclencher la clause de benchmark à tout moment et sans avoir à vous justifier. En général, on limite cette possibilité à une fois par an.
  • Il est bon d’annexer au contrat la liste des sociétés habilitées à réaliser le benchmark. Cette liste peut être constituée pour moitié par le fournisseur et pour moitié par vous. Elle peut être révisée annuellement, ce qui est nécessaire notamment dans le cas de fusion/acquisition chez les prestataires retenus.
  • Le benchmark est payé par le client, mais le fournisseur doit participer.
  • Les résultats du benchmark doivent être présentés au fournisseur. Si celui-ci rejette les résultats, il peut initier, sous deux semaines et à ses frais, un nouveau benchmark, toujours avec un prestataire dans la liste des prestataires agrés.
  • Si les résultats entre les deux benchmarks diffèrent de moins de 10 %, alors les résultats du premier benchmark (lancé par le client) sont réputés validés. Si les résultats diffèrent de plus de 10 %, alors il faut nommer un expert et/ou déclencher une procédure de conciliation
  • Le benchmark doit se dérouler dans un temps court, par exemple deux mois.
  • Si les coûts du marché mis en exergue par le benchmark sont supérieurs de 10 % aux coûts pratiqués, alors le fournisseur doit avoir la possibilité de réviser ses tarifs. Sinon, il faut pouvoir dénoncer la partie du contrat jugée en dehors du marché, sans indemnités.
  • Les seuils de renégociation peuvent varier en fonction du nombre d’années restant à courir.

Les pénalités : jouer la dissuasion

Les pénalités n’ont d’intérêt que si elles sont réellement significatives. Donc, à moins de 15 % de la facturation globale du mois, elles ne sont pas dissuasives. C’est toutefois un point de négociation important, au motif que si le fournisseur est certain de réussir en étant performant en permanence, alors il n’a aucun risque à accepter des pénalités. Réciproquement, si le fournisseur n’accepte que des pénalités de 1% de la facturation du lot incriminé pour le mois en cours, cela ne doit pas vous inciter à penser qu’il fera tout ce qui est en son pouvoir pour délivrer la prestation attendue.

Contractuellement il doit être clair que les pénalités ne sont pas liées aux conditions de résiliation et ne constituent pas la réparation d’un préjudice, car si préjudice il y a, vous devez conserver toutes les possibilités d’attaquer le fournisseur en dommages et intérêts. Les pénalités peuvent être en numéraire ou bien en avoir à valoir sur des prestations (par exemple : 10K euros ou un avoir de 20 jours/homme). Si une pénalité s’applique, elle doit être automatiquement et spontanément déduite de la prochaine facture. Pour motiver le fournisseur, il est possible d’inscrire cette condition dans les cas de résolution pour faute.

Les bonus : pas toujours utiles…

En général, lorsque l’on négocie des pénalités, le fournisseur veut négocier un bonus en contrepartie. Attention, ce principe ne vous apportera rien :

  • La pénalité est une sanction pour de la non qualité ou pour une faute.
  • Le contrat spécifie ce que vous achetez et son prix. Ce contrat définit le niveau de qualité dont vous avez besoin. Ainsi, la sur-qualité n’a aucun intérêt pour vous.
    Il y a pourtant deux cas pour lesquels un bonus peut être justifié et servir vos intérêts :
  • Vous avez un objectif impératif, et très ambitieux, de livraison. Dans ce cas, un bonus peut aider à motiver les équipes, pour autant qu’il soit attribué aux collaborateurs concernés et soit d’un montant significatif.
  • Vous êtes dans le cas d’une prestation récurrente (par exemple une tierce maintenance applicative externalisée) et vous voulez pouvoir motiver votre fournisseur sur des objectifs particuliers qui n’apparaissent pas dans le contrat, par exemple : une opération exceptionnelle, un carve out ou une acquisition…

La gestion des personnels

  • La formation
    Le prestataire doit s’engager sur des obligations traçables en matière de formation pour les personnels affectés au contrat ou à la prestation. Il est bon d’avoir un indicateur en terme de nombre de jours global annuel et de nombre de jours médian par personne affectée à plein temps.
  • Les personnels clés
    Une liste de personnes clés doit être maintenue à jour mensuellement. Chacune de ces personne clé doit avoir un backup et plus de 50 % de ces backups ne doivent pas être déjà affectés au projet objet du contrat. Une personne ne peut pas avoir plus de deux rôles (rôle principal + backup sur un autre rôle ou deux rôles de backup). De même, un titulaire et son backup ne peuvent pas être absents en même temps (congés, formation, maladie). Le backup doit assister au comité de pilotage avec le titulaire une fois sur trois. Au-delà de la notion de backup, destinée à faire face à l’urgence, chaque personne clé doit avoir un plan de succession confidentiel, mais qui sera revu une à deux fois par an avec l’entreprise cliente. Le fournisseur risque de ne pas apprécier ces clauses et de clamer qu’il s’agit d’une ingérence inacceptable. En fait, il ne s’agit, de votre part, que de garantir une saine gestion des risques, profitable aux deux parties et n’entraînant pas de coûts supplémentaires.
  • La démission ou l’éloignement
    Toute démission ou tout éloignement doit être porté à votre connaissance sous un délai de deux semaines.

La sous-traitance : un accord écrit

La sous-traitance (personne physique ou morale) n’est possible qu’après autorisation écrite de votre part. Une liste des personnes prenant part à la prestation, et n’étant pas des employés directs du fournisseur, doit être tenue à jour mensuellement et consultable à tout moment.

Le changement de contrôle (chez vous)

De même que nous avons prévu une clause visant à vous protéger, prévoyez-en une qui vous protège en cas de changement de contrôle de votre côté, en particulier sur le fait que la prestation doit se poursuivre et que cela ne remet pas en cause le contrat. Vous pouvez aussi prévoir que la prestation pourra être étendue, à votre demande, à l’ensemble du groupe qui vous rachète dans les mêmes conditions de coûts, de qualité, et d’engagement contractuel. Si, en revanche, vous voulez sortir du contrat du fait d’un changement de contrôle de votre côté, il sera difficile de négocier autre chose que la seule application de la clause de sortie pour convenance.

La cession d’une activité (chez vous)

Imaginons qu’une de vos divisions, qui se trouve dans le périmètre du contrat, fasse l’objet d’un carve out. Il faut intégrer une clause qui prévoit que :

  • Soit la prestation concernant cette division s’interrompt, il faut alors étudier les éventuels impacts sur des seuils qui vous engageraient.
  • Soit la prestation reste dûe dans les mêmes conditions, moyennant un avenant ou, selon les cas, un nouveau contrat.

Le respect des législations en cours et à venir

Il convient d’inclure une clause prévoyant que le fournisseur doit respecter les législations nationales des pays où la prestation s’opère. Cette clause peut être étendue aux législations supranationales (attention à l’imagination de nos commissaires européens…). Cette clause doit s’appliquer durant toute la vie du contrat. Il peut y avoir des cas particuliers où l’on veut que le contrat (projet ou prestation) soit compatible avec une clause qui ne sera applicable qu’une fois le contrat terminé. C’est un cas compliqué qui nécessite une rédaction ad-hoc, par exemple avec des règlements tels que le RGPD (Règlement Général européen sur la Protection des Données personnelles).

La réversibilité

  • Quelle définition ?
    La réversibilité se définit comme le fait de reprendre en interne une prestation qui était externalisée. La portabilité se définit comme le fait de transférer une prestation d’un fournisseur à un autre. Ces opérations doivent être possibles sur tout ou partie du contrat, par exemple :
    • Un lot est terminé pour faute ou convenance.
    • Le contrat est arrivé à son terme et est prolongé, mais sur un périmètre plus réduit.
    • Le fournisseur cède une partie de son activité et vous décidez de ne pas maintenir votre confiance au repreneur.
    Les opérations de réversibilité mobilisant les ressources opérationnelles du fournisseur, il est fréquent qu’il y ait la négociation suivante :
    • La réversibilité s’opère, mais les niveaux de service et les obligations de performance sont maintenus : dans ce cas, il y a en général un surcoût pour le client.
    • Au contraire, on accepte une baisse convenue des niveaux de service et alors la réversibilité se fait sans surcoût.
    Il est de votre intérêt de prévoir les deux options dans le contrat, mais de décider le moment venu laquelle des deux vous voulez appliquer.
  • Le plan de réversibilité
    Il est utile de développer un plan de réversibilité à l’image d’un plan qualité. Le plan de réversibilité définit plusieurs éléments :
    • La démarche, les étapes et les livrables de la réversibilité.
    • Les prérequis, c’est-à-dire des éléments (documentations, livrables, procédures) qui doivent être présents et à jour à tous moments, afin de rendre la réversibilité possible.
    • Des obligations (rémunérées) d’assistance administrative et technique pendant une certaine période (en général entre six et douze mois), une fois la réversibilité terminée.
    • Les procédures d’audit et la vérification du plan de réversibilité.
    • Le déroulement des tests de réversibilité à mener une fois par an.

Les références et publicité : négociez une contrepartie

Interdisez explicitement toute mention ou référence relative à votre projet ou au nom de votre société sans un accord écrit de votre part. D’une part, un manquement à cette clause serait de nature à permettre la dénonciation du contrat pour faute, vous apportant par la même occasion un argument essentiel pour une négociation. D’autre part, si le fournisseur vous en fait la demande et que vous n’avez pas de raison de refuser, alors ne manquez pas l’occasion qui se présente de troquer la faveur que vous faites au fournisseur, qui utilisera le nom de votre entreprise à des fins commerciales, contre un avantage à votre profit…

Les risques de pandémie et de terrorisme

Prévoyez une clause en cas de pandémie, en particulier si vous avez des prestations offshore. De même, prévoyez une clause en cas d’acte de terrorisme. Selon la gravité on peut décider :

  • Que cela ne change rien.
  • Que l’on passe en « best effort » pour une période donnée.
  • Que l’on suspend le contrat le temps d’y voir plus clair.

Les idées à retenir

  • Soignez le préambule, retracez-y l’historique de l’appel d’offre, soulignez l’intérêt renouvelé que le fournisseur a montré, présentez-le comme un professionnel expert à qui vous vous en remettez pour mener votre projet.
  • Si possible, essayez d’imposer que le cahier des charges soit prioritaire sur la proposition.
  • Prévoyez plusieurs types d’audit et utilisez-les avant qu’il ne soit trop tard.
  • Évitez les indicateurs pastèques qui ne servent à rien (verts dehors, mais rouges dedans et pleins de points noirs).
  • Élaborez des tableaux de bord qui évoluent en fonction de vos priorités métiers.
  • Prévoyez tous les cas possibles de fin de contrat, y compris le changement de contrôle (de votre côté aussi bien que du côté du fournisseur), n’oubliez pas la sortie pour convenance.
  • Exigez une personne nommée en backup pour toute personne clé dans le dispositif.
  • Dans les opérations d’externalisation, prévoyez un plan de réversibilité et testez-le.

Cet article a été rédigé par Pierre-Albert Carlier, consultant en systèmes d’information, DSI de transition et fondateur de MonCIO (moncio.com).