Les activités opérationnelles sont stratégiques pour la performance des entreprises. La capacité à répondre rapidement et de manière pertinente aux besoins des clients est un facteur de succès dans un environnement toujours plus compétitif. Des systèmes intelligents, non intrusifs, capables de traiter rapidement des flux d’informations sans cesse croissants, sont essentiels pour améliorer l’efficience opérationnelle.
L’agilité business et le « time to market » sont devenus en 2011 les premières priorités des dirigeants d’entreprises, selon l’enquête menée par CIOnet* auprès de 375 entreprises au niveau mondial. L’année précédente, ces exigences ne figuraient qu’à la troisième place, derrière la réduction des coûts et le management des processus. Assiste-t-on à un changement durable de posture de la part des directions générales ? Probablement dans la mesure où les technologies de l’information permettent de gagner un temps considérable dans la production et la distribution de biens et de services.
Au fur et à mesure que des services sont dématérialisés, des tâches automatisées, des processus outillés, la chaîne de valeur qui relie les entreprises aux consommateurs devient de plus en plus immatérielle, avec une accélération de la circulation des flux d’informations numériques. On l’observe dans de nombreux secteurs. Ainsi, l’activation d’une ligne téléphonique s’effectue désormais en moins d’une minute, alors que ce processus pouvait durer auparavant trois jours.
De même, la mise à jour d’un stock de produits se réalise en moins d’une seconde contre une semaine avec un processus non automatisé… Même le trading algorithmique s’accélère, les transactions s’effectuant désormais en 20 millisecondes contre 100 millisecondes précédemment. Cette accélération ne se limite pas aux secteurs les plus matures sur le plan technologique, toutes les entreprises sont concernées.
Dans de tels environnements concurrentiels et incertains, améliorer la performance opérationnelle impose, d’une part, de travailler sur l’efficacité des processus opérationnels, afin de les optimiser, de les accélérer et de réduire leur coût. D’autre part, il est essentiel d’améliorer la satisfaction des clients, par une recherche de qualité et d’innovation constantes. Tous les managers le savent, beaucoup d’économistes l’ont théorisé, de nombreuses études le montrent : les entreprises qui réussissent sont celles qui savent anticiper les attentes des consommateurs, proposer avant les autres des services innovants et offrir une vraie qualité de service, depuis la fourniture du produit jusqu’au support.
« Quasiment toute opération de l’activité de l’entreprise peut être analysée en temps réel avec des outils adaptés, c’est techniquement possible », assurent les analystes de Gartner, Roy Schulte, Janelle Hill et Nigel Rayner, auteurs d’une étude sur l’intelligence opérationnelle**. Ils estiment, eux aussi, que « les organisations qui disposent de capacités d’analyse en temps réel de leurs activités sont plus performantes que les autres. »
Le système d’information, levier privilégié de l’intelligence opérationnelle
Les systèmes d’information sont évidemment au cœur de cette transformation, en tant que leviers privilégiés pour améliorer l’efficacité opérationnelle, contribuant à réduire les coûts et à accroître la réactivité des métiers en industrialisant et en automatisant les processus. À ce titre, les DSI sont de plus en plus sollicités pour aider les organisations à répondre à ce double enjeu d’efficience et d’agilité.
Une analyse mondiale du cabinet Gartner, publiée début 2012 et réalisée auprès de 2 335 managers de systèmes d’information, confirme que les priorités métiers figurent en bonne place dans l’agenda des DSI : accélérer la croissance de l’entreprise, fidéliser les consommateurs, réduire les coûts, créer des nouveaux produits et services et améliorer l’efficience des processus.
Dans de nombreux secteurs, notamment la finance ou les télécommunications, les processus sont déjà bien outillés et les systèmes d’information sont depuis longtemps la clé de voûte des activités opérationnelles. Pour accroître la performance de cet existant, il ne s’agit donc plus simplement de faire toujours plus vite, en poussant l’automatisation à son maximum, ou de simplement réduire davantage les coûts : il faut désormais faire mieux, c’est-à-dire « (ré)-introduire de l’intelligence dans le traitement des opérations », comme l’évoquent les analystes de Gartner Roy Schulte et Bill Gassman, spécialisés dans le suivi des activités métiers (Business Activity Monitoring – BAM).
Comment faire ? L’intelligence opérationnelle, complémentaire des approches de type décisionnel ou de gestion de la performance, passe par trois paliers (voir schéma ci-dessous) :
- être capable de savoir ce qui se passe à tout instant afin de mesurer et restituer l’information ;
- prendre de meilleures décisions, plus rapidement, pour automatiser et aider la prise de décision ;
- mettre en place une démarche d’amélioration continue pour analyser et optimiser les processus.
Pour une organisation, entreprendre cette démarche est rarement simple, le premier écueil étant d’obtenir la visibilité nécessaire. En effet, les entreprises ont souvent une vision partielle ou morcelée de leurs processus : elles voient ce qui se passe à l’intérieur de leurs systèmes ERP ou CRM par exemple, mais les processus métiers sont de plus en plus éclatés, et ils s’étendent bien au-delà du système d’information de l’entreprise : la chaîne de valeur commence et s’achève avec le client, passant à travers plusieurs systèmes d’information et souvent plusieurs entreprises.
C’est par la mise en place d’un pilotage opérationnel adapté que les entreprises peuvent répondre à ces enjeux. Ce pilotage nécessite la mise en place d’un certain nombre de capacités, correspondant aux grandes étapes de la mise en place de l’intelligence opérationnelle.
Répondre aux besoins de visibilité
Si l’on considère la chaîne de valeur dans son intégralité, celle-ci est globale. Pour le client, la prise de commande, les opérations de traitement de sa commande et la livraison ne constituent qu’un seul et même un macroprocessus, là où il s’agira de trois processus distincts pour l’entreprise. Le consommateur n’est intéressé que par quelques étapes clés de cette chaîne, non par le détail des activités : sa satisfaction prime sur la connaissance des arcanes du back-office… Ces macroprocessus reposent sur le système d’information.
Par conséquent, ils sont mesurables, même si la tâche peut sembler complexe. Ils mêlent en effet progiciels et solutions « maison », applications internes et externes, technologies récentes et « legacy ». C’est dans cet existant, souvent très hétérogène, que l’information existe et qu’il faut la puiser.
Quel système de navigation pour les métiers ?
Pour savoir où en sont les processus opérationnels, il faut d’abord identifier leurs étapes clés. Ensuite, des capteurs placés aux endroits stratégiques permettront de collecter l’information nécessaire. C’est cette information, restituée aux opérationnels sous une forme adaptée, qui facilitera la prise de décision et permettra d’enclencher une dynamique d’amélioration continue.
De la même manière que les conducteurs sont aidés dans leur conduite par les systèmes GPS, les équipes opérationnelles disposeraient ainsi d’un système de navigation adapté à leur métier, pour reprendre la métaphore de la « Business Navigation », popularisée par les analystes d’IDC. Tout comme un GPS ne modifie pas le fonctionnement de la voiture dans laquelle il est installé, le système de pilotage métier ne doit pas impliquer d’installations ou de modifications qui perturberaient le fonctionnement des systèmes opérationnels.
Un système non intrusif
Il faut donc un système capable de s’appuyer sur cet existant, sans avoir à le modifier ni le remplacer. Ce caractère non intrusif est un critère de choix important. La solution doit également être rapide à déployer, le but étant de pouvoir apporter dans un délai court la visibilité qui fait défaut. Il faut qu’elle puisse s’intégrer à un environnement hétérogène, pour aller collecter des informations partout où c’est nécessaire. Enfin, la capacité à aller chercher des informations en dehors du système d’information de l’entreprise, comme un accusé de réception transmis par un transporteur, permet d’étendre encore la visibilité sur les processus, tant en amont qu’en aval.
Augmenter la rapidité des métiers : place au temps réel !
Pour aider les opérationnels dans la prise de décisions, il faut ensuite traiter ces données, afin de mettre à leur disposition une information directement exploitable, et ce au moment où ils en ont besoin. Bien souvent, cela implique de traiter des dizaines de milliers d’événements chaque jour, voire chaque minute, et à mesure que ces événements arrivent.
En termes de solutions, la logique opérationnelle n’est donc pas celle du décisionnel, qui stocke des données pour ensuite effectuer des analyses a posteriori sur une base historique, mais celle du temps réel : il s’agit d’analyser les événements « au fil de l’eau », pour leur donner rapidement sens et pouvoir y répondre à temps. Cet aspect prend de plus en plus d’ampleur à l’heure actuelle, où les entreprises sont confrontées à l’essor des big data : des volumes de données toujours plus importants, hétérogènes et créés en permanence.
Au niveau opérationnel, il existe plusieurs types de décisions : certaines nécessitent une action immédiate, comme le blocage d’une tentative de fraude dans une banque. D’autres demandent de pouvoir analyser la situation de manière approfondie avant d’agir, comme l’envoi de promotions personnalisées aux clients pour un groupe de grande distribution.
Certaines de ces décisions peuvent être automatisées, comme le passage d’ordres financiers. D’autres ont besoin, à un moment donné, d’une intervention humaine, comme le cas d’un conseiller qui décide d’appeler un client en train de se renseigner sur son contrat, afin de lui proposer une promotion.
Automatiser ce qui peut l’être
Ces différents cas de figure nécessitent la mise en place de solutions souples, capables aussi bien d’automatiser les actions simples que de permettre une analyse détaillée lorsque c’est nécessaire.
Pour alléger la charge des opérationnels, les systèmes de workflow sont fréquemment utilisés pour orchestrer des enchaînements d’activités. Ces workflows peuvent être complétés par un moteur de règles, qui permet d’automatiser certaines décisions. Les moteurs de règles ont pour avantage de pouvoir gérer des règles relativement complexes. En outre, celles-ci sont ainsi décrites et stockées séparément des processus métiers, ce qui permet aux entreprises de les réutiliser ailleurs.
Lorsque les situations deviennent trop complexes pour être automatisées, l’intelligence humaine entre en jeu. Il faut alors restituer l’information sous une forme adaptée aux contraintes des opérationnelles. Des rapports interactifs et dynamiques, mis à jour en temps réel, aident les responsables opérationnels à acquérir une vue globale de la situation, puis de descendre progressivement dans les détails, pour comprendre, par exemple, les origines d’un problème ou les spécificités d’un client. Ces analyses permettent également d’identifier des améliorations potentielles.
Tester les améliorations
Ces différents aspects répondent au besoin toujours plus grand d’efficience opérationnelle. Néanmoins, la recherche de performance passe aussi par la qualité et l’innovation, et celles-ci s’appuient sur l’amélioration continue.
Différentes fonctionnalités d’analyse s’avèrent pertinentes aux opérationnels pour mieux comprendre ce qui se passe afin d’améliorer les processus. Cependant, il peut être nécessaire aussi de tester les améliorations proposées, pour s’assurer que les gains attendus sont bien présents.
Par exemple, il est utile de pouvoir simuler des processus en définissant le temps passé sur chaque activité, le taux journalier moyen, etc. Ce type de fonctionnalité permettra d’évaluer l’efficacité des nouveaux processus. De la même façon, quand une règle métier est modifiée, il est intéressant de la tester au préalable sur les données historiques, afin de s’assurer qu’elle fonctionne.
Combinées, ces différentes fonctionnalités constituent une véritable tour de contrôle des activités opérationnelles : les responsables métiers disposent ainsi de la visibilité nécessaire pour prendre des décisions au bon moment. Ils peuvent réagir plus rapidement en cas d’imprévu, saisir des opportunités qu’ils ne voyaient pas auparavant, ou encore répondre de manière plus fine et personnalisée aux demandes des clients.
Décisionnel, gestion de la performance et intelligence opérationnelle : une réelle complémentarité | ||
Décisionnel, gestion de la performance | Intelligence opérationnelle | |
Objectif | Faciliter les décisions stratégiques et tactiques | Prendre des décisions immédiates basées sur des transactions individuelles |
Source des données | Retraitement de données issues des systèmes opérationnels (par exemple dans des cubes OLAP) | Données directement issues des systèmes opérationnels ou de capteurs |
Fraîcheur de données | Quelques heures, jours, semaines ou mois | Moins de quinze minutes |
Cible | Managers | Collaborateurs en contact avec les clients |
Source : Gartner. |