De l’intérêt de professionnaliser la gestion de projets

La gestion de projets a tout à gagner à se professionnaliser et s’industrialiser. Les exemples de Mercedes Financial Services et du conseil général du Pas-de-Calais.

Conseil général du Pas-de-Calais : une réduction de 30 % des demandes de projets

Le conseil général du Pas-de-Calais a créé en 2005 un service d’assistance à maîtrise d’ouvrage, en parallèle du lancement d’un schéma directeur informatique et d’une démarche de contractualisation avec les quarante-cinq EPCI (établissements publics de coopération intercommunale). « Cette démarche s’est également inscrite dans une nouvelle impulsion politique, avec un projet départemental stratégique et une volonté de développer les services de proximité », rappelle Christophe Cousin, responsable assistance maîtrise d’ouvrage au conseil général du Pas-de-Calais.

Objectif, avec la mise en œuvre du service d’assistance à maîtrise d’ouvrage : « Se doter d’une solution collaborative de gestion de portefeuille de projets, partagée par tous, précise Christophe Cousin. Avec trois fonctionnalités indispensables. D’abord, professionnaliser la démarche de gestion de projet impulsée par le service assistance à maîtrise d’ouvrage (démarches, méthodes et outils), ensuite, assurer la gouvernance (interne/externe) du projet politique départemental et, enfin, faciliter le processus d’arbitrage et de suivi des projets SI, puis des opérations de contractualisation. »

La mise en œuvre d’un outil de gestion de portefeuille de projets, la solution de Planview, s’est traduite par plusieurs bénéfices : « L’ensemble des acteurs s’est approprié l’outil et l’on observe une avancée significative vers une culture commune de gestion de projet, ainsi qu’un plus grand partage de l’information entre les services et les directions métiers », résume Christophe Cousin.

Par rapport au schéma directeur, ce dernier estime qu’il y a une « meilleure objectivation de la phase d’arbitrage des demandes, avec une optimisation budgétaire, une amélioration des prévisions de charges et de l’affectation des ressources ». En termes de contractualisation, les contrats sont suivis à partir des données saisies dans Planview, notamment pour les aspects techniques, administratifs et financiers. « Nous disposons de plus de trois mille fiches d’opérations », précise Christophe Cousin.


Les cinq conditions de réussite d’une démarche de gestion de portefeuille de projets

  1. Expérimenter les processus de gestion de projet et les méthodes de travail avant l’acquisition de l’outil
  2. Bien connaître son besoin (fonctionnalités, périmè­tres, acteurs…) et valider son adéquation avec la solution
  3. Faire parrainer le projet au plus haut niveau afin de faciliter son appropriation par le plus grand nombre
  4. Déployer progressivement la solution en passant par des portefeuilles «pilotes»
  5. Disposer d’une structure projet (PMO) assurant sa mise en œuvre et le support (administration de l’outil, gestion des évo­lutions, formations, développement des tableaux des bord…)

L’implémentation d’un outil de gestion de portefeuille de projets peut toutefois se heurter à des environnements dans lesquels la culture projet est peu développée. « C’est effectivement l’une des difficultés à gérer, convient Christophe Cousin. Cela suppose une démarche pédagogique et nous avons associé les maîtrises d’ouvrage au choix de la solution. »

Par ailleurs, dans le cadre du schéma directeur, chaque pôle métier dispose d’un référent : « Nous les réunissons trois fois par an pour faire le point sur les projets en cours et identifier leurs nouveaux besoins. Ils arbitrent en fonction de notre capacité à délivrer les projets, c’est une vraie révolution par rapport au « mode guichet ». »Le nombre de demandes de projets a été réduit de 30 %, « avec essentiellement la suppression des demandes de confort », précise Christophe Cousin.

Mercedes-Benz Financial services : de l’utilité d’un comité projet

La démarche de gestion de portefeuille de projets engagée par Mercedes-Benz Financial Services répondait à plusieurs besoins, exprimés sous forme de questions, proposées par Laurent Mopin, le DSI de Mercedes-Benz Financial Services, au cours de son intervention lors du DSI Symposium organisé par IDC France le 22 novembre 2011 : « Comment fiabiliser la gestion de nos projets ? Comment définir nos priorités ? Quelle gouvernance adopter pour faciliter la compréhension mutuelle de tous les partenaires ? Comment gérer les frustrations des utilisateurs métiers engendrées par la « lenteur apparente » de l’entreprise ? » Cette série de questions est née de quelques constats : « Les directions métiers sont des spécialistes de… leur métier.

La vision transverse et l’approche processus sont peu développés. Nous (IT et Business) ne nous comprenons pas. » Et Laurent Mopin estime que, bien que la DSI intervienne en transversal pour tous les métiers, « les savoir-faire liés à la conduite de projet sont rares dans les direction métiers dans la mesure où les opérationnels sont là pour faire de l’opérationnel ».

Face à ces constats, la réponse à ces questions a consisté à mettre en place au milieu des années 2000 un PMO (Project Management Office), directement rattaché à la direction générale, ce qui permet de respecter au moins cinq principes : élaborer un processus collégial et structuré, obtenir un portefeuille complet et avec un ordre de priorités clairement défini, établir une charte projet pour initier toute demande, disposer d’une vision synthétique de la feuille route et d’un suivi méthodologique des projets.

Le processus est géré à travers un comité projet. « Il nous fallait un organe de discussion et le comité projet constitue un point de rencontre pour suivre l’avancement des demandes et des projets en lien avec la stratégie de l’entreprise », précise Laurent Mopin.

Le comité projet a plusieurs missions principales : suivre l’avancée du portefeuille des demandes, valider les demandes de nouveaux projets, suivre les projets et les réalisations en cours sur la base de rapportsd’avancement et, enfin, informer le Comex de l’avancement des demandes, projets et réalisations. « Le comité projet, dans lequel chaque direction du Comex est représentée, est une nécessité pour suivre la feuille de route des projets car, en effet, même si l’on est bien organisé avec des parties prenantes sensibilisées, les projets ont par définition des conséquences opérationnelles et accusent des retards », poursuit Laurent Mopin.

Le comité se réunit tous les quinze jours pour le suivi et la validation des demandes, et une fois par mois pour le suivi des projets et réalisations en cours. « Nous disposons donc d’une connaissance fine des plannings, de qui fait quoi et quelles sont les directions métiers qui sont concernées », explique Laurent Mopin. Il importe toutefois de bien expliquer pourquoi tel projet est sélectionné et plus efficace que tel autre, « sachant que les projets retoqués peuvent être représentés ultérieurement », précise Laurent Mopin.

Pour ce dernier, la mise en place d’un PMO a abouti à une « gestion plus efficace des ressources, à une culture projet en forte amélioration, à une vision partagée des enjeux et des contraintes, à des arbitrages en commun, donc plus transparents ». Le DSI de Mercedes-Benz Financial Services estime que le PMO positionne la DSI en dehors des aspects strictement techniques, avec un portefeuille complet avec des priorités définies. « Toutes les initiatives doivent être qualifiées pour identifier les enjeux, ce que cela apporte à l’entreprise, quels sont les plannings et ce qui est attendu, précise Laurent Mopin. Comme tout le monde sait ce qui a été décidé, cela diminue considérablement les débats inutiles, et évite d’avoir à gérer des demandes résumées dans des e-mails de quelques lignes… »


Les principales fonctionnalités d’un outil de gestion de portefeuille de projets

Processus d’éligibilité au portefeuille

  • analyse des coûts, des charges et des délais ;
  • gestion des priorités des demandes ;
  • analyse de valeur ;
  • définition et suivi des principes directeurs de la gestion de projets…

Processus de suivi de projet :

  • animation des instances de suivi de projet ;
  • suivi des risques et des actions ;
  • reporting et tableaux de bord ;
  • planification et suivi des charges ;
  • gestion documentaire partagée ;
  • gestion financière…

Source : Conseil général du Pas-de-Calais.


Les principaux écueils à éviter

  • Ne pas disposer d’une vraie délégation du Comex
  • Ne pas définir le niveau adéquat des participants au comité projets
  • Oublier de communiquer au-delà du comité projets
  • Tomber dans le micro-management (notamment en matière de gestion des ressources)
  • Ne pas expliquer pourquoi certains projets sont réalisés alors que d’autres ne le sont pas
  • Laisser place à des discussions et des débats une fois que les décisions sont prises
  • Ne pas vérifier la disponibilité des ressources

Source : Mercedes-Benz Financial Services.