Pilotage et alignement du SI à l’université de Genève

Le pilotage et l’alignement du système d’information de l’université de Genève s’appuient sur un plan directeur, un catalogue de services, une démarche de cartographie et l’intégration du SI dans un plan stratégique et dans l’agenda de la direction générale.

Le système d’information de l’Unige (Université de Genève) s’articule en quatre grandes composantes : le pilotage (soutien aux fonctions de direction stratégique et générale de l’institution), le cœur de métier (enseignement et recherche), le support (finances, RH, logistique, achats, informatique, bibliothèques, etc.) et des éléments spécifiques à des projets de recherche.

« Le « SI institutionnel » est constitué des trois premiers sous-ensembles (pilotage, cœur de métier, support) et fait l’objet d’une gouvernance et d’un management spécifique au système d’information, précise Alain Jacot-Descombes, directeur des TIC de l’université. Le quatrième volet (éléments spécifiques) n’est suivi par la gouvernance que sur quelques aspects précis (sécurité informatique, budgets, etc.). »

Le pilotage d’un tel système repose sur des besoins précis : « Des activités d’enseignement et de recherche de plus en plus consommatrices de technologie, un soutien de plus en plus important et nécessaire aux activités administratives, un pilotage de l’institution qui requiert accès et mise en forme d’informations multiples, un accès aux ressources et à l’information scientifiques qui doit être sécurisé et efficace, tout cela dans un contexte où les coûts d’équipements se combinent à une érosion des sources de financement », détaille Alain Jacot-Descombes.

Pour ce dernier, l’université constitue un contexte particulier : « D’abord, l’Unige, au même titre qu’une entreprise, est une organisation soumise aux lois de la concurrence, avec quelques spécificités, telles qu’une décentralisation très forte avec des entités largement autonomes et un mode de gouvernance qui réalise un compromis permanent entre organisation hiérarchique et concertation basée sur le gain du consensus.

Ensuite, le temps de développement est plus long que celui que l’on connaît dans la vie économique et, enfin, le management change tous les quatre ans. »

En outre, la population des chercheurs est marquée par une culture qui conduit à accepter relativement difficilement de travailler dans un environnement trop stable, avec une perception de lourdeur face aux contraintes technologiques imposées aux utilisateurs : « Mais il est difficile, pour le DSI, de devoir travailler sans une certaine stabilité », observe Alain Jacot-Descombes, qui est confronté à trois attentes en tant que DSI : « Être un membre du « cerveau collectif » en mode pas seulement réactif mais aussi proactif, jouer le rôle de veille technologique et proposer de nouveaux développements, et donner accès à la DG à des benchmarks qui lui permettent de comprendre où son institution se situe en termes de SI par rapport à d’autres institutions comparables. »

Plus généralement, se pose la question suivante : la stratégie mise en œuvre au niveau du SI contribue-t-elle efficacement aux principales attentes et besoins de l’institution ? L’université de Genève s’appuie sur quatre éléments : un plan directeur, un catalogue de services, une démarche de cartographie et l’intégration du SI dans le plan stratégique de l’institution et dans l’agenda de la DG.

Le plan directeur s’appuie sur la déclinaison de résultats à atteindre, exprimés en termes fonctionnels et non techniques, priorisés et cadencés dans le temps, la mise en place de projets de SI, « élaborés et validés dans le cadre du dispositif de gouvernance du SI, permettant l’atteinte de ces résultats », précise Alain Jacot-Descombes.

Le plan directeur s’appuie également sur « une coordination et un support par un responsable MOE (division informatique), une expression/appropriation des résultats à atteindre et des projets de SI qui en découlent par les MOA concernées, et un parrainage au niveau de la DG ».

Deuxième élément de réponse : le catalogue de services. Il permet « d’appréhender l’ensemble des services du SI institutionnel à travers une présentation structurée et cohérente du catalogue et des fiches de services, d’accéder facilement à tous les services du SI, de valoriser l’orientation service (vision « utilisateur ») et la couverture fonctionnelle (vision « métier ») du SI et, enfin, de renforcer au niveau de l’institution la culture du service et le décloisonnement des structures administratives », détaille Alain Jacot-Descombes.

Pour sa part, la démarche de cartographie du système d’information, « est soutenue par la DG en tant que démarche visant à une meilleure maîtrise des opérations et des risques dans l’institution », assure Alain Jacot-Descombes, qui ajoute : « La cartographie du SI est devenue le « référentiel institutionnel » permettant de modéliser le fonctionnement de l’Unige (existant ou cible), la base de connaissances du fonctionnement de l’institution. »

Quant à l’intégration du développement du système d’information dans l’agenda de la direction générale, « le développement du SI institutionnel est inclus dans le plan stratégique d’évolution de l’institution et dans la convention d’objectifs entre l’Université et l’État de Genève, et plusieurs lois d’investissement votées par le parlement genevois et programmes nationaux soutiennent le développement du SI institutionnel, notamment pour les services à l’enseignement, les services à la recherche, l’administration en ligne, le pilotage de l’institution, le socle technologique… », souligne Alain Jacot-Descombes.

Alain Jacot-Descombes précise : « La « performance du SI » n’est rien d’autre que la performance du fonctionnement de l’entreprise : les coûts des projets de SI et des services du SI sont souvent liés à la complexité et à la maturité de l’organisation, à la capacité du management de la transformer, de changer les modes de faire, de (re)définir les responsabilités, de faire évoluer les compétences. Les projets de SI qui se passent mal sont souvent des indicateurs d’autres dysfonctionnements sectoriels qui méritent d’être évalués et si tous les projets SI se passent mal, les dysfonctionnements sont probablement à chercher du côté du dispositif de gouvernance ou de gestion du SI et/ou du secteur informatique de l’entreprise. »

Malgré tout ce qui est mis en place dans le SI de l’Unige, il subsiste encore un écart entre, d’une part, « les attentes de la DG vis-à-vis de son SI et la maturité de la DG concernant la gouvernance du SI » et, d’autre part entre « l’importance du rôle du DSI et son positionnement vis-à-vis de sa DG », estime Alain Jacot-Descombes.

Comment atténuer cette difficulté ? « Combler cet écart nécessite de mieux interagir et de repenser l’interface DG-DSI et ainsi d’éviter de superposer deux périmètres qui sont complémentaires de façon que chacun soit bien centré sur ses rôles et responsabilités et à éviter le travers de la DG qui prend la place de la DSI ou réciproquement », conclut Alain Jacot-Descombes.

Les éléments de cet article ont été recueillis lors du symposium Afai (juin 2010).


Les quatre dimensions d’un SI

  1. Le système d’information (SI) est le véhicule des interactions et de la communication dans l’organisation. Sa structure est constituée de l’ensemble des ressources (compétences, données, logiciels, équipements) organisées pour collecter, stocker, structurer, traiter et communiquer les informations, sous différents formats.
  2. Le SI se construit autour d’informations et de processus « métier » organisés et non simplement autour de bases de données ou de logiciels. Le SI engrange la connaissance de l’entreprise.
  3. Le SI implique une multitude d’acteurs et doit être géré et piloté selon un cadre de management spécifique. Il doit être aligné sur le fonctionnement et la stratégie de l’entreprise.
  4. Le SI coordonne ainsi à travers l’information les activités de l’organisation et lui permet d’atteindre ses objectifs.

Gouvernance du SI : les best practices de l’université de Genève

Dispositif de gouvernance du SI :

  • renforcer la compréhension du dispositif de gouvernance à tous les niveaux et l’interaction entre toutes les parties concernées
  • améliorer le reporting concernant la « vie du SI » au rectorat
  • élaborer et mettre en œuvre un plan et des actions de communication pour mieux faire connaître le SI institutionnel et ses services
  • optimiser les fonctions et outils de support du dispositif
  • assurer le contrôle de gestion sur le fonctionnement du dispositif

Processus de traitement des projets de SI :

  • renforcer l’accompagnement des projets dans les phases d’initialisation et de cadrage, afin d’assurer une analyse du projet dans toutes ses dimensions
  • améliorer la qualification des projets (criblage) afin de faciliter la prise de décision au niveau de la gouvernance
    assurer un meilleur suivi de la réalisation des projets

Processus de traitement des maintenances évolutives :

  • formalisation et mise en œuvre de « comité de maintenance utilisateurs » par domaines (RH, finance…), en veillant à la bonne implication des MOA et MOE

Processus de gestion des services du SI :

  • élaborer/compléter les documentations utiles aux services et les lier aux fiches de services correspondantes du catalogue
  • élaborer/compléter et rendre disponible les mesures pertinentes pour chacun des services
  • mettre en œuvre une chaîne de support unifiée au sein de l’institution, permettant de réellement gérer le processus de service
à l’utilisateur et les ressources qui y sont consacrées
Questions-réponses pour la direction générale
La question de la DG Les solutions
Les projets SI avancent-ils assez vite ?Le constat : de la genèse à la fin d’un projet, plusieurs étapes fondamentales doivent être réalisées qui sont en principe évidentes pour les gestionnaires des projets, mais le sont plus rarement pour ceux qui lancent l’idée ou s’attendent à un résultat « immédiat ». L’avancement réel et l’avancement perçu d’un projet de SI sont parfois très différents.
  • Les compétences et les ressources mobilisées, les plans de charges, la complexité des résultats à atteindre, les transformations organisationnelles et/ou culturelles nécessaires, l’implication des parties prenantes, la maîtrise technologique, le contexte moteur ou résistant, etc. sont autant de facteurs influençant directement l’avancement d’un projet de SI… ce qui ne se limite pas à l’informatique
  • Tableaux de bord
  • Actions de communication
Comment faire en sorte que le SI soit régulièrement mis à l’ordre du jour des réunions de « direction générale » et abordé de façon adéquate et structurée ?Le constat : la DG a une information très lacunaire et partiale du SI (participation restreinte, intérêts très ciblés, remontées négatives, etc.) Le SI est souvent confondu avec l’informatique, tout comme le rôle de DSI avec celui de responsable informatique. Les traces de ce lien historique avec l’informatique sont souvent encore présentes dans l’organisation (intitulés « informatique » au lieu de « SI ») et maintiennent une identité et une perception erronées du rôle du DSI et du SI.
  • Le SI ne doit pas être cloisonné dans un silo chapeauté par la DSI, mais interagir de manière organisée avec les différentes parties prenantes, notamment la DG
  • Il est nécessaire de définir les modalités d’un feedback régulier (quoi, quelle forme, quelle fréquence) entre DSI et DG, afin d’assurer une information régulière permettant le pilotage stratégique et opérationnel de l’entreprise
  • Les responsabilités qui sont attribuées au DSI par la DG doivent être clarifiées et en phase avec les attentes de l’entreprise vis-à-vis de son SI
  • Le positionnement du DSI doit être tel qu’il puisse assumer pleinement ses responsabilités
Comment mesurer la performance du SI ?Le constat : difficulté à mettre en évidence l’efficacité et l’efficience du SI.
  • La performance du SI peut se mesurer selon différents axes portant notamment sur les projets, les services, le dispositif de gouvernance et de gestion, le degré d’urbanisation, les processus IT, les niveaux de maturité
  • Des mesures quantitatives et qualitatives peuvent être définies et leur évolution au cours du temps analysée
  • Des comparaisons avec les référentiels de bonnes pratiques
  • Des autoévaluations et le regard croisé de pairs permettent d’évaluer les forces et faiblesses de son SI par des professionnels
  • Prendre en compte tous les gains possibles : temps, argent, organisation, satisfaction des utilisateurs, motivation, image… Ces gains sont à mettre en rapport avec les coûts totaux : coût de la situation actuelle (sans le projet) ; coût du mouvement (investissement pour réaliser le projet) ; coût d’exploitation (une fois le projet réalisé)
  • L’évaluation des projets de SI peut être réalisée sur la base des éléments suivants :

– existence d’un « Project Office » mettant en œuvre une méthodologie et des outils normalisés pour la définition, la réalisation et le suivi des projets et portefeuilles de SI
– évaluation du « retour sur investissement » d’un projet de SI selon une approche multicritère, portant sur la « valeur » (pas seulement ou directement monétaire) qu’il est censé délivrer et pas uniquement sur ses coûts (totaux)
– évaluation de la nécessité de faire (contraintes légales, techniques…)
– évaluation relative d’un projet de SI dans le cadre de portefeuilles de projets (interdépendances, optimisation des investissements)
– réalisation systématique de bilans de projet (respect des délais et des coûts, adéquation des fonctionnalités, vérification de la valeur délivrée, satisfaction des clients et/ou utilisateurs),
à la fin du projet puis après un certain temps

Source : Université de Genève