Dans l’univers de plus en plus concurrentiel de la protection sociale, le GIE Chorégie accompagne ses mutuelles adhérentes dans la transformation des systèmes d’information. Avec un socle fédérateur : une approche pragmatique et agile de l’architecture d’entreprise.
Le monde de la protection sociale est marqué par une forte concentration. Selon le dernier rapport de l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution), publié en novembre 2013, il existait en France 1 158 mutuelles en 2006, mais seulement 630 en 2012, soit 45 % de moins. L’une des justifications de ce mouvement de fond porte sur des exigences de mutualisation et de réduction de coûts. En 2005, trois grands acteurs de la protection sociale (MGEN, LMDE et MFP Services) ont créé le GIE (Groupement d’intérêt économique) Chorégie afin de gérer leurs systèmes d’information, pour la conception, le développement, l’exploitation, l’assistance et le conseil aux utilisateurs.
« L’objectif de Chorégie est de doter ses partenaires et les mutuelles d’une plate-forme SI pour la gestion des prestations d’assurance à la personne, de santé (régimes obligatoires et complémentaires), de prévoyance, ainsi que le système d’information des établissements de santé, explique Gérard Russeil, directeur général de Chorégie, les systèmes d’information gérés couvrent les activités de front office, back office, ainsi que les activités de support. Chorégie participe à l’identification des besoins des mutuelles, depuis la proposition et le choix de solutions, jusqu’à leur intégration et leur exploitation dans le respect des engagements de services. »
Un univers de plus en plus concurrentiel
Pour les mutuelles, les systèmes d’information s’avèrent stratégiques : « Non seulement ils portent l’évolution réglementaire, constituent un vecteur d’efficacité dans la gestion, mais ils sont surtout de plus en plus déterminants pour développer de nouvelles offres de services », assure Gérard Russeil. C’est même d’autant plus déterminant que des acteurs, tels que les groupes d’assurance, investissent le terrain de la santé ou élargissent leurs gammes de prestations. Avec des modèles économiques qui fragilisent les mutuelles de protection sociale qui ont basé leurs approches sur les valeurs de l’économie sociale.
« Cette culture de l’économie sociale, au sens noble, se traduit par des offres globales avec peu de sélection des assurés, selon le principe « chacun paie selon ses revenus et reçoit en fonction de ses besoins » », caractéristique de notre secteur », rappelle Gérard Russeil, pour qui ce modèle va être bousculé par les concurrents qui miseront sur des offres plus ciblées basées, sur des segmentations d’assurés beaucoup plus fines. « Comment adapter le positionnement sans perdre son âme, d’autant que certaines mutuelles gèrent également, par délégation, le régime obligatoire ? Tel est l’enjeu de nos actions chez Chorégie », précise son directeur général.
Une profonde évolution des offres
De fait, pour accompagner les mutuelles et anticiper leurs besoins, Chorégie a engagé plusieurs transformations de ces offres. « Nous travaillons, à travers nos catalogues de services techniques et fonctionnels, à proposer la couverture la plus complète possible pour s’aligner sur les différents métiers d’une mutuelle », résume Jean-Luc Merelli, responsable de l’urbanisation fonctionnelle et des référentiels chez Chorégie. Ainsi, le GIE a, par exemple, fait évoluer son système de « facturation » (cotisation) et s’est engagé dans la refonte du système de gestion de la relation mutualistes (avec des devis en ligne, la gestion des campagnes, la gestion multi-contacts). « Nous nous orientons vers l’omni-canal, en replaçant l’assuré mutualiste au cœur du dispositif, ce qui suppose un outil de gestion de la relation client plus performant, organisé non pas en silos, mais avec une réelle approche multi-canal », poursuit Gérard Russeil. Chorégie est intervenue en tant que maître d’œuvre pour le compte de plusieurs mutuelles.
Chorégie a également transformé le cœur de la gestion des régimes obligatoires et complémentaires, avec le projet ORION, solution intégrée pour traiter les droits des assurés, le paramétrage des offres, les flux de sortie tels que les remboursements…, de manière à réduire les délais de paiement et à garantir une meilleure traçabilité, mais aussi, et surtout, à proposer un guichet unique à l’adhérent pour lui permettre une vision globale de ses remboursements. Cette solution s’avère au cœur du dispositif, comme l’a rappelé la MGEN dans son rapport annuel 2012 : « Ce nouvel outil regroupera l’ensemble des activités de liquidation, automatique et manuelle, pour les régimes obligatoires et complémentaires. L’enjeu ? Une meilleure maîtrise des coûts de gestion, comme une amélioration de l’efficacité et de la qualité du service, ce qui impactera l’ensemble du système d’information du groupe MGEN. » La percée des approches omni-canal dans le monde de la protection sociale va aboutir, selon Gérard Russeil, à « une disparition des frontières entre le back office et le front office, d’où l’importance de ce type de solutions. Et à l’heure de l’entreprise numérique, Chorégie est force de proposition auprès des mutuelles, avec une vision d’avance pour transformer les relations avec leurs adhérents. »
Maîtriser l’architecture d’entreprise, un prérequis
Ces transformations ne sont pas possibles sans une parfaite maîtrise de l’architecture d’entreprise. « Imaginer comment l’environnement de la protection sociale va évoluer impose une telle maîtrise de l’architecture d’entreprise, c’est même fondamental », assène Jean-Luc Merelli. Une architecture d’entreprise qui doit être largement teintée d’agilité : « Il n’est pas possible de passer trop de temps à réfléchir pour imaginer comment évoluer, il faut au contraire privilégier une approche itérative, avec différents chantiers et définitions de trajectoires, que l’on synchronise », ajoute Jean-Luc Merelli.
Chorégie a fait appel à Obeo, éditeur de logiciels et société de conseil, qui a proposé sa solution Obeo SmartEA. Basé sur un référentiel TOGAF (The Open Group Architecture Framework) et des technologies Open Source, Obeo SmartEA permet de fédérer des référentiels existants pour élaborer des trajectoires de transformation. L’approche par point de vue et par pivots de modélisation (voir encadré ci-contre) facilite la modélisation des architectures actuelles et futures pour analyser les écarts et les impacts sur l’existant. « Nous devons gérer pas moins de 40 000 objets techniques, personne ne peut en avoir la vision complète, c’est en dehors des capacités du cerveau humain, constate Jean-Luc Merelli, nous avons donc opté pour une logique qui consiste à construire un référentiel avec les différents points de vues, plus ou moins détaillés. », selon une règle simple : « Dis-moi qui tu es, je te donnerai le point de vue qui te correspond ». Ainsi, par exemple, le point de vue du fiscaliste décrira les liaisons interapplications, comment circulent les flux et comment on parvient à gérer 400 000 transactions, alors que celui d’un responsable applicatif proposera une vue globale de son écosystème, avec les différents acteurs, processus, fonctions, composants applicatifs, technologies…
L’agilité par la simplicité
« Nous avons choisi Obeo SmartEA, une solution adaptée à notre dimension plutôt que de retenir un outil lourd et complexe à mettre en œuvre, souligne Jean-Luc Merelli. Il est, en outre, important pour nous de pouvoir travailler en sourçant des données référentes, car je ne veux pas que l’équipe d’architecture concernée passe du temps à ressaisir l’existant, alors que l’on peut toujours récupérer ce qui existe déjà ! La cartographie n’était pas forcément un prérequis même si elle se révèle extrêmement utile. L’un des enjeux était de rendre compréhensible notre écosystème, avec une approche pragmatique et opérationnelle, d’où le choix de la solution d’Obeo, dont j’ai perçu l’intérêt sur les aspects fédération et interopérabilité, deux axes auxquels nous sommes très attachés. »
Les référentiels existants sont consolidés de manière à obtenir une vision globale : « On peut y naviguer en faisant des hypothèses, on obtient donc une visualisation accessible à des non spécialistes de l’urbanisation, ce qui permet de partager davantage les analyses et, surtout, de se libérer de la partie collecte de l’information », explique Jean-Luc Merelli. Tous les managers de systèmes d’information ont au moins deux besoins : « Gérer la complexité et favoriser l’agilité. Avec le principe de constitution automatique de la cartographie, à l’aide d’un outil facile d’usage, cela permet de partager plus aisément et de mettre à jour avec le bon niveau de maille : c’est fortement contributeur à l’agilité », assure Gérard Russeil.
« Nous avons connu en effet des outils avec lesquels on consacre énormément de temps à documenter ce qui, de toute façon, ne sera jamais à jour. Nous avions donc davantage des cartographes que des architectes. Il faut automatiser au maximum la production documentaire de la cartographie pour se consacrer aux analyses d’impacts, beaucoup plus pertinentes. Enfin, tout cela a pu être réalisable et mis en place avec l’expertise des consultants d’Obeo, en particulier sur la modélisation et les compétences en Open Source. Cela nous a permis d’automatiser l’alimentation dynamique du référentiel à partir des différents outils et sources existantes de notre architecture, du business à l’infrastructure. »
Chorégie va renforcer la place de l’architecture d’entreprise. « Nous construisons le référentiel d’entreprise stratégique, fonctionnel et technique, où tout acteur ayant une question sur le SI pourra y trouver sa réponse. La solution sera prochainement utilisée par nos partenaires, permettant de lier les axes/enjeux/objectifs aux solutions », précise Jean-Luc Merelli. Plus précisément, il s’agira d’agréger, autour d’un modèle d’architecture d’entreprise, l’ensemble des modélisations, qu’elles soient stratégique, métiers ou système d’information.
Une approche basée sur les pivots de modélisation
Comment valoriser l’existant, en particulier les référentiels (partenaires, production, études, fonctions support), les outils et les bonnes pratiques ? Chorégie a retenu une approche basée sur les pivots de modélisation. Ceux-ci ont quatre caractéristiques :
- adaptés à l’usage et au domaine concerné : un pivot de modélisation est zoné, par domaines fonctionnels, par projets de transformation, par applications… « Un pivot de modélisation compréhensible permet une approche par usage : « Dis-moi ce qui t’intéresse, je saurai te montrer le point de vue pertinent » », précise Jean-Luc Merelli.
- fédérés et partagés : « Un pivot de modélisation cohérent ancre les objets dans un modèle fédéré (processus, services métiers, applications …), permettant le travail collaboratif », souligne Jean-Luc Merelli.
- ouverts : un pivot de modélisation ouvert s’appuie sur des métamodèles connus et peut les étendre.
- itératifs et chronologiques : un pivot de modélisation est branché directement sur les référentiels opérationnels. « Cela évite de ressaisir l’existant, permet de faire ressortir les écarts, qui peuvent être réévalués si besoin, et de déduire les impacts pour définir les trajectoires de transformation », indique Jean-Luc Merelli.
Urbanisation, agilité et Open Source : les bénéfices | |
Les avantages | |
Urbanisation |
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Agilité |
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Open source |
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Source : Obeo |
Démarche d’architecture d’entreprise : les éléments-clés | |||
Principes | Pour quoi faire ? | ||
Référentiels | Création |
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Garder une trace (historisation) des modifications effectuées |
Consultation | Consulter via un navigateur Web, avec des droits utilisateurs selon leurs rôles | Naviguer à travers les éléments du référentiel, consulter les représentations publiées, recherche textuelle… | |
édition |
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Mettre à jour en temps réel, étendre les représentations existantes, ou en ajouter | |
Points de vue |
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Filtrer les informations concernant les utilisateurs et les représenter sous un format pertinent pour eux | |
Sourcing et fédération de référentiels |
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Construire automatiquement une hiérarchie de paysages fonctionnels et applicatifs, élaborer des analyses croisées entre l’activité d’un système et son coût… | |
Outils pour l’architecture d’entreprise | Analyse d’impacts | Créer un diagramme spécifique pour obtenir les éléments associés à n’importe quel élément ou groupe d’éléments du référentiel | Faciliter l’analyse des impacts qu’une modification d’un élément entraîne sur l’ensemble des architectures métiers, applicatives, données ou techniques |
Gestion des exigences | Créer un référentiel d’exigences | Définir les exigences et les mettre en lien avec les éléments connus dans le référentiel d’architecture d’entreprise | |
Validation sémantique du référentiel | Définir des règles de validation sémantique sur le référentiel, qui vérifient la validité des éléments du référentiel |
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Analyse d’écarts | Créer des « branches » sur le référentiel pour gérer différentes descriptions des architectures | Comparer différentes branches pour analyser l’écart existant entre une architecture existante et une architecture cible | |
Source : Obeo |