Chief Happiness Officers : nous les avons tant aimés

Depuis une quinzaine d’années, le bien-être au travail est devenu un enjeu majeur pour de nombreuses entreprises. Dans ce contexte, la fonction de Chief Happiness Officer (CHO) a émergé, suscitant à la fois enthousiasme et scepticisme.

Mais qu’en est-il réellement de ce rôle, souvent perçu comme un symbole de modernisation des pratiques managériales ? Une étude de l’Observatoire Trends at Work, lancé par Hello Masters dresse le panorama de cette fonction a qui a suscité beaucoup d’espoirs dans les entreprises.

Les missions du CHO : entre animation et soutien RH

Initialement, le CHO avait pour mission d’améliorer la qualité de vie au travail et l’expérience collaborateur. Cependant, la réalité s’est avérée plus complexe. Les missions ont varié considérablement selon les organisations et leur maturité en matière de ressources humaines.

On observe quatre grands domaines d’intervention : l’animation de la vie interne (événements collectifs), l’amélioration de l’environnement de travail (espaces conviviaux, services), la communication et l’écoute (baromètres, médiation), et le soutien RH (climat social, onboarding, prévention des RPS).

Toutefois, l’absence de cadre formel a entraîné une grande hétérogénéité des pratiques et un flou quant à la valeur stratégique du poste.

Une chronologie mouvementée

Née dans la Silicon Valley au début des années 2010, la fonction de CHO visait à attirer et fidéliser les talents grâce à une culture d’entreprise forte. Tony Hsieh, PDG de Zappos, en était une figure emblématique.

En France, le titre de CHO a émergé vers 2015-2017, surtout dans les startups, avec une image parfois caricaturale de culture « fun ». Cependant, le manque de structuration était flagrant.

Entre 2018 et 2019, une professionnalisation partielle a eu lieu, mais les critiques sur la légitimité stratégique du poste se sont intensifiées. Le concept de « wellness washing » est apparu.

La crise sanitaire de 2020-2021 a mis en lumière les limites d’un poste trop centré sur la convivialité. Les enjeux de santé mentale et de télétravail sont devenus prioritaires. De nombreux postes de CHO ont été supprimés ou redéployés.

Depuis 2022, on observe un repositionnement et une dilution de la fonction. Le titre disparaît progressivement au profit d’une intégration des missions dans les directions RH, RSE ou « People & Culture ». L’accent est mis sur la santé mentale, l’inclusion et l’engagement.

Aujourd’hui, le titre « CHO » tend à disparaître, mais ses objectifs initiaux sont intégrés aux politiques RH durables. D’une part, avec la montée en puissance des fonctions orientées « culture », de « l’engagement » et de « l’expérience salarié ». D’autre, avec une approche plus systémique, moins incarnée par un individu, plus intégrée dans les structures.

Mais que sont devenus les CHO ?

L’analyse des trajectoires professionnelles des anciens CHO révèle une grande diversité d’évolutions. Beaucoup se sont repositionnés au sein des RH, d’autres ont migré vers la communication interne ou l’événementiel. Certains ont lancé des activités indépendantes, tandis que d’autres ont simplement abandonné le poste.

Des trajectoires similaires pour d’autres fonctions

La trajectoire du CHO n’est pas isolée. D’autres fonctions innovantes ont connu des parcours comparables : Chief Freelance Officer, Chief Remote Officer, Chief Evangelist, Chief Culture Officer. Elles ont souvent été intégrées dans des structures plus traditionnelles.

Avec le recul, la fonction de Chief Happiness Officer a représenté une tentative de réponse aux transformations du monde du travail. Bien que le titre tende à disparaître, les enjeux qu’il portait restent d’actualité : engagement, climat social, reconnaissance, qualité de vie au travail.

Ces enjeux sont heureusement désormais intégrés dans des approches plus structurées, portées par les directions RH et RSE, avec des objectifs alignés sur la performance durable et l’expérience collaborateur. Selon l’étude, « le Chief Happiness Officer n’a finalement pas disparu : il a changé de forme. »

Image par Elisa de Pixabay