Un constructeur automobile n’est plus un fabricant de véhicules mais un acteur de la mobilité. Avec le digital, c’est une réorientation que la plupart des industriels du secteur vont prendre.
«Le changement de comportement des individus est un tsumani lent », estime Grégoire Olivier, directeur des services mobilité du groupe PSA et directeur général de Free2move, l’entité créée par le groupe automobile pour saisir les opportunités du marché de l’autopartage, issue du rachat de la start-up allemande CarJump et qui est intervenu lors d’une conférence organisée par l’Idate.
Free2move, application disponible en France et en Espagne et aux Etats-Unis depuis octobre 2017, constitue un élément du plan stratégique « Push to Pass » qui positionne le groupe PSA en tant que fournisseur de services de mobilité.
Ce service permet d’identifier tous les véhicules en autopartage situés à proximité de l’utilisateur en un seul clic sur son smartphone. L’utilisateur peut ainsi comparer l’emplacement, les caractéristiques et le coût d’utilisation des véhicules disponibles.
Il peut soit réserver, soit utiliser immédiatement le véhicule de son choix pour quelques minutes ou plusieurs jours. D’après les analyses de Frost & Sullivan, la France est le troisième pays d’Europe en nombre d’utilisateurs (320 000 membres en 2015), après l’Allemagne et l’Italie, et le deuxième en nombre de véhicules partagés, après l’Allemagne. Le nombre d’utilisateurs des services d’autopartage dans le monde devrait être multiplié par 4,5 en dix ans avec une évolution de 8 à 36 millions de personnes entre 2015 et 2025.
Diversifier les offres de services
« Nous sommes face à des concurrents (Blablacar…) et à un écosystème en recomposition permanente dans lequel on ne peut travailler seul », diagnostique Grégoire Olivier, qui est intervenu lors de la dernière conférence Idate pour expliquer sa stratégie. PSA a créé un « business lab », doté d’un investissement de cent millions d’euros, qui se veut être un lieu d’échanges avec les start-up. « C’est étrange, nouveau et difficile », résume Grégoire Olivier.
En matière de services de mobilité, le groupe PSA se positionne sur trois axes : le BtoC, le BtoB et les services connectés. Dans le domaine BtoC, il s’agit, d’une part, d’accompagner les usages d’autopartage, avec un démarrage à Madrid en 2016. « C’est pour l’instant un succès d’estime parce qu’il reste difficile d’anticiper les besoins de déplacement », reconnaît Grégoire Olivier. Et sur ce marché de masse, il est indispensable de conjuguer deux contraintes : être compétitif et proposer un service de qualité.
« C’est toujours difficile de faire payer les consommateurs, il n’y a que deux « killers apps » : la cartographie des bouchons et la détection des radars », déplore Grégoire Olivier. D’autre part, Free2move se positionne sur le marché de la location courte durée, en s’appuyant sur les concessionnaires de la marque Peugeot.
« Cela amène des nouveaux prospects dans les points de vente et la moitié des loueurs courte durée ne sont pas clients, on espère bien sûr qu’ils achèteront… », explique Grégoire Olivier, qui cible les villes moyennes. PSA a également investi dans la start-up Travelcar.com, qui propose un service d’autopartage dans les aéroports.
Sur le segment BtoB, l’objectif est de faciliter la mobilité dans les entreprises, avec un logiciel de gestion de flotte et des offres de leasing, lancées début 2017 en France. Quant aux services connectés, ils reposent sur l’exploitation des données. « Nous commercialisons, par exemple, des données pour visualiser les vitesses moyennes ou les zones où les airbags se déclenchent, de manière à aider les collectivités locales à mieux gérer leurs infrastructures », explique Grégoire Olivier.
A plus long terme, les constructeurs vont se positionner sur la voiture autonome et les services associés. « Techniquement, on sait le faire et, à terme, on ne vendra plus de véhicules haut de gamme qui n’auront pas cette possibilité », assure Grégoire Olivier, qui rappelle que « vers 2035-2040, 80 % des trajets effectués aux Etats-Unis le seront avec des véhicules autonomes. » Une expérimentation de taxis autonomes sera lancée à Paris au second semestre 2018.