Le système d’information des opérateurs de télécommunications représente une partie stratégique de leur activité. En effet, d’une part les constructeurs télécom maîtrisent les défis liés à l’infrastructure réseau, parfois jusqu’à la gestion globale de l’activité de maintien en conditions opérationnelles.
D’autre part, l’agilité dans la gestion des abonnés, la facturation et l’exploitation des données clients incarnent le moyen de transformer au mieux les CAPEX en OPEX, ce qui est un fondamental du business model des opérateurs. Ceux-ci placent donc le SI opérateur au centre de leurs préoccupations stratégiques.
Ce système d’information se complexifie et se spécialise de plus en plus, dans le but de répondre à l’évolution du marché et aussi dans un souci d’efficacité toujours plus grande. Ainsi de nombreuses fonctions le composent comme par exemple l’activation, le provisionning, ou encore le selfcare.
Ces millions de lignes et de clients peuvent être des particuliers et des pros (de l’ordre d’une seule ligne par client), et aussi des entreprises. Dans ce dernier cas, les flottes de lignes mobiles peuvent atteindre un volume de l’ordre d’une centaine de milliers, en général avec un contrat (voix et/ou data) affecté à un utilisateur et administré par un gestionnaire en central.
Le business du Machine to Machine (M2M) ne constitue pas une nouveauté, et beaucoup disent qu’il tarde à vraiment décoller. Cependant les chiffres de l’ARCEP illustrent une croissance très rapide en France, avec une augmentation de 200% du nombre de cartes SIM M2M entre juin 2008 et juin 2010, où le palier des 2 millions de lignes a été dépassé.
De nombreuses success stories existent dans des domaines variés, et des projets importants sont en cours, en particulier autour de la taxe poids lourds, du smart metering, ou encore de la cité intelligente. Les opérateurs anticipent donc cette tendance lourde pour prendre de nouvelles parts de marché et augmenter la valeur des services vendus, l’ARPU M2M mobile classique étant relativement faible en moyenne.
De plus, les clients demandent des fonctionnalités M2M de plus en plus avancées pour gérer ces lignes un peu particulières : à ce titre, les services du SI M2M sont une vraie manière de se différencier de la concurrence.
Les clients et les services M2M présentent en effet des particularités qui reflètent la nature de ce business. Les opérateurs vendent leurs services M2M à des clients entreprises, soit en B2B classique soit en B2B2C.
On peut compter de nombreuses lignes par client, de quelques dizaines à quelques centaines de milliers (par exemple pour Coyote), que ce soit sur du cœur de métier ou sur des moyens d’optimisation de fonctionnement. Les lignes M2M se caractérisent par le fait qu’elles se rattachent à un objet communiquant et non à une personne, ce qui allège les contraintes de confidentialité. Ces lignes véhiculent en général uniquement du trafic data à un débit plutôt faible.
Les communications M2M peuvent s’appuyer sur des medias physiques variés comme le GSM/GPRS/UMTS, les lignes fixes, les liaisons satellites, et aussi les bandes VHF. Enfin les services M2M ont souvent vocation à interagir de façon riche et assez intégrée avec les SI des clients.
Ainsi, à titre d’illustration, le SI de l’opérateur peut envoyer en temps réel le positionnement de centaines de milliers de cartes SIM dans le monde au SI de son client, lequel intègre le traitement de ces informations dans ses business process. La sensibilité aux pannes et à la corruption de donnée peut se révéler bien supérieure que pour un client entreprise classique.
Le SI « traditionnel » des opérateurs ne répond pas à ces besoins et à ces spécificités, et c’est bien la fonction d’un SI M2M dédié. Celui-ci doit en effet :
- Gérer l’activation en masse des lignes
- Fournir des fonctionnalités avancées de gestion de flottes mobiles (activation/test/désactivation, monitoring de la qualité du lien, historisation des informations de localisation, gestion d’événements liés à la qualité du signal et à la localisation, …)
- Faciliter la logistique des cartes SIM de l’encarteur au fournisseur du client
- S’interfacer en temps réel avec le SI et les business process des clients
- Gérer la supervision du service par client, et proposer des fonctionnalités avancées de selfcare
- S’interfacer avec les plateformes réseau M2M (par exemple de gestion d’e-book ou de gestion de données de véhicules)
- Les SI M2M ne réinventent pas tout, mais au contraire s’interfacent avec les autres briques existantes des SI opérateurs, en particulier la facturation et les solutions de business intelligence.
Les principaux opérateurs de solutions de communication européens ont déjà initié la mise en place des premières fonctionnalités du SI dédié M2M. Etant donnée la croissance importante du marché M2M, ainsi que les nouveaux usages portés par ces business units, les perspectives de développement restent très importantes. Les défis court-moyen terme du SI M2M sont en particulier :
- Soutenir les nouvelles offres qui viseront à enrayer l’érosion de l’ARPU des communications M2M, c’est à dire savoir vendre et valoriser des services spécifiques, y compris dans un modèle de facturation à l’acte
- Continuer à enrichir l’interface avec les business process des clients, et sécuriser la qualité et la fiabilité des échanges
- Anticiper la mise à disposition d’importantes capacités de traitement, nécessaires au développement accéléré des services et du trafic M2M
- Concilier la mise en place d’enablers communs aux différentes offres M2M, et la réactivité nécessaire pour gagner les appels d’offres européens
A l’heure de la sortie de crise, dans le cadre d’une activité M2M en forte croissance, les opérateurs s’organisent pour se positionner au mieux dans cette compétition européenne et bénéficier de l’expansion de ce marché. Ceci passe obligatoirement par des investissements pertinents dans les SI M2M.
Cet article a été écrit par Philippe Bléhaut, Manager chez Beijaflore.