Déploiements technologiques : les points de vigilance

Déployer une technologie, un logiciel ou des matériels dans un contexte d’entreprise étendue (avec des filiales, des franchisés, des concessionnaires…), soulève des problématiques opérationnelles. Qu’il faut anticiper contractuellement.

En matière d’organisation des sys­tèmes d’information, les modèles centralisateurs ont le vent en poupe. Ils ont d’ores et déjà été adoptés par les deux tiers des entreprises européennes et près de sept entreprises américaines sur dix, selon l’enquête « European Key IT and Management Issues » publiée début 2012 par le réseau CIOnet et le Global Institue for Management.

La centralisation du système d’information concerne de plus en plus les groupes avec de multiples filiales ou ceux qui ont des réseaux de partenaires, par exemple des franchisés, des concessionnaires, des distributeurs… Et dont les DSI sont amenés à s’interroger sur une optimisation du système d’information, notamment suite à des opérations de croissance externe, à des changements de périmètres métiers ou à la création de filiales pour pénétrer de nouveaux marchés.

Uniformiser les infrastructures, les réseaux et les applicatifs répond le plus souvent à des motivations financières de réduction des coûts ou de refacturation. La mutualisation peut se révéler pertinente lorsque les économies d’échelle sont significatives : « Par exemple pour les liaisons télécoms, les tablettes et les logiciels métiers, souligne Franklin Brousse, avocat au Barreau de Paris. Ce sont d’ailleurs souvent les métiers qui poussent à une telle mutualisation, pour vendre plus, fluidifier les processus ou augmenter la productivité. » Mais, du côté des DSI, les économies ne sont possibles que lorsque les déploiements sont effectifs.

Avec, d’abord, un enjeu technique : la capacité à déployer la technologie. « Cet aspect pose de moins en moins de problèmes, la maturité des technologies permettant de réaliser des déploiements dans de bonnes conditions », souligne Franklin Brousse. Ensuite, un enjeu humain, notamment lorsqu’un prestataire intervient sur site et doit former les utilisateurs. Enfin, un enjeu économique, lié au retour sur investissement et au modèle économique retenu, « selon le principe : plus on déploie moins cela coûte cher », résume Franklin Brousse.

Ces projets de déploiements se déroulent géné­ralement en trois étapes : l’initialisation du projet, avec le transfert de compétences par exemple de l’éditeur vers le prestataire qui sera chargé d’intervenir sur le terrain ; puis une phase de projet pilote plus ou moins étendue et, enfin, la généralisation du déploiement. « Il faut veiller à deux points essentiels, souligne Franklin Brousse, d’une part, à fixer la date à partir de laquelle le déploiement est considéré comme terminé, ce qui pose par exemple le problème de l’harmonisation des versions de logiciels et, d’autre part, la question du support, qu’il soit internalisé ou externalisé, pendant le déploiement et au-delà. »

En matière contractuelle, deux modèles sont possibles : soit un contrat global groupe, soit une relation contractuelle qui doit s’établir avec chaque entité. « Il n’y a pas de solution meilleure que l’autre, cela dépend du modèle économique retenu, mais, dans les deux cas, le prestataire et son client ont intérêt à déployer le plus rapidement possible », observe Franklin Brousse, qui met en exergue trois éléments à ne pas négliger.

En premier lieu, le contrôle de la conformité du déploiement. « C’est la notion anglo-saxonne d’ »acceptance rules » qui est la plus utilisée pour désigner les critères retenus pour considérer que le service rendu par le ou les prestataires est accepté sur chaque site ». En second lieu, la propriété intellectuelle des logiciels utilisés « notamment les outils de migration utilisés par les prestataires, ou en cas de développement spécifique », précise Franklin Brousse.

Enfin, en troisième lieu, il faut veiller à bien définir les conditions de réversibilité ou de sortie anticipée du projet: « Que fait-on si le déploiement se passe mal ? Tout dépend des conditions de sortie contractuelles. D’où la nécessité d’anticiper cette question lors des négociations avec le prestataire », conseille Franklin Brousse qui résume ainsi les facteurs clés de réussite des projets de déploiements, qui peuvent coûter plusieurs dizaines de millions d’euros : « Un bon contrat, de bonnes conditions financières et un modèle économique pertinent… »


Les dix principaux points de vigilance

  • Le montage contractuel : qui signe avec qui ?
  • L’identification des différentes phases du projet
  • Les implications éventuelles pour des tiers
  • L’unification des versions de logiciels
  • La vérification de la propriété intellectuelle
  • les scénarios alternatifs, « Au cas où… »
  • La coordination avec les directions métiers et la communication vers les utilisateurs
  • Les conditions d’acceptation du service et de réversibilité
  • La validation du modèle économique
  • Les conditions du support et des engagements de services de la part des prestataires

 

Les bonnes pratiques pour le déploiement d’une application (dans une filiale)
Opportunité
(initiation / feuille de route)
Faisabilité
(analyse des écarts)
Spécifications
(adaptation et intégration)
Implémentation
(installation et formation)
Implémentation
(déploiement)
Exploitation
  • Mesurer la valeur ajoutée (en termes financiers, stratégiques…) du déploiement vers une filiale de l’entreprise
  • Communiquer
    de manière ciblée vers les managers et les utilisateurs concernés
  • Intégrer au plus tôt le fournisseur dans cette phase (bénéficier de son expérience)
  • Vérifier que les filiales ont une infrastructure réseau capable de supporter la charge
  • Réaliser les adaptations nécessaires permettant aux sites locaux de supporter la solution
  • S’assurer que le fournisseur de la solution a les connaissances des spécificités de chaque filiale
  • Accompagner les métiers à la formation des utilisateurs aux fonctionnalités ajoutées et contrôler les acquis
  • S’assurer du déploiement dans les filiales concernées
  • Contrôler la qualité du support pour les utilisateurs locaux
  • Suivre la performance pour les filiales et actions correctives si une dérive est constatée par rapport aux résultats en central
  • Réaliser des enquêtes pour apprécier le ressenti des utilisateurs envers la solution (démarche de progrès continu)
Source : Digitalonomics.