DSI en temps de crise : comment éviter de perdre son job

Les DSI en première ligne pour gérer les crises… mais aussi pour en subir les conséquences, souvent brutales : l’éviction du DSI de son poste. Face à une situation de crise, qu’elle soit interne à l’organisation ou externe, liée à l’environnement économique, il existe heureusement des bonnes pratiques qui permettent de limiter les dégâts, à la fois pour l’entreprise et pour le DSI qui les applique.

Au cours de sa vie, l’entreprise connaît des phases de stabilité, de croissance lente ou de croissance rapide, mais aussi des phases d’exception que sont les absorptions, les fusions, les cessions, ainsi que les périodes de crise, phases qui se caractérisent par :

  • une faible visibilité sur l’avenir,
  • une incertitude sur les résultats,
  • es mutations sociales et techniques qui sont souvent brutales.

Dans le domaine de l’informatique, des systèmes d’information et, de manière générale, dans la mise en œuvre des technologies de l’information et de la communication, les directions générales ont à gérer des situations qui, souvent, les déconcertent, ce qui peut les inciter inconsidérément à externaliser sans discernement.

Les échecs de nombreux grands projets sur lesquels toutes les bonnes fées s’étaient penchées, jettent une lumière crue sur les difficultés qu’il y a à faire évoluer tant l’outil de travail que les habitudes acquises en intégrant un environnement technologique en perpétuelle évolution.

Parfois, l’échec est cuisant. Il peut remettre en cause l’équilibre de l’entreprise, sa compétitivité, voire sa pérennité. Dans un tel contexte de crise grave, lorsque les repères habituels ont disparu, lorsque les hommes en place sont dépassés par les évènements, le management classique est inopérant. C’est là que peut intervenir, pour remettre les choses en place un manager de crise qui peut être soit un dirigeant de transition soit un nouveau DSI.

La crise, selon Patrick Lagadec, expert en gestion de crise, c’est « la rupture de l’univers de référence organisationnel », c’est « l’accident plus la déstabilisation. Elle combine : déferlement de difficultés, dérèglement dans le fonctionnement des organisations, divergences dans les choix fondamentaux ». C’est donc une période d’incertitude, voire de désarroi.

Les DSI en première ligne pour gérer les crises

La crise qui se manifeste est limitée généralement à l’entreprise elle-même, mais elle peut aussi être perceptible de l’extérieur lorsque les dysfonctionnements affectent par exemple une large clientèle ou mettent en cause un service public ou d’intérêt général.

Les cellules de crise que l’on voit décrites dans les ouvrages traitant des situations de crise s’adressent à des entreprises qui ont à gérer un problème avec le public et les médias ; elles sont créées pour gérer la communication.

Dans le cas des situations de crise qui nous occupent, lorsque les systèmes opérationnels ne marchent plus et que, donc, la survie de l’entreprise peut être en cause, c’est la DSI elle-même qui est impliquée dans sa résolution et y implique forcément les utilisateurs.

La crise est, la plupart du temps, non la conséquence d’une simple erreur, mais la résultante d’une longue série d’errements. Si les conséquences visibles sont les dysfonctionnements des systèmes opérationnels, neuf fois sur dix, dans le domaine des systèmes d’information, tout vient d’erreurs de management. C’est la raison pour laquelle on ne peut garder en place les responsables opérationnels qui ont présidé au désastre ; cela ne concerne qu’un nombre très limité de personnes.

Une crise, c’est toujours un condensé, une exagération des problèmes de l’entreprise. En cas de crise grave qui met en cause la pérennité de l’entreprise, il arrive que celle-ci soit aveugle, autiste, anesthésiée. Le bon sens n’a plus cours !

La démarche et les techniques de traitement de telles situations de rupture ne sont que la mise en pratique, dans des circonstances certes particulières et avec une rapidité de mise en œuvre inhabituelle, des grands principes qui régissent la profession informatique et qui constituent les fondements sur lesquels doit être établie une DSI moderne.

Bonne pratique n° 1 : y voir plus clair

Il s’agit, tout d’abord, de déterminer l’origine des problèmes ou, tout simplement, de comprendre la situation. Le diagnostic doit être rapide et sûr. Ce n’est ni une étude détaillée de l’existant, ni un audit.

En effet, en situation de crise, les repères et documents que l’on utilise habituellement n’existent pas ou, s’ils existent, sont soit faux, soit inutilisables.

Le budget, par exemple, est toujours faux. Il est donc totalement inutile de se lancer dans un audit laborieux et détaillé pour en faire le constat. Mais ce n’est pas la première priorité, il faut d’abord éteindre l’incendie puis travailler directement à le remettre sur pied et cela prend en général la période budgétaire, c’est à dire un an.

La documentation opérationnelle est au mieux incomplète. Elle est en général inexistante ou alors illisible car ne comportant aucune synthèse. Quoi qu’il en soit, en temps de crise, quand les alertes et les mauvaises nouvelles se succèdent de manière ininterrompue, on n’a guère le temps de lire !

Pour savoir ce qui se passe, il faut prendre le temps d’écouter et savoir écouter. On s’aperçoit alors qu’un chef de projet qui n’est pas capable de faire au pied levé un exposé sur le projet qu’il dirige avec une synthèse brillante sur les objectifs, les lignes de force, les principales difficultés, et qui, à toute question précise, renvoie sur ses adjoints, apporte tout simplement la preuve qu’il ne maîtrise pas son sujet et qu’il n’a rien compris. C’est hélas une situation assez courante. C’est presque toujours le cas lorsqu’un projet est en crise.

Procéder par interviews crée la confiance et permet ainsi de se faire accepter par l’organisation, préalable indispensable à la conduite du changement. Très souvent, les éléments de solution à la crise sont mentionnés par les collaborateurs eux-mêmes à qui on n’a jamais pris le temps de prêter attention.

Mais on ne récupère ainsi que les briques à partir desquelles il faudra bâtir une tactique crédible, ce qui nécessite beaucoup d’expérience et suppose beaucoup de bon sens. Il y a évidemment une manière pour faire les interviews, les informations recueillies doivent ensuite être recoupées, les faits vérifiés. Un bon diagnostic permet, sans études préalables interminables, de déterminer très vite les premières mesures à appliquer.

Toutes les situations sont différentes et on ne peut avoir aucun à priori sur le remède à appliquer. Lorsque le Titanic a piqué du nez, il est trop tard ! Toutes les situations ne se redressent donc pas, mais on ne le sait pas forcément tout de suite et, lorsque les termites ont ravagé les fondations, il n’est pas rare que des pans entiers du système d’information s’écroulent sans prévenir.

Pour reprendre en main une situation déstructurée, il faut avoir l’esprit structuré. La prise de conscience et l’élaboration des propositions de synthèse se font lentement, au fur et à mesure des interviews, avec beaucoup d’hésitations, de volte-face et d’enthousiasmes éphémères. Il est important de garder jusqu’à la fin la capacité de changer d’avis.

Bonne pratique n°2 : s’assurer de l’accord de la direction

Il s’agit essentiellement dans un premier temps de communiquer avec les décideurs en parlant leur langage et de s’assurer :

  • qu’ils sont à la bonne place pour décider des affaires les concernant
  • que la communication est organisée
  • que le reporting fonctionne de manière efficace et transparente.

C’est à ces conditions que les systèmes d’information seront mis véritablement au service des objectifs généraux de l’entreprise, qu’ils seront supportés par les directions utilisatrices et que les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement seront alloués.

Après la phase de diagnostic vient la difficulté d’expliquer à la direction générale en place qu’il faut maintenant faire différemment de ce qu’elle a toujours fait. Cet exercice de persuasion est plus facile lorsque l’équipe de direction vient de changer. Tout peut être dit, à condition évidemment d’y mettre les formes, mais tout ne doit pas forcément être dit publiquement.

Il faut savoir prendre des risques en situation de crise ; les directions générales le savent bien et elles suivent généralement les recommandations qui sont émises. Le manager de crise se doit d’exercer strictement son obligation de conseil. Il aura intérêt à le faire de manière très formalisée, par exemple sous forme d’un rapport mensuel qui sera prévu par contrat.

Si la phase de diagnostic a permis de proposer les grandes lignes de l’action à mener et les premières mesures à mettre en œuvre, elle ne comporte aucune analyse détaillée, en particulier des budgets car, comme cela a été dit précédemment, ces analyses nécessiteront, pour être réalisées, de longs mois de travail ; c’est la phase de remise en ordre.

Bonne pratique n°3 : éclairer l’avenir

Tout au long de la première phase d’intervention qui consiste à aider l’entreprise à sortir de l’impasse, tant la direction générale que les équipes ont besoin d’informations sur l’état exact de la situation et sur le déroulement des opérations.

Elles ont également besoin d’espoir pour pouvoir supporter la dureté de la crise et, sans pour autant prétendre délivrer une vision stratégique que l’on n’aurait pas le temps d’étayer dans cette période troublée, il est bon de donner des indications sur ce que pourrait être la période d’après crise.

Plusieurs évidences doivent être affirmées clairement, par exemple :

  • que l’on se mettra à un niveau technique à jour,
  • que les problèmes de sécurité font partie des préoccupations importantes à prendre en compte,
  • que l’entreprise a besoin pour son bon fonctionnement et pour sa compétitivité d’un niveau de service très supérieur à celui délivré jusqu’à présent,
  • que, bien entendu, la formation adéquate sera délivrée pour permettre au personnel de se mettre au niveau technique requis,
  • qu’en plus on fera appel aux meilleures compétences du marché pour l’aider en ce sens,
  • qu’il est prévu de faire entrer un peu de sang neuf,
  • que les projets sont le fait d’une équipe où chacun doit apporter sa pierre,
  • que le couplage de l’organisation, des processus et de l’informatique est indispensable,
  • qu’un projet normal est un projet qui marche,

Jusqu’à présent, en effet, et si l’on se trouve en situation de crise, c’est bien justement parce qu’on n’a pas procédé de cette manière et les collaborateurs ont du mal à croire que l’entreprise pourra du jour au lendemain changer de manière aussi radicale. Or, c’est bien ce qui va se passer pour juguler la crise.

Avant de faire, il faut dire ce que l’on va faire puis faire ce que l’on a dit. C’est la base de la qualité ! Mais cela permet surtout de prévenir les réactions de peur et donne la preuve au personnel qu’ils sont traités en adultes responsables et que l’on a besoin d’eux. Tous, y compris les syndicats et le comité d’entreprise, sont sensibles à une telle démarche. C’est la base d’une bonne collaboration.

Bonne pratique n° 4 : obtenir les moyens

Les directions générales se doutent bien qu’il va falloir investir, même si certaines annoncent en préambule qu’elles ont déjà trop dépensé et qu’elles ne veulent plus mettre investir davantage. Dans ce dernier cas, inutile d’insister, la situation ne peut évoluer favorablement !

Une mise à niveau se traduit couramment la première année par une augmentation des budgets de fonctionnement et d’investissements dans une fourchette de 20 % à 50 %. Le niveau réel de l’effort total à consentir n’est en général connu qu’au bout d’un an, une fois qu’on est sorti de la période de crise et que les budgets ont été nettoyés.

Il n’est d’ailleurs pas évident du tout que l’entreprise souhaite alors poursuivre son effort une fois sortie de l’ornière. C’est alors que l’on s’aperçoit de la difficulté qu’il y a à dépenser de telles sommes car, et surtout dans le cas où le budget initial était notoirement trop faible, des réflexes d’autocensure et d’autolimitation auront été acquis, dont il sera très difficile de se débarrasser.

Bonne pratique n° 5 : dire la vérité

Les constats que nous dressons lorsque nous sommes appelé à traiter une situation de crise ne sont en général pas reluisants et la voie à suivre pour en sortir est abrupte. Tout le monde le sait dès le début, il n’est donc pas utile de se voiler la face.

Si les constats factuels ne posent aucun problème pour être exposés et reconnus par les interlocuteurs, à condition d’être étayés par des faits incontestables, il n’en est pas de même des attitudes, des luttes de pouvoir, des jugements sur les personnes, des appréciations sur le bien-fondé d’une orientation, qui font certes partie du diagnostic mais peuvent être interprétés comme des attaques personnelles et ruiner d’un coup toute crédibilité.

Un rapport de diagnostic doit tout dire, mais, pour être libre, il doit être adressé au commanditaire, sous forme papier, de manière confidentielle et nominative. Charge à ce dernier d’en faire ce qu’il veut. La version adressée au comité de direction est en général expurgée.

La vérité est presque toujours bien reçue car en général les collaborateurs de l’entreprise la connaissent et c’est lui qui a aidé à la découvrir. Il faut avoir le courage de dire la vérité à tous et sous la même forme, c’est la première base de la confiance.

Bonne pratique n° 6 : créer immédiatement les ruptures

Aider une entreprise à sortir de l’impasse est une opération de chirurgie lourde et il vaut mieux, lorsque l’on opère, ne pas avoir la main qui tremble.

Cela demande du courage de prendre des mesures impopulaires et de les assumer face à la critique qui ne manquera pas d’apparaître. Ce sont les ruptures qui feront sortir de l’ornière et qui ouvriront la voie vers l’avenir (nouvelle organisation, nouvelles technologies, nouveau management, nouveaux défis…). Mais il faut dans le même temps veiller à préserver les forces et potentialités existantes.

Aucune situation n’étant semblable à une autre, c’est une mauvaise stratégie que de vouloir plaquer des recettes qui auraient réussi dans un autre environnement. Seul le sur mesure convient. La pertinence et la rapidité fondent la crédibilité de l’intervention à cette phase.

 Bonne pratique n° 7 : fixer des objectifs

L’explication des objectifs à atteindre doit permettre à chaque personne de savoir à quel objectif d’entreprise répond le travail qui lui a été confié.  En s’astreignant à ce travail d’explication, en éclairant la route au fur et à mesure qu’on avance, on gagne la confiance du personnel, sa coopération, sa considération. C’est l’essentiel du travail, tout le reste en découle.

Les objectifs doivent être clairs, accessibles, voire « déraisonnables ».

Objectif clair

L’objectif doit être clair pour être compréhensible par tous et mobilisateur.

Chacun doit ainsi savoir à quel objectif d’entreprise se rapporte la tâche qui lui a été confiée et ce, quel que soit son niveau dans la hiérarchie. Les objectifs techniques eux-mêmes doivent se raccrocher à des objectifs d’entreprise, faute de quoi ils ne sont pas pertinents.

Objectif accessible

Un objectif inaccessible discrédite celui qui l’a fixé et décourage l’équipe. Il faut donc veiller à donner toujours des objectifs accessibles et savoir que pour passer un obstacle important, il faut en avoir passé beaucoup de petits.

Objectif déraisonnable

Un objectif doit être motivant et la raison est mère de l’ennui. Un objectif considéré comme un peu fou engendre la créativité, brise le carcan des habitudes anciennes et permet aux meilleurs de se révéler.

Lorsqu’on reprend une situation en déshérence, il y a souvent tout à changer et on ne peut tout faire en même temps. Il y a donc à établir les degrés d’urgence en ne perdant pas de vue que seules des actions de fond peuvent porter remède à des problèmes court-terme, que ces actions peuvent être longues à mener et que l’urgence est là.

Le manager de crise est donc constamment confronté à des situations où il doit accepter des manières de faire qu’il sait devoir changer mais pour lesquelles il n’a, dans l’instant, pas les moyens de le faire. Les objectifs doivent être adaptés, bien sûr, dans leur horizon et leur ambition, à cette période de transition qu’est la période de crise.

Un manager qui a des exigences, qui sait obtenir les moyens d’une politique ambitieuse, qui sait montrer la voie, celle que personne n’osait emprunter, sera écouté, respecté, estimé.

Bonne pratique n° 8 : mobiliser les équipes

Tout bon projet est le fait d’équipes que l’on a su mobiliser sur un projet d’entreprise authentique, au-delà de ce qu’elles pensaient pouvoir faire.

Dans ce domaine, il convient d’engager les actions suivantes :

  • Motiver les équipes : la mise à niveau du management et la sélection attentive de ceux qui resteront sont les signes incontestables qu’un nouveau départ est possible sur des bases solides. L’expérience montre en effet que, souvent, des personnes sous estimées peuvent se révéler dans le nouveau contexte, et parfois de façon exceptionnelle. 
  • Faire des équipes en place les acteurs du renouveau : la grande difficulté sera de transformer l’esprit des équipiers pour en faire des « traceurs » là où ils étaient des suiveurs. C’est là que se révèleront les meilleurs éléments. Leur implication leur redonnera leur fierté et garantira leur fidélité.
  • Faire entrer du sang neuf : le changement passera par l’apport de compétences et d’idées nouvelles.
  • Faire confiance, créer la confiance : il faut prendre le risque de faire confiance à la nouvelle équipe, faute de quoi rien ne peut être fait. De la confiance naît la coopération, comportement indispensable à la gestion des projets complexes où chaque acteur a un devoir d’assistance mutuelle. C’est l’esprit d’équipe.
  • Introduire un esprit d’innovation: c’est en incitant les équipes à s’ouvrir sur le monde extérieur, à lire, à faire preuve de curiosité, à prendre des risques, à vouloir gagner, et en laissant les talents s’exprimer, qu’on crée les conditions de l’innovation, conditions favorisées par l’exemple venant d’en haut.

Bonne pratique n° 9 : rétablir l’opérationnel… et l’assurer

Le rôle du manager de crise permet de polariser toutes les énergies dans une même direction : assurer ou rétablir le fonctionnement des systèmes essentiels à l’activité de l’entreprise, systèmes qui sont souvent mal en point et dont les dysfonctionnements sont parfois occultés, voire niés.

Cela peut demander du temps, car, souvent, les causes sont profondes et on ne résout bien les problèmes à court terme qu’en ayant une vue à long terme. De plus, on ne peut traiter correctement des problèmes liés aux systèmes d’information sans traiter les problèmes d’organisation et de processus.

La période de crise est une période transitoire et l’opérationnel ne peut être assuré que lorsque les fondamentaux ont été rétablis. C’est au cours de cette période, au milieu du chaos s’il le faut, que l’on peut rappeler des évidences, mais qui avaient été oubliées depuis longtemps, telles que l’utilisation d’outils et méthodes professionnels, une bonne qualité de service.

Toutes ces notions étaient souvent ignorées ou n’avaient plus cours depuis longtemps, mais dont les évènements soulignent sans concession l’impérieuse nécessité, mais aussi, et aussi choquant ou provocateur que cela puisse paraître, le respect du client : une des caractéristiques permanentes des directions informatiques en crise est en effet le manque total de respect qu’elles ont pour leur client. Ces errements, souvent très anciens, ont invariablement pour origine le management global de l’entreprise et la relation qu’elle a établi avec son informatique.

Bonne pratique n° 10 : travailler… et « laisser braire »

Quelle que soit la qualité de l’intervention du manager de crise, il sera critiqué. La critique est la plupart du temps tolérée par la direction générale qui a pourtant fait appel à lui et, au café du commerce, les aigris et les braillards refont les batailles en démontrant « comment il aurait fallu qu’on… ».


Portrait du manager de crise

Cadre dirigeant, connu et reconnu, le manager de crise est surdimensionné pour être capable de dominer le sujet sur le champ. Il a donc la compétence et l’expertise nécessaires et à jour. Homme d’expérience, il doit pouvoir tenir la barre fermement ; c’est un opérationnel avec à la fois des qualités de conseil.

Il doit avoir la vision stratégique, mais il doit constamment valider ses décisions par une analyse de détail. Aucune situation ne ressemblant à une autre, il lui faut à la fois une faculté d’adaptation immédiate et un très grand pragmatisme et surtout la capacité à démarrer une mission sans aucune idée préconçue.

Il n’y a donc pas de démarche standard, d’autant plus que, en période de crise, on est amené à gérer des situations ubuesques et qu’il est impossible d’y appliquer des méthodes autres que celles du bon sens et du pragmatisme. Cela nécessite évidemment beaucoup d’expérience.

Il faut de plus, à chaque fois, être capable d’évaluer très vite l’état des lieux et de poser un diagnostic. Sans diagnostic immédiat, impossible d’exercer ce métier.

Gérer une crise n’est pas facile et les candidats ne se bousculent pas ! D’autant plus qu’il faut à chaque fois faire le « sale boulot » que les entreprises auraient dû faire depuis longtemps !

Les principales qualités du manager de crise sont les suivantes :

  • rapidité dans l’analyse et les propositions de plan d’action ainsi que dans la prise de décision,
  • capacité à établir un sens de l’urgence et à créer une ambiance de travail,
  • autonomie,
  • sens du résultat,
  • charisme,
  • résistance au stress,
  • forte capacité de travail.

Enfin, et surtout, le manager de crise doit être indépendant pour pouvoir proposer des solutions hardies qui étaient inenvisageables, et missionnaire pour faire partager sa foi dans la réussite de leur mise en œuvre. Main de fer dans un gant de velours, le manager de crise est synonyme de changement. Pour sauver ce qui peut l’être, il doit emporter l’adhésion d’équipes qu’il n’a pas choisies, ce qui n’est pas aisé dans une entreprise en proie au doute !

C’est la grande différence entre un manager de crise et les cabinets de conseil qui, en général, écrêtent la structure pour placer leurs consultants à tous les postes stratégiques. En comparaison, le recours à un manager de transition est donc peu coûteux et surtout peu traumatisant pour les équipes. Et c’est encore plus économique avec un DSI compétent, si ce dernier a le caractère qu’il faut !

Dans un contexte de pression permanente, en particulier lorsque le devenir de l’entreprise est en jeu, ce qui arrive, il faut des résultats rapides. Certains les voudraient même immédiats, ce qui est en général impossible tant les causes sont profondes.

Or il faut s’attaquer aux racines du mal si l’on veut une guérison durable. La difficulté est donc de conjuguer une action à long terme avec des résultats tangibles dans un laps de temps très limité.

Le manager de crise n’a pas droit à l’erreur, car si on l’appelle, c’est pour résoudre le problème, non pour en rajouter ! Il doit savoir s’insérer dans l’organisation la heurter, savoir écouter, faire la part des choses et proposer très vite des solutions parfois innovantes, souvent évidentes. Les résultats doivent être rapides, visibles, mesurables, durables.