Lors de l’événement organisé par le Cigref à l’occasion de ses cinquante ans, Philippe Guillemot, directeur général d’Elior Group, a expliqué comment son groupe de services s’est adapté à la crise sanitaire.
« C’est la première fois, dans l’histoire de notre métier, qu’une crise nous impacte et nous fait perdre 70 % de notre chiffre d’affaires, du fait de la fermeture des écoles et des restaurants d’entreprises », déplore-t-il. Elior était déjà challengé par les plateformes « qui prétendaient faire notre métier mieux que nous », raille-t-il.
La crise a été l’occasion, pour Elior, d’adapter sa stratégie. « L’organisation a plutôt bien réagi, avec des équipes en modes projet et transverse et des collaborateurs capables de « sortir de la boîte » et d’utiliser leurs propres expériences de consommateur pour inventer nos solutions. Nous avons également fait appel à des start-up et acceptons d’échouer. On ne met plus deux ans à planifier ce que l’on aurait déployé pendant trois ans : on accepte d’essayer même si ça ne marche pas », assure le directeur général d’Elior.
Dans un groupe qui compte 110 000 collaborateurs, dont 90 000 dans des sites où il y a moins de cinq personnes, « on imagine aisément que lorsque l’on a une excellente idée au niveau du siège, elle n’existe vraiment que lorsqu’elle est déployée dans des milliers de sites (23 500 restaurants dans le monde, dont 9 000 en France). Toute la difficulté est d’accompagner et d’éduquer aux technologies et faire en sorte qu’ils n’en aient pas peur et considèrent qu’elles vont nous aider à conserver leur emploi. On sait que, de manière structurelle, nous perdrons 20 % de nos activités, il faut donc inventer de nouveaux emplois. Et dans un temps contraint. Après le confinement, nous savions que l’on ne pourrait plus faire comme avant », explique Philippe Guillemot.
Cela passe par un enrichissement des offres. « Pour faire mieux que les plateformes, il nous faut utiliser les données dont on dispose, pour les transformer en informations puis en connaissances. Nous avions des trésors inexploités, par exemple des bases de données avec des milliers de recettes et on n’en faisait rien. En exploitant nos données et avec un bon algorithme, nous avons par exemple introduit un Nutriscore pour informer nos clients sur la qualité nutritionnelle de ce qu’ils consomment. »
Prochaine étape : passer de l’information à la connaissance. « Il s’agit de répondre à la question suivante : en quoi fournir une information influence le comportement de nos clients et leurs modes de consommation ? Ce qui nous permettra d’ajuster nos offres et de mieux gérer les flux. D’autant que, dans notre métier, l’un des challenges est la lutte contre le gaspillage alimentaire. » Des sites, qui, auparavant, avaient une fréquentation relativement stable, se retrouvent aujourd’hui à gérer des fluctuations très importantes, entre quelques dizaines à quelques centaines de personnes.. « Il nous faut travailler autrement », prévient Philippe Guillemot.
« La gestion des flux, nous avons essayé de l’optimiser, mais avec beaucoup de difficultés. Nous avons une application dont le taux de pénétration était faible avant la crise du Covid, notamment du fait d’inquiétudes sur l’utilisation des données et sur l’emploi des collaborateurs. La crise a fait tomber ces barrières : les clients nous disent vouloir des solutions sans contact. Nous avons donc enrichi nos solutions existantes et développé de nouvelles fonctionnalités, par exemple pour sortir du mode « cafeteria » pour aller vers le mode « click and collect », comme sur une plateforme, où l’on commande et on vient chercher », explique le directeur général d’Elior Group.