Des contraintes de production en flux tendus, des exigences de performance, des obligations de reporting et des besoins de pilotage ont conduit deux groupes industriels français à adopter la technologie In-Memory pour y répondre.
Le sixième équipementier automobile mondial, Faurecia, spécialisé dans les sièges, les technologies de contrôle des émissions, les systèmes d’intérieur et extérieurs, suit un business model spécifique : « Nous gérons des grands contrats sur plusieurs années et au niveau mondial », résume Bertrand Eteneau, DSI. Le groupe (94 000 personnes, 17,4 milliards de chiffre d’affaires) est implanté sur 320 sites dans 34 pays, avec également une trentaine de centres de recherche et développement. Les équipementiers automobiles sont confrontés à deux contraintes. D’une part, livrer en flux tendus leurs clients et, d’autre part, faciliter l’analyse et le pilotage de leurs opérations financières telles que le calcul de la profitabilité ou celui de la marge opérationnelle, dont le niveau est globalement faible dans le secteur automobile et, plus encore, chez les équipementiers.
« Si nous ne sommes pas capables d’approvisionner nos clients, souvent à la minute près, nous devons payer des pénalités », précise Bertrand Eteneau. D’autant que le nombre de combinaisons dans les gammes de produits est significatif : « Nous n’avons pas deux produits qui se ressemblent : il peut y avoir, par exemple, jusqu’à 10 000 combinaisons possibles pour les sièges, ajoute le DSI. Et comme nous recevons l’ordre de fabrication seulement quatre heures avant la livraison, la problématique des approvisionnements est critique. Nous devons sans cesse replanifier. »
Éviter les ruptures dans les chaînes d’approvisionnement
Pour la gestion de la production et des approvisionnements de ses usines ainsi que pour l’analyse et le pilotage de ses opérations financières, Faurecia a déployé la plate-forme Hana (de SAP). « Cela répond à deux besoins : le pilotage financier en temps réel de l’entreprise et la gestion des opérations quotidiennes au sein des différentes usines du groupe, avec la gestion des stocks, des approvisionnements et, plus largement, pour la planification des ressources de production (Material Requirements Planning ou MRP), précise Bertrand Eteneau. Et le fait de travailler avec des données fraîches diminue les risques de rupture dans la chaîne d’approvisionnement. »
Le DSI ajoute : « Nos usines ayant des volumes de commandes et de production très différentes, capables d’évoluer d’un jour à l’autre, le groupe a atteint la limite de ses systèmes d’information, notamment en raison des recombinaisons sur les chaînes de production, qui pouvaient prendre jusqu’à 21 ou 22 heures. Les technologies que nous utilisions pour gérer les stocks ou les approvisionnements sur certaines usines n’étaient plus suffisantes pour répondre aux évolutions et aux prérequis du métier. » Avec les technologies traditionnelles de bases de données et de business intelligence alors mises en œuvre, les entrepôts de données se multipliaient et il fallait plusieurs jours à Faurecia pour calculer, par exemple, sa profitabilité ou sa marge opérationnelle. « Pour obtenir les résultats, il faut une armée de contrôleurs avec des fichiers Excel, c’est lourd et difficile », déplore Bertrand Eteneau.
Au-delà, le groupe devait être capable de mesurer en permanence l’écart entre sa profitabilité réelle et sa profitabilité théorique. Si un contrat était signé avec une profitabilité théorique de 5 %, marge visée par Faurecia, et qu’il dérivait d’un ou deux points en raison, par exemple, de délais de production non respectés, c’est la profitabilité du groupe qui pouvait être impactée, pour plusieurs années.
Ainsi, Faurecia devait non seulement améliorer la fiabilité des calculs de ses indicateurs de performance mais aussi leur rapidité, dans un contexte rendu plus complexe par le passage d’une instance unique à trois instances et à des volumes très importants (avec la gestion des flux Just In Time et du Just In Sequence). « Pour les métiers, c’est une évolution extraordinaire et cela atténue l’image des équipes de la DSI comme empêcheurs de tourner en rond. Et pour les équipes en charge de la business intelligence, c’est la perspective d’un travail plus valorisant car il faut bien reconnaitre que faire évoluer des entrepôts de données reste une tâche plutôt aride…» Grâce à l’analyse en temps réel de ces indicateurs de performance, les contrôleurs de gestion de Faurecia peuvent désormais passer plus de temps sur l’exploitation et l’analyse de grands volumes de données, et, de fait, les directeurs de programmes peuvent prendre les mesures correctives le plus vite possible.
Deux usines pilotes
Dans un premier temps, Faurecia a implémenté un pilote de la plateforme SAP Hana dans ses usines de Munich et d’Alabama afin d’être capable d’élaborer ses MRP en quelques minutes là où il lui fallait plusieurs heures auparavant. « Les ordres fermes non prévisionnels de commandes arrivent un mois avant la livraison mais ces ordres fermes peuvent parfois être modifiés jusqu’à quatre heures avant celle-ci », rappelle Bertrand Eteneau. Il a donc fallu que Faurecia puisse calculer ses plans de production et d’approvisionnement et adapter ses MRP presque en temps réel en fonction des ordres fermes passés par ses clients. Le groupe Faurecia prévoit de déployer Hana dans l’ensemble de ses sites de production.
Vinci Energies : consolider le reporting de 1 500 filiales
Dans le cadre de sa stratégie de croissance externe, Vinci Energies a décidé, en juin 2012, d’opter pour une refonte totale de son système de traitement de données. Après plusieurs acquisitions successives, le groupe faisait coexister plusieurs outils pour l’analyse de ses données. En particulier, les acquisitions successives de Cegelec et de Faceo en 2010, puis de GA Gruppe en 2012, ont entraîné, pour Vinci Energies, une multiplication des plates-formes ERP au sein de son SI. Or, le métier a besoin d’informations consolidées au niveau du groupe quelle que soit la provenance des données.
C’est pourquoi, en attendant des décisions sur un éventuel ERP unique et son déploiement, Vinci Energies a décidé d’investir dans un projet de refonte de son système de business intelligence, avec comme objectif la convergence vers un outil unique de reporting. « Le groupe a doublé de taille en trois ans et, à chaque fois que nous procédons à une acquisition, nous devons toujours intégrer un nouveau système d’information et souvent un nouvel ERP, confirme Dominique Tessaro, DSI de Vinci Energies. Il y a donc des besoins, pour les métiers, de consolidation des informations dans des outils de business intelligence. »
Pour Vinci Energies, les enjeux sont doubles. D’un côté, pour les métiers, il s’agissait d’accéder à un décisionnel consolidé et partagé qui pourra, à terme, couvrir l’ensemble des indicateurs nécessaires aux fonctions achats, RH et finance, et permettre de proposer de nouveaux services d’analyse des données. D’autre part, pour les équipes de la DSI, il s’agissait de simplifier les architectures décisionnelles.
Le projet a été poussé par la direction générale, qui a besoin de reporting pour les 1 500 sociétés qui composent le groupe. D’autant que la masse de données est énorme : « Les achats représentent l’équivalent de 40 % de notre chiffre d’affaires, le catalogue produits peut compter jusqu’à 1,5 million de références, et nous avons donc besoin d’analyser plusieurs dizaines de millions de lignes », précise Dominique Tessaro, qui a lui aussi opté pour la solution SAP Hana, « afin d’accélérer la satisfaction des demandes issues des métiers. » Le pilote de la solution a été réalisé sur des tableaux financiers agrégeant, sur plus de huit tableaux d’analyse, la mesure actuelle de l’activité du groupe. Les analyses peuvent se décomposer, pour plus de lisibilité, par marque, par réseau, par entreprise ou par pôle de management. « La maîtrise d’ouvrage n’avait pas vraiment pris conscience des possibilités de la solution. C’est le rôle de la DSI de lui proposer des perspectives et nous ne sommes plus perçus comme un frein à l’évolution des solutions de reporting. »
La question du calcul précis retour sur investissement n’en est vraiment pas une. « Le ROI ? Peu importe son montant, on sait qu’il sera positif, assure Dominique Tessaro. Si l’on gagne ne serait-ce que 0,5 % sur un volume de dix milliards, cela couvre largement les investissements, et nous économiserons en parallèle sur les infrastructures. » Pour le DSI de Faurecia, c’est davantage la performance opérationnelle qui importe : « Si nous ne sommes pas performants, nous payons des pénalités à nos clients… et nous n’aimons pas payer des pénalités ! »
La technologie In-Memory, c’est quoi ?
Le principe de la technologie In-Memory est simple : au lieu de stocker des données sur des disques durs, elles le sont directement en mémoire. En utilisant des algorithmes de compression et de structures de base « en colonne », on obtient des gains significatifs en temps de réponse. Il est donc possible d’analyser d’importants volumes de données, d’y accéder instantanément, de réaliser des opérations en traitement parallèle et des calculs à la volée et de répliquer les données des systèmes de gestion avec des temps de latence quasi-inexistants.