Geodis : le Business Process Management pour améliorer la relation client

Afin de répondre aux attentes de ses grands clients, le groupe de logistique et de transport a mis en place une solution pour orchestrer les processus de suivi des demandes clients. Philippe Poirson, DSI corporate de Geodis témoigne.

Historiquement, la logistique, la messagerie et l’express, le transport routier et le freight forwarding forment le cœur de métier de Geodis. Depuis quelques années, le groupe a également développé un ensemble de prestations de services à valeur ajoutée autour de ces activités afin de répondre à de nouvelles attentes émanant des clients. « Aujourd’hui, les clients souhaitent un guichet unique ainsi qu’un reporting homogène et centralisé, afin de gérer efficacement et de manière industrialisée l’ensemble de leurs demandes », explique Philippe Poirson, DSI Corporate du Groupe Geodis. Cette démarche nécessite de mettre en œuvre de nouveaux processus transverses, supportés par des solutions mutualisées, s’intégrant avec les différents systèmes d’informations existants.

Pour répondre aux premières demandes, le groupe a d’abord mis en place des solutions de workflow spécifique, permettant notamment d’effectuer un suivi des activités. Rapidement, des problèmes liés à l’obsolescence des technologies et des produits sont apparus, alors que les besoins de reporting et d’intégration des processus étaient toujours croissants. En quête d’agilité, Geodis envisage alors une approche plus globale, celle du Business Process Management (BPM) ou gestion de l’exécution des processus métiers.

« Le BPM n’est pas l’artère centrale du SI, c’est un élément complémentaire qui permet d’orchestrer des processus. »

« Nous avons déjà mis en place un bus d’entreprise (ESB) qui nous permet de communiquer de manière homogène vers l’extérieur (les clients, les partenaires) et de structurer les échanges, précise le DSI. Par ce biais, nous avons expérimenté une première approche orientée processus, mais à un niveau assez technique. Nous avions besoin de compléter nos solutions par des fonctions de gestion de processus métier, permettant une implémentation simple et agile. » Dans ce contexte, le BPM apparaît comme un bon complément, offrant la rapidité et la facilité de mise en œuvre souhaitée.

Le groupe doit en effet répondre à plusieurs besoins : il importe, tout d’abord, de satisfaire aux exigences de réactivité des clients et être en mesure de leur proposer la visibilité attendue sur le niveau de service. Il faut, ensuite, pouvoir cordonner de nombreux acteurs, tant internes (direction de la supply chain, opérationnels, commerciaux) qu’externes (clients et partenaires). Une volonté d’industrialiser et de standardiser les processus transparaît également dans les demandes, les acteurs métiers souhaitant, par exemple, réutiliser certains processus de gestion client existants pour les appliquer à d’autres, moyennant quelques adaptations.

Améliorer le suivi de la relation client

Pour répondre à ces enjeux, le cahier des charges est construit autour d’un système industrialisé de gestion des demandes, capable de couvrir l’ensemble des métiers de l’entreprise. Ce guichet unique doit garantir aux clients une bonne qualité de service, avec un niveau de reporting pertinent et une communication en temps réel. Selon Philippe Poirson, « le projet était un projet de gestion de la demande : il fallait faire en sorte que toutes les demandes de grands comptes passent par des « tours de contrôle », des services chargés de répartir les demandes dans les différents services opérationnels, de vérifier que les demandes de transports sont correctement exécutées, et ensuite de fournir le reporting des actions réalisées ».

La solution devait satisfaire à quatre principaux critères :

  1. La capacité d’intégration : « dans un projet de BPM, il faut tenir compte de l’existant en matière de système d’information », souligne le DSI. Dans le cas de Geodis, l’intégration avec les outils de communication, et notamment le portail, était primordiale.
  2. La possibilité d’effectuer des simulations : Geodis souhaitait pouvoir simuler l’exécution des processus avant leur mise en place, aussi bien sur des aspects économiques que sur des critères de performance, « deux logiques différentes de montage du retour sur investissement des projets ».
  3. La réutilisation des processus mis en place, afin de capitaliser sur l’existant et de réduire les coûts. Dans ce type de projets, « ce qui coûte cher, ce sont les interfaces et l’intégration », estime Philippe Poirson.
  4. Les capacités de supervision des processus, afin de contrôler leur bonne exécution. Il s’agit de savoir ce qui a été effectué, comment et dans quel délai, afin de remonter des statistiques détaillées sur l’exécution de la prestation par client, ou par division. De cette façon, l’entreprise obtient une traçabilité complète sur les demandes et peut répondre à tout moment aux clients, en leur indiquant par exemple qu’elle dispose d’un récépissé pour telle livraison à telle date.

Geodis entame ensuite la mise en œuvre d’un premier processus. Ce projet a démarré par une consultation des différents acteurs pour déterminer ce qu’il convenait de mettre en place : le processus a tout d’abord été décomposé, puis développé, testé et enfin déployé. « L’outil permet de modéliser le processus, puis de l’implémenter directement, à partir de cette modélisation. Ce lien entre la phase de design et la mise en œuvre est un point fort, qui permet de coller au processus demandé, avec une notion de construction narrative de la solution », relate le DSI.

« S’il n’y a pas de projet métier, il n’est pas nécessaire de mener un projet BPM. »

Pour la mise en place, le Groupe a adopté une démarche agile. Quatre mois ont été nécessaires pour déployer le processus souhaité, dont trois semaines de tests. « Le projet était tiré par les services opérationnels en charge de la relation client, insiste Philippe Poirson. Le point de départ, c’est le métier et non pas l’IT. » Les différentes parties prenantes ont tout de suite été impliquées, d’autant que le délai était court. Au total, la réalisation a nécessité deux représentants côté métiers, deux experts fournis par un prestataire et un collaborateur de la DSI. L’installation a été confiée à d’autres équipes plus techniques. En termes de budget, outre l’investissement initial, Geodis estime qu’un tiers des coûts du projet étaient liés à l’élaboration du processus, un tiers à la réalisation et un tiers aux tests et à l’accompagnement au changement.

Le BPM opère principalement une fonction de coordination et d’assemblage, il ne remplace pas les interactions humaines. « Par rapport à l’outil de workflow, l’avantage essentiel réside dans son intégration dans les espaces de communication et le fait qu’il prévoit en natif des connecteurs vers des applications, vers des bases de données, vers des messageries, souligne Philippe Poirson. C’est un univers intégré. » Les premiers gains constatés portent sur la rapidité d’exécution, la fiabilité et le suivi des processus. Le projet était porté par la direction métier et il a été piloté par la DSI. «Les processus sont aux mains des métiers, ils en restent propriétaires », souligne le DSI, qui précise : « Concrètement, les métiers peuvent modifier eux-mêmes un écran de saisie, car l’outil est suffisamment simple. »

Chez Geodis, l’outil BPM est une solution mutualisée. La solution est mise à la disposition des divisions pour leur utilisation propre. Ainsi, « l’investissement est mutualisé, le retour sur investissement (RSI) est démultiplié ».

Pour assurer la conduite du changement, un plan de communication a été mis en place au niveau du groupe et au niveau des équipes métiers. Les mesures d’accompagnement se sont concrétisées par des réunions de travail, puis des présentations avec des démonstrations. « Celles-ci étaient les meilleurs facteurs de communication et de transmission de l’information », assure Philippe Poirson. Mais selon lui : « La véritable clef du succès,c’est que le projet vienne des gens du métier. Ensuite, le rôle de la DSI est de les aider à transposer l’outil dans leurs problématiques opérationnelles, afin qu’ils sachent ce qu’il va leur apporter au quotidien. »

Geodis a d’ores et déjà mené un second projet de BPM pour un autre client, déployé fin avril 2013. Ensuite, l’objectif est de se concentrer sur la vente en interne de la solution, afin que les autres divisions se l’approprient également. « Pour cela, nous nous appuierons sur le retour d’expérience des deux premiers projets », prévoit le DSI. D’autres réflexions sont en cours sur les processus d’alerte et la gestion des achats, notamment pour le workflow de validation.


Points de vigilance et bonnes pratiques

  • Disposer des bonnes compétences. Dans un projet de BPM piloté en méthode agile, il est impératif que les experts métiers soient présents aux côtés des experts techniques, pour des raisons de réactivité. L’architecte est aussi important, car il vérifie que l’implémentation est faite correctement.
  • Décrire le processus dans le détail dès le début, notam­ment en termes d’acteurs (qui fait quoi) et d’exécution.
  • Ne pas chercher à recréer dans l’outil BPM des parties du système opérationnel. Par exemple, il peut s’avérer tentant de mettre des règles métiers dans le BPM, mais il faut laisser les règles opérationnelles dans le système opérationnel.
  • Gérer les « non-événements », comme des confir­mations d’ordres qui ne parviennent pas à l’entreprise. Il faut pouvoir remonter une alerte dans le cas de figure où une action n’a pas été effectuée, afin de générer un ticket d’incident.
  • Impliquer les parties prenantes dans la conception. Dans la construction de la solution de Geodis, l’interface client a ainsi été faite avec les clients. « L’outil permet de standardiser le processus tout en se différenciant sur les méthodes d’accès proposées aux clients », précise le DSI.
  • Connaître son rôle : le DSI doit être vigilant sur l’architecture, dans la mise en œuvre et le bon positionnement des services. Il doit également avoir un rôle de conseil, afin de lever les freins politiques en expliquant ce que l’entreprise va gagner.
 Piloter des processus ou piloter par les processus ?
 Piloter des processus  Piloter par les processus
 Identifier certains d’entre eux  Une direction générale engagée
 Déterminer des indicateurs  Une organisation adaptée
 Définir les actions à conduire  Une démarche possible et une gouvernance ajustée
 S’assurer de leurs réalisations  Une conduite du changement adéquate
Passer à d’autres processus  Un système de pérennisation pour conforter les acquis et assurer le développement.
Source : Club des pilotes de processus.