La dématérialisation, un marché porté par les obligations réglementaires

Xerfi vient de publier une étude consacrée au marché de la dématérialisation de documents, réaliséee par Thomas Roux, consultant chez Xerfi.

Selon cette étude, outre la transformation digitale des entreprises, la dématérialisation des documents est portée par de nombreuses obligations réglementaires en sa faveur. Et les acteurs du secteur continueront d’en profiter.

Depuis 2016, le marché français a ainsi progressé de plus de 6% par an pour frôler les 10 milliards d’euros en 2023. Et la généralisation de la facturation électronique prévue entre 2026 (émission obligatoire pour les ETI et les grandes entreprises) et 2027 (émission obligatoire pour les PME et TPE) constituera un pilier fort de la croissance des prestataires de services et des éditeurs de logiciels.

Au-delà, l’élargissement de la base de clients, la digitalisation croissante des organisations, les incessants progrès technologiques ou encore l’apparition de nouveaux besoins tireront la croissance. Le marché de la dématérialisation devrait ainsi s’envoler de 7% par an d’ici 2026 pour dépasser les 12 milliards d’euros.

Pour autant, les acteurs devront améliorer leurs performances financières. A ce titre, miser davantage sur l’automatisation semble incontournable face à des frais de personnel qui ont augmenté bien plus vite que le chiffre d’affaires de 2020 à 2023. Point positif : le ralentissement des salaires sera facilité par une inflation globale plus mesurée qu’en 2022 et 2023.

Le papier reste encore très présent dans les habitudes des entreprises françaises : plus d’une sur deux continue en effet d’imprimer des documents avant de les réintégrer dans le système informatique.

Ce conservatisme contraste avec l’incessant développement digital des outils de dématérialisation, notamment en matière d’intelligence artificielle. Force est de constater que d’importants freins culturels doivent encore être levés pour accélérer la croissance du marché. Les professionnels de la dématérialisation sont donc invités à effectuer un véritable travail pédagogique pour libérer ce potentiel.

La dématérialisation des processus documentaires au sein des grands comptes est d’ailleurs encore largement perfectible. Nombre de solutions technologiques existantes ne sont ainsi toujours pas déployées chez cette catégorie de clients.

En parallèle et pour élargir leurs débouchés, les professionnels de la dématérialisation doivent redoubler d’efforts pour conquérir les PME/TPE mais aussi les acteurs publics. Par le biais d’obligations réglementaires (généralisation de la facturation électronique) ou en raison d’une plus grande maturité, ces derniers vont afficher des besoins en matière de dématérialisation qui ne vont qu’augmenter ces prochaines années. Faire l’impasse sur cette manne serait une erreur stratégique, selon Xerfi.

Globalement, les besoins ne cessent d’augmenter. Les projets de dématérialisation deviennent de plus en plus transverses que ce soit au niveau fonctionnel, sectoriel et géographique. Les professionnels devront ainsi miser sur des positionnements multispécialistes pour y répondre. L’élargissement des besoins des donneurs d’ordres en matière de gestion des processus documentaires va inexorablement favoriser les stratégies one-stop-shop (ou guichets uniques) au sein des professionnels de la dématérialisation. Au-delà d’une incursion plus large sur la filière de la dématérialisation, les acteurs se doivent désormais de proposer une offre transverse que ce soit sur d’autres pans du BPO (relation client, soutien à la production, FM, etc.) et/ou sur les activités connexes comme le conseil ou l’analyse de la data. Ces positionnements multispécialistes constitueront un atout clé pour conquérir et fidéliser durablement les clients.

Déjà très avancés en matière technologique, ils intègrent peu à peu les dernières avancées en matière d’IA générative. Les nouveaux procédés vont permettre en effet d’encore mieux fiabiliser les solutions proposées aux clients tout en augmentant les gains de productivité en interne. L’ajout de nouvelles fonctionnalités pour le client associé à une meilleure efficacité en interne permettra d’augmenter la rentabilité des solutions proposées. Mais face aux nombreuses craintes en matière de sécurité des données, l’enjeu pour les professionnels sera de rassurer leurs clients sur les avantages et les limites de l’IA générative appliqués à la dématérialisation des documents.

Les grands leaders de la dématérialisation (Esker, Docaposte, Parangon, Tessi, Quadient, Exela, etc.) ont déjà amorcé le virage vers l’IA générative via des lancements internes ou des alliances.

L’émergence de l’IA générative va remettre à plat les modèles organisationnels actuels avec une meilleure autonomie des utilisateurs (grâce aux modèles no ou low code) et une réallocation des ressources humaines en interne.

Cela nécessitera de conséquents efforts RH (formation, organisation) et de communication pour démystifier les nombreuses craintes liées à l’IA générative.

Croissance externe et alliances au menu des prestataires

Mode de croissance historiquement très utilisé dans la dématérialisation des documents (et dans le BPO au sens large), la croissance externe a vu son coût grimper avec la hausse des taux d’intérêt.

Dans ce contexte, les alliances vont à l’évidence se renforcer à court et moyen terme. Elles représentent en effet une alternative de premier choix (et à moindre coût) pour proposer une offre originale et créatrice de valeur.

L’impératif de maîtriser les dernières technologies d’IA renforce encore plus la pertinence des partenariats. En atteste, l’alliance conclue en novembre 2023 entre Docaposte, LightOn, Aleia et NumSpot, pour lancer la première solution souveraine et industrielle d’IA générative.

La co-création doit également se faire avec les clients pour cerner leurs besoins précis et leur proposer des solutions sur mesure. Cette approche est d’après nous primordiale face au caractère toujours très anxiogène lié au besoin de sécurisation des données.

Le marché s’oriente ainsi vers une scission de plus en plus forte entre les gros acteurs, solides financièrement qui pourront poursuivre leurs stratégies d’acquisitions et les plus fragiles qui seront cantonnés à un développement plus lent basé sur la croissance organique et les partenariats.

Conséquence : les écarts de parts de marché devraient s’accroître. Les grands leaders actuels continueront de dominer le marché ces prochaines années. S’il ne faut pas exclure l’arrivée de nouveaux entrants, ces derniers occuperont des niches (savoir-faire technologique ou sectoriel).