Cela pourrait être un des thèmes du jeu « Questions pour un champion » : « Je suis un pays qui n’a pas le droit de demander deux fois dans une vie la même information à ses citoyens, dans lequel quasiment toutes les démarches s’effectuent en ligne avec une carte unique, où l’on peut voter depuis son canapé, créer une entreprise en moins de vingt minutes et où l’accès à Internet est un droit fondamental. Je suis… Je suis… L’Estonie ! »
Après plusieurs décennies d’occupation soviétique, « il devient nécessaire de sortir de cette administration et de marquer une rupture avec le passé », rappellent les auteurs, Violaine Champetier de Ribes, fondatrice de l’agence de stratégie d’influence Le Meunier Qui Dort, et Jean Spiri, responsable du développement stratégique de OnePoint, groupe spécialisé dans la transformation numérique. Il fallait notamment créer une administration à partir d’une page blanche, avec une densité de population très faible et une contrainte financière qui ne permettait pas d’embaucher une armée de fonctionnaires.
D’où l’émergence d’un « État plateforme », dont les auteurs nous expliquent la genèse et les caractéristiques, avec « une architecture numérique conçue en partant des besoins des citoyens. ». Cette plateforme, baptisée X-Road, repose sur trois piliers : d’abord, une infrastructure, « système de registres et d’échanges de données qui permet aux entités publiques et privées de partager des données, avec une interopérabilité globale. »
Ensuite, un système d’identification numérique sécurisé, utilisé par 90 % de la population. Enfin, une couche de services accessibles via divers portails. Un modèle de Government as a Platform ou de Country as a Service qui, selon les auteurs, est exportable.« Et si le modèle estonien, entièrement numérique, transparent, décentralisé, à l’écoute de ses utilisateurs, apportait la solution que nous attendons tous ? », se demandent les auteurs. En particulier face aux GAFA, « prédateurs des Etats qui dominent la nouvelle l’économie mondiale des données », pour réhabiliter l’Etat-nation. Il s’agit ainsi d’éviter que les GAFA ne puissent apporter des solutions meilleures que celles proposées par les Etats.
Demain, tous estoniens ? L’Estonie, une réponse aux GAFA, par Violaine Champetier de Ribes et Jean Spiri, Edition 1014 Cent Millle Milliards, 2018, 231 pages.