Le Printemps refond son système d’information pour supporter ses processus métiers

Le Printemps, grand magasin spécialisé dans la mode et le luxe, a choisi de changer son système de gestion et de rebâtir son reporting. Un projet de trente mois et de vingt millions d’euros.

Présent dans les domaines du luxe, de la mode, de la beauté, des accessoires et de la maison, le Printemps gère actuellement près de 1,5 million de références élémentaires (en anglais, SKU : stock-keeping units), quatre collections par an et environ 2 000 marques. Il gère dix-sept magasins en France, dont les bâtiments historiques du Printemps Haussmann, et emploie près de 3 500 personnes.

En 2006, le groupe a entamé une vaste démarche de repositionnement de son enseigne, conciliant rénovation des bâtiments, réagencement de l’intérieur des magasins et actualisation du portefeuille de marques.

L’objectif était à la fois de mettre l’accent sur le luxe et d’offrir une expérience de shopping haut de gamme aux clients. Paolo de Cesare, nommé PDG de l’enseigne en 2007, réalise rapidement que pour atteindre ces objectifs, « il fallait investir dans la technologie ». Est alors créé le poste de directeur des systèmes d’information et des flux marchandises, un poste qui n’existait pas à l’époque où le Printemps faisait partie du groupe PPR. Arnaud Lescoart est nommé pour assurer cette double fonction.

L’entreprise entame alors une vaste démarche de refonte de son système d’information, dans le prolongement de la rénovation des magasins. Cette démarche se traduit par un ensemble de projets stratégiques et complémentaires, notamment le projet Oscar, qui regroupe les transformations apportées au modèle de gestion, et le projet Bird, qui consiste à moderniser et optimiser le processus de reporting.

Oscar ou la mise en place d’une gestion unitaire intégrée

En 2007, le Printemps était équipé d’un système conçu pour une gestion de masse (prix au poids, à la longueur ou au volume), inadapté à un marché de la mode dans lequel la fraîcheur des collections, leur cohérence et leur adéquation avec les envies des consommateurs étaient devenues primordiales. Pour remplir ces nouvelles exigences, le groupe décide alors de changer sa manière de travailler en passant à un modèle de gestion unitaire.

Les objectifs sont multiple. Il faut en effet :

  • assurer une couverture logicielle des différents besoins métiers ;
  • passer d’une méthode de gestion basée sur les coûts de masse à une gestion unitaire ;
  • gérer de manière précise les marges et les stocks grâce à une chaîne d’approvisionnement (supply chain) ;
  • harmoniser les procédures d’approvisionnement et le back-office ;
  • proposer une logistique plus performante ;
  • développer la collaboration avec les fournisseurs ;
  • et, enfin, réduire le délai de mise en vente, en anglais « time-to-market ».

À cela s’ajoutent des objectifs purement informatiques, comme le remplacement d’un système devenu obsolète, la simplification de l’environnement informatique, une diminution des coûts d’exploitation et des coûts maintenance associés et, enfin, la création d’un centre de compétences interne. Changer de modèle de gestion suppose la mise en place d’un système et de processus adaptés.

Pour répondre à ces besoins, et remplacer les huit précédents systèmes (« maison » ou tiers) qui géraient séparément le référentiel, les commandes, les stocks et les ventes, l’entreprise choisit de déployer un progiciel de gestion intégrée (PGI) et retient la solution SAP Retail, complétée par les modules de gestion des assortiments (Merchandising and Assortment Planning) et de gestion des tickets de caisse (Point of Sales Data Management).

Le Printemps choisit d’effectuer la bascule depuis l’ancien système vers le PGI marché par marché plutôt que fonction par fonction, pour éviter de bousculer une organisation encore fortement axée sur des silos. « Dans une entreprise qui n’avait pas de processus normés, de gestion unitaire, de best practices et qui était organisée en silos, l’approche de remplacement des outils de l’entreprise par marché, plutôt que par fonction, nous est apparue plus prudente et plus structurante », déclare Arnaud Lescroart. Le premier domaine basculé est celui de la mode enfant, en février 2010. Suivront la mode femme et homme ainsi que la beauté en avril 2010, puis, en octobre 2010, la maison, les accessoires et la lingerie.

Durant cette phase de transition, l’entreprise a dû vivre avec les deux systèmes en parallèle. Cette phase de cohabitation avait heureusement été anticipée et préparée : des outils de reporting ont permis au Printemps de conserver la maîtrise globale avec une visibilité sur les deux systèmes. Il a fallu également travailler avec les fournisseurs : lors de la transition, certains d’entre eux recevaient en effet des commandes émanant des deux systèmes, et il était essentiel de leur donner de la visibilité sur les tendances et les ventes.

Au total, le projet a nécessité trente mois de travail, depuis les phases préparatoires jusqu’au déploiement et à la recette, effectuée fin 2010. L’investissement total est estimé à vingt millions d’euros. Aux côtés de l’intégrateur CSC, l’éditeur SAP a été impliqué dans le projet.

Comme le résume Arnaud Lescoart : « Le Printemps savait ce qu’il voulait faire, SAP savait ce qu’on pouvait faire et CSC savait comment le faire. » Ce dialogue entre les trois partenaires est l’un des facteurs de réussite du projet, selon Arnaud Lescoart : « Il a permis au Printemps de privilégier les bonnes pratiques liées au progiciel, en évitant ainsi un recours excessif aux développements spécifiques. »

Harmoniser en douceur les processus métier

Aujourd’hui, le progiciel SAP est opérationnel et tous les produits sont passés en gestion unitaire. Les premiers bénéfices pour le Printemps sont la réactivité et la visibilité, avec, à tout moment, la possibilité d’obtenir une information précise et à jour sur l’état des stocks. La mise en place du progiciel a également permis d’harmoniser les processus métiers à travers les différents marchés verticaux.

Le Printemps ne souhaite pas s’arrêter là. La mise en place du progiciel ouvre en effet de nouvelles possibilités en termes de services, notamment en y associant des outils de mobilité. Ainsi, le groupe étudie actuellement la mise de tablettes ou de smartphones à la disposition de ses vendeurs, pour les informer en temps réel sur les stocks et les prévisions de vente.

Autre projet à l’étude, la mise en place d’applications de relation client sur mesure, permettant aux vendeurs d’accéder en temps réel à l’historique et aux préférences des clients membres des programmes de fidélité, de voir les produits qu’ils peuvent leur proposer et même d’encaisser directement depuis les terminaux mobiles.

Bird, une plate-forme au service de la prise de décision

Un autre pan critique pour le système d’information du Printemps était le support à la prise de décision, qui passe notamment par le reporting. L’objet du projet Bird (pour « BI Reports to Decide ») était de mettre en place un système de reporting en temps quasi réel, avec un niveau de détail poussé. Avant le projet, l’entreprise s’appuyait sur un ensemble d’outils externes ou internes, parmi lesquels ceux de Microstrategy.

Pour bâtir sa nouvelle plate-forme de reporting, c’est de nouveau Microstrategy qui est retenu. La société avait notamment des exigences en termes de simplicité d’utilisation et de mise en place des rapports. Le Printemps utilise par ailleurs SAP BW, mais en support de la plate-forme de gestion, et non de son système décisionnel.

Souhaitant éviter de multiplier les rapports, l’entreprise choisit de se concentrer sur ceux qui apportent une réelle valeur métier, en particulier ceux qui concernent la gestion de la performance. Une fois la conception de la base de données effectuée, l’équipe a donc développé des rapports pour gérer la performance de l’offre, de la chaîne d’approvisionnement, des ventes, des clients ou encore des opérations commerciales.

Pour les managers, le Printemps a mis en place des tableaux de bord basés sur leurs priorités : analyse des marges, classement des produits qui se vendent le mieux ou encore état des stocks. Ces tableaux sont déclinés sur trois niveaux : stratégique, tactique, opérationnel. Nombre de ces rapports utilisent des données fournies par le progiciel SAP, comme le taux de rupture de stocks.

Des alertes pour réagir immédiatement

Cinq personnes ont été affectées au projet : un chef de projet, deux collaborateurs du Printemps et trois sous-traitants. Au total, cette équipe a déjà mis en place 58 tableaux de bord en ligne, consultables sur demande des utilisateurs (mode « pull »). Huit autres sont envoyés en « push » tous les matins aux équipes opérationnelles, cinq sont transmis tous les lundis et enfin, un « Executive Dashboard » fournit la vision stratégique.

Les rapports en mode « push » sont destinés à suivre et gérer les événements clés : ils permettent notamment d’alerter les équipes opérationnelles et les managers en cas de performance trop faible, d’identifier les challenges prioritaires et de décider des actions correctives à mettre en place.

Les rapports sont conçus de manière à privilégier les indicateurs visuels : les collaborateurs du Printemps peuvent, par exemple, visualiser graphiquement les magasins et leurs différents étages, ce qui leur permet de localiser d’un coup d’œil les problèmes éventuels. Ils disposent d’outils pour analyser la performance par marque, par boutique ou par groupe de produits. Ils peuvent également analyser les ruptures de stocks pour en identifier les causes (fournisseur, chaîne logistique, ventes supérieures aux prévisions, etc.).

La prochaine étape converge avec le projet SAP. Il s’agira, en effet, de se doter d’outils pour optimiser la gestion des stocks en magasins, en réduisant notamment les réserves en local pour mieux les ajuster à la demande globale. L’intégration des données du système de gestion de la relation client est également prévue. Enfin, sur la feuille de route figure également l’utilisation de ces outils depuis des terminaux mobiles de type iPad, avec, en ligne de mire, le développement de nouveaux services, par exemple pour les conseillers personnels en style ou « personal shoppers ».