Les banques ont engagé leur transformation numérique, mais elle est plus facile pour les groupes de taille intermédiaire. La transformation des banques et, plus largement, des établissements financiers et d’assurances en organismes 2.0 est évidemment inéluctable. Ne serait-ce que parce que les consommateurs ont devancé le mouvement.
C’est plus facile pour les groupes de petites tailles et qui sont challengers sur leur marché : ils ont tout à gagner à aller vite pour coller aux attentes de leurs clients. C’est moins facile pour les grandes banques qui ont quatre contraintes :
- la complexité de leurs systèmes d’information, souvent issus d’empilement de solutions et de briques technologiques,
- les problèmes sociaux liés aux reconversions des ressources humaines, avec une pyramide des âges défavorable,
- la taille de leurs réseaux d’agences,
- la culture de leurs directions générales dont on ne peut pas dire qu’elles soient toujours à l’avant-garde de l’innovation technologique.
Le 2.0 est souvent vu du côté du consommateur, comme un ajout de fonctionnalités sur des applications accessibles via des terminaux mobiles. De fait, la plupart des grandes banques européennes ne sont pas prêtes. Dans une étude récente, parue en juillet 2014, les consultants de McKinsey (1) rappellent que les banques de détail ont numérisé seulement 20 à 40 % de leurs processus et investi seulement 0,5 % de leurs budgets globaux dans le numérique.
Pas de quoi révolutionner les business modèles… Pourtant, selon McKinsey, la transformation numérique des banques peut affecter (de façon positive ou négative) jusqu’à 30 % du chiffre d’affaires et réduire les coûts de 25 %, voire beaucoup plus dans le cas d’applications de type self-service. Une autre étude, réalisée par EY (2) auprès de 32 000 clients des banques de détail dans 43 pays, explique que l’amélioration de l’expérience client constitue la clé de la croissance, avec la restauration de la confiance des consommateurs.
Une autre étude, menée fin 2013 en Europe et aux États-Unis par Ipsos pour GMC Software Technology (3), avait conclu que, pour la France, seulement 6 % des consommateurs ont l’impression que leur banque les valorise en tant que clients et estiment, à 65 %, que le point le plus important est l’accès aux services bancaires quand et où ils veulent. Selon, cette étude, 65 % des répondants ne pensent pas que les services bancaires en ligne délivrent un service client suffisant, plus dérangeant, 29% considèrent que ces mêmes services ne sont pas réellement interactifs, leurs possibilités sont limitées.
Concernant les services bancaires sur mobile, seulement 23 % des clients trouvent le service satisfaisant. Une étude réalisée pour SAP par la Frankfurt School of Finance & Management, la Stern School of Business and Management de l’Université de New York, l’Université des sciences appliquées et des arts du Nord-Ouest Suisse et la Business Transformation Academy, explique que les banques subissent de fortes pressions pour changer leurs modèles (4), sans pour autant y parvenir, notamment vis-à-vis des exigences réglementaires.
L’enjeu est bien évidemment de personnaliser : d’après une étude européenne publiée en juillet 2014 par BT et Avaya, 48 % des clients pensent en effet que les banques et les assurances se sont trop axées sur l’automatisation des services et 41 % que les services bancaires sont trop anonymes.
On pourrait multiplier les exemples de décalage entre le positionnement des établissements financiers et les besoins de leurs clients, entre l’état de leurs systèmes d’information et ce qu’ils devraient être, entre l’attitude de leurs managers et la culture « 2.0 »… L’expérience de CIH Banque est intéressante et l’on peut retenir plusieurs bonnes pratiques :
- le facteur clé de succès reste que l’implication de la direction générale est fondamentale, surtout si elle est consciente du potentiel des technologies de l’information,
- la transformation doit être globale, de manière à ne pas laisser des métiers à la traîne,
- la refonte des systèmes de back office existants est indispensable, de même que celles des principaux processus métiers,
- une transformation numérique provoque un décalage des compétences qu’il faut anticiper,
- il faut identifier toutes les possibilités d’agilité pour aller vite,
- un accompagnement externe est souvent nécessaire, notamment pour les choix d’architecture, les développements et la gestion du changement.
Les principaux modèles d’évolution des SI bancaires vers le digital | ||
Principaux avantages | Principales difficultés | |
Webisation des applications existantes | Coûts réduits | Approche nécessairement transitoire qui ne crée pas de rupture |
Expérimentation avec des projets pilotes | Imaginer des business modèles innovants | Mettre en œuvre et intégrer dans les applications existantes |
Création d’une entité autonome (banque 2.0) | Capter de nouveaux clients | Alignement et interopérabilité avec les SI existants |
Refondre tous les SI existants | Créer de vrais avantages concurrentiels | Dégager des budgets suffisants et reconfigurer les compétences |
Source : Best Practices. |
(1) The rise of digital bank, par Tunde Olanrewaju, McKinsey.
(2) Winning through customer experience, EY Global Consumer Banking Survey 2014.
(3) The end of the banking autocracy, Ipsos – GMC Software Technology.
(4) Banking Study, the benefit of IT in the banking industry in turbulent times, an empirical study in Europe and North America, Business Transformation Academy.