Les modèles d’organisation de la DSI

La fonction système d’information peut s’organiser de différentes manières dans une entreprise, selon qu’elle est considérée comme un centre de valeur, de profit ou de coût. Les modes de pilotage et de gouvernance qui en découlent seront différents.

La fonction informatique d’une entreprise peut prendre différentes formes : département informatique, direction informatique ou direction des systèmes d’information.

Un département informatique a pour but de répondre aux besoins opérationnels des utilisateurs. Cette unité fonctionne de manière autonome et est faiblement impliquée dans la vie et les enjeux d’entreprise. Il est cantonnée dans une relation client-fournisseur « non structurée » vis-à-vis des utilisateurs. Une direction informatique agit comme un prestataire de services interne de type GIE (Groupement d’Intérêt Economique) informatique ou SSII. Son action est cadrée par un catalogue de produits et des engagements de services. Elle fonctionne dans une relation client-fournisseur « structurée » et refacture généralement ses prestations.

Pour sa part, une direction des systèmes d’infor­mation a pour mission de répondre aux besoins des utilisateurs, dans un cadre structuré, en refacturant ses services, mais également de contribuer à la performance et à la compétitivité de l’entreprise. Elle agit clairement dans une relation partenariale. Elle a le pouvoir de dire « non » et d’être force de proposition par rapport aux métiers (voir schéma ci-dessous).

Une organisation peut ainsi évaluer son niveau de maturité selon plusieurs dimensions : stratégique, implication dans les enjeux d’entreprise, connaissance métiers, mode de fonctionnement, logique de pilotage.

Il est ainsi possible, par exemple dans le cadre d’un schéma directeur, d’identifier le positionnement actuel de l’organisation informatique, puis de discuter avec sa direction générale du modèle idéal à cibler.

À l’évidence, le rattachement hiérarchique n’est pas le même selon le type de gouvernance : un département informatique est plus souvent rattaché aux services généraux, à la direction administrative et financière (DAF) ou à une direction utilisatrice principale. Une direction informatique reporte généralement à la DAF. Elle ne fait pas partie du comité de direction ou du comité exécutif, mais y est invitée, selon les thématiques traitées. Pour sa part, une direction des systèmes d’information est le plus souvent rattachée directement à la direction générale et fait partie quasi systématiquement du comité de direction ou du comité exécutif.

En synthèse, le modèle de DI-DSI et son positionnement hiérarchique conditionnent inéluctablement la contribution des SI à la valeur ajoutée de l’entreprise. Elle peut varier d’un simple département informatique, qui répond aux demandes de manière réactive et non structurée, à une DSI proactive, partenaire des métiers et de la direction générale, en ayant la responsabilité de certains programmes de transformation.

Afin de profiter pleinement de tout le potentiel issu des technologies de l’information et de la communication, nous recommandons fortement le modèle de DSI, seul à même d’aider l’entreprise dans son évolution et sa stratégie.

Une illustration : deux modèles de DSI

Dans toute DSI, on retrouve les fonctions classiques d’études et développement, d’exploitation et de services utilisateurs. Le premier cas montre une partie études de type « Assistance à Maîtrise d’Ouvrage » (AMOA) distincte de la partie développement. L’AMOA est clairement orientée métiers de l’entreprise. Elle intègre la dimension PMO et les aspects stratégiques. Le cadre est, car il souligne l’orientation multi-acteurs de la DSI et identifie les interlocuteurs privilégiés.

Le second cas correspond à une organisation publique de plus grande taille. Les fonctions suivantes sont intégrées et distinguées par des cellules au sein de la DSI :

  • PMO ou bureau de projet
  • Stratégie, processus et architecture
  • Pilotage opérationnel et contrôle de gestion
  • Méthodes et qualité.

En dehors de la DSI, les fonctions suivantes sont mentionnées :

  • La gestion du changement au sein de la DRH
  • La qualification, la validation et la recette au sein de l’agence comptable
  • La gestion des risques et de la sécurité SI au sein de l’agence comptable.

Bien évidemment, aucune organisation n’est parfaite. Il s’agit de concilier enjeux, taille et compétences critiques.

Quelles instances de pilotage de la DSI ?

La DI-DSI doit s’appuyer sur des instances de gouvernance spécifiques pour conduire à bien ses missions. On peut ainsi distinguer les composantes suivantes :

  • Un comité stratégique SI qui fait office de conseil d’administration, composé des principaux actionnaires de la DI-DSI, c’est-à-dire la DAF, les directeurs métiers, et piloté par la direction générale. Il se réunit trimestriellement, ou semestriellement. Sa mission est de donner les orientations politiques, de valider la stratégie SI, de mettre à disposition les moyens, d’avaliser les nominations au niveau de la direction informatique, etc. A l’instar des conseils d’administration des entreprises, il peut s’avérer utile de créer des conseils ad hoc composés d’experts externes de haut niveau sur les grandes thématiques : tendances technologiques et innovation, stratégie partenariale, rémunérations, nominations, audit. L’objectif est d’informer, voire éduquer, les actionnaires sur les enjeux SI, afin qu’ils soient en mesure de prendre les bonnes décisions.
  • Un comité exécutif ou opérationnel SI qui pilote de manière plus opérationnelle la DSI. Il est en général composé des mêmes acteurs que le comité stratégique ou de ses représentants. Il se réunit trimestriellement ou bimestriellement et suit la mise en œuvre du schéma directeur SI, l’avancement des grands projets, la gestion du patrimoine applicatif, la consommation des budgets, etc. Il est piloté par la direction générale ou son représentant.
  • Un comité de direction SI interne à la DSI qui gère mensuellement ou hebdomadairement les sujets opérationnels. Il regroupe les cadres de la DSI en dehors des métiers. Il est dirigé par le DSI lui-même.
  • Un PMO (Project Management Office) qui gère le portefeuille de projets pour le compte du comité stratégique SI.
  • Des comités de pilotage pour les programmes et les projets.
  • Un comité architecture et urbanisation en charge de définir et faire appliquer les standards et référentiels d’architecture d’entreprise et SI.
  • Un comité sécurité des SI en charge de définir et faire appliquer la politique de sécurité des SI avec les métiers.

Le pilotage de la DSI dépend largement du périmètre qu’on lui octroie. Même si la majorité des directions informatiques se sont transformées en directions des systèmes d’information, leur périmètre de légitimité a rarement été revu et affiné. Or, il est fondamental de le préciser si l’on veut le gérer et le maîtriser. Par ailleurs, compte tenu de la grande complexité de la fonction informatique, les méthodes et référentiels se sont multipliés.

Le modèle maîtrise d’ouvrage – maîtrise d’œuvre

A la base, le concept « maîtrise d’ouvrage – maîtrise d’œuvre » (MOA-MOE) trouve sa place dans le monde du bâtiment. Rappelons que la France a été le berceau de l’application de ce modèle aux systèmes d’information. L’application du modèle MOA-MOE aux SI à la française n’en reste pas moins sujette à caution, voire erronée, pour plusieurs raisons :

  • la confusion entre organisation de projet et organisation de fonctionnement,
  • l’association de l’informatique à la maîtrise d’œuvre et des métiers à la maîtrise d’ouvrage,
  • la promotion de la dichotomie métier-informatique.

Pour pallier les dysfonctionnements constatés dans le monde des SI et éviter toute confusion, il est utile de rappeler quelques définitions : le maître d’ouvrage est, par définition, le commanditaire, c’est-à-dire la personne physique ou morale qui prend la décision de construire un ouvrage, en réalise le financement et confie le projet à un maître d’œuvre. Il est le propriétaire de l’ouvrage réalisé. L’architecte est la personne qui conçoit les plans et les caractéristiques de l’ouvrage pour le compte du maître d’ouvrage. Le maître d’œuvre est la personne physique ou morale qui dirige la réalisation de l’ouvrage pour le compte du maître d’ouvrage.

Quelques bonnes pratiques

La gestion courante du fonctionnement et la gestion des projets sont deux métiers bien distincts. La connaissance de l’un n’implique pas forcément la connaissance de l’autre. La responsabilité opérationnelle d’un domaine ne donne aucun droit de préemption sur un projet dans ce même domaine.

N’oublions pas qu’une organisation de projet est totalement indépendante de la hiérarchie de l’entreprise (organigramme). Il faut donc éviter de nommer à la tête d’un projet un responsable opérationnel qui reste en poste car le fonctionnement courant prendra toujours le dessus.

De même, il convient impérativement de sortir de la logique « DSI = maîtrise d’œuvre » et « métier = maîtrise d’ouvrage », qui engendre une confusion entre gestion du fonctionnement et investissement. La maîtrise d’œuvre ne doit pas être assimilée à la DSI. Elle peut très bien être externe ou confiée à tout autre acteur de l’entreprise selon les projets à mener.

La maîtrise d’ouvrage requiert des compétences bien spécifiques et ne doit pas forcément être assimilée au domaine métier. C’est d’autant plus le cas pour les applications transversales de type ERP ou CRM, de plus en plus nombreuses, où un maître d’ouvrage global doit être nommé. Enfin, il faut obérer le terme « projet informatique » qui est erroné et ne représente qu’une vision partielle de la solution qui intègre aussi les aspects : organisation, processus, compétences, etc.

La DSI : centre de coût, de profit ou de valeur ?
 Définition  Caractéristiques
Centre
de coût
Un centre de coût est un centre de responsabilités dont les ressources sont mesurées en termes financiers alors que les résultats ne le sont pas.
  • Il n’y a pas facturation des prestations (produits et services) fournies.
  • Il n’y pas confrontation à une logique de marché, car il n’y a pas de prix.
  • La gratuité des prestations peut entraîner des dépenses
    économiquement injustifiées.
  • L’accent est majoritairement mis sur les ressources, indépendamment des résultats.
  • Les prestations fournies doivent être mises en relation avec les ressources consommées, afin de calculer le coût par unité d’œuvre produite.
Centre
de  profit
Un centre de profit est un centre de responsabilités dont la performance est mesurée par la différence entre son chiffre d’affaires, réalisé par la vente de ses produits et services, et le montant des ressources consommées.
  • La fonction est soumise à une logique de marché, car il y a forcément facturation et donc définition d’un prix.
  • Les prix des produits et services doivent être fixés (prix de cession interne) : au coût réel du service, d’après le prix du marché ou en fonction de
    la stratégie poursuivie.
  • L’objectif est que la différence soit positive et donc un qu’un profit soit généré.
  • Le processus de facturation peut générer un travail administratif important.
  • Le prix des produits et services peut éventuellement freiner les projets
    des métiers.
Centre
de valeur
Un centre de valeur est un centre de responsabilités dont la performance est mesurée par la valeur fournie à l’organisation. Il se démarque de la logique simple de coût ou de profit des modèles précédents qui ne considèrent que la dimension comptable des activités.
  • La notion de valeur est plus large que la simple dimension monétaire.
  • Certains bénéfices sont intangibles et difficiles à quantifier.
  • Des méthodes et outils d’appréhension de la valeur doivent être mis en place.
  • Les responsables sont amenés à réfléchir par rapport à leurs activités, en terme de contribution à la chaîne de valeur de l’entreprise.
  • Il est souvent difficile d’estimer la valeur pour l’entreprise d’une prestation informatique.

 

Cet article a été écrit par Christophe Legrenzi et Catherine Gapaillard.