Les nouveaux modèles de la quatrième révolution industrielle

Il n’y a plus beaucoup de professionnels des technologies de l’information pour penser que nous ne vivons pas une quatrième révolution industrielle. C’est le constat formulé par Maurice Lévy, le président du directoire de Publicis : « Jamais le rythme de l’innovation n’aura été aussi soutenu, dans tous les secteurs de l’économie. Les disruptions technologiques associées à cette nouvelle révolution ont un caractère additif qui démultiplie leur impact. »

D’où une recomposition de tous les secteurs et l’émergence de nouveaux business modèles. Pour Klaus Schwab, fondateur et président du World Economic Forum, « jamais l’humanité n’a connu d’époque à la fois si prometteuse et si dangereuse. »

On parle aujourd’hui de quatrième révolution industrielle parce qu’elle a quatre caractéristiques, par rapport aux précédentes révolutions industrielles, celles de la machine à vapeur, de l’électricité et de l’ordinateur. D’abord, la rapidité, « la vitesse est exponentielle et non linéaire, chaque technologie nouvelle en engendre d’autres, encore plus puissantes. » Ensuite, l’ampleur et la profondeur : « Ce ne sont pas seulement le « quoi » et le « comment » de notre manière de faire qui se trouvent bouleversés, mais également le « qui nous sommes » », affirme l’auteur.

Enfin, la quatrième révolution industrielle est marquée par son impact systémique, sur l’ensemble de la Société, car nous serions parvenus à un point d’inflexion à partir duquel les technologies donnent leur pleine puissance. Mais Klaus Schwab estime que « la technologie peut coexister avec la Société, nous ne sommes pas prisonniers d’une alternative binaire entre « accepter et supporter » d’un côté et « refuser et s’en passer » de l’autre. »

On observe une combinaison de mégatendances et de points de bascule. Les recherches du World Economic Forum ont identifié trois catégories d’éléments moteurs : de types matériels (véhicules autonomes, impression en 3D, robotique…), numériques (capteurs, Blockchain, plateformes numériques…) et de types biologiques (imagerie, modification du vivant…).

Quant aux points de bascule, qui constituent le moment où une mutation technologique atteint la Société dans son ensemble, ils sont nombreux. Pour l’auteur, à l’horizon 2025, ces points de bascule les plus significatifs concerneront les objets connectés, le stockage illimité, la présence numérique des individus sur Internet et le Big Data.

Si l’impact sociétal est indéniable, celui sur les entreprises l’est tout autant. D’une part, sur le plan macroéconomique : moindre croissance, plus de productivité, transformation des compétences, moins d’emplois… D’autre part, pour les entreprises, Klaus Schwab retient quatre impacts majeurs :

  • Les attentes des clients évoluent, « elles sont redéfinies en expériences et poussent vers plus de transparence », note l’auteur.
  • Les produits intègrent sont de de plus en plus enrichis avec des données, à l’image des véhicules.
  • De nouvelles formes de collaboration entre entreprises se développent, dans un contexte d’innovation collaborative qui va au-delà de simples partenariats marketing ou commerciaux.
  • Les modèles de fonctionnement des entreprises évoluent vers davantage d’agilité et de modèles économiques basés sur des plateformes. « Les entreprises devront passer d’une structure hiérarchique à des modèles connectés et collaboratifs, autour d’équipes diversifiées, avec un échange continu des données et des idées sur les sujets ou les tâches à traiter », résume l’auteur.

Pour maîtriser les effets de la disruption, l’auteur suggère de mobiliser quatre facultés différentes : sur le plan contextuel, avec la faculté de comprendre et de mobiliser les savoirs, sur le plan émotionnel, pour ordonner et assimiler les pensées, sur le plan spirituel, pour mobiliser sur des objectifs individuels et collectifs, et sur le plan physique, afin de déployer l’énergie nécessaire à la transformation des systèmes individuels et collectifs. « Les bons dirigeants comprennent et maîtrisent l’intelligence contextuelle, avec la capacité et la volonté d’anticiper les tendances émergentes », assure Klaus Schwab.

Mais sont-ils vraiment prêts à relever « les défis qui sont aussi redoutables que les possibilités sont excitantes » ? Rien n’est certain. Car, pour Klaus Schwab, « notre système actuel de prise de décision et notre modèle dominant de création de richesse ont été conçus au cours des trois premières révolutions industrielles et ont évolué progressivement. Cependant, ces systèmes ne sont plus à même de répondre aux besoins des générations actuelles et encore moins des générations futures. »

 

La quatrième révolution industrielle, par Klaus Schwab, Dunod, 2017, 207 pages.