L’épidémie de coronavirus aura au moins fait prendre conscience de deux éléments, d’une part, que la dépendance aux technologies peut être mortelle pour une entreprise dès lors qu’un événement brutal survient, stoppe les activités et paralyse une organisation. D’autre part, que les technologies constituent des opportunités pour continuer à travailler ou à télétravailler.
Dans le contexte de l’après-crise épidémique, les DSI auront au moins six dossiers à gérer de façon prioritaire.
1. Se préparer à un rationnement budgétaire
Lors de la crise de 2008, les dépenses IT mondiales avaient chuté de 4,8 %, selon Gartner, mais avaient nettement rebondit l’année suivante (+ 5,9 %) et encore plus en 2011, avec plus de 7 % de croissance. On retrouvera probablement un effet similaire, d’autant qu’à la différence de 2008, la crise de 2020 a conduit à des arrêts brutaux de production qui impactent les chiffres d’affaires. Il y aura donc à très court terme des arbitrages, pour les projets en cours ou prévus, dans un contexte de récession économique. Au mieux avec un report dans le courant 2021, au pire, avec leur suppression.
IDC avait anticipé une évolution optimiste des dépenses IT au niveau mondial, avec une croissance de 5,6 % en 2020 (soit environ 5 300 milliards de dollars) et de plus de 6 % en 2021 et 2022. De son côté, Gartner prévoyait que les entreprises européennes dépenseraient 3,4 % de plus en 2020. Nous serons bien en dessous, du fait de pannes de trésorerie, mais temporairement, car un rebond en 2021 est probable, du fait des investissements dans le cloud, de la transformation digitale et de la modernisation des infrastructures pour gagner en performance.
2. Anticiper les besoins en mobilité et en télétravail
Le recours massif au télétravail pendant l’épidémie de coronavirus a démontré son efficacité pour le maintien en conditions opérationnelles. C’était déjà le cas auparavant : selon une étude Malakoff Mederic Humanis, 30 % des salariés français du secteur privé pratiquaient le télétravail en 2019. D’après une étude Wrike, 40 % des salariés français déclaraient travailler à distance au moins une journée par semaine, et même 11 % d’entre eux sont entièrement en télétravail, plus qu’en Allemagne et au Royaume Uni (5 % et 6 % respectivement), mais beaucoup moins qu’aux Etats Unis (19 %). La demande pour ce type d’organisation viendra autant des utilisateurs que des directions générales, pour faire face à la prochaine crise.
3. Muscler les plans de continuité
Jusqu’à présent, les plans de continuité souffrent de trois maux : d’abord, ils ne sont pas généralisés à toutes les entreprises. Ensuite, lorsqu’ils existent, une majorité ne sont pas suffisamment testés : une entreprise sur trois pratique des audits de continuité d’activités, selon le Clusif. Enfin, ils ne couvrent pas toujours un large périmètre de menaces. D’après le Clusif, l’indisponibilité des applications de gestion est privilégiée par rapport à celles des locaux, de l’informatique industrielle ou d’un fournisseur essentiel.
C’est donc un chantier que les DSI vont ouvrir (pour en élaborer un) ou réouvrir (pour en adapter l’efficacité).
4. Accélérer la transformation digitale
La transformation digitale ne devrait pas fléchir de façon significative. Certes, les entreprises seront tentées de mettre certains projets sur pause, mais, en comparaison des gains potentiels, notamment pour capter de nouveaux clients et les fidéliser, le mouvement se poursuivra. D’autant que la transformation digitale participe à la réduction des coûts, par exemple avec la dématérialisation, l’optimisation des flux d’information ou des chaînes logistiques.
5. Optimiser le recours au cloud
Le cloud s’est déjà largement installé dans les entreprises et l’épidémie a dopé les usages, pour l’accès aux applications (CRM, comptabilité, ERP…) et pour le stockage/partage de documents, de même que pour les usages collaboratifs. Cela va imposer une vigilance de la part des DSI : selon Gartner, un tiers des dépenses IT ne sont pas intégrées dans le budget IT et 28 % des dépenses IT passeront au cloud à l’horizon 2022, contre 19 % en 2018. Les DSI ont donc un rôle essentiel pour éviter que les dépenses (hors budget DSI) n’explosent et pour conserver la cohérence du système d’information.
6. Se focaliser sur la cybersécurité
Si la disponibilité des applications, des infrastructures et des réseaux fait l’objet d’une focalisation, il ne faudra pas oublier les trois autres composantes de la sécurité : l’intégrité des données, la confidentialité et la traçabilité. D’autant que l’épidémie a montré que les hackers sont restés très imaginatifs pour piéger les utilisateurs. Certes, les entreprises n’ont jamais autant investi pour protéger leurs systèmes d’information.
Dans le même temps, elles n’ont jamais été aussi vulnérables face aux cybermenaces, un paradoxe qui s’explique par la rapidité de l’évolution des menaces liées au cloud, à la mobilité et à la transformation digitale. Heureusement, selon une étude Colt Technology Services et Brunswick Insight, publiée en mars 2020, la cybersécurité reste en tête de liste des priorités pour 80 % des entreprises françaises, devant la migration vers le cloud (64 %). Ces priorités ne devraient pas changer cette année, mais la pression sera plus forte sur les DSI pour que les politiques dans ce domaine soient plus efficientes.