Pour la septième année consécutive, Deloitte France dévoile son étude sur les tendances technologiques auxquelles seront confrontés les entreprises et les DSI dans les 18 à 24 prochains mois.
Depuis une dizaine d’années, le cloud, les technologies analytiques et le digital ont radicalement bouleversé les modes de pensée, les stratégies et les manières de faire fonctionner les systèmes d’information. On a ainsi assisté à la modernisation des systèmes Legacy (pour réduire la dette technique) et à la généralisation des modes de Delivery agiles.
« Aujourd’hui, trois forces annoncent une nouvelle rupture : la blockchain, les technologies cognitives (Intelligence Artificielle, Machine Learning) et la réalité digitale (AR, VR, MR) », souligne Eric Delgove, associé Conseil Technology Strategy chez Deloitte, pour qui « en 2019, l’innovation métier, au travers de la maîtrise des nouvelles technologies, doit être au centre de l’attention des entreprises. Le DSI est le catalyseur de ce processus. » Pour les consultants de Deloitte, six tendances vont, une nouvelle fois, remodeler les systèmes d’information : l’intelligence artificielle, le NoOps, les réseaux du futur, les interfaces intelligentes, la réinvention de l’expérience client et le DevSceOps.
1. L’intelligence artificielle : du Chief Information Officer au Chief Insight Officer
Les entreprises considèrent de plus en plus l’IA comme un levier de transformation. Cette montée en puissance les confronte à des problématiques multiples : choix des cas d’usage, qualité et accessibilité des données, accès aux talents… « Depuis le lancement des premiers chatbots, les entreprises ont, aujourd’hui, dépassé les phases d’expérimentation et de mise en œuvre en allant progressivement vers l’industrialisation de véritables projets opérationnels », souligne Eric Delgove.
Selon le Global CIO Survey 2018 de Deloitte, l’IA est la technologie prioritaire pour 58 % des organisations (72 % pour les entreprises les plus avancées et « les projets d’IA menés par nos clients offrent un retour sur investissement de 17 % », assure Eric Delgove, qui reste toutefois persuadé qu’il existe toujours « un déficit de culture sur l’IA et la qualité des données, les concepts étant encore largement méconnus. » Pour les auteurs des Tech Trends, « au bout du chemin vers l’Intelligence Autonome, s’offre au DSI l’opportunité de transformer son rôle de Chief Information Officer en Chief Insight Officer, un leader en mesure d’éclairer ou de conforter l’entreprise dans les choix stratégiques à entreprendre. »
2. Le NoOps : d’un mode réactif à un mode proactif
Pour Eric Delgove, « nous entrons dans la prochaine ère du cloud, l’ère du « NoOps » – No Operations – où les infrastructures sont créées et gérées automatiquement et dynamiquement par les fournisseurs cloud, permettant ainsi aux DSI de recentrer leurs compétences sur de nouvelles fonctions, sources d’innovation pour les métiers. » Grâce à l’avènement des infrastructures programmables (Software-Defined, Infrastucture-as-a-Code…), de nouveaux modèles et pratiques d’architecture émergent, permettant de décorréler la gestion des applications des infrastructures dans le but de les industrialiser et d’automatiser à grande échelle.
L’infrastructure est alors créée automatiquement et dynamiquement en fonction de la charge nécessaire pour être ensuite détruite une fois l’exécution du code terminée. Le client ne paie alors que pour les ressources consommées pendant son temps d’exécution. « S’il est bien maîtrisé, ce modèle offre une granularité de pilotage des coûts jusqu’alors inimaginable sur des modèles IaaS cloud ou on-premises », assurent les consultants de Deloitte.
« L’arrivée des architectures Serverless capte l’attention des DSI qui y perçoivent un accélérateur pour décliner leur stratégie d’automatisation et d’optimisation des coûts. La promesse du NoOps les fascine avec des opérations IT entièrement automatisées nécessitant peu de personnel », précisent les auteurs.
3. Les réseaux : la menace invisible
« Pendant des années, les entreprises ont considéré que les problématiques réseaux étaient un sujet derrière elles, mais, depuis, la proliférationn des types de terminaux et l’Internet des objets changent cette perspective, le sujet des réseaux revient sur le devant de la scène, la 5G remet en cause les investissements des entreprises et nous n’en sommes qu’au début », précise Guillaume Charly, associé Conseil Technology Strategy chez Deloitte.
Les technologies telles que l’Edge Computing, la 5G et les satellites en orbite basse promettent des améliorations significatives en termes de performance et de fiabilité des communications. Leur adoption va stimuler le développement de nouveaux produits et services, ainsi que le changement des modèles opérationnels. « Pour garantir un niveau de performance et de sécurité maximum, les DSI doivent anticiper le redimensionnement de leurs capacités réseaux et se moderniser. Les DSI doivent ainsi préparer dès aujourd’hui la feuille de route du réseau de demain en renforçant notamment leurs compétences en cybersécurité et en architecture », note Eric Delgove.
4. Les interfaces intelligentes : de nouvelles interactions entre hommes, machines et données
Dopées à l’intelligence artificielle, les interfaces de nouvelle génération sont désormais capables d’analyser et de comprendre l’environnement dans lequel elles évoluent. Que ce soit pour améliorer l’expérience client ou optimiser l’efficacité d’une chaîne de production, ces interfaces intelligentes vont constituer, dans les prochains mois, un investissement stratégique pour les DSI et devenir un élément essentiel de la compétitivité des organisations.
Le marché de la reconnaissance vocale pourrait représenter à lui seul 22,3 milliards de dollars en 2024, selon Zion Market Research. Le marché de l’informatique sensorielle et des logiciels d’analyse d’émotions pourrait, lui, atteindre 41 milliards de dollars d’ici 2022, d’après une étude de ResearchandMarkets. « Les interfaces entre humains et machines sont désormais bidirectionnelles : initialement donneur d’ordre, l’homme se retrouve aujourd’hui en bout de chaîne, consommant des informations à travers des environnements toujours plus riches (réalité augmentée, réalité virtuelle…) », soulignent les auteurs des Tech Trends.
5. Marketing : réinventer l’expérience client
« 60 à 70 % des budgets marketing concernent encore le Off Line et c’est très orienté produits, or un produit seul ne peut suffire à « engager » les consommateurs. Pour connaître le client, il faut exploiter les données afin de créer un marketing expérientiel », rappelle Guillaume Charly. « Le nouveau monde du marketing est personnalisé, contextualisé et dynamique », résument les auteurs qui estiment que « les directions marketing et les DSI tendent à abandonner les solutions propriétaires de leurs partenaires pour se doter d’un arsenal d’outils de marketing expérientiel, basé sur le cloud. Objectif : transformer un marketing traditionnellement focalisé sur l’acquisition client en une démarche d’amélioration continue des parcours utilisateur, tirée par la maîtrise grandissante des données collectées (préférences, comportement…). »
Le marketing expérientiel, basé notamment sur l’intelligence artificielle et la donnée, ouvre la voie à la génération de nouveaux revenus. Pour répondre aux attentes des consommateurs, trois dimensions technologiques devront être priorisées au cœur des agendas des organisations : la collecte des données, le ciblage et la diffusion des contenus.
6. DevSecOps : concilier sécurité et flexibilité
Pour faire face aux cybermenaces, certaines entreprises intègrent de plus en plus les pratiques de sécurité et de protection des données personnelles directement au sein de leurs méthodologies de développement agile. « Le DevSecOps élève la priorité des activités de gestion des risques pour leur faire quitter le domaine de la conformité et embrasser l’ensemble du cycle de vie des produits IT. Le DevSecOps n’est pas qu’une méthodologie, il se décline en outils et plateformes, afin d’accélérer la prise en compte de la cybersécurité dans l’ensemble de l’organisation », soulignent les auteurs.
Il s’agit « d’un mélange d’empirisme et d’une démarche déterminée », résume Eric Delgove. Mais, sur le terrain, le DevSecOps est loin d’être une pratique généralisée. « Au sein de la communauté des DSI, la tendance DevSecOps n’en est qu’à ses balbutiements », confirment les auteurs.
L’approche DevSecOps repose sur trois caractéristiques :
- La collaboration : les équipes de développement et celles dédiées à la cybersécurité travaillent ensemble.
- La priorité à la sécurité : le DevSecOps intègre des fonctionnalités de contrôle de la sécurité au cœur des développements.
- L’automatisation et le contrôle continu : l’automatisation des contrôles s’applique à trois niveaux : les développements, l’audit des systèmes et la détection des incidents.
Comment les DSI peuvent collaborer avec les directions marketing | |
Étapes | Principes d’action |
1 | Les spécialistes marketing élaborent des stratégies et des indicateurs pour améliorer l’expérience client et travaillent avec les DSI pour mettre en place les outils associés |
2 | Le client interagit avec l’entreprise à travers différents canaux, tels que le Web, les applications mobiles, les médias sociaux, les centres d’appels |
3 | Les actions des consommateurs sont transformées en données référencées sous un identifiant unique |
4 | Les spécialistes du marketing et les DSI mettent en place des modèles prédictifs d’analyse de données |
5 | Le modèle détermine le contenu qui suscitera le plus d’intérêt pour chaque consommateur en fonction du moment |
6 | Le système décide de l’action à entreprendre et diffuse le contenu |
7 | Le système analyse les réponses des consommateurs pour améliorer l’expérience suivante |
Source : Deloitte. |
Tech trends 2019, beyond the digital frontier, une perspective française, Deloitte Insights, 65 pages.