L’approche historique de l’externalisation, qui consisterait à confier à un tiers une activité IT dont on veut se débarrasser, avec pour objectif principal de réduire les coûts, ne serait plus de mise.
C’est en tout cas la perspective choisie par l’auteur de cet ouvrage, dirigeant de la société de conseil W2aC! spécialisée dans l’outsourcing : « Externaliser, c’est plutôt apporter le changement dans l’entreprise, l’externalisation se révèle un puissant levier de création de valeur. » Avec une approche traditionnelle, les gains directs (matériels, logiciels, infrastructures…) sont, en réalité, marginaux et les déceptions souvent au rendez-vous. Les bénéfices de l’externalisation sont essentiellement indirects : davantage de flexibilité, de qualité, de simplification et une réduction des risques.
L’externalisation revêt plusieurs facettes : elle peut ainsi concerner toute la fonction IT, seulement l’une de ses composantes (centre d’appels, hébergement, tierce maintenance applicative), ou n’importe quel métier de l’entreprise faisant appel à la technologie (paie, back-office comptable, logistique…) avec le cloud.
L’auteur articule son propos autour de cas concrets, avec différents objectifs : lancer une nouvelle activité, pérenniser le système d’information, résoudre un problème opérationnel, se réorganiser, se développer à l’international et accompagner les évolutions… Ces exemples permettent de préciser quelles sont les bonnes et les mauvaises pratiques.
Guide pratique d’externalisation des SI, l’entreprise et l’outsourcing : optimiser le digital, par Pierre-Jean Esbelin, Gereso Edition, 2018, 221 pages.
Lancer une nouvelle activité dans le cadre d’une croissance externe : dans ce cas, l’externalisation est un facteur d’agilité et d’optimisation. Mais, dans le cas décrit par l’auteur, plusieurs mauvaises pratiques sont mises en exergue : des pénalités exprimées en pourcentage de la facturation mensuelle, l’absence de bonus, trop d’instances de pilotage (six) qui diluent les responsabilités ou encore le flou qui a entouré les indicateurs de niveaux de service.
Pérenniser le système d’information : il s’agit d’élaborer un plan de transformation du système d’information pour garantir le maintien en conditions opérationnelles, avec une phase de stabilisation avant de basculer vers une prestation externalisée. Dans cette approche, les échecs sont souvent dus à l’insuffisance de définition des besoins, le prestataire ne devant pas se substituer à son client.
Résoudre un problème opérationnel : le cas décrit par l’auteur concerne une banque française qui souhaite industrialiser et centraliser ses contrats de TMA, qui couvrent un périmètre de soixante pays. Pour l’auteur, quatre indicateurs fondamentaux, et suffisants, sont à prévoir : la réactivité sur la correction d’incidents, sur les demandes d’étude, le respect des délais pour les travaux d’évolution et la fiabilité des livraisons.
« Le quantitatif est aussi important que le qualitatif. Ils sont les parents pauvres de ce type de prestation », souligne Pierre-Jean Esbelin. Ces indicateurs présentent plusieurs avantages : « Ils sont autant présentables visuellement que par des chiffres, ils facilitent la communication efficace en allant du plus général au plus spécifique et ils sont économes du temps des participants en focalisant l’attention sur les situations où les écarts constatés sont supérieurs aux limites fixées. »
L’auteur rappelle deux points de vigilance : d’une part, il ne faut pas croire que la signature d’un contrat dispense de s’intéresser aux besoins du métier ou aux compétences du fournisseur. D’autre part, un contrat au forfait peut exister sans obligation de résultat.
Se réorganiser : dans ce contexte, le business case est indispensable. « C’est l’outil par excellence de l’outsourceur, il permet de démontrer le bien-fondé d’un projet. » Même si, reconnaît l’auteur, « l’obligation de conseil du prestataire est trop sacrifiée sur l’autel de la vente. »
Se développer à l’international : l’auteur décrit le cas d’une entreprise familiale dans le secteur pharmaceutique et analyse la façon dont sont gérés les cinq T : la transition, la transformation, les troubles (lorsque le rationnel laisse la place au subjectif), les tensions (avec les métiers) et la manière de transiger, en cas de dysfonctionnement plus ou moins grave.
Dans ce cas, il a été créé un trop grand nombre d’indicateurs : « Cela disperse l’attention du client et surcharge inutilement le travail de gestion de projet du fournisseur. Il en résulte un jeu politique malsain, mis en œuvre par les deux parties au gré des besoins. Dans tous les cas, c’est le projet qui en souffre (livrables et équipes). »
Accompagner les évolutions : l’auteur aborde le cas d’une banque qui veut céder ses actifs stratégiques et externaliser des fonctions en dehors de son cœur de métier, y compris l’informatique. Notamment pour transférer les immobilisations chez un prestataire, éventuellement recevoir de ce dernier un chèque, en fonction de la valeur comptable des actifs transférés, et disposer d’une meilleure visibilité sur les coûts dans le cadre d’un contrat pluriannuel. L’auteur mentionne trois bonnes pratiques essentielles.
D’abord, « aucun lien ne doit être accepté entre la technologie et la facturation ou des indicateurs de niveaux de services », afin de ne pas se trouver pénalisé par des ruptures technologiques. Ensuite, « tout niveau de service doit prévoir la description du service, la disponibilité, les délais, les responsabilités, le mode de révision et la procédure d’alerte. » Enfin, il faut définir des standards pour la gestion des données, en particulier pour répondre aux obligations du RGPD.
Entre l’industrialisation de l’externalisation, initiée dans les années 1960 par l’américain EDS, et aujourd’hui, « l’ADN est resté inchangé », assure l’auteur, même si le cloud en a fait un produit de grande consommation.