Pernod Ricard industrialise son processus d’élaboration budgétaire

À l’occasion de l’Oracle Hyperion Day 2014, Pernod-Ricard a partagé son expérience autour de la refonte de ses applications d’élaboration budgétaire, un projet accompagné par le cabinet de conseil et d’intégration Smarthys. Point fort du projet : une gestion intelligente des ressources métiers.

En 2013, Pernod Ricard, décide de revoir ses processus d’élaboration budgétaire, à l’époque gérés sous Excel. « Nous avons six processus de planification au cours d’une année », explique Aymar de Floris, alors contrôleur de gestion au sein du groupe. « Après la première élaboration du budget, nous effectuons trois révisions budgétaires, plus une estimation à mi-parcours, et, enfin, nous établissons un plan à quatre ans. » Ces rapports, qui mobilisent une vingtaine de contributeurs, contiennent notamment des données sur les quantités par réseau de vente, des analyses et prévisions par marque et des chiffres unitaires.

« Notre enjeu majeur était de s’affranchir d’Excel », insiste Aymar de Floris. En effet, avec un fichier par marque, pour un portefeuille total dépassant la trentaine de marques, auquel s’ajoutait un fichier central dans lequel les autres venaient puiser les hypothèses, l’ensemble devenait pesant à administrer. « Nous arrivions aux limites de l’outil », se souvient-il.

Le projet de refonte était donc une nécessité, motivée par plusieurs raisons. Il s’agissait, tout d’abord, de gagner du temps sur l’administration et la saisie, afin d’en libérer pour effectuer des analyses et apporter ainsi davantage de valeur ajoutée lors des comités de direction. Le deuxième objectif était de fiabiliser les données : « Dans les périodes de rush, il est plus difficile d’avoir le recul nécessaire pour s’assurer qu’une donnée est fiable et bonne », pointe le contrôleur de gestion.

Enfin, l’entreprise souhaitait intégrer une dimension collaborative dans son processus d’élaboration budgétaire. « Un outil permet d’anticiper et de faire circuler l’information, afin de confronter différents points de vue sur le budget. En outre, cela évite que les commerciaux ne découvrent les prévisions à la dernière minute. »

Le processus d’élaboration budgétaire devait s’intégrer à l’environnement applicatif mis en place dans l’entreprise, basé sur l’ERP Oracle JD Edwards pour la partie opérationnelle et sur un système Oracle Business Intelligence côté décisionnel, ce dernier servant de base aux applications de planification. Pernod-Ricard opte donc pour la mise en place d’une solution Hyperion Planning.

La reprise de l’historique, une tâche non négligeable

Le projet proprement dit démarre en septembre 2013, pour une mise en route fin février 2014. Au total, 100 jours/homme ont été nécessaires côté Pernod et 150 jours/homme côté Smarthys. « La validation en ateliers des traitements et processus mis en œuvre a consommé 40 % du temps des ressources métiers, tout le reste ayant été consacré à la reprise et la validation des historiques. Cette dernière activité demande beaucoup de temps, il faut bien vérifier que le paramétrage est bon en cas de rectification », précise Aymar de Floris.

Le déploiement de la solution a démarré par une étape intermédiaire, durant laquelle les contrôleurs de gestion ont saisi en parallèle les données dans Excel et dans l’outil. En terme de périmètre aussi, l’entreprise a adopté une approche progressive, testant d’abord l’outil sur une marque, afin de résoudre quelques bugs, pour ensuite le déployer sur l’ensemble de son portefeuille.

Créer des conditions favorables côté métier

Plusieurs facteurs ont contribué à tenir le délai court. Parmi ceux-ci, le fait que les consultants soient présents dans les locaux de l’entreprise, ce qui permettait des interactions régulières avec les contrôleurs de gestion impliqués dans le projet. Ceux-ci étaient au nombre de trois, assistés par un représentant de la DSI pour les aspects techniques. « Au départ, il était prévu de n’allouer qu’un seul contrôleur de gestion sur le projet », raconte Aymar de Floris.

« Le fait d’être à trois a permis d’éviter les ralentissements, il y avait toujours quelqu’un de disponible pour que le projet puisse avancer. » Cela a également contribué à créer une atmosphère motivante, propice à l’émulation. Enfin, c’était un atout pour « l’appropriation et la pérennisation de la solution », souligne-t-il en décrivant une situation que bien des entreprises ont connu : « Nous avons eu l’expérience d’un outil dont une seule personne était experte, et qui était inexploitable à son départ. »

Autre critère de succès, la mise en œuvre progressive, par itérations. « Au démarrage, il était difficile pour les contrôleurs de gestion de se projeter dans la solution », se remémore Aymar de Floris. De plus, le contexte a évolué entre le début et le développement du projet. « Le schéma classique, où l’on établit les spécifications, suivies par un développement en « chambre noire », puis une phase de recette, nous aurait peu convenu », juge-t-il. « En contrepartie, avec une approche progressive, le métier doit être réactif. » Il estime néanmoins qu’il faut conserver une certaine vigilance avec ce type de fonctionnement : poser des limites aux évolutions des métiers, qui peuvent être sans fin, a été une partie intégrante du rôle de Smarthys.

Le troisième élément important dans la réussite du projet a été l’existence d’un calendrier très clair, qui tenait compte des charges prioritaires pour les métiers. « À chaque reporting, le projet était au point mort pendant dix jours, afin que les contrôleurs de gestion puissent accomplir leur travail, en accord avec le directeur administratif et financier », explique Aymar de Floris. « De cette façon, une fois la période passée, nous pouvions reprendre en étant à 100 % sur le projet, sans être interrompus toutes les dix minutes. » Ce choix leur a également permis d’élaguer les tableaux de bord existants avec le soutien de leur directeur, qui les a encouragés à effectuer moins d’analyses durant le projet.

Enfin, une fois le déploiement lancé, une formation en petits comités a été mise en place auprès des utilisateurs côté marketing, ces derniers ayant également le soutien de leur direction. « Nous avons d’abord formé un utilisateur en débuggant tout ce que nous avons vu avec lui, puis nous avons mis en place des formations par groupes de six à sept personnes. » Pendant les deux premières semaines, l’équipe projet a également passé du temps auprès des utilisateurs, avec un suivi très approfondi.

Au final, le bilan est fidèle aux objectifs : la diffusion de l’information s’est accélérée et les contrôleurs de gestion apportent davantage de valeur ajoutée, car ils ont le temps de creuser les chiffres. Les mises à jour, automatisées, ont lieu tous les soirs et les utilisateurs accèdent ensuite à des tableaux de bord. Enfin, le niveau de sécurité s’est accru, les problèmes de liaisons coupées ou de formules écrasées dans Excel appartenant au passé. « Nous pouvons également archiver les différentes versions des tableaux de bord et analyser rapidement les différences de l’une à l’autre », ajoute Aymar de Floris.


A retenir – quatre critères pour favoriser l’implication des métiers

  1. Répartir la charge entre plusieurs collaborateurs : pour éviter les goulets d’étranglement en cas d’indisponibilité d’une ressource clef, Pernod-Ricard a choisi de déléguer trois contrôleurs de gestion sur le projet, au lieu d’un seul prévu initialement.
  2. Privilégier une approche itérative : les besoins métier évoluant fréquemment, une approche trop figée risque d’aboutir à une solution en décalage avec ceux-ci. Par ailleurs, le fonctionnement par itération aide les représentants métier à se projeter dans la solution, en travaillant sur des ébauches concrètes plutôt qu’en partant d’une feuille blanche.
  3. Inclure les impératifs métiers dans le calendrier du projet : la prise en compte, dans le planning, des contraintes liées aux périodes de reporting a permis aux contrôleurs de gestion de bien gérer leur temps, sans sacrifier celui alloué au projet. Par ailleurs, la proximité des consultants, présents dans les locaux, a également favorisé les interactions en évitant des pertes de temps inutiles.
  4. Mettre en place des formations par petits comités : l’équipe projet a d’abord préparé le terrain en formant un utilisateur, puis elle a formé les autres par petits groupes n’excédant pas sept personnes, afin de permettre un vrai suivi.