S/4 Hana est typique d’une solution qui cristallise deux attitudes. D’un côté, l’éditeur (SAP), qui y voit une réelle avancée en termes de création de valeur et d’innovation. D’un autre côté, des entreprises pour qui cette création de valeur ne va pas de soi, d’autant qu’elle est subjective et variable dans le temps.
Et, entre les deux, les directions générales s’interrogent sur l’opportunité de mettre quelques millions ou dizaines de millions d’euros sur ce qu’elles considèrent essentiellement comme une migration technique. « L’adoption de S/4 Hana en tant que vecteur de création de valeur ajoutée pour les métiers (plutôt que comme un projet technique de plus pour les experts), nous préoccupe fortement », rappelle l’USF (association des utilisateurs SAP francophones) qui a organisé sa Convention 2019 à Nantes les 9 et 10 octobre.
Pour Gianmaria Perancin, président de l’USF, les entreprises « ont encore une vision de S/4 comme un projet technique, on a du mal à voir la valeur business pour convaincre les métiers et les directions générales. » « C’est à nous de convaincre les clients », admet Gérald Karsenti, PDG de SAP France, pour qui le pire scénario serait « une migration obligatoire sans voir les bénéfices. »
Une enquête menée par l’USF auprès de ses membres a mis en exergue plusieurs freins, le premier étant cette difficulté à démontrer les bénéfices, devant les coûts, la reprise des spécifiques. Les bénéfices métiers et l’optimisation des processus sont, en même temps, les raisons majeures de l’adoption de S/4 Hana par les entreprises qui ont investi.
L’éditeur va évidemment pousser sa base installée à passer de ECC6 (l’ERP historique) à S/4 Hana. D’autant qu’en 2025, SAP a prévu l’arrêt de la maintenance technique. Pour les entreprises, cette perspective implique de devoir traiter plusieurs problématiques : l’absence de support en cas de bug, de livraison des changements réglementaires, l’obsolescence progressive des plateformes techniques qui supportent SAP, la disparition des correctifs de sécurité et l’absence d’évolutions fonctionnelles.
« Nous avons annoncé l’arrêt du support de ECC dix ans à l’avance, il ne faut plus attendre ce n’est pas en 2023 que les entreprises commenceront à migrer. Dix ans, c’est certes respectueux pour les clients, mais cela n’a pas créé de sentiment d’urgence », se défend Gérald Karsenti, PDG de SAP France, qui craint la pénurie de compétences. Et assure que « SAP ne laisse jamais tomber ses clients. »
A l’occasion de sa Convention annuelle, l’USF a publié une nouvelle Note de Perspectives sur « S/4 HANA, les chemins pour y aller ». Ce document est issu des travaux d’un Groupe de Travail spécifique à cette problématique, auquel ont été associés SAP, PWC et Inventy, qui se sont déroulés sur plusieurs mois, sous forme de différents ateliers portant sur plusieurs thèmes : le Business Case, les outils, le licensing, les principes de migration, les retours d’expérience.
« L’objectif de cette Note de Perspectives est de dégager les tendances, de dresser l’état du marché et du niveau d’adoption de S/4 HANA, avec des business cases et des scénarios de migration », souligne Bernard Cottinaud, Président de la Commission Organisation et Gouvernance de l’USF, pour qui l’objectif est de « faire en sorte que des non-experts puisse en tirer une philosophie et disposer des informations les plus pertinentes pour leurs entreprises. »
L’USF suggère dans ce document plusieurs bonnes pratiques pour implémenter S/4 Hana :
– Associer les métiers même s’ils ne sont pas les promoteurs du projet, afin qu’ils se projettent vis-à-vis du potentiel de la solution.
– Prendre le temps de bien choisir le ou les partenaires, la plupart n’ont pas encore d’équipes complètes et vraiment expérimentées.
– Former les équipes internes (paramétrage, développements, ssécurité…).
– Associer l’éditeur dans la mesure où SAP S/4 Hana reste encore un produit jeune avec des expertises.
– Evaluer l’impact de la politique de licence, étape chronophage qu’il convient de bien anticiper.
– Intégrer dans les évaluations budgétaires la conservation d’un environnement d’archive, la reprise des données peut être risquée.
– Demander aux métiers de se positionner par rapport à l’utilisation du standard.
– Réfléchir au lotissement du projet et au planning de migration.
– Réaliser un démonstrateur pour les métiers sur une base migrée.
– Vérifier les performances du code spécifique liées à la simplification du modèle de données.
– Rejouer la bascule autant de fois que nécessaire pour limiter les risques.