Intégrer de nouveaux besoins, opérer un saut technologique et fonctionnel, moderniser un système existant, réduire l’hétérogénéité : telles sont les grandes évolutions qu’un DSI doit le plus souvent mener. Les retours d’expériences de quatre PME qui ont basé leurs approches sur des ERP.
Pour transformer un système d’information, en particulier dans la perspective de le baser sur un ERP, quatre approches sont possibles, selon deux critères déterminants : la structure de l’environnement existant et l’orientation que les DSI souhaitent donner à la transformation, autrement dit, si celle-ci est plutôt orientée sur des évolutions technologiques ou vers des besoins métiers. On déduit quatre stratégies de transformation en fonction de ces deux axes.
Lorsqu’il existe déjà une solution, la première stratégie consiste à la moderniser, essentiellement avec des montées de version ou l’ajout de modules. La seconde porte sur l’adaptation de la solution à de nouveaux besoins (changement de périmètre, nouveaux métiers, évolution des usages…). Lorsqu’un progiciel intégré n’est pas encore implémenté, une troisième stratégie consiste à réaliser un saut technologique, entre un ou plusieurs systèmes obsolètes et une solution à l’état de l’art. Enfin, une quatrième stratégie consiste à réduire l’hétérogénéité en mettant en place une solution relativement centralisatrice telle qu’un progiciel intégré.
1. Moderniser une solution existante : l’exemple de Bourasseau Industrie
C’est la fin de vie du logiciel Produflex de Cegid qui a été l’élément déclencheur de la transformation de l’ERP de Bourasseau Industrie, entreprise vendéenne spécialisée dans la tôlerie industrielle. « Ce progiciel de gestion intégré, qui datait de 1995, ne nous satisfaisait plus », indique Michaël Bézard, responsable maintenance, achat et informatique chez Bourasseau Industrie. « Toute modification devenait anarchique et conduisait à des erreurs. » Ce qui n’était plus acceptable pour une PME industrielle qui ne peut se permettre d’être en retrait sur son marché. Cette société, créée en 1980, répartie sur 10 000 m2 de bâtiments, fabrique tout type de pièces grâce à des outils de découpe et de mise en forme des métaux pour des secteurs aussi variés que le mobilier urbain, la PLV (publicité sur les lieux de vente) ou encore l’agencement de magasins. Outre le directeur général, l’équipe de direction est constituée d’une responsable comptabilité et ressources humaines, d’un responsable de la maintenance et du SI et de cinq chargés d’affaires.
« Sachant que Cegid arrêtait la maintenance de Produflex, utilisé jusqu’à présent par notre entreprise, le temps était venu pour nous de changer de logiciel. » Sous la houlette du directeur général et en collaboration avec un chargé d’affaires spécialisé en informatique, Michaël Bézard initie alors le projet ERP. Après délibération avec les autres managers de l’entreprise, un budget de 120 000 euros (couvrant la licence, les développements spécifiques, le paramétrage et l’accompagnement au démarrage) est finalement alloué. Reste à trouver la solution qui convient. Le cahier des charges est alors rédigé, avec l’aide d’un consultant.
Ensemble, ils présélectionnent cinq éditeurs, en novembre 2011. Après évaluation des réponses, et avec une attention particulière apportée à l’analyse technique, deux solutions émergent : Cegid et Sylob, qui se voient attribuer des notes supérieures à 80/100. Pour se départager, Sylob propose alors de développer un module spécifique pour la gestion des devis, totalement intégré dans l’ERP de Bourasseau Industrie. « Ce module nous permet de calculer une imbrication optimum des pièces à deviser pour chaque tôle et donc de faire ressortir le coût de la pièce en fonction du choix de tôle (parmi nos 300 formats de tôle en stock). Résultat : nous pouvions, dès le stade du devis, déterminer le coût par tôle, c’est un vrai plus pour nous », explique Michaël Bézard. Quant à Cegid, leur proposition de faire évoluer l’interface entre Zylos et leur EPR laissait la configuration d’utilisation de deux logiciels, ce qui ne convint pas l’entreprise qui décida d’arrêter le processus. En juin 2012, Bourasseau Industrie signe donc avec Sylob.
La rédaction du cahier des charges aura été une étape essentielle pour le responsable maintenance, car ce projet d’ERP exige une intégration totale au sein de la PME. En outre, il a conscience que sa mise en place dans l’entreprise va entraîner des modifications importantes des habitudes de travail des collaborateurs. Parmi les contraintes stipulées dans le cahier des charges, Michaël Bézard évoque trois éléments. D’abord, les performances techniques, c’est-à-dire la capacité de l’ERP Sylob 5 à gérer la réalisation des devis jusqu’à leur transformation en bons de commande. « Avec notre solution précédente, nous utilisions un applicatif spécifique qui était capable, lors de la phase devis, d’optimiser le placement des pièces dans la matière première (plaque de tôle). Mais ce logiciel n’était pas intégré à notre ERP ! », explique Michaël Bézard.
Cette fois, il souhaite une intégration totale du module « devis » dans l’ERP, ce qui représenterait un gain de temps pour les chargés d’affaires et une fiabilité accrue des données, en évitant les doubles saisies. Ensuite, Michaël Bézard recherche un outil de planification pour l’aiguiller dans ses choix de production. « Un planning simple sur lequel on puisse filtrer les informations », résume-t-il. Et, enfin, il souhaite privilégier un éditeur « à taille humaine.
D’octobre à novembre 2012, Bourasseau Industrie entre dans la phase d’analyse de Sylob 5 avec l’aide de deux chefs projets de l’éditeur. S’ensuit l’étape dédiée au prototypage, entre novembre 2012 et juillet 2013, qui permet à la société de découvrir les modules des flux de l’ERP. « Cette période consacrée aux essais et aux tests nous a permis d’adapter l’outil à nos besoins », précise Michaël Bézard. Le démarrage de Sylob 5 s’est déroulé en janvier 2014. Ainsi, l’ensemble des salariés, du bureau d’études aux techniciens sur les machines à commande numérique, en passant par les soudeurs et les monteurs, seront en mesure de suivre l’ensemble du flux de production dans l’outil. Lors de l’analyse, l’éditeur va identifier un besoin complémentaire : la possibilité pour l’entreprise d’imprimer un état de synthèse détaillé. « Cette fiche nous permet de faire ressortir tous les coûts liés aux achats, mais aussi à la sous-traitance et à la production, directement sur le devis. C’est un réel plus en terme d’ergonomie et de temps de réalisation du devis », assure Michaël Bézard.
Selon ce dernier, les gains apportés par la solution devraient être rapidement identifiables. Tout d’abord, les chargés d’affaires pourront mieux gérer les devis, les commandes, les achats et la gestion des stocks de matières premières qui se trouvent dans l’usine et dans un transstockeur, ainsi ajusté de manière automatique. Ensuite, l’interface réalisée entre le transstockeur et Sylob 5 permettra au bureau d’études de connaître le stock en temps réel et la planification des ordres de fabrication. Quant aux chargés d’affaires, ils connaîtront à tout moment l’état de leurs commandes, sans en faire la demande. Enfin, l’optimisation de la planification et de l’ordonnancement des productions va permettre d’aborder les deux périodes de surcharge cycliques (novembre/décembre et avril/juillet) avec plus de sérénité.
Pourtant, cette transformation technologique n’est pas sans soulever quelques difficultés. « Les utilisateurs sont un peu inquiets face à ce nouvel outil, d’autant plus qu’ils vont devoir faire évoluer leur mode de fonctionnement », précise Michaël Bézard. Côté communication, l’éditeur soumet l’idée de définir un nom pour ce nouveau projet. Ce sera « Cap Sylob ». Puis vient la création d’un logo et d’une newsletter mensuelle qui permet d’informer les 47 collaborateurs sur les développements en cours. « Cette newsletter, qui est devenue notre outil de communication, est affichée dans les locaux sociaux. Les collaborateurs sont ainsi déjà sensibilisés à ce projet », assure Michaël Bézard. Côté apprentissage, un programme de formation est prévu pour tous les utilisateurs.
2. S’adapter à de nouveaux besoins : l’exemple de Septodont
Spécialisé dans la production d’anesthésiques pour les soins dentaires, les laboratoires Septodont (500 millions de cartouches produites par an, six unités de production et 1 200 personnes) souhaitaient renforcer la traçabilité tout au long de leurs chaînes de production et de livraison, afin d’être à même de répondre aux enjeux réglementaires du secteur pharmaceutique. Fin 2009, l’entreprise envisage la mise en place d’une solution basée sur l’étiquetage des lots avec des codes-barres. « C’était une volonté forte de la direction générale de disposer d’un ERP doté de capacités de traçabilité et d’automatisation », explique le directeur des systèmes d’information, Stéphane Leuvrey.
Mais le progiciel de gestion intégré utilisé à l’époque, Microsoft Dynamics AX V3, ne supporte pas ce type de fonctionnalité. Il fallait donc envisager le développement d’une extension, ainsi qu’une montée de version, afin de pouvoir exploiter tout le potentiel de ce type de solution. « Il nous fallait un partenaire capable de développer ce type d’add-on.», raconte le DSI. L’entreprise lance alors un appel d’offre auprès de différents intégrateurs de Microsoft Dynamics AX. À l’issue de celui-ci, l’intégrateur et éditeur TVH Consulting est retenu pour accompagner Septodont dans ce double projet. « Ils proposaient une solution temps réel, où, dès que l’on passe le lecteur sur un code-barre, le système sait dire ce qu’on a le droit de faire ou pas avec le lot concerné », précise Stéphane Leuvrey. « Pour l’industrie pharmaceutique, cela présente un intérêt fondamental : au moindre litige sur un lot, cela permet de le bloquer immédiatement et d’éviter qu’il soit envoyé. »
Un accélérateur de changement
Après une phase de préparation, d’une durée d’environ six mois en comptant l’appel d’offre, le projet démarre en octobre 2010 dans un contexte un peu particulier, le passage d’une organisation de type holding à celle d’un groupe international. « Ce projet a été l’un des premiers projets communs entre l’Europe et l’Amérique du Nord, la France et le Canada étant tous deux sur le même environnement », relate le DSI. « Il a permis aux collaborateurs des deux continents de travailler ensemble et d’apprendre à se connaître. À cet égard, le projet a été un accélérateur de changement dans la construction de la culture de groupe.»
Pour que le projet se déroule bien, « il fallait s’assurer d’avoir les bonnes compétences autour de la table », souligne Stéphane Leuvrey. Deux équipes ont alors été mises en place : une équipe principale en France et une seconde équipe au Canada, chargée de vérifier qu’un déploiement local de la solution était possible. Ces équipes réunissaient des personnes disposant à la fois d’une capacité de décision et de responsabilités sur leurs domaines. Le DSI se chargeait, quant à lui, de la coordination. Enfin, un processus d’escalade a été défini et un comité de pilotage global, constitué du PDG et des directions des deux pays, permettait de trancher en cas de divergence.
Des processus rendus plus robustes
Lors du passage à la nouvelle version de Microsoft Dynamics AX, l’enjeu principal a été d’adapter le modèle aux contraintes de l’industrie pharmaceutique. La reprise des données s’est effectuée de manière transparente, en exploitant les fonctionnalités de reporting OLAP du progiciel pour sélectionner les données importantes à reprendre. Le projet a également été l’occasion, pour l’entreprise, de remettre tous ses processus à plat, afin de tenir compte du système de codes-barres. Chaîne d’approvisionnement, flux inter-sociétés, production, gestion du référencement, gestion des dossiers de lots, engagement de dépenses et reporting financier ont donc été revus pour intégrer les nouvelles capacités. « Le nouveau système fournit une traçabilité complète, ce qui rend les processus plus robustes. Il facilite par exemple l’organisation des rappels de lots en cas de besoin », assure Stéphane Leuvrey.
Début 2011, le nouveau système est opérationnel en Europe, trois mois plus tard au Canada. Les sites de distribution ont suivi, notamment au Royaume-Uni et en Belgique. Actuellement le déploiement se poursuit, en Allemagne et au Colorado. La migration et le déploiement de la nouvelle solution ont nécessité « beaucoup de travail », mais le projet est bien lancé. Pour le DSI, cela est principalement dû à deux éléments : d’une part, l’entreprise avait une vision claire des objectifs et, d’autre part, l’organisation était globalement favorable au changement. « Nous avions quelque chose à vendre qui intéressait les opérationnels, le système d’acquisition par codes-barres », souligne le DSI.
« Tous les services ont en tête l’impact sur le patient, il existe plus de 27 points de contrôle tout au long de la fabrication d’une cartouche. La traçabilité et la qualité sont donc des enjeux reconnus et partagés.» Enfin, le transfert de compétences des consultants TVH a été efficace : « Il était important de ne pas se retrouver, à l’issue du projet, avec une boîte noire, afin de pouvoir faire évoluer le système en cas de besoin, ce qui ne manque pas d’arriver », souligne le DSI. Aujourd’hui, c’est la responsable applicative, Anne-Laure Théaud, qui gère elle-même les nouveaux déploiements, avec les ressources internes et des ressources externes quand c’est nécessaire. « Nous disposons d’un système stable que nous connaissons bien, cela nous donne de la réactivité, ainsi qu’une meilleure maîtrise des coûts que si nous dépendions entièrement d’un sous-traitant », estime le DSI.
La solution « Automated Data Capture » mise au point par TVH Consulting, permet aujourd’hui à Septodont de tracer tous les produits et composants grâce à un numéro de lot. Tous les éléments constitutifs d’un médicament (boîte, notice, seringue..), les statuts qualité et les dates d’expiration peuvent ainsi être tracés dans le nouveau système ERP.
La mise en place de cette solution, couplée à la montée de version, a procuré d’autres bénéfices à l’entreprise, notamment l’automatisation des opérations de reporting et de consolidation financière, auparavant effectuées sous Excel. Le groupe a pu également réorganiser sa chaîne logistique en Amérique du nord, en améliorant la performance des entrepôts et en réduisant leur nombre. Il a également amélioré le réassortiment des sites de distribution. Enfin, il dispose à présent d’une meilleure maîtrise de ses engagements financiers.
3. Accélérer le saut technologique : l’exemple de Chrétien Matériaux Distribution
Chrétien Matériaux Distribution n’a eu de cesse d’évoluer depuis sa création à Tincques (Pas-de-Calais). Simple menuiserie, puis négociant en matériaux destinés aux professionnels du bâtiment, l’entreprise décide, dans les années 1990, de s’ouvrir aux particuliers. Aujourd’hui, cette PME familiale (250 collaborateurs, 45 M€ de chiffre d’affaires en 2012), comprend quatorze magasins situés dans la région Nord-Pas de Calais/Picardie. Chrétien Matériaux Distribution s’est engagé, il y a déjà trois ans, dans un projet dont l’objectif était de mieux structurer et d’optimiser les différentes étapes et contraintes liées à son métier de distribution.
« L’entreprise rencontrait plusieurs problématiques », rappelle Guillaume Chrétien, directeur général de Chrétien Matériaux Distribution. En premier lieu, le système utilisé jusqu’alors était instable, ce qui avait pour effet de générer des pannes et de perturber l’organisation des magasins. En outre, l’outil installé début 1990 était obsolète par rapport aux ERP disponibles sur le marché. Par ailleurs, l’hétérogénéité du SI du groupe, constitué de bases de données indépendantes pour chaque magasin et sans communication entre elles, rendait difficile la visibilité sur l’information, d’où une difficulté à trouver la bonne information au bon moment dans le cadre du parcours client, donc, difficile aussi à tracer. En dernier lieu, Guillaume Chrétien cite le contexte actuel de crise qui oblige l’entreprise à être plus productive.
« Nous devions trouver des moyens de diminuer nos coûts. Pour cela, il nous restait donc à investir dans un système d’information nous permettant d’être plus stricts dans l’application de nos procédures, ce qui était impossible avec le système existant. » En fait, la PME répond simplement aux demandes pressantes des utilisateurs soumis à la lourdeur du système et aux multiples pannes, qui souhaitent simplement évoluer vers une version améliorée.
Une fois la décision de changer d’ERP validée par la direction générale, l’entreprise se lance alors dans la recherche du fournisseur. Pour cela, l’équipe projet étudie les solutions déployées (Divalto notamment) chez des confrères négociants et examine, en parallèle, des solutions telles que SAP. Mais SAP est jugé démesuré par rapport au budget alloué et aux capacités de la solution. Chrétien Matériaux Distribution préfère alors l’éditeur Comarch qui répond à ses principales exigences : proposer des procédures précadrées, présenter un outil simple d’utilisation et comprendre véritablement les problématiques des PME. « Nous voulions bénéficier d’architectures qui puissent évoluer et uniformiser les procédures de l’ensemble des quatorze magasins », précise Sylvia Lopez, directrice communication chez Chrétien Matériaux Distribution. « Nous avons beaucoup travaillé sur la phase d’étude, et notamment sur la refonte des processus », ajoute Vincent Veriez, chef de projet.
Un basculement en douceur
À partir de septembre 2013, Comarch livre ses premiers modules et réalise des tests, tandis que Chrétien Matériaux Distribution se penche sur les transferts des données vers les futurs logiciels. L’objectif est de déployer progressivement l’ERP dans l’ensemble des magasins et dans la centrale d’achat du réseau. « Ainsi chaque mois, à partir d’avril 2014, un magasin sera basculé vers la nouvelle solution. 2014 sera donc consacrée à l’intégration », souligne Guillaume Chrétien.
Via l’ERP, la PME pourra piloter la gestion des stocks, des achats et des réapprovisionnements pour les quatorze magasins, depuis un outil intégré unique. Les opérations « répétitives » seront automatisées pour plus d’efficacité. Quant à la sécurisation des données, elle sera améliorée avec la mise en place d’un système de gestion des droits. Ainsi, le salarié n’aura accès qu’aux seules informations utiles à l’exercice de sa fonction.
Par ailleurs, Chrétien Matériaux Distribution n’oublie pas sa force commerciale mobile et a décidé de mettre à sa disposition le module adapté pour créer des devis et passer des commandes, via les téléphones ou les tablettes, en lien direct avec l’ERP, en mode connecté ou déconnecté. De plus, l’intégration du module E-Shop B2C permettra, à moyen terme, le développement d’un drive, alors que le module E-shop B2B sera utilisé pour la création d’un espace clients orienté professionnel. Avec le module de Business Intelligence, le réseau Chrétien aura une visibilité totale sur son activité en offrant la création de rapports personnalisés, autorisant le croisement entre les différents flux liés à la production (achats, ventes, variation des stocks, …). À terme, logisticiens, vendeurs, caissiers et administrateurs utiliseront l’outil au quotidien.
Une communication progressive
Et pour s’assurer de l’adhésion de cette centaine d’utilisateurs, l’entreprise a insisté sur la communication. Dès janvier 2013, elle diffuse à l’ensemble des collaborateurs un courrier présentant brièvement le projet d’ERP. Puis la communication cesse pendant huit mois. « Concrètement, nous ne voulions pas surcommuniquer par peur de lasser et d’impatienter les collaborateurs », se souvient Sylvia Lopez. Le contact est repris en octobre sous la forme d’une newsletter bimestrielle. « Dans ce premier document, nous avons présenté l’équipe projet et expliqué les différentes phases prévues jusqu’en 2014 », indique Sylvia Lopez, qui ajoute que le service communication a aussi voulu apporter une touche ludique à ce projet à travers un jeu concours. « Il s’agit de baptiser notre logiciel ERP et de lui trouver un nom propre. Pour cela, nous avons fait appel à la créativité de tous nos employés pour qu’ils nous proposent un nom en adéquation avec le projet et son utilisation. »
En matière de formation, tout est également prévu. Avec l’aide de Comarch, l’entreprise va former un nombre limité d’utilisateurs qui devront ensuite transmettre leur savoir à leurs collaborateurs basés dans les quatorze magasins. « La sélection de ces utilisateurs privilégiés se tient à trois critères : ils devront représenter les différents métiers de notre activité, ils seront basés plutôt dans les magasins situés proches du siège social, car cela facilite la logistique, et, enfin, ils disposeront d’une vision complète de leur métier de demain », précise la directrice de la communication.
4. Diminuer l’hétérogénéité : l’exemple d’Oberthur Cash Protection
Filiale du groupe François Charles Oberthur Fiduciaire (FCOF), Oberthur Cash Protection (OCP) conçoit et fabrique des systèmes de protection des billets de banque. Comme l’explique Yann Marques, responsable informatique, « nos systèmes utilisent des technologies permettant de détecter les attaques ou les tentatives de vol en marquant les billets avec de l’encre indélébile. Ces billets n’ont ainsi plus aucune valeur. » C’est en 1985, date de la création de l’entreprise, que ce système sécurisé avec maculage pour la protection des valeurs est inventé à Dijon. Depuis, plus de 60 000 systèmes ont été installés dans un seul but, celui de protéger les transporteurs de fonds, les distributeurs de billets (DAB) et les commerçants, basés majoritairement en France et en Belgique.
En 2011, il est envisagé de moderniser la gestion des ventes, des achats, de la production et de la comptabilité, avec pour objectif d’abandonner les solutions internes au profit d’un l’ERP. Trois raisons principales ont poussé OCP à privilégier cette approche. La première raison est d’ordre technique. « Jusqu’alors, nous utilisions des outils déployés en interne sous forme de fichiers Excel et Access, difficilement maintenables, d’autant plus que chaque département disposait de ses propres outils », explique Yann Marques. La deuxième est d’ordre fonctionnel. L’offre d’OCP s’est considérablement étoffée depuis la création de l’entreprise.
D’un seul produit commercialisé sur deux marchés, la France et la Belgique, l’entreprise s’est tournée, depuis quelques années, vers l’international en proposant une nouvelle gamme de produits. « Le système existant n’intégrait pas ces nouveaux produits rendant le travail des collaborateurs plus contraignant », se souvient Yann Marques. Le troisième motif concerne la fiabilité. « Nous disposions de multiples bases de données. Résultat, lorsque nous devions produire des rapports, les informations que nous obtenions étaient inexactes et donc inutilisables. La situation était telle, qu’il devenait difficile de s’assurer que l’intégration de nouvelles fonctionnalités avait bien été effectuée dans chacune des bases de données. »
Le responsable informatique tient à préciser que l’initiative de ce projet d’ERP revient en totalité aux utilisateurs. Selon lui, « 80 % des responsables de services voulaient changer de système et étaient donc demandeurs. » Cela concernait aussi bien les services de contrôle de gestion et de logistique, que les services de production, d’administration des ventes et des achats. « Tous aspiraient à la standardisation des informations », renchérit Yann Marques. Une équipe projet est alors constituée, regroupant un directeur de projet expérimenté en ERP, un chef de projet et un responsable de chaque service, auxquels s’ajoutent une trentaine d’utilisateurs CRM et ERP.
Pour le choix de la solution, OCP se fait aider d’un consultant externe qui agit comme AMO (Assistant maîtrise d’ouvrage). « Le consultant nous a accompagné dans la réalisation de l’audit, la description des prérequis du projet et la mise en lumière des problèmes à résoudre », explique Yann Marques qui spécifie aussi que la direction d’OCP contraint l’équipe informatique à choisir un produit compatible Microsoft et délimite le budget. « La politique du groupe obligeait que le système d’information soit basé à 90 % sur des produits Microsoft. Il fallait donc que la solution s’intègre correctement dans cet environnement. » A ces deux exigences, s’ajoute celle du délai. « Nous avions une obligation de réaliser le projet en neuf mois. » Et enfin, OCP veut privilégier les solutions standards car, selon Yann Marques, « cela permet de mieux gérer la notion du temps, de limiter l’enveloppe budgétaire et de réexaminer les processus internes. »
En avril 2011, l’équipe projet fait appel au consultant pour établir et valider la cohérence du cahier des charges. Puis, ensemble, ils approchent cinq intégrateurs. Quatre sont présélectionnés et participent à deux soutenances techniques et une soutenance commerciale, entre septembre et décembre 2011. « Pendant cette période, nous avons demandé aux intégrateurs de présenter les solutions, leurs coûts de prestation et de traiter des cas concrets que nous pouvions rencontrer au quotidien », décrit Yann Marques. L’équipe projet est consultée sur l’ergonomie et les propriétés de la solution, et la réponse fonctionnelle de l’intégrateur. « Nous voulions choisir un couple : produit et intégrateur. Dans ce cas précis, nous avons opté pour Microsoft Dynamics CRM et Jalix. »
Le projet démarre en février 2012. « Le rôle de l’intégrateur a été essentiel. Ainsi, lors de la rédaction de l’appel d’offre, nous n’avions pas mesuré l’intérêt que pouvait nous apporter un CRM interfacé avec un ERP. Mais Jalix avait identifié ce besoin complémentaire », constate Yann Marques. D’ailleurs, cette combinaison permet de partager les référentiels principaux (base clients, articles, etc.) et de gérer les opportunités de vente des commerciaux. Concrètement, l’intégrateur a organisé, au cours des trois premiers mois, des ateliers de deux heures sur différent thèmes, permettant aux responsables de processus d’appréhender les fonctionnalités de la solution et de soumettre leurs contraintes. « Une phase de dialogue entre les consultants et les responsables de processus s’est réellement instaurée. » Après plusieurs mois d’échanges, Jalix a pu intégrer ces données dans l’ERP et la CRM, mettre en place l’environnement de test et gérer le paramétrage avec les consultants techniques, laissant à OCP la possibilité de se positionner sur la partie purement fonctionnelle.
Août et septembre 2012 sont consacrés à la phase de recette. « Les responsables de processus, aidés par quelques utilisateurs, ont élaboré des jeux de tests afin de savoir si la solution répondait bien à leurs attentes », explique Yann Marques. En septembre 2012, 80 % de la solution est déployée. C’est l’occasion pour l’équipe projet de lancer le programme de formation basé sur la vision et le CRM. « Cette première phase de formation, réalisée entre octobre et novembre, a permis aux utilisateurs de manipuler l’outil. Un second cycle de formation à la carte a été mis en place en décembre. Notre volonté était de s’assurer que l’intégralité des utilisateurs soit correctement formée. »
Mais, malgré ces apprentissages, la réaction est mitigée, notamment en termes de prise en main. Tandis que les deux tiers des utilisateurs sont pleinement satisfaits, les autres, anxieux face aux changements, sont désorientés. « Nous avons constaté que la facilité de prise en main de l’outil différait selon les compétences des utilisateurs et selon les bénéfices qu’ils pouvaient en tirer », indique Yann Marques, qui a déjà programmé de nouvelles formations en 2014 car, selon lui, « s’approprier rapidement le logiciel après une formation reste primordial. L’utilisateur applique tout de suite ce qu’il a appris et il est plus en confiance. Cela se ressent sur son travail. » Après la validation des différents processus effectuée par Jalix et JEH Consulting, l’ERP Microsoft Dynamics NAV 2009 et Microsoft Dynamics CRM 2011 sont finalement mis en production en janvier 2013.
Des délais serrés
Pendant ces neuf mois, OCP aura rencontré certaines difficultés. De timing tout d’abord : « Si on ne maîtrise plus le temps, on ne maîtrise plus les coûts », fait remarquer Yann Marques. « Le projet a été bouclé en dix mois. Cet objectif a été atteint car les responsables de processus ont dû s’investir fortement pour gérer ce projet en plus de leurs tâches habituelles. » Ce dossier a aussi exigé, de la part de l’équipe projet, une parfaite organisation et le respect du calendrier. « Nous organisions des réunions de production toutes les deux semaines pour cadencer le projet. Le comité de pilotage se réunissait également chaque mois avec les directeurs de projets et les chefs de projets pour échanger, décider ou encore trancher. Du reste, en cas de différents, c’est le directeur ou chef de projet qui prenait la décision finale. » Enfin, le responsable informatique insiste fortement sur la nécessité de déterminer les rôles de chacun des intervenants avant le lancement du projet « pour éviter tous litiges ou discussions sans fin. »
« Aujourd’hui, nous disposons d’une seule base de données, d’un seul référentiel. L’outil fonctionne parfaitement, est bien paramétré, sans aucune latence », conclut Yann Marques. Concrètement, les données clients et produits dans Microsoft Dynamics CRM 2011 sont directement issues de l’ERP Microsoft Dynamics NAV et donc saisies une seule fois, puis partagées entre les collaborateurs du service client. « Nous avons constaté que les données fournies par le CRM et basées dans l’ERP sont plus fiables, facilitent les échanges entre le service client et les autres services, comme par exemple avec le service administration des ventes, grâce à l’ERP, ou le service commercial, grâce au CRM », explique Yann Marques.
Avec ces technologies, OCP gagne aussi en temps et en performances, ce qui se traduit par une rapidité accrue de la facturation, comme le résume le responsable informatique « Auparavant, la facturation clients nécessitait deux jours contre une demi-journée actuellement. Autre avantage, le processus est géré de A à Z par une seule personne, ce qui n’était pas le cas avec notre ancien système qui exigeait la contribution de plusieurs acteurs et donc augmentait le risque d’erreur. Désormais, celui-ci est limité et la correction s’en trouve facilitée », assure Yann Marques. « Côté CRM, le commercial peut, chez son client, accéder au parc des produits installés chez ce même client, visionner les incidents traités et vérifier les interventions réalisées, autrement dit, disposer d’une photo instantanée et complète de la relation avec son client. »