Une analyse des impacts sectoriels de l’intelligence artificielle

L’intelligence artificielle (IA) devient un enjeu majeur pour l’économie et la société française. La Direction générale des entreprises (DGE), qui pilote le volet économique de la stratégie nationale pour l’IA, le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET) et Tech’in France ont confié la réalisation de cette étude sur l’état de l’art en matière d’intelligence artificielle au cabinet Atawao (*).

Ayant pour but d’enrichir la réflexion globale des pouvoirs publics et des professionnels sur le développement de l’IA, ce rapport propose un classement et une analyse des quatorze secteurs économiques français potentiellement les plus impactés par l’IA : administrations publiques, services financiers, agriculture, services juridiques, sécurité des biens et des personnes, commerce de détail, professions libérales et services professionnels, télécommunications, loisirs et médias, santé, industrie, transport et mobilité, ainsi qu’énergie et environnement.

Parmi ces quatorze secteurs, quatre sont particulièrement touchés par l’IA et ont été étudiés de manière plus approfondie :

  • Le secteur de la santé qui est l’un des plus dynamiques en matière d’IA, notamment dans le domaine de la médecine préventive ou du diagnostic médical. L’étude recommande de créer des zones d’expérimentation, à l’échelle d’un hôpital ou d’un réseau de soins, et met l’accent sur la nécessité d’accéder à d’importants volumes de données de qualité pour permettre l’innovation. Sur ce point, le gouvernement a déjà lancé le Health Data Hub en octobre 2018, dispositif unique de partage entre producteurs et utilisateurs de données de santé.
  • Le secteur de la mobilité bénéficiera également des apports de l’IA, en particulier grâce à la conduite autonome. Plusieurs freins à son développement ont été identifiés et doivent être levés rapidement, avec, par exemple, la création de zones d’expérimentation à l’échelle d’une ville ou d’une situation de transport à risque, telle qu’une autoroute ou une zone montagneuse.
  • Dans les secteurs de l’énergie et de l’environnement, les effets de l’IA ont déjà été constatés, avec notamment le pilotage des réseaux électriques intelligents, les stratégies d’efficacité énergétique ou encore l’anticipation des chocs liés au changement climatique. « Il s’agit à présent de stimuler la production de données environnementales chez les industriels », notent les auteurs.
  • Dans le secteur industriel, le potentiel d’applications de l’IA, variable selon le type d’industrie, offre des opportunités à des start-up ou des PME françaises, en particulier dans le contrôle qualité ou la maintenance prédictive.

Selon les auteurs, « cette étude montre que l’IA pourrait représenter de réelles opportunités pour la France, à condition qu’elle encourage son développement. » A cette fin, le rapport formule plusieurs recommandations pour, d’une part, favoriser la création de jeux massifs de données et faciliter l’accès à ces mêmes données aux acteurs économiques, et, d’autre part, soutenir le développement d’expertises nationales en IA, notamment :

  • Créer un cadre légal d’expérimentation à partir de données afin d’en faciliter l’accès.
  • Créer des zones d’expérimentation à grande échelle pour tester en « grandeur nature » des solutions innovantes basées sur l’IA : un hôpital pour les solutions de santé, une ville pour les solutions de mobilité, un quartier pour les solutions de gestion de l’énergie.
  • Créer un marché protégé pour les start-up, afin de favoriser l’émergence de sociétés viables économiquement.
  • Encourager des projets centrés sur les assistants intelligents, dans le but de proposer une solution de facilitation des besoins quotidiens du grand public.

Toutefois, l’intelligence artificielle, si elle veut copier le cerveau humain, se heurte à sa complexité : « L’immense majorité des tâches de compréhension et de décision réalisées par les humains reste hors de portée des systèmes actuels en intelligence artificielle. Aucun véhicule autonome n’est aujourd’hui capable d’anticiper une situation de conduite « non apprise », alors qu’il s’agit d’une tâche relativement banale pour un humain », soulignent les auteurs.

Il est en effet difficile d’appréhender les mécanismes d’acquisition de l’expérience humaine : « Actuellement, les performances de l’IA reposent sur la disponibilité d’un grand nombre d’évènements (souvent plusieurs milliers) et une puissance de calcul importante pour l’apprentissage avec un résultat peu généralisable à d’autres situations. De son côté, le cerveau humain apprend souvent une situation avec très peu d’exemples (moins d’une dizaine) et avec une excellente capacité de généralisation à d’autres situations. Cette capacité de généralisation à partir de peu d’évènements est au cœur de la recherche actuelle. Elle va de pair avec des recherches sur la « robustesse » d’un modèle apprenant, sa capacité à fournir des réponses stables malgré des évènements parasites. Cela correspond à la notion d’expérience chez les humains. »

(*) L’étude est consultable à cette adresse : https://www.entreprises.gouv.fr/etudes-etstatistiques/intelligence-artificielle-etat-de-art-et-perspectives-pour-la-france

230 biblio2
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
  • Gmail

Prospective Intelligence artificielle – État de l’art et perspectives pour la France, Commissariat général à l’égalité des territoires, Tech’In France, direction générale des entreprises, pôle interministériel de prospective et d’anticipation des mutations économiques, 333 pages.