CES 2020 : décryptage des tendances

Lors du CES 2020, deux sessions ont permis de partager une première synthèse des tendances les plus significatives : la toujours renommée « Living in Digital Times » et les « Tech Trends », la session animée par l’équipe technique de la Consumer Technology Association (CTA).

Du digital au connecté

Il est toujours intéressant d’écouter le discours d’ouverture du CES de Gary Shapiro, président de la Consumer Technology Association. Cette année, il a pointé le fait que les entreprises de la dernière décennie sont passées d’un monde digital à un monde connecté. Autrement dit, maintenant que nous avons les moyens de connexion, nous devons aller plus loin. Dans ce contexte, Gary Shapiro nous indique que « toute entreprise sera une entreprise technologique », à l’intersection des personnes et de la technologie.

Nous attendions, comme chaque année, le classement des nations les plus innovantes, espérant un bon classement de la France après l’émergence de plusieurs « licornes françaises » cette année. Ce ne fut pas le cas ! Ce sont les États-Unis et leurs innovations qui ont été distingués par Gary Shapiro. Selon ce dernier, au cours de la prochaine décennie, nous nous poserons des questions autour du travail du futur, notamment le besoin de former un nombre conséquent d’experts pour couvrir les besoins.

Le digital et l’éthique

Lors de la session « Living in Digital Times », l’importance donnée aux informations personnelles, à la sécurité et à l’éthique montre que ces points deviennent primordiaux dans notre monde digital. Il est intéressant de noter que se précise la perspective de la fin des écrans et des claviers, au profit du langage naturel. Et, dans le domaine de la santé, le « Next-Gen Doctor » émerge et positionne clairement le médecin au cœur de la santé de demain. Cela est illustré, par exemple, par MedWand, une solution qui permet un support très actif à la téléconsultation en réalisant dix diagnostics clés. Il ne s’agit pas de remplacer le médecin, mais d’être capable de lui exposer la donnée nécessaire pour réaliser ses diagnostics.

Le Retail et les nouvelles expériences client

Le Retail est également à l’honneur avec, notamment, le Frictionless Shopping et le rôle attendu de la 5G, alliée à l’IoT, pour créer une expérience Retail unique. De la cuisine à la salle de bains, en passant par les voyages, chaque instant ou chaque objet devient un canal d’achat. Chaque objet connecté va devenir un élément intelligent qui s’intègre dans un ensemble plus grand : c’est « l’Intelligence of Things », qui permet de garder le sigle « IoT », mais de lui donner un sens nouveau.

En attendant la 5G

La 5G est naturellement très attendue pour confirmer les innovations auxquelles elle est associée, mais, pour cela, elle doit être déployée. Un plan précis se met en place. Les retours sur investissement sont anticipés pour des usages en entreprise, notamment du fait de solutions critiques pour le métier dont l’entreprise a besoin pour garantir son activité ou sa valeur ajoutée.

IA : toujours plus

L’intelligence artificielle est attendue pour tous les services du quotidien et participe directement aux solutions et services utilisés par le grand public. Un des éléments d’innovation, cette année, a été autour de la VR/AR (réalité virtuelle et réalité augmentée) : atteindre le principe de « 6 degrés de liberté » (6 Degrees Of Freedom : haut, bas, gauche, droite, avance, recul), qui donne la capacité de se déplacer à 360° et d’intégrer l’accélération du mouvement au travers des lunettes. Les robots domestiques ne sont pas en reste et sont anticipés sur pratiquement l’ensemble des tâches automatisables : de la réalisation du pain jusqu’au repassage des vêtements.

Mais le robot se cherche encore avec les deux dynamiques qui se croisent : l’une, orientée sur des tâches à réaliser (répétitives ou adaptatives au contexte), et l’autre au niveau du robot social, apportant la partie émotionnelle (à visée médicale : de la surveillance à l’accompagnement en situation d’isolement). Ces deux axes donnent, à leur point de convergence, un robot complet dont on attend encore l’usage domestique et la reconnaissance du grand public.


Les quatre niveaux d’IA selon LG

  1. L’efficacité : l’IA est au service de l’optimisation et exécute des tâches.
  2. La personnalisation : l’IA reconnaît les environnements, les connecte, joue le rôle d’assistant et est orientée « objectif ».
  3. Le raisonnement : l’IA comprend l’environnement, coordonne plusieurs éléments, joue le rôle de compagnon et s’acquitte d’une mission.
  4. L’exploration : l’IA explore tout ce qui est disponible, orchestre des ensembles d’éléments, joue le rôle du sage, donne des conseils et est orientée « enjeu ».

L’automobile connectée et autonome

Depuis plusieurs années, l’automobile connectée, électrique, autonome et partagée, embarque avec elle bien des innovations au-delà de son propre marché, comme dans la Smart City. Pour reprendre les mots de François Pistre et Philippe Chain, deux experts de l’automobile, « l’automobile autonome n’est plus à l’ordre du jour, mais le véhicule autonome oui, dans des environnements précis ». C’est pourquoi la notion de Shuttle intervient.

L’autonomie d’une voiture se mesure sur une échelle de 0 à 5. Allant de « aucune capacité autonome » pour le plus petit score, à « il n’y a plus de volant et de conducteur », pour le niveau 5. Ce dernier niveau nécessite de « réfléchir » autrement en matière de service à la demande, plutôt que de posséder par exemple. C’est là que le CES va continuer de nous alimenter sur ces nouveaux services innovants dans les années à venir.

Chez Faurecia, la position est claire : participer à la transformation de la mobilité. L’accessibilité du prix des véhicules sera un élément déterminant et guidera le choix des technologies à embarquer. Elle influencera aussi la vitesse à laquelle le marché se transformera. L’électrique détiendra une partie importante et grandissante du marché, mais ne représentera pas 100 % de celui-ci (50 % en 2030).

La neutralité carbone est un vrai sujet sur lequel Faurecia est engagé pour 2030 : utiliser moins de ressources, dessiner les modèles en tenant compte de la planète, garantir l’appui sur des fournisseurs et des achats « verts », et optimiser les transports. Le cockpit de demain sera connecté et aura pour but de proposer de nouvelles expériences utilisateurs.

Faurecia souligne, comme beaucoup d’autres acteurs du salon, l’importance de créer une proximité forte avec un écosystème de partenaires. Un partenariat avec Microsoft a permis de s’appuyer sur leur plateforme de véhicules connectés et Microsoft veut développer des solutions pour ce secteur.

Delta Airlines et la valorisation des données

Le DG de Delta Air Lines, Ed Bastian, était venu au CES, en 2019, pour expliquer qu’il s’appuierait sur les données pour créer les services d’accompagnement de ses clients, il y est revenu en 2020 pour approfondir cette problématique. Ed Bastian avait expliqué qu’il entendait utiliser toutes les données disponibles afin de créer une expérience client fluide et agréable. Il a présenté les avancées réalisées depuis. Tout d’abord pour gérer le temps perdu : l’utilisation des données biométrique va se généraliser.

Le voyage est un moment particulier, fort en émotion, et l’utilisation des données venant de partenaires, tels que FitBit, permet de détecter ces émotions, grâce à l’analyse du rythme cardiaque, afin d’identifier tous les points de difficulté. Cela a permis à Delta Air Lines de vérifier que le voyage en avion crée une tension, qui s’intensifie lors du passage en zone d’embarquement ou lors de turbulences… mais qui s’apaise lorsque le personnel de bord s’occupe des passagers.

À partir de là, l’objectif est de créer une assistance et des solutions tout au long du voyage (depuis chez soi jusqu’à l’hôtel de destination) : anticiper les problèmes météo à l’avance, collecter les bagages à domicile et les déposer à l’hôtel, les suivre en permanence, tout comme l’animal de compagnie ou les enfants qui voyagent seuls, ou encore payer des services avec des miles.

Mais le plus étonnant a été la présentation d’une solution de technologie de réalité parallèle, réalisée grâce à un partenariat entre le « Hangar » de Delta Air Lines, lieu d’accélération des innovations, et la start-up Misapplied Sciences. Une technologie en rupture qui permet à plusieurs personnes, devant le même écran, de ne voir que ce qui le concerne ; cela veut dire seulement son vol, et dans sa langue ! Une technologie qui sera prototypée à Détroit dès le milieu de l’année 2020. Pour limiter la queue lors de l’embarquement, Delta Air Lines souhaite travailler sur la « file d’attente virtuelle » : le système vous appelle juste au bon moment pour embarquer.

L’application Delta Air Lines devient un assistant tout au long du trajet et joue le rôle de concierge. L’intelligence artificielle est utilisée pour réaliser des opérations comme, par exemple, prévenir et s’adapter aux turbulences. L’écran personnel devient un « Onboard Hub » à partir duquel on accède à tous les services. Pour les employés qui ont à porter de lourdes charges, Delta Air Lines opte pour la cobotique et notamment l’exosquelette. En conclusion, Ed Bastian a expliqué avoir lancé un plan de réduction de 50 % des émissions de CO2.

Cet article a été rédigé par François Koehl, senior Partner du cabinet de conseil Tasmane.