Comment mesurer l’immatériel dans l’économie ?

Les statistiques sur la croissance économique, mesurée par l’évolution du PIB, ont toujours mal pris en compte les investissements immatériels, souvent considérés comme des dépenses et non des investissements.

En juillet dernier, le BEA (Bureau of Economic Analysis (1)) américain a modifié la méthode de calcul de l’évolution du PIB des États-Unis en considérant que les dépenses de recherche et développement constituent des investissements et non des dépenses et en créant une catégorie « produits de propriété intellectuelle », eux aussi considérés comme des investissements. Un changement justifié par la nécessité de « prendre en compte les effets de l’innovation et des actifs immatériels dans l’économie ».

Les économistes ont depuis longtemps supposé une relation positive entre les investissements en technologies de l’information et l’élévation de la productivité, même si les technologies peuvent avoir quelques effets contraires… Un article publié en 2010 dans l’American Economic Review (2) explique : « L’innovation n’est pas un phénomène exogène qui tombe du ciel, de même qu’elle ne résulte pas des seuls investissements en technologies de l’information. C’est la conjonction d’idées, de processus, de design, de marketing et de capacités organisationnelles. » Les ressources immatérielles compteraient pour un tiers dans l’augmentation de la productivité du travail aux États-Unis entre 1995 et 2007.

Une analyse de McKinsey (3), publiée en juillet 2013, confirme cette proportion d’un tiers, applicable également à la croissance du PIB. Pour les consultants, le « capital innovation » est formé de trois éléments : le capital physique (équipements et télécoms) et le capital humain en représentent 24 % chacun, tandis que quasiment la moitié en est constituée par le capital de connaissances (marques, propriété intellectuelle). Au total, ce capital d’innovation représenterait, selon McKinsey, 40 % du PIB des seize plus grands pays. Dont la France, qui se situe dans cette moyenne, derrière les États-Unis, plus proches de 50 % …

(1) www.bea.gov
(2) Measuring intangible asset : How do you measure a technological revolution ?, par C. Corrado et C. Hulten, American Economic Review, mai 2010.
(3) Measuring the full impact of digital capital, par Jacques Bughin et James Manyika, McKinsey&Company, juillet 2013.