Dématérialisation des factures : radiographie des entreprises françaises

Best Practices a réalisé une enquête, auprès de 158 entreprises privées et organisations publiques, afin de comprendre les caractéristiques des projets et des usages des solutions de dématérialisation, en particulier les caractéristiques des solutions, les motivations, le pilotage et la gestion, les bénéfices, les gains financiers et les difficultés auxquelles les entreprises font face.

Des usages croissants

Par rapport à l’édition précédente du Baromètre Best Practices, réalisé en 2017, la proportion des entreprises qui disposent d’au moins une solution de dématérialisation est passée des deux-tiers aux trois-quarts. Cette nette progression est en phase avec le marché, qui croît d’environ 5 % par an, selon les analystes du cabinet Xerfi-Precepta. Plusieurs raisons expliquent ce mouvement vers la dématérialisation : le cloud suscite de moins en moins de craintes, les inconvénients à ne pas dématérialiser sont de plus en plus visibles, les métiers recherchent toujours plus de gisements de productivité, la législation pousse à l’adoption de solutions de dématérialisation et le contexte de transformation digitale constitue un facilitateur de la dématérialisation et des traitements numériques de l’information.

Les entreprises qui ne sont pas encore équipées avancent trois motivations principales :

  • l’absence d’effet de seuil : les volumes de factures trop faibles qui ne justifient pas la mise en place d’une solution avec un retour sur investissement rapide.
  • l’arbitrage défavorable à la dématérialisation : d’autres projets sont plus prioritaires dans l’entreprise, dans un contexte de ressources budgétaires et techniques contraint.
  • le manque d’expertise interne, lié également à la difficulté de recruter des profils adaptés, phénomène commun à la plupart des métiers du domaine de la Data.

On trouve également une entreprise sur quatre qui estime que ses utilisateurs souhaitent continuer à travailler « à l’ancienne », que le ROI est incertain ou qu’il n’y a pas d’obligations réglementaires. Si, en 2019, une organisation sur quatre ne dispose pas de solution de dématérialisation, le potentiel d’équipement est significatif à court terme : quatre entreprises sur dix qui ne sont pas encore équipées envisagent de le faire au cours de l’année 2020.

Une extension vers la sphère publique

Sans surprise, le périmètre de la dématérialisation couvre les domaines dans lesquels les volumes sont les plus significatifs : les factures fournisseurs et les factures clients. On notera l’importance des factures avec la sphère publique, tirée par l’évolution des obligations réglementaires, qui s’étendent progressivement pour les émetteurs de factures à destination de l’Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics : depuis le premier janvier 2019, les PME de plus de dix salariés sont concernées et toutes les entreprises à l’échéance depuis le janvier 2020. Par rapport à la précédente édition du Baromètre, la prise en compte des factures avec la sphère publique est deux fois plus importante, alors que les périmètres factures clients et fournisseurs sont stables.

Au-delà du périmètre théorique de la dématérialisation, tous les volumes ne sont pas couverts. Ainsi, le traitement dématérialisé de plus de 75 % des volumes de factures ne concerne qu’une entreprise sur quatre. Il reste encore une proportion significative d’entreprises (35 %) qui dématérialisent moins d’un quart de leurs volumes de factures. Cela peut s’expliquer d’abord par un effet de taille des organisations (toutes les entités ne sont pas équipées d’une solution de dématérialisation de factures), ensuite par le fait que des solutions en cours d’implémentation ne couvrent pas tous les périmètres et, enfin, par le fait que les répondants n’ont peut-être pas la vision complète de la réalité de la dématérialisation des factures, domaine dont les volumes sont fluctuants.

On retrouve cette évolutivité dans les périmètres des solutions implémentées. Les entreprises évoquent ainsi le besoin d’intégrer de nouveaux partenaires, de nouveaux domaines de dématérialisation (factures entrantes, sortantes ou intégration à Chorus…) ou de nouvelles fonctionnalités. Très peu d’entreprises envisagent de remplacer leurs solutions actuelles, elles privilégient l’évolution de l’existant.

Les solutions en mode SaaS plébiscitées

L’utilisation de solutions en mode SaaS est plébiscitée par les entreprises, du fait de leurs atouts : facilité de mise en œuvre, évolutivité fonctionnelle, facturation à l’usage, scalabilité en fonction des volumes… Tous les éditeurs proposent ce mode de commercialisation. Cela correspond à une tendance de fond, tous secteurs confondus : selon Syntec numérique, en 2018, 63 % des éditeurs de logiciels français disposaient d’une offre SaaS, contre 60 % en 2017. De même, le chiffre d’affaires SaaS des éditeurs de logiciels français représente aujourd’hui 37 % de leur activité, contre 32 % en 2017 et 27 % en 2016. Le parc installé, tel qu’il est mentionné par les répondants au Baromètre, est relativement jeune, avec un quart des solutions implémentées depuis moins d’un an, les solutions beaucoup plus anciennes (en production depuis plus de huit ans) représentent moins de deux entreprises sur dix.

Plusieurs formes de dématérialisation sont possibles, par exemple la création d’originaux à partir de factures numérisées, la dématérialisation de factures structurées ou EDI, les factures signées PDF ou la piste d’audit. Rappelons que la piste d’audit est une démarche consistant en la mise en place d’un processus continu et intégré, avec la description, d’une façon claire et exhaustive, du cheminement des opérations (flux d’informations, flux financiers), de leur documentation (documents comptables et pièces justificatives) et de leur contrôle. Les répondants au Baromètre utilisent toutes ces voies de dématérialisation, avec une dominante pour les factures structurées qui représentent l’essentiel des flux dans les entreprises. Pour celles qui recourent à la piste d’audit, les dispositifs sont majoritairement développés en interne, sur la base de processus documentés.

Les solutions de dématérialisation sont généralement associées à des outils complémentaires. Les plus couramment utilisées sont les workflows d’approbation, en amont ou en aval du traitement dématérialisé des factures, ainsi que l’OCR (reconnaissance optique de caractères). En revanche, des dispositifs tels que les plateformes collaboratives avec les fournisseurs sont beaucoup plus rares.

Les obligations réglementaires prennent le pas sur les exigences des clients et la recherche de productivité

Lors de la précédente édition du Baromètre, trois motivations avaient été plus spécifiquement mises en exergue par les répondants pour implémenter une solution de dématérialisation de factures : les exigences des clients, la recherche de gains de productivité et la volonté de réduire les coûts de traitement des factures. Cette année, les obligations réglementaires ont été citées en premier, devant les exigences des clients, toujours présentes, et la recherche de gains de productivité. La volonté de réduire les coûts, si elle est toujours très affirmée, n’apparaît qu’en quatrième position.

Les DAF et les DSI toujours en première ligne

Les directions financières et les DSI sont le plus souvent à l’initiative de l’implémentation des solutions de dématérialisation, ce qui était déjà le cas lors de la précédente édition du Baromètre. L’une ou l’autre sont citées par six entreprises sur dix comme étant les moteurs de la dématérialisation, devant les directions générales (citées par moins d’une entreprise sur cinq). Les directions des achats et juridiques interviennent très peu, du moins pour la mise en œuvre des projets de dématérialisation, même si elles sont parties prenantes pour leur utilisation au quotidien.

Les bénéfices de la dématérialisation : traçabilité, sécurité et conformité

La dématérialisation entraîne de nombreux bénéfices dans les entreprises et les organisations qui les mettent en place. Les répondants mentionnent des impacts élevés et très élevés tout particulièrement dans cinq domaines (par ordre d’importance) :

  • La traçabilité des processus.
  • La fiabilité/sécurité des traitements.
  • Une meilleure conformité règlementaire.
  • Une réduction du temps de mise en paiement.
  • L’accès en temps réel aux informations.

Dans l’édition précédente, on retrouvait déjà les bénéfices de traçabilité, de sécurité et d’accès en temps réel à l’information, mais, cette année, on voit monter, dans le Top 5 des bénéfices, les aspects de conformité (un besoin déjà présent pour justifier les implémentations de solutions de dématérialisation) et de réduction des délais de paiement. Les conséquences positives sur les coûts et la productivité sont moins mises en exergue.

A l’inverse, les domaines dans lesquels les solutions de dématérialisation apportent le moins de gains, toutes choses égales par ailleurs, concernent la simplification des tableaux de bord et la gestion de la trésorerie.

Les gains financiers de la dématérialisation : toujours l’inconnu

Si les bénéfices qualitatifs des solutions de dématérialisation sont relativement bien identifiés, il n’en est pas de même pour les estimations des gains financiers. Ainsi, près de huit entreprises sur dix ne savent pas calculer les économies réalisées sur le traitement des factures entrantes. Pour celles qui y parviennent, les estimations sont très variables, mais elles se situent principalement en dessous de deux euros par facture entrante. Pour les factures sortantes, les évaluations s’avèrent plus précises, même si 60 % des organisations ne savent pas quantifier les bénéfices financiers. Là encore, ils sont très divers, mais essentiellement en dessous de trois euros par facture.

Les difficultés de la dématérialisation : le ROI, l’intégration et la résistance au changement

Comme pour tout projet d’implémentation de solutions logicielles, les entreprises se heurtent à quelques contraintes. Trois ont été mises en exergue par les répondants : la difficulté de mesurer le retour sur investissement, lié à la difficulté d’estimer les gains financiers directs ou indirects, la difficulté d’intégration dans le système d’information existant et la résistance au changement, ce dernier facteur est devenu plus important entre les deux éditions du Baromètre. Il figurait à la huitième place et est passé à la troisième place du Top 10 des difficultés liées à la dématérialisation.

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Les motivations pour s’équiper d’une solution de dématérialisation de factures
Motivations % d’entreprises
Les obligations réglementaires 53,1 %
Les exigences des clients 48,4 %
La recherche de gains de productivité 48,4 %
La volonté de réduire les coûts de production des factures 46,9 %
La recherche de bénéfices métiers (facilité de rapprochement, gestion de trésorerie, réduction des litiges…) 28,1 %
Une initiative de la direction générale de l’entreprise 15,6 %
Les exigences de vos fournisseurs 9,4 %
Les retours d’expériences de vos concurrents/partenaires 1,6 %
Les recommandations d’un prestataire 1,6 %

 

Les principaux bénéfices perçus de la dématérialisation
Impact très faible
ou faible
Impact moyen Impact fort ou très fort
Une meilleure traçabilité du processus 9,4 % 26,4 % 64,1 %
Une meilleure fiabilité/sécurité des traitements des factures 14,8 % 21,8 % 63,6 %
Une meilleure conformité règlementaire 18,5 % 24,1 % 57,4 %
Une réduction du temps de mise en paiement 18,5 % 31,5 % 50,0 %
L’accès en temps réel aux informations 29,1 % 21,8 % 49,1 %
Des gains de productivité 20,0 % 30,9 % 49,1 %
Un meilleur respect des dates d’échéances de paiement 22,6 % 35,8 % 41,5 %
Une meilleure transparence des processus 29,6 % 31,5 % 39,9 %
Une réduction significative des coûts 22,2 % 42,6 % 14,8 %
Une simplification des workflows de validation 39,6 % 26,4 % 34,0 %
Une autonomie accrue des utilisateurs 41,5 % 32,1 % 26,4 %
Une meilleure gestion de la trésorerie 49,1 % 32,1 % 18,9 %
Un pilotage plus fin de la fonction financière 50,0 % 33,3 % 16,7 %
Une baisse des litiges 36,5 % 50,0 % 13,5 %
Une simplification de l’élaboration des tableaux de bord 53,9 % 32,7 % 13,5 %