Elaborer son budget en six étapes

L’importance donnée au budget positionne la DSI au sein de l’organisation. Sa structure et son montant per­met­tent d’exprimer les réalités du système d’information et la vision de l’entreprise pour cette fonction et les services rendus. Outil naturellement important pour la maîtrise des comptes d’une entreprise, le budget cache aussi, souvent, une vocation implicite de communiquer à l’extérieur les réalisations de la DSI.

1. Établir un bilan

Il est fondamental de mener un bilan du précédent exercice budgétaire. C’est une base de travail et une référence-clé pour concevoir les budgets de l’année. L’exercice n’est pas simple, car une erreur de répartition d’une année peut se traduire par des dépassements de budgets l’année suivante, simplement par report d’une ligne d’un compte à un autre.

Le piège provient souvent de la comparaison d’éléments mal dimensionnés ou dont le périmètre n’aurait pas été clair au départ. Une comparaison erronée conduit souvent à une perte de confiance sur les autres messages.

2. Construire le budget

  • Écouter les orientations business : Il est loin le temps de la DSI qui envoyait ses experts « évangéliser » les équipes métiers. Aujourd’hui, la DSI doit « anticiper, mais pas trop » et, en même temps, optimiser. Deux logiques qui se contredisent sur le terrain où une équipe doit participer à la fois au développement et à la qualité de l’opérationnel.
  • Traduire ces orientations en « solutions faisables et esti­mées » : Un élément apparaît très clairement à toutes les équipes utilisatrices : la DSI connaît la technique et se doit de la porter dans les projets. Tout ce qui sera expliqué par la DSI sera, par nature, incompréhensible et trop cher, mais devra dans tous les cas avoir un prix fixe et être faisable dans un délai prédéfini. Le temps du budget peut être le temps d’une annonce nouvelle si l’on connaît bien le domaine, ou le temps des précautions pour éviter de trop prétendre. Même si l’intérêt d’un « prototype » est souvent incompréhensible pour une MOA, un avant-projet aura comme avantage de bien expliquer l’état d’avancement exact d’un projet.
  • Différencier structure et projet : le point classique d’un budget sera de différencier les coûts structurels et les projets répondant ainsi aux deux missions phares de la DSI qui doit assurer le fonctionnement au quotidien et accompagner le développement de l’entreprise. Le budget de la DSI gagne à bien séparer les éléments suivants :
    ➙ l’administration, car une DSI est de plus en plus gestionnaire d’achats, de contrats, d’équipes hétérogènes ;
    ➙ les nouvelles fonctionnalités qui sont de réelles nouvelles avancées pour l’entreprise ;
    ➙ la maintenance de l’existant qui représente un lot d’opérations (évolutions mineures, corrections des bogues, support…) dont la vocation est de garantir l’utilisation des outils existants ;
    ➙ l’infrastructure qui représente les éléments très techniques servant directement le système d’information ;
    ➙ les coûts financiers d’amortissement des investissements précédents.

Une démarche projet correctement mise en place tout au long de l’année donne aux budgets leur légitimité car elle permet d’inscrire un projet dans une logique de business model incluant des retours sur investissements mesurables.

3. Bâtir l’argumentaire

  • Argumenter les choix et les propositions : l’argument même très technique doit être sensé, compréhensible et « fort ». Surtout lorsque la pression est budgétaire. Pour exprimer un argument, n’hésitez pas à répondre aux questions « pourquoi faut-il faire ce projet ? » et « ne peut-on vraiment pas s’en passer ? ». Vous pourrez préparer un « plan B » (plan de contournement de la solution idéale) qui, même s’il n’a pas vocation à être mis en avant, vous permettra d’être sûr de vos propositions.
  • Différencier l’argumentaire « projet d’évolution » et « maintien de la continuité de service » (maintenance, support, production) : Cet argumentaire fait apparaître des éléments business (par ex. : nouvelles fonctionnalités) et des éléments techniques (par ex. : changement d’infrastructure). Le DSI doit pouvoir argumenter en démontrant un apport de valeur pour les projets business et une couverture de risques pour les projets techniques. Il y a une différence importante entre ces deux budgets, car le budget business est assez naturel mais le budget technique est plus difficile à argumenter et à rendre transparent. Pour une direction générale, une évolution technique n’est pas compréhensible et les seuls critères de jugement sont les services rendus et les coûts associés. Le budget technique sans un argumentaire fort est, par nature, revu à la baisse. Le plus important est alors de faire comprendre à la direction générale que si baisse les coûts techniques en comprenant , elle baisse la couverture de risque, comme elle le ferait pour une assurance. Il faudra alors s’assurer, au cours de l’année, que cela ne constitue par un boomerang, car passer de 99,8 % à 99,5 % de disponibilité pour baisser de x % les coûts est une décision simple à prendre. Mais personne ne comprend alors que tout le système peut dès lors s’arrêter plusieurs heures par mois et, potentiellement, le vendredi de l’arrêté des comptes commerciaux à la veille du séminaire corporate…
  • Quantifier l’effort, tant qualitatif que quantitatif, à fournir pour mener ces opérations : selon l’adage qui exprime que ce qui est gratuit n’a pas beaucoup de valeur, il importe de ne pas « sous-vendre » les projets et de faire une réelle estimation. Un projet tendu dès le départ aura souvent comme conséquence d’être tendu durant son déroulement et, finalement, de ne pas aboutir tout en mécontentant tous les acteurs. En période de restrictions budgétaires, il faut choisir entre « faire autant de projets mais avec moins de moyens » ou bien « faire moins de projets avec autant de qualité ».

4. Défendre son budget

Ce n’est pas un combat, mais il faut se préparer à défendre son budget sur son propre terrain. Les DSI sont souvent tentés de le défendre sous l’angle du projet, car ils trouvent peu de répondant du côté maîtrise d’ouvrage. Il est important d’équilibrer : la maîtrise d’ouvrage défend les valeurs pour le business et la maîtrise d’œuvre défend les valeurs techniques. Chacun, dans son domaine, doit être un professionnel responsable et porter clairement son champ de responsabilité.

Pour cela, le DSI peut agir dans trois directions : d’abord, se préparer à défendre durement les priorités techniques (non-obsolescence, consolidation…) dont le côté naturel pour un professionnel ne sera pas partagé par sa hiérarchie : « C’est le problème de l’éditeur de sortir une nouvelle version ! » Ensuite, le DSI doit résister aux pressions du business (baisse de coûts, réactivité…) et s’inscrire dans la logique d’entreprise. Enfin, il doit obtenir un planning opérationnel pour améliorer sa visibilité sur les projets à démarrer.

5. Contractualiser

Il importe de créer une fin à une action. Le budget doit avoir une fin claire et précise pour servir par la suite de référence. Plusieurs choix sont possibles, depuis le partage de la dernière version sur l’intranet, la signature d’un document finalisé ou l’avenant au contrat de service de la DSI… Reste qu’un écrit validé sera garant de l’engagement de la DSI et de la capacité de mesure ultérieure.

6. établir un processus de suivi

Suivre les actions, étapes, processus qui permettent le suivi du budget tout au long de l’année revient à définir la période de suivi, les actions nécessaires (réactualisation, diffusion, présentation, arbitrage…) et le moyen de partager avec les acteurs concernés.

Cet article a été écrit par François Koehl, directeur associé, Advese.


Les situations « client – fournisseur » et les types de relations induites

Face aux multiples demandes faites à la DSI, les situations dans lesquelles la relation « client – fournisseur » s’exprime caractérise les différents rôles qu’elle peut être amenée à jouer.

  • Pour les grands projets d’entreprise – la DSI est un pôle de consultants internes.
    Ces projets développent l’entreprise et lui permettent de concrétiser sa stratégie. Le rôle du DSI est d’apporter une veille technologique ainsi qu’un regard pragmatique sur les possibilités de réaliser telle ou telle évolution passant par le système d’information pour l’entreprise. D’un point de vue budgétaire, le DSI participe au business model du projet et remplit la ligne de coût, tout en mettant en avant les apports de valeur de la technologie.
  • Pour les grands projets techniques – la DSI est un pôle d’architectes d’entreprise et d’experts.
    Ces projets sont issus des besoins techniques (nouvelle version, changement technologique, modification des coûts unitaires…) ou de la mutualisation de besoins fonctionnels. La DSI est porteuse de ces projets et se doit de faire la preuve de « l’intelligence » pour l’entreprise de ce saut technique.
  • Pour la mise en œuvre des projets de système d’information – la DSI est une entité de services d’intégration de d’accompagnement.
    Selon le projet, l’implication du DSI va de la maîtrise d’œuvre, naturelle pour les projets impliquant la technique informatique, jusqu’à l’assistance à la maîtrise d’ouvrage. Dans ce dernier cas, la DSI apporte aux équipes métiers, par son expérience des projets, les compléments qui permettent aux projets d’aboutir avec succès. L’impact budgétaire dépend du rôle qu’elle joue au service de chaque projet. Le budget doit distinguer les rôles de la DSI en tant qu’intégrateur ou en tant qu’accompagnateur.
  • Pour le fonctionnement au quotidien – la DSI est une entité de services d’hébergement et d’exploitation.
    Le DSI est bien souvent le responsable des moyens informatiques et techniques mis à la disposition de l’entreprise. La DSI assure, de ce fait, un niveau de fonctionnement en rapport direct avec les besoins de l’entreprise. Le budget de ce fonctionnement est un coût récurrent et structurel fonction de la dimension de l’entreprise (nombre d’utilisateurs, nombre de traitements…).