La DSI va-t-elle rester une fonction support ?

Selon une étude menée par Eurogroup Consulting entre décembre 2011 et février 2012 auprès d’une vingtaine de professionnels issus de DSI ou de Directions Générales, trois enjeux majeurs se dessinent : la légitimité de la fonction DSI au sein de l’entreprise, l’affirmation de son positionnement en relation avec les métiers et la DG, et la transition vers un rôle de partenaire-réflexe des acteurs de l’innovation.

Plusieurs constats se dégagent de cette étude. La majorité des DSI n’a pas de mandat clair sur la modélisation et l’optimisation des processus métiers (ou Business Process Management, BPM), et de ce fait, peu de DSI en font aujourd’hui une priorité. Elles font pourtant figure de partenaires idéalement positionnées du fait de leur statut d’acteur transverse. Le silotage SI de l’entreprise, fruit des récentes vagues technologiques, rend difficile l’identification du moteur de l’urbanisation – et a fortiori impossible celle d’un responsable unique.

L’urbanisation reste cependant une fonction régalienne clé sur laquelle la DSI doit garder la main, car elle est la seule à pouvoir garantir sa cohérence dans la globalité et dans le temps. Malgré une crédibilité technique naturelle, les DSI ne sont pas systématiquement moteurs de l’innovation auprès des métiers, suivant plutôt le mouvement induit par l’évolution du marché en termes de technologies et d’usages.

Les DSI ont néanmoins réalisé l’opportunité de participer à l’émergence de nouveaux axes de développement de l’entreprise. Les attentes de la Direction Générale sont généralement focalisées sur la maîtrise et la diminution des coûts, dont la trajectoire est complexe à objectiver pour les DSI. En effet, la structure des coûts Build/Run est souvent mal maîtrisée, réduisant parfois l’image des DSI à un centre de coût.

Casser cette image réductrice nécessite un travail de fond sur la transparence et la lisibilité du modèle économique, en développant un contrôle de gestion associant davantage les coûts SI aux usages métiers. Les attentes des métiers sont orientées sur les fondamentaux historiques: qualité de service, coûts compétitifs et réactivité.

La « valeur ajoutée pour le métier » n’est étonnamment pas perçue comme une priorité opérationnelle des DSI, mais plutôt comme un concept à clarifier. La DSI qui se rapproprie le SI dans sa globalité devient de plus en plus légitime pour apporter sa vue d’ensemble dans le dialogue stratégique de l’entreprise, mais cette posture reste encore limitée à certains secteurs. La démarche reste souvent bottom-up, avec une présence indirecte ou peu percutante de la DSI au comité de direction.

Selon Eurogroup Consulting, il s’agit désormais pour la DSI de se positionner comme un acteur stratégique légitime, en assurant la solidité des fondamentaux afin de pouvoir s’affirmer dans le processus d’innovation. Sécuriser les fondamentaux, cela signifie affiner les modèles opérationnels et économiques afin d’allier la qualité du service et l’optimisation des coûts.

Sur le Business Process Management, les DSI doivent adopter une posture claire: celle du « process enabler », celle du modèle adapté à la maturité de l’entreprise et non de la standardisation stricte, celle de la performance et de l’amélioration continue plutôt que celle de la cartographie à tout prix. Dans beaucoup d’entreprises, les DSI absorbent les maîtrises d’ouvrage fonctionnelles.

Par conséquent, les DSI proposent désormais de véritables « business partners » au sein de l’organisation, à la fois experts des enjeux métiers et du paysage global SI. Les DSI contribuent ainsi à l’élaboration de la vision prospective et à la gestion de la demande.

L’émergence de ce positionnement nouveau, ajoutée à leur expérience des projets transversaux (cession/acquisition par exemple), confère aux DSI visibilité et légitimité. De plus, les DSI ont l’opportunité de saisir le rôle d’interlocuteur de référence dans le processus d’innovation. L’arrivée incontournable des nouveaux devices, et l’attente très forte en termes d’usages, constituent des enjeux complexes, certes techniques, mais aussi financiers, RH, métiers et même sécuritaires. L’approche classique « processée », déductive, répond à un besoin.

Aujourd’hui, les DSI doivent privilégier l’approche inductive, centrée sur les usages. Sur ces nouveaux sujets, il est vital pour les DSI d’accompagner le métier très en amont dans l’approche innovante. L’enjeu majeur devient alors l’expérience utilisateur : ergonomie, simplicité, connectabilité. Les DSI sont donc amenées à être bien plus que de simples fonctions support ; elles ont leur rôle à jouer pour s’imposer dans la posture de partenaires stratégiques crédibles, et porter l’évolution radicale et rapide des systèmes d’informations professionnels.