La grande distribution sous pression

Le secteur de la grande distribution est largement perturbé, à la fois par une recomposition des forces concurrentielles, une évolution des usages et la nécessité de reconfigurer les systèmes d’information. Dans un tel contexte, huit stratégies SI sont indispensables.

Lors du Hubday Retail 2019, Vincent Ducrey, co-fondateur du Hub Institute, a résumé les huit tendances qui, selon lui, vont transformer le monde de la distribution et du e-commerce : la recherche visuelle, le Voice Ready commerce, la personnalisation (par exemple avec l’intelligence artificielle, le temps réel et la reconnaissance faciale), l’expérientiel (au-delà de l’acte d’achat), le sans-couture (expérience d’achat fluide et en mobilité), le shopping “for good” (responsable, transparent), l’exigence autour de la livraison et l’excellence du Back Office.

Eric Dadian, président de l’AFRC (Association française de la relation client), confirme que trois éléments structurent de plus en plus la distribution et le e-commerce : « L’émotion (avec la réalité virtuelle et augmentée, la personnalisation, l’authenticité), la confiance (avec la transparence et la traçabilité) et la simplicité (avec la fluidité ou les magasins mobiles…). »

Selon Gartner, en 2020, cent millions de consommateurs à travers le monde feront leurs achats via la réalité augmentée, que ce soit en ligne ou en magasin. De même, 46 % des commerçants prévoient de déployer des solutions de réalité augmentée ou virtuelle pour répondre aux besoins de leur clientèle, en s’appuyant notamment sur la 5G pour faire évoluer l’expérience client.

Historiquement, le secteur de la distribution est probablement l’un de ceux qui a été le plus bousculé : il l’a déjà été, dans un premier temps, avec l’apparition des surfaces libre-service, essentiellement alimentaires, puis du discount et de l’intégration de multiples enseignes, au sein de centre commerciaux. Ce mouvement s’est traduit par une concentration du secteur, avec la disparition de marques, souvent puissantes (Mammouth, Rallye, Euromarché, Continent…).

Plus récemment, l’émergence d’Internet, des réseaux sociaux et de la transformation digitale a, une fois de plus, rebattu les cartes et introduit une rupture profonde. On est ainsi passé, historiquement, du cabas au chariot, puis du chariot au clavier. « Auparavant, il fallait aller dans un magasin, attendre à la caisse et bénéficier des mêmes promotions que tous les autres consommateurs et les prix des produits étaient impossibles à comparer », rappelle Cyril Bourgeois, directeur de la transformation du groupe Casino, qui estime que « nous sommes passés de la consommation de masse à l’ère de l’expérience, dont le smartphone est devenu le couteau suisse. » Aujourd’hui les acteurs du secteur doivent faire face à sept principales tendances qui ont autant d’impact sur les systèmes d’information.

Tendance #1 : des points de ventes en recomposition permanente

La physionomie des super et hypermarchés se transforme principalement selon trois principes : d’abord, un principe d’organisation, par exemple avec la multiplication des espaces Drive, de l’auto-scan par le consommateur ou des caisses automatiques.

Ensuite, un principe d’intégration, avec des services complémentaires, par exemple des espaces de bricolage, de voyage ou de prestations diverses (lavage de véhicules, énergie…). Enfin, un principe géographique : du fait de la préférence des consommateurs à opter pour des circuits courts et la livraison à domicile, les distributeurs, y compris les GSS (grandes surfaces spécialisées), ont développé les magasins de proximité dans les centres-villes.

« Dans le domaine alimentaire, les magasins physiques dominent, mais les clients veulent aller plus loin, au-delà du Drive, il faut choisir le mode de livraison à la fin du processus de commande », rappelle Maud Funaro, directrice de la stratégie digitale et innovation chez Leclerc, qui développe la livraison à domicile dans Paris, ainsi que via des points relais. « Nous devons amener l’hypermarché en centre-ville », ajoute-t-elle.

Tendance #2 : le hard discount continue son offensive

Les statistiques, publiées régulièrement par Kantar Worldpanel, montrent un repli des parts de marché des hypermarchés au profit des circuits On Line et EDMP (enseignes de distribution en marque propre, autre nom du discount), en particulier Aldi et Lidl. Ce dernier, qui a investi dans ses magasins et développé son offre de produits frais a, en 2018, pesé 5,5 % des ventes des produits de grande consommation, soit un gain de 300 000 ménages.

D’après une étude de Xerfi, publiée en décembre 2018, les enseignes à petits prix ont vu leurs chiffres d’affaires bondir de 20 % entre 2013 et 2018. Dans ces conditions, le chiffre d’affaires des enseignes de bazar (GiFi, La Foir’Fouille, Centrakor…) et celles de déstockage (Stokomani, Noz, Au Fil des Marques…) vont respectivement s’envoler de 15 % et 8 % par an à l’horizon 2021.

Tendance #3 : le e-commerce de plus en plus puissant

Si l’on en croit les statistiques de la Fevad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance), le e-commerce a pesé, en France, 90 milliards d’euros en 2018, contre 81,7 milliards en 2017, soit une croissance de plus de 10 %, dix fois plus qu’en 2005. A comparer à une progression inférieure à 1,5 % pour le commerce de détail. « Aujourd’hui, la fréquentation des sites de e-commerce est aussi importante que les sites de médias », souligne Christophe Blot, directeur de 3W RelevanC, entité du groupe Casino spécialisée dans la collecte, la mesure, le ciblage et la monétisation d’audiences et de données transactionnelles.

Entre l’hypermarché et un site de e-commerce, on change de dimension : « On passe de 100 000 références à plusieurs millions », précise Cyril Bourgeois. Chez un industriel comme Seb, 20 % des ventes s’effectuent en ligne « et 95 % des acheteurs se sont auparavant informés sur le Web », assure François Mayor, responsable digital chez Seb. En 2018, les dépenses On Line ont augmenté de 11% pour atteindre 38 milliards d’euros selon le dernier rapport de Kantar Worldpanel. De même, les consommateurs naviguent en moyenne sur 5,5 sites pour effectuer leurs achats et réalisent environ 20 commandes par an.

Tendance #4 : de nouveaux usages, de nouveaux modes de consommation

La transformation des modes de consommation se traduit principalement par trois tendances majeures. D’abord, la volonté de consommer des produits plus bio. L’Agence Française pour le Développement et la Promotion de l’Agriculture Biologique observe, depuis 2015, une hausse régulière significative de la fréquence de consommation des produits biologiques.

En 2017, plus de neuf Français sur dix ont consommé des produits biologiques et près des trois-quarts en consomment régulièrement, au moins une fois par mois. Ensuite, les consommateurs revendiquent toujours plus de transparence et d’éthique sur l’origine des produits, leurs modes de fabrication et de distribution. Selon une analyse du cabinet BearingPoint, plus de la moitié des jeunes générations choisissent une marque en tenant compte de son engagement sociétal et de la transparence de ses pratiques commerciales ou de gestion des données.

Enfin, les réseaux sociaux, ainsi que la mobilité, ont introduit une volatilité dans le comportement des consommateurs et dans leurs pratiques d’achat. Les réseaux sociaux interviennent à un double niveau : d’une part, comme critère de choix des produits et des marques (80 % des consommateurs utilisent leur smartphone dans un magasin pour sélectionner les produits, selon Gartner).

Le Web est ainsi largement utilisé pour consulter des avis de consommateurs, comparer les prix ou dénicher les promotions. D’autre part, comme outil de fédération de communautés, autour d’une thématique, dont les recommandations modèlent le comportement d’achat.

Tendance #5 : l’expérience client et la personnalisation, un chantier permanent

Les entreprises, surtout celles de la distribution, ne vendent plus des produits, mais des expériences, ou, mieux, des expériences uniques… Face à l’abondance de l’offre, ce n’est plus uniquement sur le produit, le service ou la réputation réelle ou supposée que les enseignes et les marques peuvent se différencier, c’est sur l’expérience client pour attirer davantage l’intérêt d’une clientèle devenue disparate.

Il s’agit de créer de l’émotion au-delà de l’interaction, par exemple en transformant les points de vente en lieux de vie, avec un ensemble de services. « Nous devons construire une dynamique disruptive autour du client, sur la totalité de son parcours, en intégrant toute la chaîne », souligne Romain Roulleau, deputy CEO digital & client de Conforama.

Un avantage stratégique des retailers par rapport aux marques fournisseurs est la volumétrie importante de données dont ils disposent et qui, en mettant en œuvre les technologies adaptées, améliore cette expérience client, y compris en jouant la carte de l’hyper personnalisation. La qualité de la relation et de l’expérience proposée peut alors faire la différence et permettre aux retailers de conserver un lien fort avec les clients. Ils peuvent par exemple proposer des offres personnalisées de type « all inclusive » (Produits + Services) qui leur permettront de lutter efficacement contre les modes de distribution DTC (Direct to Consumer) des marques fournisseurs.

Tendance #6 : une incontournable omnicanalité

Une entreprise omnicanal doit être en capacité de proposer à ses clients une offre adaptée, personnalisée et évolutive, quel que soit le canal de vente ou de distribution. Le principe réside dans la continuité et la cohérence du parcours client d’un canal à l’autre. On parle alors de parcours seamless (sans couture). Le client peut ainsi initialiser un panier d’achat sur un média (smartphone) et le poursuivre sur un autre (ordinateur, par exemple), voire le transférer à un membre de sa famille, à un groupe ou à une communauté, tout en conservant son historique de recherche et son identifiant.

Le terme omnicanal est également utilisé pour décrire le phénomène d’utilisation simultanée de deux canaux de vente, par exemple un smartphone dans un magasin ou une tablette devant la télévision. Ces démarches impliquent une cohérence des offres et un suivi des parcours client. C’est en partie pour cette raison que se nouent des partenariats entre les grandes enseignes généralistes et d’autres plus spécialisées, par exemple entre Casino et Cdiscount ou entre Carrefour et Showroomprivé…

Tendance #7 : des marges sous tension

Les tendances multiples et les ruptures profondes auxquelles les acteurs de la distribution sont confrontés ont évidemment un impact financier majeur. Celui-ci se manifeste à trois niveaux. Le premier concerne le chiffre d’affaires et les parts de marché, qui se recomposent au profit d’acteurs plus agiles, plus digitalisés ou qui adoptent des business fondés sur le Low Cost et/ou la spécialisation.

Le second niveau concerne les marges : les consommateurs étant très sensibles aux niveaux des prix, toute initiative commerciale ou innovation impose de réagir, le plus souvent en adaptant les prix, dans un contexte où les acteurs du e-commerce, très présents sur le terrain de l’optimisation des prix, sont très réactifs.

Le troisième niveau de pression concerne la gestion de trésorerie. Le secteur du Retail se caractérise par des niveaux de marges nettes relativement plus faibles que dans d’autres secteurs, compte tenu des coûts logistiques, immobiliers et de personnel ; il est donc impératif d’optimiser la trésorerie pour garantir la performance financière.

Des systèmes d’information à reconfigurer

Pour le secteur du Retail, le cabinet Gartner a défini quatre scénarios qui, à l’horizon 2025, caractérisent l’usage des technologies de l’information et correspondent à quatre impératifs de modernisation des systèmes d’information :

  • La vitesse, avec des technologies qui supportent de nombreuses transactions avec des temps de réponse très courts.
  • L’invisibilité, avec des technologies qui favorisent la performance des Back Offices de manière transparente pour les consommateurs, les fournisseurs et les acteurs de la chaîne logistique.
  • L’élasticité, avec des technologies qui personnalisent l’expérience client et favorisent l’agilité/réactivité par rapport à l’évolution des usages et des comportements des consommateurs.
  • La robustesse, avec des technologies capables de gérer d’énormes volumes de données, en temps réel, tout en personnalisant l’expérience client.

En 2018, selon Gartner, les acteurs du Retail ont investi avant tout dans les solutions de CRM (77 %), le e-commerce (69 %), la personnalisation (50 %) et la modernisation des points de vente (40 %). Selon les analystes, la tarification en temps réel sera largement utilisée par le Top 10 des distributeurs mondiaux.
En termes stratégiques, la transformation des systèmes d’information repose sur huit principes.

#1 – Fluidifier la Supply Chain

Qu’il s’agisse de répondre aux exigences de performance opérationnelle, de personnalisation, de maintien des marges ou de e-commerce, l’agilité de la chaîne logistique est incontournable. Concilier performance, qualité et pilotage, tout en réduisant les coûts et en maîtrisant les risques : tel est, aujourd’hui, le paradoxe que tous les managers de chaîne logistique doivent résoudre.

La flexibilité correspond à la capacité de réagir rapidement en cas de besoin, qu’il s’agisse, par exemple, d’identifier un nouveau transporteur ou de faire appel à des fournisseurs supplémentaires, en cas d’incapacité du fournisseur habituel à satisfaire une demande.

L’agilité intègre une capacité d’anticipation dans la chaîne d’approvisionnement. Elle suppose une visibilité étendue de la chaîne et un partage d’informations entre tous les acteurs, par exemple pour anticiper une rupture d’approvisionnement ou une hausse de prix en augmentant les stocks de précaution ; ou, pour un fournisseur, afin de proposer une alternative plus intéressante à ses clients en fonction de leurs besoins. En cas de flexibilité insuffisante, le moindre aléa touchant les fournisseurs, directs ou indirects, ou les partenaires logistiques, est susceptible de perturber la production ou de mettre en péril la capacité à livrer ses propres clients.

La moindre défaillance d’une composante du système d’information peut être lourde de conséquences concrètes, en particulier dans le secteur du e-commerce : coûts directs, perte de clients, dégradation de l’image de l’entreprise.

Trois facteurs contribuent à rendre vulnérable la disponibilité d’une chaîne logistique : l’augmentation du nombre de parties prenantes (l’entreprise, ses fournisseurs, ses transitaires, ses transporteurs, ses clients, les clients de ses clients…), la sensibilité des consommateurs à la disponibilité d’une chaîne logistique et la complexité des processus.

De même, trois axes de performance d’une chaîne logistique sont à privilégier :

  • L’efficacité, qui traduit la capacité de la chaîne logistique à répondre aux objectifs d’approvisionnement de l’entreprise en termes de qualité, de coûts et de délais.
  • L’efficience du dispositif d’approvisionnement, qui permet d’obtenir les meilleurs résultats tout en optimisant les ressources utilisées pour atteindre les objectifs, avec une prise en compte de la non-conformité.
  • La résilience face aux risques opérationnels susceptibles d’entraîner des défaillances ou des ruptures d’approvisionnement.

Les entreprises investissent dans les chaînes logistiques principalement en vue de réaliser des économies, d’accroître leur chiffre d’affaires et d’adopter de nouveaux business models. Selon une étude CapGemini Research Institute, la digitalisation de la chaîne de logistique est l’une des priorités des organisations et l’engouement dans ce domaine s’explique par le potentiel en terme de retour sur investissement (ROI).

Selon l’étude, l’automatisation de la chaîne logistique et des achats offre un ROI de 18 % en moyenne, contre 15 % pour les ressources humaines, 14 % pour les technologies de l’information, 13 % pour le service client et 12 % pour la finance, la comptabilité et la R&D. En outre, les investissements dans l’automatisation de la chaîne logistique sont généralement amortis en seulement douze mois.

#2 – Optimiser la gestion des stocks

L’optimisation de la gestion des stocks passe par un équipement en solutions de WMS (Warehouse Management System), souvent couplé à des TMS (Transport Management System). L’enjeu est de développer des entrepôts intelligents, avec les technologies adaptées (objets connectés, réseaux, automatisation des flux, robots…). En matière de WMS, les tendances vont vers des tableaux de bord personnalisables, une vision à 360°, une visibilité et des capacités d’action en temps réel, et un pilotage en situation de mobilité…

#3 – Personnaliser et prévoir les comportements d’achat

C’est dans ce domaine que des technologies telles que le Big Data, l’intelligence artificielle ou l’analyse prédictive trouvent tout leur sens. Le Big Data permet, par exemple, de traiter l’intégralité de ses verbatims clients en temps réel. Il s’agit, ainsi, en particulier, de pouvoir répondre aux questions suivantes : quels sont les profils des clients ? Quelles sont leurs attentes ? Sont-ils satisfaits des produits et des services proposés ? Quels problèmes rencontrent-ils ? Que disent-ils de l’enseigne et de ses concurrents ? Il est ainsi possible d’anticiper, en amont, des problèmes de qualité sur la base de signaux faibles, d’identifier des problématiques sociétales, de détecter des différences de prix par rapport à la concurrence et de réagir, de mesurer plus finement qu’auparavant l’évolution de la satisfaction client.

Le Big Data peut être couplé à l’intelligence artificielle. Selon une étude du CapGemini Research Institute, plus d’un quart (28 %) des entreprises du secteur de la distribution déploient aujourd’hui l’intelligence artificielle. L’étude montre qu’elles n’étaient que 17 % en 2017 et 4 % en 2016. De même, les technologies d’analyse prédictive trouvent une application directe dans un domaine comme la prévision des ventes. L’analyse prédictive est une application concrète des sciences statistiques, consistant à chercher des relations entre différentes variables à travers la modélisation, ceci dans le but de prédire l’évolution de certaines de ces variables.

#4 – Piloter la gestion de trésorerie et des marges

Les solutions de gestion de trésorerie offrent des atouts majeurs pour répondre à l’objectif de pilotage de trésorerie, notamment avec une automatisation des opérations répétitives, une diminution des sources d’erreurs, un référentiel de données financières à jour, une vision globale en temps réel, une analyse des flux et un reporting personnalisé.

#5 – Améliorer la gestion des fournisseurs /centrale d’achat SRM

Le secteur de la distribution fonctionne en grande partie via la mise en place de centrales d’achats. Compte-tenu du nombre élevé de fournisseurs (un hypermarché propose en effet entre 20 000 et 80 000 références de produits), il existe toujours des marges d’amélioration. L’une des bonnes pratiques consiste à s’équiper d’une solution de SRM (Supplier Relationship Management), avec des fonctionnalités de collaboration, de sourcing et de sélection des fournisseurs, de scoring et de gestion opérationnelle (RFP, RFI, consolidation des commandes…). La tendance est également à investir dans les places de marché, qui redéfinissent les relations entre les fournisseurs et les consommateurs.

#6 – Passer du multicanal à l’omnicanal

Les Retailers historiques ont une organisation tournée vers les magasins et les systèmes d’information sont adaptés à cette configuration. L’arrivée de la vente en ligne par le média Internet a amené ces Retailers à adjoindre à leur canal de vente historique un ou plusieurs sites marchands. Devenus multicanal, ils ont pu ainsi en tester l’efficacité et devenir concurrents avec les nouveaux entrants, souvent des Pure Players organisés avec des modèles logistiques marketing et SI spécifiques. L’enjeu actuel, pour les acteurs du secteur du Retail, consiste à passer du multicanal, de mieux en mieux maîtrisé, à l’omnicanal. Le client peut ainsi initialiser un panier d’achat sur un média (smartphone) et le poursuivre sur un autre (ordinateur, par exemple) pour, au final, acheter (ou non) dans un magasin.

Le terme omnicanal est également utilisé pour décrire le phénomène d’utilisation simultanée de deux canaux de vente, par exemple un smartphone dans un magasin ou une tablette devant la télévision. Ces démarches impliquent une cohérence des offres et un suivi des parcours client. En terme de systèmes d’information, pour passer du multicanal à l’omnicanal, il importe de réorganiser l’ensemble du SI pour passer d’une organisation descendante classique (référentiel, Supply Chain, magasins et en parallèle les sites m- et e-commerce) à une organisation mettant le client en contact avec un front office cohérent, homogène et global.

Cette organisation doit être efficace et cohérente, quel que soit le canal de commande ou d’achat (magasin, site, mobile, drive…), et disposer de référentiels centraux, uniques et nativement compatibles avec l’ensemble des canaux de ventes. Les SI de production et de distribution doivent devenir, eux aussi, uniques et capables de piloter tous les flux (Supply Chain, promotion, contact client…). On parle aujourd’hui de commerce unifié, car les consommateurs ne peuvent plus être catégorisés selon leurs canaux d’achat. Autrement dit, à la vue unique du consommateur se substitue une vue continue : toutes les données doivent être accessibles pour chaque moment de la relation entre un distributeur et ses clients et de leurs parcours d’achat. Ce qui suppose un système d’information en temps réel.

#7 – Déployer l’EDI pour s’intégrer à l’écosystème

Les solutions EDI sont très présentes dans le secteur de la distribution. La tendance actuelle est de faire évoluer ces solutions vers un mode SaaS pour répondre à plusieurs besoins : technologiques (s’adapter à l’état de l’art…), organisationnels (gagner en agilité, intégrer d’autres entités…), règlementaires (intégrer de nouvelles contraintes…), métiers (mieux satisfaire les besoins…) et stratégiques (externaliser, créer plus de valeur…).

#8 – Développer le e-commerce : vers le phygital

L’évolution des usages d’achat, vers le e-commerce, impose aux distributeurs d’adapter, s’ils ne l’ont déjà fait, leurs systèmes d’information pour intégrer des fonctions de e-commerce. Notamment face aux géants comme Amazon. Selon une étude de CapGemini Research Institute, 40 % des consommateurs commandent déjà leurs courses en ligne au moins une fois par semaine. Ce chiffre devrait atteindre 55 % à l’horizon 2021. Longtemps opposés, le digital et le Retail semblent désormais faire bon ménage. Si quelques enseignes, parmi les leaders de la distribution française, n’ont pas encore de site marchand, les enseignes classiques rattrapent néanmoins leur retard sur les Pure Players.

Leur part de marché a ainsi doublé entre 2010 et 2017 pour représenter 40 % des ventes en ligne, d’après les calculs des experts de Xerfi Precepta. Et si Internet s’invite dans nombre de parcours d’achat, le magasin physique reste le canal préféré des consommateurs français. Cela suppose une adaptation de la chaîne logistique : les enseignes travaillent aujourd’hui au développement du Ship from Store, qui consiste à faire de chaque magasin un entrepôt au service de la livraison, dans un modèle où le e-commerce, dans une combinaison vertueuse, s’adosse aux magasins physiques pour augmenter la proposition de valeur pour les consommateurs.