La maîtrise des services, prérequis pour gérer les coûts de la DSI

Alors que se profilent de nouvelles restrictions budgétaires pour 2012, la valorisation des services constitue une piste prometteuse pour concilier les deux impératifs auxquels les DSI doivent répondre : réduire les coûts et maintenir la qualité de services pour les métiers. Le point de vue d’Olivier Martin, fondateur d’Atep Services.

Quelles sont les pressions qui s’exercent aujourd’hui sur les DSI et pourquoi doivent-ils se préoccuper de mieux maîtriser les services proposés aux directions métiers ?

Olivier Martin Dans un contexte de crise comme nous le connaissons aujourd’hui, les directions générales, prudentes, voire frileuses, cherchent de plus en plus à réduire les coûts, et c’est compréhensible. Mais, pour les DSI, le risque est de sacrifier la qualité sur l’autel de la diminution des dépenses.

Confrontés à cette exigence, les DSI ne peuvent se permettre d’agir en aveugles : baisser les charges ne peut se faire sans une réelle connaissance appropriée des services. À cela s’ajoute une inévitable contrainte de temps, les directions générales imposant d’agir vite : pas question pour elles, en effet, d’attendre les résultats d’un hypothétique schéma directeur à trois ou cinq an.

Comment résoudre ce paradoxe et intégrer cette forte contrainte temporelle ?

Olivier Martin Nous préconisons d’agir sur trois axes : d’abord, connaître et faire connaître les services de la DSI ; ensuite, améliorer la gestion des risques opérationnels et, enfin, démontrer la valeur ajoutée des services. En premier lieu, pour s’améliorer, face à la crise, le DSI doit connaître l’ensemble de son système d’information, en mesurer les limites, identifier les risques et les gisements d’économies sans pénaliser la qualité, tout cela en moins de douze mois. à ces conditions seulement, la DSI pourra faire comprendre à ses clients la valeur de ces mêmes services, avec une vision transverse, en contrepoint des organisations en silos que nous connaissons encore trop souvent aujourd’hui.

Souvent, en effet, la direction générale et les métiers en ont une vision partielle, voire déformée. L’informatique est perçue soit comme un sujet purement technique, loin de leurs préoccupations, soit comme un simple prolongement de leur métier.

Dans les deux cas, les clients internes ne connaissent pas bien la finalité des services, identifient mal les contours des prestations que la DSI leur facture et ne mesurent pas les efforts accomplis pour les faire fonctionner. Il est difficile, dans ces conditions, d’établir un dialogue efficace entre la DSI et les utilisateurs.

Pourtant, c’est bien ce dialogue qui doit être à la base de toutes les décisions, qu’il s’agisse d’améliorer certains services, d’optimiser les coûts ou de mieux répartir les ressources en fonction des besoins. C’est l’efficience de la DSI qui doit être mise en avant par les DSI.

Comment acquérir et transmettre cette connaissance des services ?

Olivier Martin La mise en place d’un portefeuille de services orienté métier est la première condition pour acquérir la visibilité nécessaire. Ce portefeuille, véritable vitrine de la DSI, fédère les informations clés sur les services. Il permet de comprendre la finalité des services, aussi bien en tant que capacités informationnelles qu’en tant que support à des offres métiers.

Il identifie également leur coût et les engagements associés en termes de qualité de service. Une fois le portefeuille en place, les DSI pourront alors combiner ces différentes informations pour communiquer aux autres acteurs de l’entreprise une vision claire de leurs services et de leurs engagements.

Quels sont les principes de gestion des risques opérationnels ?

Olivier Martin Outre la connaissance des services, le deuxième axe que nous préconisons consiste à acquérir la maîtrise de ceux-ci : c’est une impérieuse nécessité pour assurer la qualité de service et maîtriser les coûts associés. Il s’agit notamment de gérer les risques liés au système d’information, autrement dit de les identifier et de simuler leur impact opérationnel (sur les plans métier et financier) pour en évaluer la probabilité et la gravité.

Les DSI doivent comprendre précisément les risques encourus pour pouvoir y répondre efficacement, dans une logique aussi bien préventive que réactive. Cela leur permettra de prendre des décisions avisées sur les investissements à effectuer et les priorités opérationnelles.

Par quels moyens le DSI peut-il démontrer la valeur ajoutée de ses services ?

Olivier Martin Démontrer la valeur ajoutée représente la troisième brique de la stratégie des DSI. Dans ce domaine, il convient de valoriser ces services, aussi bien au niveau financier qu’au niveau métier. Les DSI doivent pouvoir associer une valeur à chaque service, autrement dit mettre en rapport les gains fournis par le service avec son coût.

Des indicateurs fins sont utiles pour identifier des sources de réduction des coûts réellement pertinentes pour l’organisation, mais aussi pour évaluer les effets de bord d’une optimisation des coûts mal ciblée.

En centrant leur discours sur la valeur des services, les DSI pourront également dialoguer sur des bases saines avec les métiers et la direction générale, et s’engager dans un processus d’amélioration en phase avec la stratégie de leur entreprise.

Comment obtenir des résultats tangibles, compte tenu des échéances du moment ?

Olivier Martin Pour aller vite et être agiles, les DSI ont deux leviers à leur disposition : celui de l’information et celui des pratiques. La première étape consiste à mettre en place un système de connaissance des services, appelé Service Knowledge Management System (SKMS) dans le référentiel de bonnes pratiques Itil V3. Ce système fédère les informations sur les services et les coûts du système d’information, permettant ainsi de reconstituer l’ensemble de la chaîne de production des services en fournissant une vue transverse, cohérente et sur plusieurs niveaux du système d’information : vision financière, technique, métier, organisationnelle, etc.

En réalité, la collecte d’information peut aller très vite, dès lors que l’on s’appuie sur les systèmes opérationnels disponibles. La mise en place d’un SKMS se prête à une démarche itérative : un prototype est d’abord établi pour montrer la faisabilité et la valeur d’un tel système, puis celui-ci est enrichi au fur et à mesure en intégrant les informations provenant des référentiels existants.

Il est ainsi possible de reconstituer l’ensemble d’une chaîne de production en quelques mois. Par exemple, pour un grand ministère, nous avons reconstitué une chaîne de production métier, y compris la comptabilité et les infrastructures, en moins de trente jours !

Insistons sur ce point : dès lors que la DSI connaît (et maîtrise) ses services, elle est en mesure de les améliorer et d’identifier des sources d’optimisation, notamment, par un meilleur usage des serveurs, une rationalisation du parc de licences, la diminution du nombre de référentiels ou encore une analyse d’impact et de causalité des incidents… Il s’agit d’autant de gisements potentiels d’économies, difficiles, voire impossibles, à identifier sans SKMS. C’est une démarche structurée, itérative et pragmatique.

Une fois la connaissance acquise, la seconde étape consiste à industrialiser les bonnes pratiques, notamment les activités opérationnelles de l’organisation, la gestion des risques, de la continuité et de la sécurité. Cette industrialisation se traduit par des gains concrets pour l’organisation réduction des silos, accroissement de la gestion de la capacité, meilleure sécurité…

Dans le domaine de la gestion des services, des référentiels comme Itil ou ISO 20 000 ont amplement fait leurs preuves, la norme ISO permettant également de démontrer la maturité de la DSI dans le cadre d’une démarche de certification. L’industrialisation nécessite parfois de transformer en profondeur la DSI. Pour qu’elle porte ses fruits, il est donc nécessaire d’accompagner ce changement, afin que les bonnes pratiques soient adoptées et mises en œuvre de manière durable.

Avec la période de crise qui s’annonce, nulle raison que les DSI soient épargnés par la pression sur les coûts. S’ils ne s’y préparent pas, le risque est grand de subir des coupes arbitraires, avec un impact désastreux sur le niveau de service fourni et sur leur image. Il est encore temps d’éviter ce scénario.

En moins d’un an, les DSI peuvent acquérir la connaissance et la maîtrise nécessaires pour identifier des gisements d’économie qui ne mettent pas la qualité de service en péril. Pour cela, il leur suffit d’adopter une démarche pragmatique, basée sur deux priorités : fédérer les informations sur leur portefeuille de services et industrialiser leurs pratiques.

 Le DSI face à la crise : une stratégie en cinq étapes
 1
  • Connaître son système d’information
 2
  • Mesurer les limites du système d’information
 3
  • Identifier les risques
 4
  • Gérer les risques
 5
  • Identifier les axes de réduction de coûts sans pénaliser

la qualité de service

Source : Atep Services

 

Les composantes d’un SKMS
(Service Knowledge Management System) 
Couche de présentation
  • Changements de mises en production
  • Gestion des actifs
  • Cycle de vie des configurations
  • Configurations techniques
  • Gestion de la qualité
  • Centre de services…
Couche de traitement de la connaissance
  • Interrogation et analyse
  • Reporting
  • Gestion de la performance
  • Modélisation
  • Contrôle (tableaux de bord)…
Couche d’intégration des informations
  • Modèles des processus
  • Schémas de correspondance
  • Gestion des métadonnées
  • Extraction, transformation des données
  • Datamining…
 Sources de données et d’informations/outils
  • Bibliothèques des médias
  • Outils de configuration des infrastructures
  • Gestion des configurations logicielles
  • Outils de gestion des actifs et audit
  • Applications d’entreprise…