Le management IT par la psychologie

Bernadette Lecerf-Thomas, coach en organisation, nous livre un ouvrage qui a pour ambition de faire le lien entre la psychologie et les organisations. Les neurosciences sont issues de la collaboration de neurologues, de neuropsychiatres, de psychologues, de biologistes, d’informaticiens…

Cette discipline à été créée en 1971 à New York. à cette époque, elle fédérait environ 1 500 chercheurs, aujourd’hui elle en compte plus de 50 000 dans le monde.

La fédération de compétences complémentaires a permis une évolution des connaissances du fonctionnement du cerveau humain particulièrement importante. Les neurosciences sont d’abord les sciences de la neurologie, elles visent à la compréhension de l’ensemble des composants neurobiologiques humains.

« Connaître l’organisation du cerveau, les processus cognitifs et les conditions de leurs modifications est extrêmement utile pour bien communiquer, prendre soin de soi-même et respecter les autres », explique l’auteur.

« Sur un plan professionnel, oser prétendre accompagner la transformation d’une entreprise tout en ne connaissant pas les conditions nécessaires à la transformation des représentations et des comportements humains devient aujourd’hui intenable. »

Neurosciences et management, le pouvoir de changer, par Bernadette Lecerf-Thomas, Eyrolles, 238 pages.

Certes, depuis de nombreuses années, les progrès sont indéniables : « Les systèmes d’information ont permis de nombreuses évolutions des organisations et offrent de plus en plus d’outils ouvrant à de nouveaux modes de collaboration ».

Il n’empêche : « Les pratiques managériales sont toujours fondées sur un rapport à l’autorité qui reste avant tout hiérarchique », rappelle Bernadette Lecerf-Thomas. Comment rénover les pratiques managériales ? L’auteur avance que « l’une des conditions de réussite est d’aider les managers à inhiber définitivement la croyance prônant la rationalité comme moteur principal des comportements humains ».

De fait, la décision de changer ne peut venir que de celui qui doit changer. Les marges de manœuvre des managers proviennent des conditions qu’ils organisent afin de créer le désir de changement.

« La connaissance des fondements de cette réalité est précieuse quand on souhaite amener les personnes à changer leurs comportements, explique l’auteur. Une personne, pour changer de comportement, doit aussi changer de point de vue (d’opinion, de croyance) et cela, elle seule peut décider de le faire. »

La rénovation des pratiques managériales est donc, plus que jamais, d’actualité : « Dans un contexte qui reste confortable, un sentiment d’inquiétude s’est développé, la perception du futur est devenue porteuse de craintes, la croyance dans les apports bénéfiques d’un progrès continu est largement ébranlée ». D’où des contradictions (des « dialectiques » pour reprendre l’expression de l’auteur) entre l’innovation et le contrôle, entre l’élitisme et l’esprit collectif, entre l’appartenance exclusive ou temporaire, ou entre le désir d’efficacité et le surinvestissement.

L’une des notions-clés est le fait de « désapprendre » : « La montée en compétences d’un système humain est dépendante de l’abandon des certitudes venant du passé », assure Bernadette Lecerf-Thomas. Cette notion se décline à trois niveaux. D’abord, au niveau de l’organisation, travail difficile pour l’entreprise dans la mesure où « le passé s’est durci au travers des systèmes d’information et de l’imbrication de toutes sortes de pratiques. »

Résultat : « Les acteurs ne savent plus comment s’articule ce qu’ils font. » Il est donc impossible de faire table rase du passé pour inventer d’autres pratiques, « le chemin ne peut être que progressif », rappelle l’auteur. Ensuite, il s’agit de désapprendre les modalités de collaboration obsolètes des équipes : « Formées dans la concurrence et la compétition entre les personnes, les stratégies mentales intègrent peu l’intérêt de savoir mettre en synergie les compétences », diagnostique Bernadette Lecerf-Thomas.

Enfin, sur le plan individuel, pour un professionnel, « désapprendre pour apprendre » consiste à réexaminer la pertinence de ses croyances et de ses décisions anciennes et de mettre à jour le processus de confirmation de ce qui est connu. Dans la mesure où l’innovation n’est possible que par l’ouverture à de nouvelles informations ou à de nouvelles contraintes, « c’est par l’ouverture du l’hémisphère droit du cerveau, celui du complexe, de l’inconnu, du multimodal que l’innovation est rendue possible », précise l’auteur.


Six constats sur le changement

  • Le système prend le pas sur l’individu.
  • Il n’y a pas de changement sans processus émo­tion­nels : chaque fois qu’une personne change ses repré­­sentations, elle traverse des processus où pensées et émotions sont liées.
  • Le changement est à la fois un processus de déapprentissage et d’apprentissage : faire comme s’il suffisait d’ajouter une couche au savoir passé est le premier quiproquo.
  • Le changement provient de la tête ou de la marge : pour changer un système schématisé sous la forme d’un triangle, seuls les angles offrent un angle d’attaque.
  • Le changement et les résistances vont de pair : pas de résistance, pas de changement.
  • Le processus relationnel prend le pas sur le contenu : les messages cachés ont souvent la primauté sur les messages officiels.