Le modèle 2.0 renforce le pouvoir des DSI

Pour Xavier Aucompte, DG du cabinet de conseil Web escape agents, et coanimateur du blog des managers 2.0 (www.b-r-ent.com), les modèles d’organisation autour du Web 2.0 vont s’imposer. Avec le DSI comme interlocuteur incontournable.

Face aux multiples discours sur les nouveaux usages des technologies, les exigences des jeunes générations et le Web 2.0, les entreprises sont-elles selon vous devenues beaucoup plus matures ?

Xavier Aucompte En 2009, nous avons vu de nouveaux projets émerger, avec une évolution des entreprises, pas nécessairement d’ailleurs vers le 2.0, mais il est clair que la période de rupture actuelle oblige les entreprises à se transformer. à partir de là, elles recherchent de nouvelles solutions et, parmi celles-ci, figurent les approches 2.0. Mais nous sommes encore loin d’un mouvement de fond. En 2010, l’évolution va se poursuivre.

Qui sont vos interlocuteurs dans les entreprises ?

Xavier Aucompte Généralement, nous travaillons avec quatre types d’interlocuteurs principaux : les directions générales, les DRH, les directions de la communication et, bien sûr, les DSI. On ne peut pas réaliser aujourd’hui de telles transformations sans les systèmes d’information : les DSI sont des partenaires incontournables.

En outre, le 2.0 constitue une nouvelle façon de communiquer au quotidien, d’où l’implication des directions de la communication, mais c’est également une transformation de l’organisation avec la recherche de nouvelles performances internes et externes, d’où l’implication des DRH. Enfin, il me semble impossible de penser un projet 2.0 sans que la décision, stratégique par définition, ne vienne de la direction générale.

Certains secteurs sont-ils plus moteurs que d’autres ?

Xavier Aucompte Naturellement, le secteur des hautes technologies et ceux qui ont une population jeune et liée aux technologies sont davantage en avance pour l’usage des outils 2.0. C’est dans les secteurs les plus touchés par la crise et en difficultés que l’on observe la recherche et l’ouverture les plus immédiates vers de nouvelles stratégies basées sur le Web 2.0. Dans ces secteurs, tels que la distribution, la banque et l’assurance ou l’immobilier, que la transformation des organisations est une obligation.

Quels sont, selon vous, les principaux freins dans les entreprises vis-à-vis des approches 2.0 ?

Xavier Aucompte La majorité des entreprises se sont développées selon des modes d’organisation, des modèles économiques et des approches managériales qui sont aujourd’hui inadaptés. Même si les entreprises commencent à comprendre les leviers sur lesquels elles peuvent agir, et l’approche 2.0 en est un, la transformation reste toujours une réelle difficulté. Les principaux freins concernent essentiellement le poids des structures hiérarchiques, ainsi que les modes d’utilisation et de conservation de l’information. Les modèles du passé sont condamnés à disparaître, mais le management intermédiaire éprouve des difficultés à s’adapter à cette transformation parce qu’une partie de son pouvoir est basé sur un « droit de propriété de l’information » qui n’a plus lieu d’être dans un contexte 2.0. C’est toute la difficulté, pour les entreprises, de repositionner le rôle et les missions de ces managers dans une organisation 2.0.

Les DSI ne sont-ils pas eux aussi réticents face à une crainte de perdre du pouvoir sur le système d’information ?

Xavier Aucompte Il n’y a pas de règles. Cela dépend beaucoup de la personnalité des dirigeants de systèmes d’information. N’oublions pas que les DSI sont au cœur de la transformation 2.0. Du fait de leur métier et de leur formation, ils comprennent les enjeux. Mais leur tâche reste difficile : le 2.0 change le métier et les ressources, avec des exigences nouvelles en matière de sécurité. On retrouve les mêmes attitudes de la part des DRH, plus ou moins ouverts à la transformation.

Quels sont les principaux fondamentaux en matière de gestion de projet 2.0 ?

Xavier Aucompte Avant tout la rapidité : il n’est guère envisageable d’attendre un ou deux ans pour réaliser un projet 2.0. C’est toute la difficulté de prendre le moins de risques possible tout en avançant rapidement. Ensuite, il ne faut jamais perdre de vue les valeurs de l’entreprise. Ses axes stratégiques sont au cœur des projets 2.0. Enfin, il y a par définition une obligation d’ouverture : dès lors que l’on avance dans la voie de « l’innovation participative » ou de la « social innovation », cela intègre toutes les entités et les collaborateurs de l’entreprise, tous acteurs du projet.

Vous exercez une partie de vos activités au Canada : le monde anglo-saxon a-t-il pris le virage du 2.0 ?

Xavier Aucompte Dans le monde anglo-saxon, beaucoup d’entreprises progressent vers un modèle 2.0, mais il est rare de voir les organisations aussi complètement remodelées. Dassault Systèmes (voir pages 2 à 4) a plusieurs années d’avance par rapport à la plupart des entreprises. Je n’en connais pas d’autres qui ont acquis une telle maturité. Bien sûr, on peut comparer avec des groupes comme IBM ou Microsoft, mais ils n’ont pas nécessairement la même ouverture ni l’usage des environnements 3D qui, il est vrai, sont au cœur du métier de Dassault Systèmes.