Métier de DSI : les dix tendances à anticiper

En complément des inévitables prévisions technologiques proposées par les analystes, les fournisseurs et les cabinets d’études, quelles sont les grandes tendances qui vont marquer le métier de DSI ?

1. Une augmentation du turn-over des DSI

Il n’existe malheureusement pas d’études statistiques sur le taux de turn-over des DSI, mais il semble que la fonction soit devenue fragile. Les raisons sont diverses : effet de génération, volonté des directions générales d’avoir du sang neuf, effet de lassitude des DSI, rythme de transformation des entreprises, effets collatéraux du « numérique »… La mobilité volontaire va probablement être supplantée par une mobilité involontaire, qui finira par grossir le nombre de DSI devenus, par défaut, consultants ou managers de transition.

La bonne idée  : préparer un plan B avant qu’il ne soit trop tard.

2. Un changement de posture face à la gestion du temps

À force d’accoler le terme agilité à quasiment toutes les évolutions technologiques (mobilité, cloud, mainframes, Big Data…) et managériales, notamment dans la gestion de projet, les relations entre des DSI se transforment avec le temps. Il ne s’agit pas seulement du temps à dégager pour rester à l’état de l’art, mais aussi de celui qu’il faut gagner pour délivrer les solutions.

D’autant que de plus en plus d’utilisateurs et de directions métiers n’imaginent plus de bénéficier de solutions qui ne soient pas en temps réel, y compris pour l’accès à des données qui ne le justifient pas.

La bonne idée : auditer la consommation du temps pour le DSI et ses équipes.

3. L’irruption du « politique » dans les projets de transfor­mation

Par rapport à l’époque au cours de laquelle les DSI n’attiraient guère l’attention, parce qu’ils étaient essentiellement occupés à gérer des infrastructures, des mainframes, des serveurs et des applicatifs lourds nécessitant une expertise pointue, le contexte actuel se caractérise par une vraie rupture : l’élévation du niveau de maturité à l’égard des technologies de l’information, accompagnée par un traitement médiatique beaucoup plus grand public des problématiques de systèmes d’information, dès lors, par exemple, que l’on parle de Big Data, d’Internet des objets, de mobilité ou de cloud. Il en résulte un dommage collatéral : tout le monde, ou presque, à un avis que la question, y compris ceux qui, par rapport à l’expérience et aux compétences d’un DSI, n’ont guère de légitimité. Pour les projets de transformation, notamment pour ceux qui ont une dimension symbolique forte, les composantes « politiques » vont devenir beaucoup plus visibles. Cela peut se traduire, par exemple, par des dérives dans l’opportunité de lancer des projets, avec des business cases approximatifs, mais qui satisfont l’égo de telle direction métier, ou par des dérives dans les délais, dès lors qu’il faut obtenir un consensus de trop nombreuses parties prenantes.

La bonne idée : recenser ses alliés… et les autres, pour les transformer en alliés.

4. Un regain de tension avec les fournisseurs

L’un des fréquents sujets de discussions avec les DSI concernent les audits de licence. Il ne s’agit pas d’en contester le fond, mais plutôt les principes de mise en œuvre. Certains DSI, parce qu’ils travaillent dans des secteurs stratégiques ou sensibles, ont des moyens de pression pour faire plier les fournisseurs un peu trop gourmands qui exigent plusieurs centaines de milliers d’euros, voire quelques millions. Mais, hélas, la plupart n’ont guère d’armes pour se défendre. Il est fort probable qu’en 2015, la pression des éditeurs sur leurs clients va se renforcer, parce que ce sont des ressources a priori plus faciles à obtenir et que, du côté des DSI, on observe quelques négligences quant au contrôle des licences.

La bonne idée : cartographier les licences logicielles et leur utilisation.

5. Un reflux des prises de risques

L’un des ingrédients de la réussite pour la transformation des organisations réside dans l’aptitude des managers à prendre des risques, de manière à innover. Les DSI sont en première ligne dans ce domaine, la transformation des entreprises passe toujours par des ruptures technologiques. L’exposition de plus en plus forte des DSI dans les projets de transformation et, en parallèle, le foisonnement d’opportunités peuvent conduire à réfréner les stratégies trop risquées qui, si elles échouent, aboutiront à l’éviction des DSI responsables, même s’ils ne le sont pas… Surtout en période d’incertitude économique, comme cela sera le cas en 2015, selon les prévisions (1 % de croissance pour la France, selon l’OCDE).

La bonne idée : partager les risques avec les direc­tions métiers.

6. Un nécessaire questionnement entre l’offre et la demande

En période de crise, les économistes sont partagés entre ceux qui prescrivent une politique de demande, pour soutenir la consommation, et ceux qui préfèrent prôner une politique de l’offre. Il en est de même pour les DSI : historiquement, c’est plutôt une politique de l’offre qui a été privilégiée, les DSI mettant en avant telle ou telle technologie vers les métiers qui, de toute façon, ne les maîtrisaient guère et faisaient confiance à leurs « directeurs informatiques » pour faire fonctionner le système d’information. Désormais, c’est plutôt la politique de la demande qui prévaut dans les entreprises, à l’initiative des directions métiers. Comme dans toute économie, l’équilibre entre l’offre et la demande doit être assurée : si les DSI poussent des technologies dont les métiers ne veulent pas ou si, à l’inverse, les demandes de ces derniers excèdent les capacités des DSI, l’équilibre ne peut être atteint.

La bonne idée : conserver une posture de force de proposition.

7. Du flou dans l’innovation

En 2013, dans la liste du cabinet de conseil Deloitte des 500 start-ups connaissant la croissance la plus rapide en Europe, les entreprises françaises arrivent premières pour la quatrième année consécutive. Ce bon dynamisme de l’écosystème des start-ups en France est évidemment prometteur, mais il devient difficile, pour les DSI, d’identifier où sont les innovations susceptibles d’être intégrées dans les systèmes d’information, sauf à y consacrer beaucoup de temps et de ressources.

La bonne idée : se rapprocher des lieux, des structures et des organisations qui fédèrent les start-ups.

8. Des frictions dans le domaine des compétences

Dans tous les domaines technologiques, le manque de compétences pose problème. Selon le cabinet de recrutement Harvey Nash, 52 % des DSI français affirment que la pénurie de compétences aura un impact pour leur entreprise. De même, 80 % des entreprises françaises indiquent manquer de compétences en interne pour mener à bien des projets de Big Data (Markess International). Pour Gartner, 50 % des initiatives de transformation numérique ne pourront être menées à bien, à l’horizon 2018, faute de compétences disponibles.

La bonne idée : cartographier les compétences, les vraies, pas seulement celles qui figurent dans les CV, et surtout les talents disponibles ou ceux qu’il faut chercher ou transformer.

9. Une pression accrue des utilisateurs

Le mouvement est déjà bien amorcé, par exemple avec le BYOD (Bring your own device), la mobilité, les applications dans le cloud… On ne devrait évidemment pas assister à un retour en arrière, à moins que les DSI ne veuillent entrer en conflit ouvert avec les utilisateurs.

La bonne idée : analyser les usages, au-delà des aspects technologiques et fonctionnels, pour intégrer les aspects culturels, organisationnels et sociologiques.

10. L’impératif des multi-compétences des DSI

Si le « I » de DSI (ou de CIO) signifie toujours « Information », il est de plus en plus associé à « Influence » (pour les relations avec les directions métiers et les DG), à « Intégration » (de solutions hétérogènes) et à « Innovation », vers les utilisateurs et les clients. En 2015, ces différentes composantes vont de renforcer, avec des compétences autrefois optionnelles, mais qui sont aujourd’hui incontournables : marketing de la DSI, maîtrise des techniques de négociation et de communication, aptitude au leadership…

La bonne idée : l’ajout d’une ligne budgétaire « sanctuarisée » dédiée au marketing des projets et au marketing de la DSI.